est le second album « unplugged » de Prince. Alors que depuis une dizaine d’années, l’autodidacte de la musique délaisse le piano sur ses disques et sur scène (nous avions tous en mémoire les longs passages de la tournée
33 minutes émouvantes où il est seul face à l'instrument. Conséquence de ce qu’il vit à l’époque ? Son père, pianiste de jazz, est mort quelques mois plus tôt.
est son album le plus épuré, le plus triste, celui où on a le sentiment d’être le plus proche de lui (on l’entend quitter la pièce à la fin). L’album, bien que confidentiellement distribué, donne son nom à une tournée mondiale où nous retrouvons un Prince sur scène au piano à queue mais pas que. Et ça nous en parlerons demain.
Prince admirait Joni Mitchell.
. Une autre version est présente dans l’album
qui sortira le 25 septembre prochain chez...
.
Même s’il vendait moins de disques dans la seconde partie de sa carrière Prince a toujours rempli les salles, du petit club réservé à l’arrache à 1h du matin au Stade de France booké seulement un mois avant le show. Et, soyons un peu objectifs, même un concert éventuellement « moins bon » de Prince dépassait de loin à peu près tout le reste de ce que j’ai vu avant, pendant et depuis. Si les fans le sont restés aussi longtemps malgré la difficulté à le suivre sans nom dans sa croisade anti-major et le labyrinthe mystico-bulshitesque de son bon-vouloir, c’est avant tout grâce à ses concerts et aux enregistrements de ses concerts, enfin les enregistrements pirates de ses concerts.
Car en déjà 25 ans de carrière, mis à part quelques programmes vidéo et le film
, Prince n’a jamais officiellement sorti de « live ». Il devait donc être sacrément fier de la tournée
pour en faire un triple-album.
alors que Prince termine la tournée en Europe. Cette tournée, avec Prince et son groupe en costards, est exceptionnelle pour sa set-list sortant des hits attendus. L’album a été enregistré lors de la partie américaine autour d’une formation « jazz » (avec John Blackwell et Maceo Parker) et l’on y retrouve le son et les titres de
) revisités sur le même mode.
Le second disque reprend le concept de son album précédent et on l’entend longuement seul au piano. Malheureusement l’enchainement des titres au piano est trop rapide pour vraiment créer une émotion. Le tout est même presque trop « lisse » par rapport à ce que nous avons expérimenté sur cette tournée.
Le troisième disque ONE NITE ALONE LIVE… THE AFTERSHOW : IT AIN’T OVER ! est un collage de titres enregistrés lors d’aftershows dans des petits clubs sur cette même tournée. Car un concert de Prince c’était souvent l’angoisse d’un second concert surprise de Prince ailleurs dans la nuit. On ne compte plus ceux qui ont raté un premier concert dans l’espoir d’une bonne place au second qui n’aura finalement pas lieu (ou ailleurs) et ceux qui, à l’inverse, par le plus grand des hasards se sont retrouvés aux premières loges d’un concert surprise de Prince dans une boite de nuit alors qu’ils étaient venus pour une soirée mousse. Le son de ce troisième disque est donc différent, plus électrique, plus funk, plus décousu aussi, on y croise George Clinton, Larry Graham ou Musiq Soulchild, et une longue version à la guitare saturée d’une de ses plus belles chansons :
. Tout cela est très bien mais il manque le principal : y être.
: Il existe un DVD officiel de cette tournée, à regarder d’un œil seulement.
est filmé avec les pieds (c’est l’époque où Prince filme tout lui-même au camescope parce que ça coute moins cher). Le DVD dure une heure et ne rend pas hommage ni à ce concert (qui en faisait trois) ni à cette tournée.
Pas de répit, ce n'est jamais fini. La tournée
s’achève en décembre 2002 et le coffret Live vient tout juste de sortir et, pour les abonnés du
, l’année 2003 commence par un cadeau. Le matin du 1er janvier Prince offre un nouvel album en téléchargement :
.
touche à sa fin. Les fans ont parfois eu la dent dure avec le club, mais avec le recul c’était une expérience fabuleuse. Durant 3 ans nous avons eu un contact plus « direct » avec la musique de Prince au fur et à mesure qu’il l’enregistrait.
Alors qu’un grand projet discographique et scénique pour le grand public se dessine (l’album et la tournée
Musicology), un nouveau site est ouvert. Plusieurs albums sont mis en ligne sur le
Musicology Download Store. A commencer par ces deux volumes regroupant les
NPG TRAX, les chansons que Prince distillait chaque mois de 2000 à 2002 sur internet.
