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Union européenne : montée de la précarité et de la pauvreté…

Par : pierre

Les études se suivent et se ressemblent. Elles confirment la montée inexorable de la précarité et de la pauvreté. Cela vaut en particulier pour les pays de l’Union européenne (qui promettait pourtant, dès le Traité de Rome, d’assurer le bien-être et la prospérité…) ; les Etats membres les plus riches, dont la France, ne sont nullement épargnés.

C’est ce que vient de montrer une enquête réalisée par le SPF, une des plus grandes organisation caritatives françaises, associé à l’institut de sondage IPSOS qui a travaillé dans dix pays (dont sept de l’UE).

Plusieurs chiffres illustrent ce constat de manière effrayante. On note ainsi que 29% des sondés affirment se trouver durablement en situation de précarité. Et plus d’un sur deux (51%) a dû se priver, dans les six derniers mois, dans au moins un domaine vital : santé, alimentation, chauffage. En particulier, pour les dix pays confondus, 37% des personnes interrogées ont déclaré avoir renoncé à certains soins médicaux. La France et l’Italie sont précisément à ce niveau…

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Union européenne : montée de la précarité et de la pauvreté

Par : pierre

Les études se suivent et se ressemblent. Elles confirment la montée inexorable de la précarité et de la pauvreté. Cela vaut en particulier pour les pays de l’Union européenne (qui promettait pourtant, dès le Traité de Rome, d’assurer le bien-être et la prospérité…) ; les Etats membres les plus riches, dont la France, ne sont nullement épargnés.

C’est ce que vient de montrer une enquête réalisée par le SPF, une des plus grandes organisation caritatives françaises, associé à l’institut de sondage IPSOS qui a travaillé dans dix pays (dont sept de l’UE).

Plusieurs chiffres illustrent ce constat de manière effrayante. On note ainsi que 29% des sondés affirment se trouver durablement en situation de précarité. Et plus d’un sur deux (51%) a dû se priver, dans les six derniers mois, dans au moins un domaine vital : santé, alimentation, chauffage. En particulier, pour les dix pays confondus, 37% des personnes interrogées ont déclaré avoir renoncé à certains soins médicaux. La France et l’Italie sont précisément à ce niveau.

Le chiffre est le même (36%) pour les personnes se privant d’éléments essentiels pour leurs enfants, tels que les frais médicaux, les frais de scolarité, l’habillement, ou même les repas.

Sans surprise, la Grèce est l’un des pays les plus mal lotis. Depuis la crise de 2008, des sacrifices considérables – salaires, retraites, services publics… – ont été imposés à ce pays par les dirigeants européens. On se souvient que la « Troïka », formée par la Commission européenne, la Banque centrale européenne, et le FMI, était alors à la manœuvre pour élaborer les plans d’austérité successifs et les faire accepter par le gouvernement national, alors dirigé par Alexis Tsipras. Mais ce dernier, pourtant catalogué « gauche radicale », avait préféré se soumettre au diktat – malgré un non massif exprimé par référendum en juillet 2015 – afin que le pays puisse rester dans la zone euro…

Aujourd’hui encore, outre les sacrifices dans les domaines essentiels de la vie, 60% des sondés en Grèce affirment faire appel à des proches pour se faire prêter ou donner de l’argent. Et 75% d’entre eux précisent se restreindre sur leurs besoins de transport.

La patrie de Socrate avait été l’un des premiers pays où la classe moyenne a été touchée par les privations. Ce phénomène s’étend désormais en Europe, précise l’étude du SPF. Et la France n’est pas épargnée. Ainsi, 58% des Français interrogés affirment redouter de tomber à court terme dans la précarité. Et 45% d’entre eux s’estiment en difficulté pour payer des actes médicaux. Enfin, 32 % ne peuvent pas se procurer une alimentation saine et en quantité suffisante pour faire trois repas par jour. La viande est le premier poste sacrifié, mais l’achat de fruits et légumes frais est aussi lourdement concerné.

Et tous ces indicateurs se sont aggravés depuis la précédente enquête. Ce n’est évidemment pas une surprise, au regard de l’inflation galopante depuis dix-huit mois, une inflation qui percute tous les pays de la zone euro. Lors de son discours solennel du 13 septembre, la présidente de la Commission européenne a tenté de souligner que celle-ci ralentissait depuis le pic d’octobre 2022 où elle avait culminé à 10,6%. En réalité, le rythme mesuré s’est encore établi à 5,3% en août 2023, très loin devant l’augmentation des salaires et des retraites.

Selon les pays, ce sont les dépenses de santé qui ont le plus plombé les budgets des ménages, dans d’autres, le prix de l’énergie. En France, les prix de l’alimentation ont bondi de 22% en 2022 par rapport à 2021. Ce rythme annuel devrait s’établir à + 11,8% pour 2023 selon les prévisions pour ce secteur.

Les principes et les politiques de l’UE, qui constituent son ADN, contribuent massivement à appauvrir les peuples

Bien sûr, l’Union européenne n’a pas l’exclusivité en matière de pauvreté et de précarité. Celles-ci font des ravages sur tous les continents. Mais, d’une part, l’UE était censée « protéger » les citoyens face à la dureté de la mondialisation. « Unis, nous sommes plus forts et plus prospères » reste un des slogans favoris des partisans de l’intégration européenne…

D’autre part et surtout, les principes et les politiques de l’UE, qui constituent son ADN, contribuent massivement à appauvrir les peuples, à commencer par la libre circulation des capitaux et le soutien au principe de la concurrence mondiale.