Il faut donc voir ces 2 volumes comme des compilations, jouables en mode shuffle à destination première de ses fans, pour marquer de façon plus officielle un moment de sa carrière où il a privilégié la musique en ligne, et non des albums « pensés ». La plupart des morceaux sont des chutes d’albums abandonnés. S’il y a une dominante funk-electro cohérente sur
Chocolate Invasion, on y trouve des morceaux plus doux comme
When I Lay My Hands on U ou
U Make My Sunshine, un duo avec Angie Stone.
A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842442
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"- How can a non-musician discuss the future of music from anything other a consumer point of view ?" |
La recette est la même pour le volume 2,
The SlaughterHouse, qui a peut-être un meilleur niveau global et sonne un peu plus techno. Le son y est de nouveau surproduit et la tonalité se veut futuriste.
Ces deux compilations ne sont jamais sorties en CD et, à quelques notables exceptions près, la plupart des titres des deux volumes n’ont pas été joués sur scène. Pourtant les clips de plusieurs chansons ont été tournés.
A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69842402Titres favoris : 2045 Radical man, Northside, Judas Smile, SexMeSexMeNotLeSachiezTu : sur cette compilation figurent deux titres inspirés/écrits par/pour un film de Spike Lee,
Bamboozled (
Judas Smile et
Radical Man). Ce n’est pas la première fois que Prince travaillait avec Spike Lee. Il avait déjà signé la BO de son film
Girl 6 et avait participé au financement du biopic sur
Malcolm X. Au générique de fin du récent
Blackkklansman on peut également entendre un classique de la musique noire américaine repris au piano en 1983 :
Mary Don’t U Weep. Spike Lee a également réalisé plusieurs vidéos pour Prince.
[17/23] C-NOTE ou quand Prince improvise
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"- Now how am I gonna fill this empty room?" |
Mars 2004, le troisième album distribué en téléchargement sur le
Musicology Download Store est une perle. Pour la décoder, il faut revenir en arrière à l’automne 2002 sur la tournée
One Nite Alone. En plus des titres et des podcasts, les abonnés du
NPG Music Club avaient alors accès à la billetterie des concerts et des aftershows en avant-première ma
is aussi le privilège d’assister aux répétitions des concerts. Et, avec Prince, répétition équivaut parfois concert et souvent un concert différent de celui qui va suivre. C’est ainsi qu’à Paris, en amont des deux heures de concert puis des deux heures d’aftershow au Bataclan, 200 fans français ont assisté à un concert privé d’une heure dans un Zénith vide. Le summum est atteint au sportpaleis d’Anvers avec un soundcheck de 2h qui reste un de mes meilleurs souvenirs de cette époque et la seule fois où j'ai vu prince habillé en type lambda, dans une posture totalement décontractée, jouant les titres qu’on lui demandait.
C-Note revisite, trop brièvement, ces moments magiques. C’est une compilation de 5 morceaux dont 4 instrumentaux improvisés enregistrés à Copenhague et au Japon. Le disque est court (33 minutes) mais c’est un sans-faute. Les milliers d’heures d’enregistrements pirates qui circulent le prouvent : Prince était particulièrement doué pour ces exercices d’improvisation. La majeure partie de ses chansons sont nées sur scène, construites au fil de ces jams d’avant concert puis améliorées de preshow en show.
C-NOTE contient également la première version officielle d’une émouvante chanson « inédite » bien connue des fans depuis dix ans,
Empty Room, dont on s’est toujours demandé pourquoi il ne l’avait pas sortie sur un album avant. Peut-être est-ce tout bêtement par ce que le titre (« salle vide ») prend sur cet album toute sa signification.
Il n’a jamais réitéré cette expérience « planifiée » de réelle proximité avec les fans, mis à part pour quelques «Celebrations» à Paisley Park et quelques chanceux au fil des tournées, pourtant il semblait l’apprécier.
Une pièce rare dans tous les sens du terme.
A écouter ici :
https://www.deezer.com/fr/album/69842552
[18/23] MUSICOLOGY ...ou quand Prince fait le tour de la révolution
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"- Kick the old school joint, for the true funk soldiers !" |
Prince a multiplié les comeback plus ou moins réussis entre 1995 et 2003.
En avril 2004, il se donne enfin les moyens commerciaux de ses ambitions.