En outre, la gouvernance économique bruxelloise est constituée de règles et mécanismes qui visent à imposer l’austérité – et pas seulement aux Grecs. Le Pacte de stabilité – dont la raison d’être est d’assurer la survie de l’euro – en est l’outil le plus connu. Provisoirement suspendu suite à la débâcle économique post-Covid, il doit à nouveau entrer en vigueur d’ici quelques mois. Les discussions sur sa réforme, théoriquement dans un sens plus souple, patinent. Même si elles aboutissent, il n’y a aucune chance que ce soit vers une relance du pouvoir d’achat des ménages.

Ces derniers, à commencer par ceux en bas de l’échelle, ne sont donc pas au bout de leurs peines. Ils pourront toujours se consoler en contemplant la générosité de l’UE dans un domaine en particulier : le soutien à l’Ukraine.

Le soutien militaire à Kiev a déjà totalisé 5,6 milliards d’euros depuis février 2022

Depuis le déclenchement de la guerre, le total des aides versées par l’Union et ses Etats membres dépasse les 77 milliards. Une somme pharaonique qui inclut le soutien financier macro-économique, humanitaire, et bien sûr militaire. Concernant le premier poste, une nouvelle manne de 50 milliards a été proposée en juin par la Commission pour la période 2024-2027.

Quant au soutien militaire à Kiev, il a déjà totalisé 5,6 milliards d’euros depuis février 2022, selon les chiffres officiels. A cela, il faut ajouter au moins 10 milliards d’euros de livraisons d’armes directes des différents Etats membres sur une base bilatérale. Encore ne s’agit-il là que de chiffres officiels…

Qui a dit que l’UE ne pratiquait que l’austérité ?

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L’improbable retour de la Convention Giscard (éditorial paru dans l’édition du 23/05/22)

Par : pierre

Le « serment de Strasbourg ». C’est ainsi qu’Emmanuel Macron a baptisé, en toute simplicité, le discours qu’il prononça le 9 mai devant l’hémicycle des eurodéputés. Le (jusqu’au 30 juin) président du Conseil de l’UE ambitionnait ainsi de clore la « Conférence pour l’avenir de l’Europe » lancée il y a un an tout juste. Vous l’ignoriez ? Depuis des mois, 800 « citoyens européens » travaillent d’arrache-pied et ont finalement abouti à 49 « propositions citoyennes » déclinées en 325 mesures… Les participants de base ont été bien sûr tirés au sort ; ce dernier faisant décidément bien les choses, toutes les suggestions exigent fiévreusement plus d’Europe. Et ce, dans les domaines les plus variés, de la défense à l’éducation, en passant par une réforme des institutions dans un sens plus fédéral.

Comme le ridicule ne tue pas ceux qui font mine de s’extasier devant cette europhilie spontanée, le président français a plaidé pour une Europe « plus indépendante » et « plus efficace ». Le premier terme doit se traduire, selon lui, dans les domaines militaire, écologique, alimentaire, et informationnel. Quant à l’efficacité, elle doit être renforcée « par une réforme aussi de nos textes, c’est évident », et donc la convocation d’une convention de révision des traités – lointain successeur de la convention Giscard qui accoucha du projet de constitution européenne, avec le succès que l’on sait. Le président français s’est attiré les hourrah des dirigeants européens les plus fédéralistes, d’Ursula von der Leyen qui préside la Commission européenne, au président du Conseil italien, Mario Draghi, favorable à un « idéalisme fédéraliste ».

Mais à peine avait-il prononcé son discours que treize Etats membres (scandinaves, et de l’Est) publiaient une lettre commune rejetant toute perspective de modification des traités. Qu’à cela ne tienne, certaines idées macroniennes ne nécessitent pas ce détour. Il en va ainsi par exemple de la mise en place de listes transnationales pour les prochaines élections européennes. Mais il y a surtout un point qui mobilise à Bruxelles, et tout autant à Berlin : la fin des décisions prises à l’unanimité. Cette règle, qui permet à un ou quelques pays de bloquer un projet qu’ils jugent contraire à leur intérêt, ne s’applique déjà plus, en réalité, qu’en matière sociale et fiscale, et en politique étrangère.

C’est bien dans ce dernier domaine que ce verrou doit sauter, martèlent en particulier les dirigeants allemands, avec une insistance redoublée depuis la guerre en Ukraine. Et pour cause : pour l’heure, la Hongrie traîne notoirement les pieds dès lors qu’il est question de se priver du pétrole ou de gaz russe, d’autant que Budapest est soupçonné de nourrir des sentiments insuffisamment hostiles à Moscou. Mais, hors réforme des traités, passer à la règle de la majorité nécessite… l’unanimité des Vingt-sept. Improbable.

Une dernière proposition a marqué le plaidoyer du maître de l’Elysée : la création d’une « Communauté politique européenne » qui associerait aux Etats membres de l’UE actuelle les pays souhaitant la rejoindre, en particulier l’Ukraine. Car, estime le président français, leur adhésion proprement dite prendra des années voire des décennies. Agacé, le président ukrainien a déploré une intégration au rabais. Enfin, Emmanuel Macron a suggéré qu’au sein même des Vingt-sept, des pays « plus avancés » constituent des « avant-gardes », comme c’est déjà le cas pour l’euro ou Schengen.

Les prétendues nouveautés exhumées par Emmanuel Macron renvoient étrangement aux décennies 1990 et 2000

Convention pour une UE plus fédérale, Europe à plusieurs vitesses, confrontation entre partisans de l’élargissement et supporters de l’approfondissement : les prétendues nouveautés exhumées par Emmanuel Macron renvoient étrangement aux décennies 1990 et 2000. Mais aujourd’hui avec des lignes de fracture et des querelles bien plus exacerbées. Les réformes rêvées sont donc une nouvelle fois mort-nées.

D’autant que, malgré la volonté de décrire la Russie sous les traits les plus repoussants, l’UE a encore moins de charme aux yeux des peuples aujourd’hui qu’hier. Et ce sera très probablement pire demain, dès lors que les dirigeants européens s’engagent dans une voie outrageusement belliciste conduisant inexorablement à des hausses sans précédent des prix de l’énergie et à la « sobriété », faux-nez d’une austérité décuplée.

Cette dernière pourrait être imposée plus aisément si elle est habillée de vert, estime-t-on sans doute à Bruxelles. Mais ce faisant, la Commission prend surtout le risque de récolter un peu partout du jaune. Celui des gilets.

Pierre Lévy

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« Censure, arbitraire, opacité : les réseaux sociaux, nouveaux maîtres du monde ? » – émission en direct

Par : laurent

Suite à l’affaire du « label rouge » de Twitter, Ruptures propose d’élargir le champ en organisant un débat sur le thème « Censure, arbitraire, opacité : les réseaux sociaux, nouveaux maîtres du monde ? »

En direct sur Internet, l’émission a eu lieu le mardi 13 avril à 19h. Elle a été diffusée sur la chaîne YouTube de Ruptures.

Pour cette première, l’équipe de Ruptures échange avec trois journalistes :

Elsa Ferreira, journaliste pigiste spécialisée en culture et technologie, elle écrit notamment pour les sites Makery et CTRLZ ;

Raphaël Grably, chef du service « BFM Tech » de BFM-TV ;

Erwan Seznec, journaliste indépendant, passé par La Tribune et Que Choisir, il contribue aujourd’hui à Marianne et Causeur.

L’émission évoque bien sûr le cas Ruptures/Twitter – les trois invités font partie des rares journalistes à en avoir rendu compte (voir leurs articles ci-dessous) –, mais il s’agit surtout de parler plus largement du pouvoir des grands réseaux sociaux états-uniens et en particulier de leur rôle prééminent dans la circulation de l’information et le contrôle de l’expression publique. En somme, quels sont les enjeux politiques et démocratiques de la situation de quasi-monopole des plateformes californiennes ?

L’équipe de Ruptures

Les articles de nos invités par ordre chronologique :

– « Twitter présente un journal français comme “affilié à la Russie” » – Raphaël Grably (BFM-TV)

– « Quand Twitter invente la bêtise artificielle » – Erwan Seznec (Causeur)

– « Modération des plateformes : y a-t-il un humain sur les réseaux ? » – Elsa Ferreira (CTRLZ)

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« Ruptures » face à l’arbitraire de Twitter : bilan provisoire de l’affaire du « label rouge »

Par : laurent

La firme à l’oiseau bleu refuse toujours de retirer le « label rouge » qu’elle a attribué à Ruptures en septembre dernier. Twitter refuse même de justifier publiquement sa décision. Retour sur quatre mois d’une affaire entre poussée néo-maccarthyste et arbitraire kafkaïen. À l’image de l’évolution des grands réseaux sociaux états-uniens vers une censure politique plus serrée ?

Le 7 septembre 2020, Ruptures publie un article sur son site Internet : « Retour sur le Russiagate : 98 % des médias français ont été conspirationnistes ». Moins d’une heure après la mise en ligne, nous observons l’apparition d’un label sur notre compte Twitter : « Média affilié à un État, Russie ».

Nous contactons immédiatement le réseau social par voie électronique pour faire retirer cette qualification aussi absurde qu’erronée, puis nous envoyons une lettre recommandée à Twitter France le 11 septembre.

Un mois plus tard, nous constatons dans un communiqué que nous n’avons reçu aucune réponse de la firme à l’oiseau bleu et que la couverture médiatique de l’affaire est quasi inexistante.

Fin octobre, les médias francophones ayant traité cette histoire se comptent sur les doigts d’une main. La situation ne s’améliorera guère par la suite. Quelques blogs et chaînes YouTube ont néanmoins soutenu Ruptures.

Le 1er décembre, nous envoyons une deuxième lettre recommandée. Cette fois-ci Twitter (International) nous répondra – en anglais – deux semaines plus tard. Voici son verdict quant à notre demande de retrait du label : « nous vous informons que notre décision reste la même pour le moment ». Le réseau social ajoute : « Si vous avez des informations supplémentaires que vous souhaitez que nous prenions en considération, veuillez les fournir dans les meilleurs délais. »

Début janvier, nous faisons savoir à la firme californienne dans une nouvelle lettre qu’elle procède à une inversion flagrante de la charge de la preuve. C’est à l’accusateur de fournir les éléments censés fonder ses allégations. Or elle nous demande en somme de lui faire parvenir une attestation de non-affiliation à Moscou…

La réponse – très brève – de Twitter viendra rapidement. L’entreprise refuse de retirer le « label rouge » et de s’expliquer sur sa décision arbitraire.

Depuis, le réseau social a fait parler de lui en supprimant le compte du président des États-Unis en exercice après les événements du Capitole à Washington. De nombreux autres comptes ont été désactivés dans la foulée, ils appartiennent majoritairement à des soutiens réels ou supposés de Donald Trump. Twitter avait déjà procédé par le passé à de telles suppressions (ainsi que des restrictions d’accès et autres censures de contenus) en ciblant aussi des personnalités et organisations anti-impérialistes, mais la purge est cette fois massive. Facebook, YouTube et d’autres plateformes agissent dans le même sens.

Censure politique, limitation de la liberté d’expression, deux poids deux mesures… L’évolution délétère des grands réseaux sociaux états-uniens (en situation de quasi-monopole) devrait conduire à une prise de conscience. Il y a urgence.

En ce qui concerne Ruptures, nous ne nous résignons nullement à subir le néo-maccarthysme de Twitter. Nous sommes plus que jamais déterminés à obtenir le retrait du label. Comme annoncé précédemment, nous préparons une initiative au sujet de cette expérience kafkaïenne et du contexte plus général dans lequel elle s’inscrit.