Prince annonce à la fois la sortie de l'album
Musicology et une très longues tournée américaine durant l'été. Première mondiale, le CD de
Musicology est inclus dans le prix de vente du billet et sera distribué physiquement à l'entrée des concerts.
Cette fois, tout ceci est appuyé à un vrai plan média : superbe prestation avec Béyoncé aux Grammy Awards où ils reprennent
Let's Go Crazy et
Purple Rain, tournage d'un vrai vidéo-clip, une emission-concert à New York diffusée sur MTV et une prestation légendaire au Rock n'Roll Hall Of Fame avec Tom Petty. Il sera également le premier artiste à organiser une retransmission live du concert de lancement dans les salles de cinéma américaines.
Le
Musicology Tour est une de ses tournées « greatest hits » la plus formatée avec, toujours (c'est Prince quoi), de grands moments et un long set acoustique à la guitare au milieu du public. C'est également une tournée sans effets où une grande place (scène centrale) est donnée aux musiciens : "real music by real musicians"
A l'exception du titre phare (hommage funky à James Brown et à la musique de son enfance) qui débute le concert, l'album Musicology a peu de rapport avec le concert du même nom. Peu ancré dans les sons du moments, l'album est un portfolio de genre divers (funk, pop, balades, rock...). Si l'ensemble montre proprement l'aisance et la diversité du musicien, Musicology laisse à l'époque une impression d'éparpillement. Plusieurs titres tiennent pourtant très bien les années et sont des merveilles de production.
A écouter ici :
https://www.deezer.com/fr/album/69842532Si
Musicology n'est pas un summum de créativité, ce sera en revanche un très gros succès commercial. Grâce à son coup de génie marketing (un cd vendu d'office dans une tournée à guichet fermé), Prince renoue avec les sommets des ventes de disques aux États-Unis. Il est enfin de retour sur les écrans et dans les esprits. L'aventure
Musicology est la preuve que Prince comprend avant les autres que le rapport scène/vente de disque s'inverse à l'heure de la musique en ligne et du piratage. De surcroît, la recette lui permet de s’émanciper, avec une pointe de fierté, des "majors" du disque. Il fera désormais plus d'argent en concert qu'en cherchant à vendre des CD. Chaque album sera le pivot d'une tournée offrant l'opportunité d'une distribution ingénieuse de l'album qui, en retour, fera parler de la tournée.
La boucle est bouclée entre le petit Prince qui, pour s'entrainer à la guitare, achète un vinyle dans un "record store" au début de la vidéo de
Musicology, et la dévalorisation du support CD symbolisée par la distribution gratuite de l'album à l'entrée du concert d'un Prince devenu grand... La musique n'est pas une question de formats mais d'émotions.
Titres favoris : Musicology, Call My Name, Dear Mr ManLeSachiezTu :
Dear My Man est une des rares chansons "politiques" de Prince (Other Titles In This Category Include :
Baltimore, America et
Sign Of The Times).
[19/23] 3121 ou quand Prince va en vacances
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- You can come if you want to, but you can never leave" |
Après sa longue tournée américaine de 2004 et une exposition médiatique comme il n’en avait pas bénéficié depuis une bonne dizaine d’années, pour la première fois de sa carrière, Prince souffle un peu.
Pas de disque, pas de tournée en 2005.L’indépendance retrouvée, Prince suit enfin le rythme que lui a dicté en vain la
Warner pendant des années (une forte exposition pendant six mois pour le nouvel album et la tournée, puis un silence radio d’un ou deux ans avant le prochain album).
Celui qui est pourtant attaché à son Minnesota natal passe l’essentiel de cette année à Los Angeles dans la grande maison du 3121 Antelo Road. Il y organise des soirées où se pressent les people d’Hollywood. On retrouve quelques traces de ces nuits et concerts privés dans le livre photo de Afshin Shahidi :
Prince A Private View… C’est le même Afshin qui réalise la pochette du 31e album de Prince :
3121. L’album sort en mars 2006 chez
Universal, accompagné d’un beau plan marketing et de plusieurs prestations télé aux États-Unis et en Angleterre.
A écouter ici :
https://www.deezer.com/fr/album/69842852L’album est, une fois encore, un collage de morceaux divers et légers dans l’esprit de
Rave Unto The Joy Fantastic. Et, comme souvent depuis quelques années, on n’en ressort pas convaincu sur le moment, avant de lui trouver des qualités au fil des années.