L’équipe de Ruptures

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Twitter répond enfin à « Ruptures »

Par : laurent

Suite de l’affaire kafkaïenne du « label rouge »…

Plus de trois mois après nous avoir attribué un label erroné (« Média affilié à un État, Russie »), Twitter a finalement réagi* à nos demandes de retrait de celui-ci. Notre deuxième lettre recommandée, envoyée le 1er décembre, est cette fois arrivée à bon port.

Enfin, pas tout à fait, car nous avions écrit à Twitter France et c’est le service international des litiges qui nous a répondu par voie électronique – en anglais évidemment – le 14 décembre, nous signifiant que l’antenne française n’était pas la bonne interlocutrice pour notre requête. C’est à la Twitter International Company, domiciliée en Irlande, qu’il fallait s’adresser. Mais l’expérience kafkaïenne va plus loin.

Malgré cette erreur de destinataire, la firme californienne condescend à nous dire qu’elle a bien pris connaissance de notre courrier et qu’elle a examiné les éléments qui l’ont conduite à nous attribuer le label. Et voici son verdict : « nous vous informons que notre décision reste la même pour le moment ». Le réseau social ajoute : « Si vous avez des informations supplémentaires que vous souhaitez que nous prenions en considération, veuillez les fournir dans les meilleurs délais. »

Il s’agit d’une inversion flagrante de la charge de la preuve. Non seulement Twitter ne communique toujours aucun élément concret pour justifier son action (et pour cause !), mais l’oiseau bleu nous demande en fait de démontrer par nous-mêmes que nous ne sommes pas de mèche avec l’État russe. Il oublie de nous indiquer à quel endroit on peut se faire délivrer un certificat de non-affiliation à Moscou.

Que faire désormais face à cet arbitraire, cette opacité ? Nous allons bien sûr répondre à Twitter que c’est à l’accusateur de prouver ses dires. Mais il nous semble surtout urgent de mobiliser contre le néo-maccarthysme en ligne. La censure politique et la limitation de la liberté d’expression sont en train d’être largement sous-traitées par les autorités à des géants privés du numérique, tous états-uniens (Google/YouTube, Facebook, Twitter). La situation se dégrade rapidement.

Nous comptons organiser prochainement une initiative autour de ce thème.

L’équipe de Ruptures

———————————–

*La réponse de Twitter, reçue le 14 décembre :

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Censure en ligne : « Ruptures » écrit de nouveau à Twitter pour exiger le retrait du « label rouge »

Par : laurent

Ruptures vient d’envoyer une deuxième lettre recommandée à Twitter France – qui n’a pas répondu à la première – pour exiger le retrait du label mensonger que le réseau social nous a attribué le 7 septembre 2020, moins d’une heure après la publication de cet article.

Comme la couverture médiatique de l’affaire est très réduite, y compris du côté des médias dits « indépendants » ou « alternatifs », nous encourageons ceux qui s’inquiètent des avancées de la censure politique et du néo-maccarthysme en ligne à faire connaître les pratiques arbitraires de la firme californienne.

Voici un fac-similé de notre lettre :

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« Ruptures » et le label maccarthyste de Twitter : après un mois, aucune réponse du réseau social, aucune couverture médiatique

Par : laurent

Cela fait maintenant un mois que Twitter a attribué à Ruptures le label mensonger « Média affilié à un État, Russie ». C’était le 7 septembre, juste après la publication sur notre site d’un article critique sur le traitement médiatique en France du « Russiagate ». Malgré des alertes en ligne et l’envoi d’une lettre recommandée (le 11 septembre), Twitter ne nous a toujours pas répondu pour expliquer cet étiquetage arbitraire.

Et plus grave encore que le silence du réseau social américain : en dépit de nos signalements, aucun média français n’a rendu compte de cette affaire alors qu’il s’agit d’un précédent pour le moins inquiétant. En effet, à notre connaissance, Ruptures est le premier et seul média hexagonal à avoir reçu un tel label (le même que RT France et Sputnik France). Celui-ci a des conséquences négatives à la fois en matière de visibilité sur Twitter mais surtout de réputation.

Assez ironiquement, le soutien est venu des États-Unis. En premier lieu d’Aaron Maté, un journaliste du remarquable site The Grayzone ; il a tweeté le 15 septembre pour informer ses nombreux abonnés de nos mésaventures avec l’oiseau bleu. Nous traduisons le premier de ses trois messages : « Le maccarthysme du Russiagate est mondial. En France, le média d’information “Ruptures” a publié un article critique sur la façon dont les médias français ont couvert le Russiagate. Twitter lui a rapidement attribué le label “Média affilié à un État, Russie” – alors que le site est totalement indépendant et soutenu par ses lecteurs. »

Russiagate McCarthyism is global. "Ruptures," a media outlet in France, published an article critical of how the French media covered Russiagate.

Twitter quickly labeled it "Russian state-affiliated media" — even though the site is completely independent and reader-supported. https://t.co/bYToWlhWAj

— Aaron Maté (@aaronjmate) September 15, 2020

La double indifférence à l’égard de nos protestations – celle de la firme californienne et celle des médias français – nous semble être un symptôme de l’acceptation croissante de la privatisation à la fois de la censure politique et de la limitation de la liberté d’expression (et de la presse en l’occurrence).

Autre manifestation de ce climat maccarthyste : le député européen Raphaël Glucksmann vient de prendre la tête d’un comité pour traquer l’influence terrifiante de la Russie (cf. notre article). Ainsi l’Europarlement pourra, comme l’oiseau bleu, décerner des « labels rouges ».