La tournée à venir sera immobile, Prince décide de s’établir à Las Vegas sur la scène de l’Hôtel Casino Rio pour une série de shows durant toute l’année 2006. Il rode ici un concept qui traversera l’Atlantique l’année suivante.
Titres Favoris : 3121, Black Sweat, Get On The BoatLeSachiezTu : Sur le CD de
3121 est sous-titré « The Music ».
3121 est aussi un film que Prince voulait distribuer en DVD avec l’album avec le sous-titre « The Movie ». Devant l’indigence narrative et formelle de la chose à côté de laquelle
Grafitti Bridge ressemble à
Citizen Kane, Universal a dû juger bon de brûler les copies. Le film restera inédit. Ce n’est pas une première expérience cinématographique pour Prince. Dans la foulée de
Purple Rain, Prince a réalisé trois longs métrages, et durant vingt ans il a tourné (ou fait tourner) des centaines de clips et de programmes musicaux à Paisley Park. Si certains ont été diffusés (
Sacrifice of Victor, Love 4 One Another, Beautiful Experience…), la plupart n’ont jamais été distribués, ni même vus.
[20/23] Planet Earth ou quand Prince occupe Londres
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"- I love you baby, but not like I love my guitar" |
Été 2007. Définitivement remis sur orbite marketing avec sa prestation historique à la mi-temps du
Superbowl, Prince revient conquérir l'Europe qu'il avait délaissé pendant près de cinq ans. Il va allier le modèle de distribution expérimenté sur
Musicology avec le principe de la tournée en résidence inauguré avec
3121. Inclus dans le prix du billet, l’album
Planet Earth sera distribué à l’entrée du concert de la tournée européenne Earth T
our. 21 dates dans un lieu unique : l’O2 à Londres. Durant l’été tous les fans européens convergent donc en pèlerinage à Londres, certains pour une date, d’autres pour douze.Même s'il est plutôt bien accueilli, on garde de meilleurs souvenirs de ces concerts que de l’album. Des disques kaléidoscopiques et sans concept, prétextes à tournée, égrainés par Prince de 2000 à 2010,
Planet Earth est le moins inspiré (Oui,
Guitar ressemble quand même BEAU-COUP au
Back In USSR des Beatles). 2 ou 3 titres surnagent d’un ensemble très, trop, facile d’écoute et donc pas désagréable mais qui s’oublie très vite.
Mais, avec ces deux mois invraisemblables de concerts à l’O2, un main show modifié chaque soir et une douzaine d’aftershows, tout lui était pardonné à la fin de l’été.
A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69843302Titres Favoris : Planet Earth, Chelsea Rodgers, ResolutionLeSachiezTu : Pour le lancement de la tournée, l’album sera distribué en Angleterre avec le journal Mail-On-Sunday. C’est une première pour un artiste de cette renommée.
[21/23] INDIGO NIGHTS ou quand, à l’heure du mp3, Prince sort le cd au boitier le plus encombrant du monde
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« - Inside I’m still the same, but something else has changed » |
Terminée l’époque de la course aux aftershows,
la tournée Earth tour de l’été 2007 offre la possibilité de réserver des tickets pour l’aftershow qui aura lieu à 50 mètres du premier concert au
Club Indigo. Sa présence n’est pas garantie, mais au final cet été londonien sera riche en c
oncerts princiers d’anthologie autour de formations variables du NPG (des formations rock avec le couple Dunham, d’autres plus funk, latino ou encore plus jazz avec Renato Neto et Maceo Parker). En 2008, le disque
Indigo Nights est une sélection d’extraits de ces soirées, reflétant plusieurs de ces tendances.
A écouter : https://www.deezer.com/fr/album/69842942Après avoir sorti un parfum pour l’album
3121, Prince décide d’accompagner le CD d'un livre de photos, ou plutôt l'inverse. Pour avoir le disque, il fallait acheter par correspondance le coffee table book de 5 kilos (pas très
Planet Earth comme initiative).
Pour les habitués des enregistrements pirates et, plus encore pour ceux qui ont assisté aux concerts, une impression bizarre d’un mix trop propre se dégage de cet enregistrement. On regrette aussi ce choix de titres lorsqu’on connait le contenu des autres concerts. Mais tel est le fan de Prince : jamais content spécialement lorsqu’il est gâté.
Ce disque reste pourtant intéressant à plus d’un titre. Déjà pour les quelques morceaux rarement joués, pour ses reprises (Led Zeppelin, Aretha Franklin, Mother’s Finest) ainsi que pour le monologue central de Prince (qui s’étend sur 4 morceaux de
Girls and Boys à
Just Like U) où il évoque son rapport à la célébrité, sa jeunesse, des aveux à la fois drôle et pointant de réelles angoisses.
D’ailleurs, si le livre
Indigo Nights est une succession de photos à sa gloire, cliché après cliché, l’artiste enfermé dans son hôtel y étale d’abord, consciemment ou non, son extrême solitude.
Titres Favoris : Indigo Nights/Get on The Boat, Misty Blue/Baby love, The One/Question Of U LeSachiezTu : Plusieurs guests sont montées sur scène à l’Indigo, notamment Amy Winehouse et Will I Am. Ce n’est que le second live officiel de Prince en 30 ans de carrière. Ce sera le dernier de son vivant.
[22/23] LOTUS FLOW3R + MPLS SoUND ou quand Prince est plus incontrôlable que jamais
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"-Donwload a future full of isolated boys and girls..." |
Au fil de la première décennie des années 2000 Prince propose des albums « faciles » pour tenter de conquérir une autre audience que celle de ses fans, des albums « formatés » pour les radios … radios qui ne les diffusent pas. Les albums un peu plus pointus, eux, sont distribués sous d’autres modes. Le disque n’est plus qu’un support dans lequel il ne se projette plus vraiment. C’est n’est vraiment plus que sur scène qu’on l’apprécie, et qu’il s’améliore. Alors que sa production (officielle tout du moins) décontenance les fans, Prince multiplie dans la même période des prestations scéniques fabuleuses à un rythme toujours plus soutenu.
Chaque album est un coup marketing et le théâtre d’un évènement scénique que Prince gère en artisan, certains diront en amateur. Force est de constater qu’il est plutôt doué pour faire parler de lui.
En 2009, pour son lancement, le triple album
Lotus Flow3r est l’objet de trois concerts consécutifs le même soir à Los Angeles dans trois salles différentes. En parallèle,
LotusFLow3r est vendu en exclusivité à prix cassé aux États-Unis dans une chaine de supermarché,
Target (un peu comme si Johnny avait donné l’exclu de son album à
Monoprix).
En Europe, la stratégie commerciale (s’il y en a une) est basée sur le plaisir de Prince de créer des évènements uniques. En juillet 2009, Prince s’invite au dernier moment au festival de Montreux pour deux concerts différents le même soir. La tournée promotionnelle d’octobre 2009 (le triple album est distribué en France par le label
Because) sera l’occasion d’une des semaines de concerts princiers les plus intenses survenues sur le sol français. En assistant à la fashion-week, Prince décide de jouer sous la nef du Grand Palais. Organisés en quelques jours, et complets en une heure, ces deux concerts du 11 octobre 2009 sont un sommet de magie princière, à la fois pour le bordel général de l’entreprise (il n’y a quasiment eu aucunes répétions et la balance est faite en direct lors du premier concert), et la beauté du moment (pour le premier concert entre chiens et loups et les allers retours des pigeons d’un bout à l’autre de la verrière). Il remettra le couvert dès le lendemain à
la Cigale avec un set plus funk à destination des abonnés de son nouveau site (succédant au
NPGMC, puis au
Musicology, puis au 3121). On sent pourtant lors de cette tournée quelques signes de faiblesse physique.
Si on a l’impression depuis quelques temps que non seulement le contenu des albums de Prince peut-être écouté dans n’importe quel ordre et que les titres sont également interchangeables d’un album à l’autre,
LotusFlow3r échappe un peu à la règle. Déjà, il prend le temps d’offrir trois visions musicales. Le premier disque, « organique » est un condensé des dernières années musicales de Prince, un peu de jazz instrumental, une pointe de rock. Le tout est plutôt réussi.
A écouter ici :
https://www.deezer.com/fr/album/69842742
Le second disque
MPLS Sound se veut un retour au son de ses débuts, plus électronique, le son de Minneapolis qu’il a contribué (avec d’autres) a lancé au début des années 80. Là à l’exception d’un
Old Skool Company, particulièrement efficace, c’est moins concluant.
A écouter ici : https://www.deezer.com/fr/album/69843262Le troisième album,
Elixer (He Licks Her), met en avant sa protégée du moment, Bria Valente. Ce troisième album n’est mystérieusement pas disponible en streaming. C’est dommage c’est le plus intéressant du package. Il en interprétera des passages sur la scène du festival de jazz de Montreux.