Des tendances délétères pour la démocratie et la presse sont à l’œuvre. À bon entendeur…

L’équipe de Ruptures

Post-scriptum : Raphaël Grably, chef du service « BFM Tech », semble être le seul journaliste français à avoir tenté d’en savoir plus sur l’épisode que nous traversons (voir son dernier tweet à ce sujet). Le réseau social ne lui a pas répondu. Ainsi, en dehors de notre site, l’unique article publié à ce jour en français sur le diktat de Twitter provient… de RT France.

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Les naufrageurs de la raison (et de la gauche) : réponse à Foucart, Horel et Laurens

Par : laurent

Les journalistes du Monde Stéphane Foucart et Stéphane Horel se sont associés au sociologue Sylvain Laurens (EHESS) pour écrire Les Gardiens de la raison : Enquête sur la désinformation scientifique (La Découverte, septembre 2020). Les auteurs font preuve dans ce livre d’un manque sidérant de rigueur et d’éthique intellectuelles. Erreurs factuelles, interprétations malhonnêtes, omissions délibérées, extrapolations complotistes… Illustration avec la façon dont je suis présenté.

Avertissement : ce texte n’engage que moi, il ne saurait notamment être attribué à l’Afis, qui a publié sa propre mise au point.

Pour répondre aux propos de S. Foucart, S. Horel et S. Laurens (« FHL » désormais), j’utiliserai largement le contenu d’un courriel que j’ai fait parvenir à Bruno Andreotti au sujet de son article « Contre l’imposture et le pseudo-rationalisme » (Zilsel, février 2020) – dans lequel je suis également mentionné –, message auquel, je dois le dire, celui-ci a réagi de façon courtoise et ouverte.

Trois phrases, trois erreurs factuelles

C’est dans un chapitre consacré à Jean Bricmont (voir sa réponse) que les auteurs des Gardiens de la raison parlent brièvement de moi. Voici le passage en question (p. 236) : « En octobre 2017, à l’occasion des vingt ans de l’affaire Sokal, une chaîne YouTube intitulée “Lumières !” propose une interview en deux volets de Sokal et Bricmont. La chaîne a été créée par un dénommé Laurent Dauré. Passé par le mouvement souverainiste de Paul-Marie Coûteaux, le Rassemblement identitaire français, membre du bureau de l’UPR, le jeune militant est également membre du conseil d’administration de l’Afis. »

En seulement trois phrases – soixante-sept mots –, FHL parviennent à commettre trois erreurs factuelles. Elles sont de gravité variable.

La première est anodine : l’entretien avec Alan Sokal et Jean Bricmont est en quatre parties et non en deux. C’est un fait très facile à établir, surtout quand on se met à trois pour écrire un livre et que l’on sollicite de nombreux relecteurs.

La deuxième erreur est autrement plus grave, elle s’apparente même à une falsification diffamatoire. Les auteurs affirment que j’ai été membre du « Rassemblement identitaire français ». C’est faux de toutes les façons possibles. Pour faire partie de ce mouvement, il faudrait déjà… qu’il existât. Or, le Rassemblement identitaire français est une organisation imaginaire. Si j’ai bien été brièvement adhérent d’un « RIF », cet acronyme signifie « Rassemblement pour l’indépendance de la France » (un parti créé en 2003).

On se demande comment une telle « méprise » peut être commise, l’information étant là aussi trouvable en dix secondes sur Internet. Mais peut-être que pour notre trio très « gauche plurielle » (qui ferait bondir Jaurès), l’indépendance nationale est un concept d’extrême droite et sa défense, nécessairement une démarche identitaire. C’est d’ailleurs l’opinion qui domine au sein des élites libérales-atlantistes dont Le Monde est le point de ralliement médiatique. Les thuriféraires du marché et de l’intégration européenne veulent liquider dans un même mouvement l’indépendance nationale et la souveraineté populaire. C’est en fait la démocratie même qu’ils cherchent à neutraliser. Avec un certain succès, il faut le reconnaître.

Comme beaucoup d’autres au sein de la « nouvelle gauche » (celle qui n’est pas même social-démocrate), les auteurs des Gardiens de la raison tissent l’impuissance du peuple en prétendant se soucier de lui. Mais quoi que l’on pense de ces appréciations politiques qui peuvent légitimement faire l’objet de débats, il nous semble que les méthodes de FHL devraient heurter toute personne soucieuse d’une éthique intellectuelle élémentaire.

Enfin, troisième erreur factuelle : contrairement à ce qu’écrivent nos redoutables enquêteurs, je n’ai pas été simultanément membre du Conseil d’administration de l’Association française pour l’information scientifique et du Bureau national de l’Union populaire républicaine puisque j’ai quitté ce parti en novembre 2017 – ce qu’ils savent – et que je n’ai rejoint le CA de l’Afis qu’en juin 2018 – ce qui est facile à savoir.

On remarque que les erreurs majeures servent la démonstration (confuse) que s’efforcent de produire les auteurs. Le procès n’étant qu’à charge et le verdict défini à l’avance, tous les « faits » doivent s’y plier. Je précise que les deux journalistes d’investigation et le sociologue n’ont pas cherché à me contacter. Ils me présentent uniquement comme un « militant », ce que je suis indéniablement – comme eux d’ailleurs –, mais en occultant mon activité de journaliste, en particulier pour Ruptures.

Le b.a.-ba du rationalisme c’est le souci scrupuleux des faits. Quand on est journaliste ou universitaire, la négligence intellectuelle est censée être disqualifiante. Comme quoi, des « gardiens de la raison » sont peut-être utiles…

Omissions et bidouillages

Passons maintenant à ce qui relève de l’interprétation malhonnête et de la dissimulation d’éléments d’appréciation importants. Je vais ici recourir à des développements issus de ce long texte publié sur le site de la Librairie Tropiques (je précise que les visuels ne sont pas de mon fait). Il s’agit d’une critique de l’enquête sur l’Union populaire républicaine que Le Monde diplomatique a publiée dans son édition d’octobre 2019.

Concernant Paul-Marie Coûteaux (point 12 de l’article), il a en effet dérivé vers des positions ultra-conservatrices et réactionnaires, jusqu’à doubler sur sa droite le Front national – avec lequel il a cheminé un temps –, mais c’est aussi un ancien proche de Jean-Pierre Chevènement et un membre du CERES (il est passé par les cabinets de Boutros Boutros-Ghali, du « Che » et de Philippe Séguin). Plus surprenant encore pour ceux qui ne connaissent que la partie la plus récente de son parcours, il a été adhérent à Lutte ouvrière et c’est un des membres fondateurs de l’association alter-mondialiste Attac créée en 1998 (ce que l’organisation dissimule sur son site Internet). Paul-Marie Coûteaux fut également un contributeur du Monde diplomatique.

Pendant les années 2000, celui qu’on pouvait jusque-là définir comme un gaullo-chevènementiste, s’est mis à pratiquer une sorte d’« en même temps », mettant en avant ses engagements à gauche auprès de certains, et disant à d’autres que tout cela était du passé. Lorsque le RIF et son président ont définitivement rompu avec la rive de gauche et ont de surcroît décidé de plaider en faveur d’une « autre Europe » (abandonnant l’idée de sortie de l’Union européenne), j’ai quitté le parti.

Ainsi, écrire de façon laconique, comme le font FHL, que je suis « passé par le mouvement souverainiste de Paul-Marie Coûteaux, le Rassemblement identitaire français [re-sic] » en refusant de prendre en compte tous ces éléments de contexte, de chronologie et ces nuances significatives est délibérément trompeur. L’occultation est bel et bien volontaire car les auteurs avaient connaissance de ma critique de l’enquête du Monde diplomatique : ils la mentionnent dans la note 38 du chapitre 8, sans expliquer de quoi il s’agit et en lui attribuant un titre qui n’est pas de moi (et qui ne dit rien sur son contenu). En maniant et en présentant une source de la sorte, FHL piétinent là aussi les standards élémentaires du travail aussi bien journalistique qu’universitaire.

Les auteurs des Gardiens de la raison font parfois de l’humour sans le savoir. En effet, l’affirmation selon laquelle Jean Bricmont serait intervenu à l’université d’automne de l’UPR en 2013 « [d]evant un parterre de militants issus de la droite et proches de l’ancien bras droit de Charles Pasqua » est tellement ridicule et roublarde qu’elle m’a fait rire. Il apparaîtra évident à toute personne qui était présente lors de cet événement qui a eu lieu près de Tours – c’était mon cas – que l’assertion de FHL n’est appuyée sur aucune preuve ou enquête. C’est du pur doigt mouillé, comme beaucoup des allégations et insinuations du livre. La très grande majorité des adhérents et sympathisants de l’UPR qui étaient là – le public étant par ailleurs très jeune – ne sont ni de droite ni issus de la droite, et ils ne se sentent aucune filiation avec Charles Pasqua.

Malhonnêteté au carré

Le manque d’intégrité intellectuelle de FHL devient vertigineux quand on observe leurs stratagèmes argumentatifs. Le court passage qui traite de ma personne sert en fait à atteindre Jean Bricmont et Alan Sokal, coupables d’avoir accepté d’être interviewés par moi. Chercher à dénigrer des individus A et B en les associant à un individu C dépeint à coups d’allégations fausses et d’insinuations malveillantes, c’est en somme de la malhonnêteté au carré. Sur l’entretien en question, chacun peut se faire son propre avis en le visionnant ou en lisant cette transcription de quelques extraits de la 1re partie.

En mentionnant ma présence au Conseil d’administration de l’Afis, FHL cherchent aussi évidemment à nuire à cette association, qui est la principale cible de leur livre. On va le voir, la « démonstration » est incohérente. D’après leurs sous-entendus appuyés, le fait d’être membre à la fois de l’UPR et du CA de l’Afis (faisons comme si c’était vrai…) serait significatif et dirait quelque chose – de compromettant – sur la nature de cette dernière. Toujours la même méthode de culpabilité par association. Si on avait privé les auteurs de l’emploi de ce sophisme, Les Gardiens de la raison ferait 50 pages et non 350.

Comme ils l’ont lu en décidant de ne rien en retenir (point 28 du texte déjà signalé), je n’ai cessé de critiquer les positions de l’UPR et/ou de François Asselineau précisément sur les sujets dont s’occupe l’Afis. L’inefficacité totale de mes alertes et l’aggravation de certaines tendances anti-scientifiques ont grandement contribué à mon retrait du parti. L’ironie est que FHL sont proches des idées de François Asselineau sur de nombreux points : pétition de principe englobante contre les produits phytosanitaires et les OGM, enthousiasme béat pour l’alimentation « bio », sensationnalisme anxiogène sur les perturbateurs endocriniens, technophobie réflexe, appel à la décroissance…

Les trois enquêteurs et le président de l’UPR partagent la même grille de lecture presque exclusivement articulée autour des problématiques (certes réelles) de conflits d’intérêts et d’influence des lobbies. Ce pan-corruptionnisme déborde rapidement de la critique étayée pour contester la légitimité de l’expertise scientifique et des instances publiques d’évaluation (sauf quand elles disent ce que les soupçonneux veulent entendre), accusées d’être dominées par des intérêts peu avouables. Tous les contradicteurs sont alors forcément vendus aux industriels et à la finance – ou leurs idiots utiles –, ils se livrent à une « trollisation de l’espace public » au service des puissances d’argent, des pollueurs-exploiteurs. Avec cette perspective inquisitrice, c’est la méthode scientifique qui se retrouve in fine sur le banc des accusés car ses résultats ne conviennent que très partiellement aux partisans de l’écologie politique.