Prince va bientôt entrer dans une nouvelle période, la dernière. Dans ce qui apparait avec le recul comme une fuite en avant, il multipliera les concerts comme jamais, tout en s’isolant humainement et musicalement.
Titres Favoris :
Boom, Colonized Mind, Elixer, Old Skool CompanyLeSachiezTu : Inspirée de ses tournées statiques à Londres et Las Vegas, Prince était en discussion à l’époque pour faire une nouvelle résidence à Paris. Elle se serait limitée à sept jours dans sept salles différentes parmi elles l’Olympia et Bercy … Entre le New Morning, la Cigale, le Grand Palais et le Stade de France, ce projet se sera finalement à moitié réalisé de 2009 à 2011.
[23/23] 20TEN ou Quand Prince renait en Europe
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" I love everybody and everybody loves me" |
2010 sera une année européenne pour Prince. Désormais l’artiste tourne dans les gros festivals d’été et pour l’occasion il distribuera son nouvel album
20TEN gratuitement via des magazines dans chaque pays visité, la veille même ou le jour même du concert.
Opération de la hanche ou painkillers ? Ce qui surprend lors de son passage au Main Square Festival d’Arras, neuf mois après le Grand Palais, c’est sa vitalité retrouvée. Si la set-list n’évolue guère depuis quelques temps (majorité de hits d’avant les années 2000), l’énergie et l’optimisme sont de retour.
L’album
20ten, probablement sorti des mêmes sessions d’enregistrements dans lesquelles il a puisé pour
Planet Earth, 3121 et
LotusFlow3r, est le plus abouti de la série. Sans prétention, plus inspiré, avec un peu plus de groove que les albums précédents et une bonne humeur communicative sur fond d'électronique,
20Ten est un «
MPLS sound » réussi. Certains titres pourraient même figurer sur
Controversy ou
Dirty Mind. Le tout est une pop festive ne trahissant pas ce qu’il a fait il y a vingt ans, sans pour autant verser dans la nostalgie, et au contraire en donnant envie d’avoir la suite. Si le disque a un concept, c’est bien celui éphémère d’être écouté pour la première fois sur le chemin du concert, histoire de s’échauffer.
A écouter ici :
https://www.deezer.com/fr/album/69842972Nous n’avons pourtant pas perçu à l’époque que nous changions de paradigme princier. Celui qui s’était toujours battu pour faire vivre ses albums, s’en désintéressait désormais totalement. Une preuve parmi d’autres : après s’être battu dix ans pour reprendre possession ses masters et les réenregistrer, il n’en a rien fait une fois les avoir récupérés. C’est aussi une époque où Prince s’englue à nouveau dans une communication opaque, multiplie des prises de position clivantes (anti-internet par exemple, alors qu’il a été précurseur dans le domaine) et produit des contenus web de plus en plus amateurs et déroutants (à voir comme une nouvelle preuve du système autarcique dans lequel il se complaisait). De même, la profusion de tournées et de concerts (toujours complets) qui se sont enchainés par la suite à travers le monde (principalement aux États-Unis) contribuera à mettre sous le tapis une inquiétante anomalie dans ses bientôt 40 ans de carrière : il ne s'est jamais passé plus d'une année entre la sortie de deux albums de Prince.
Son album suivant,
Art Official Age, qui déjà de son vivant a des vibrations testamentaires, ne sortira que 4 ans après en 2014 (O ironie et boucle bouclée) chez
Warner.
De son propre aveu, dans les derniers mois de sa vie, celui qui ne dormait jamais et avait déjà vécu deux ou trois vie de plus que le commun des mortels, commençait à retrouver le sommeil. Il l’envisageait peut-être comme le signe de la fin de sa carrière. Alors que nombre de fans le pensait assagi, prêt pour entamer un nouveau pan de sa carrière plus « cool » dans des clubs de jazz ou des salles prestigieuses, il surprendra jusque dans sa sortie. Entre deux réclusions dans son bunker blanc où il n’échangeait plus qu’en mode « cryptique » avec une poignée de fans sur Instagram, Prince s’est livré sur scène jusqu’à la fin dans un récital au piano où il revisitait dans la joie et surtout la peine les souvenirs d’une jeunesse qu’il n’a au fond jamais quittée.
« …and there’s always a rainbow at the end of every rain »
Titres favoris : Future Soul Song, Lavaux, LaydownLeSachiezTu : 20ten n’est sorti que dans la presse européenne (en France, dans le Courrier International). C’est un album inédit dans le reste du monde.