Nous touchons là au propre de la pensée FHL. Toute personne en désaccord avec leur vision de la science, du progrès, de l’écologie ou de la gauche a nécessairement un agenda sombre et caché (ou est instrumentalisée), une allégeance dissimulée à l’égard de forces économiques ou politiques conservatrices.

Le tropisme des accointances coupables empêche le débat rationnel et parasite la recherche collective de l’objectivité, de la vérité. Croyant critiquer le capitalisme, le productivisme, les idéologues pan-corruptionnistes sapent en fait la science et le progrès, avec les bienfaits que ceux-ci peuvent apporter. Comme l’a écrit Marie Curie dans le livre consacré à son mari, « la science est à la base de tous les progrès qui allègent la vie humaine et en diminuent la souffrance » (Pierre Curie, 1923).

Juger sur pièces

Si j’étais conspirationniste et/ou d’extrême droite, comme l’insinuent lourdement FHL, il me semble qu’il devrait être assez facile d’en trouver des traces – même discrètes – dans au moins quelques-uns des articles que j’ai écrits. Que les vérifications appropriées soient faites. Il se trouve que mon dernier travail porte sur une théorie du complot néoconservatrice qui a été relayée et promue par 98 % des médias français de premier plan (Le Monde en tête).

Les auteurs prennent bien soin de ne pas mentionner mon engagement – passé ou présent – dans plusieurs associations marquées à gauche, alors que Sylvain Laurens en a parfaitement connaissance pour au moins deux d’entre elles. Est-il honnête de dissimuler ainsi des affiliations, dont l’une dure depuis plus de 10 ans ? Je ne donne pas le nom des associations en question pour ne pas les mêler à des polémiques qui ne les concernent pas.

Dans leur livre, FHL ne semblent pas admettre que l’on puisse avoir des engagements politiques ou associatifs divers, distincts et autonomes (l’Afis se tient à l’écart de l’idéologie et de la politique pour défendre la méthode scientifique et la recherche de la connaissance objective, un positionnement qui me paraît tout à fait opportun). Pour eux, toute implication « contamine » les autres, leur mise en lumière dévoilant un plan d’ensemble. Machiavélique, cela va sans dire. Cette tournure d’esprit conspirationniste les amène à voir des coordinations, des proximités et des allégeances qui n’existent pas.

Les auteurs peinent aussi à concevoir que l’on puisse évoluer politiquement, chaque affiliation et engagement étant pour eux lourds de sens à jamais. Or, comme je l’ai écrit au journaliste du Monde diplomatique, « en réfléchissant à mon parcours, je m’aperçois que je suis entré en politique par la porte de la souveraineté populaire, du souci démocratique (et aussi de l’opposition aux guerres impérialistes), et que j’ai peu à peu donné à ma pensée un contenu plus nettement anti-libéral – puis anti-capitaliste – et des principes anarcho-communistes (via lectures et rencontres). Bref, je suis sorti de l’UPR plus à gauche que j’y étais entré. » FHL ont lu ceci et ont décidé que cela n’avait aucune valeur.

La « cancel culture » façon Sylvain Laurens

En 2016, Sylvain Laurens a été parmi les principaux artisans de l’annulation de deux contrats que j’avais signés avec une maison d’édition (plus à gauche que La Découverte), dont il était à l’époque membre du comité éditorial. Cette campagne de dénigrement en coulisse a également eu la peau d’un documentaire d’esprit on ne peut plus rationaliste dont le tournage était en cours et qui était soutenu par une société de production. En quelques mois, mes trois principaux projets personnels ont ainsi été réduits à néant.

À l’époque, Sylvain Laurens et les autres meneurs ont refusé toute discussion, je n’ai jamais pu les rencontrer pour débattre ; il ne fut même pas possible d’avoir un échange téléphonique ou électronique. Les Annulators ne parlementent pas, ils ne sont pas programmés pour la civilité ou la controverse loyale. En s’associant à des journalistes du Monde, média connu pour cornaquer le débat à l’intérieur d’un cadre idéologique étroit et refuser très fréquemment les droits de réponse, le sociologue a trouvé une autre tribu agoraphobe. Stéphane Foucart et Stéphane Horel ont d’ailleurs refusé récemment un débat avec les animateurs pourtant fort réglo de La Tronche en Biais (voir la mise au point de Thomas Durand à propos des Gardiens de la raison).

Il y a quatre ans comme aujourd’hui, Sylvain Laurens semble convaincu que je suis animé de sombres desseins, non seulement à l’égard de la gauche, mais aussi à l’égard du milieu rationaliste français. Pas de preuve, pas de débat possible, ses certitudes sont inébranlables. Et elles justifient selon lui des mesures de marginalisation professionnelle et sociale.

FHL représentent bien ce courant postmoderne qui veut acquérir l’hégémonie à gauche en convertissant celle-ci – à coups d’intimidation et d’excommunication – à l’écologie politique, au rejet de la souveraineté populaire et de l’indépendance nationale, à la politique de l’identité, à la limitation de la liberté d’expression et du débat. Ils cherchent à purger la gauche de ce qui reste de socialistes, de communistes et d’anarchistes attachés de façon conséquente à l’héritage des Lumières et à l’articulation du progrès social et scientifique.

BHL, FHL, même compas (faussé)

Si on en juge d’après les premières réponses qui ont été rendues publiques (voir aussi celle de Franck Ramus), Les Gardiens de la raison est farci d’erreurs petites et grandes. Le volume d’inexactitudes et de sophismes semble tel que nous sommes en route pour des records. Même Bernard-Henri Lévy, pourtant réputé pour sa nonchalance à l’égard des faits et son absence totale de fair-play dans la confrontation d’idées, aura du mal à rivaliser. En démontrant un tel manque d’éthique intellectuelle, FHL exposent leurs autres travaux à la suspicion…

Je n’ai pu m’empêcher de trouver cocasse que l’occupant de la chaire de « sociologie des élites européennes » de l’EHESS s’allie à deux salariés du journal par excellence des élites françaises – dont les principaux actionnaires sont deux industriels milliardaires et un banquier d’affaires millionnaire – pour tenter de jeter le discrédit sur quantité de militants rationalistes qui sont pour la plupart bénévoles et médiatiquement marginaux. Mais peut-être est-ce finalement bon signe que le combat désintéressé au service de la raison rende la bourgeoisie verte de rage.

Laurent Dauré

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Il n’y a pas d’Exit heureux (auteur invité)

Par : pierre

Une session décisive du Parlement britannique aura lieu mardi 29 janvier. L’édition à paraître de Ruptures y consacrera une large place. Avant cela, nous reproduisons ici une analyse parue sur le Blog des Descartes. En raison de l’intérêt de la problématique évoquée par ce texte, nous faisons ainsi une rare exception à la règle de ne publier que des articles de la rédaction.

La crise politique qui secoue aujourd’hui la Grande Bretagne doit être pour tous ceux qui souhaitent un retour à la souveraineté nationale et qui s’imaginent naïvement qu’un tel retour pourrait se faire dans la joie et l’allégresse un sérieux avertissement. Je suis d’ailleurs toujours surpris qu’on puisse trouver parmi les souverainistes des gens qui, aveuglés par une sorte de juridisme primaire, arrivent à oublier qu’en matière de souveraineté le droit cède à la politique, et qu’un acte politique d’une telle portée ne peut que revêtir une dimension tragique.

Comment ces gens-là voient-ils le Frexit ? Après un référendum qui aura approuvé une sortie de l’Union européenne, on commencera par déposer une lettre d’intention conformément à l’article 50 du Traité. On négociera ensuite sagement pendant deux ans, et à l’issue de cette période on signera avec l’Union européenne un traité équilibré et on récupérera toute notre souveraineté tout en gardant avec nos anciens partenaires des relations cordiales. Il ne restera alors plus qu’à déboucher le champagne.

Sauf que ça ne se passera pas comme ça. Ça ne peut pas se passer comme ça. Car il en va de l’UE comme de la Mafia : personne ne doit pouvoir quitter l’organisation et vivre heureux et avoir beaucoup d’enfants. Une telle situation condamnerait sans appel la construction européenne. Si le Brexit devait réussir, si la Grande Bretagne se portait mieux hors de l’Union européenne que lorsqu’elle en était membre, cela pourrait donner de très mauvaises idées à d’autres pays. Il est donc capital pour les institutions bruxelloises que le Brexit soit un échec, un désastre, une catastrophe. C’est la seule manière de cultiver cette peur qui est devenue aujourd’hui le seul moyen de maintenir les peuples coincés dans l’ensemble européen. Nous ne sommes plus liés par l’amour, mais par l’épouvante, comme disait Borges.

Imaginer que Bruxelles pourrait négocier de bonne foi est absurde

L’hypocrisie de l’article 50 apparaît dans cette affaire dans toute son étendue. Prévoir deux ans d’une négociation que l’une des parties a tout intérêt à faire échouer ne sert à rien, sauf à user la volonté du pays qui a décidé de sortir, de donner le temps à ses élites pour trouver un moyen de revenir en arrière, aux majorités de changer. Imaginer que Bruxelles pourrait négocier de bonne foi, que les bonzes de la Commission pourraient rechercher un équilibre juste entre les intérêts des pays de l’Union et ceux de celui qui va la quitter est absurde. Le but des négociateurs bruxellois sera de montrer que hors de l’Union, point de salut.

Et pour cela, ils peuvent compter sur la complicité des élites politiques du pays sortant, élites qui portent les intérêts du « bloc dominant », principal bénéficiaire de la construction maestrichienne. Peut-on compter sur ces gens, totalement acquis à l’Union européenne, pour négocier le meilleur compromis de sortie pour leur pays ? Pour rédiger et passer la meilleure législation permettant au pays de fonctionner après la sortie ? Ou seront-ils plutôt tentés par la politique du pire pour démontrer au peuple que la sortie est impossible, que l’Union européenne est l’horizon indépassable ?

L’expérience britannique montre comment les intérêts bruxellois et ceux du « bloc dominant » local se conjuguent pour produire un accord inacceptable – au point que les deux tiers des membres de la Chambre des Communes ont voté contre le gouvernement – tout en s’assurant que le pays ne soit pas préparé à une sortie « sèche » ce qui justifie la campagne de terreur contre cette éventualité. L’objectif, qui devient clair avec le temps, est de reporter la sortie sine die, le temps de trouver un « accord acceptable » – autant dire, jusqu’à la Saint-Glinglin, puisque l’Union européenne ne proposera jamais quelque chose d’acceptable pour les britanniques – solution élégante qui permet de s’asseoir sur le résultat du référendum tout en faisant mine de le respecter.

la sortie de l’Union européenne, c’est une guerre de libération

Il ne faut pas se tromper : la sortie de l’Union européenne, c’est une guerre de libération. Bien sûr, une guerre feutrée, ou les armes ne sont pas des chars et des canons, mais des armes économiques. Imaginer que l’Union européenne hésitera à saboter l’économie, la santé, la cohésion territoriale du pays sortant au nom d’on ne sait quelle « amitié européenne » c’est se bercer de douces illusions. On l’a vu avec la Grèce. Dans les rapports internationaux – et, on a tendance à l’oublier, les rapports entre états européens sont des rapports internationaux – il n’y a pas beaucoup de place pour les sentiments ou les principes. Et si vous ne me croyez pas, regardez ce qu’ont été les discussions sur le Brexit. Menaces d’asphyxie économique, soutien ouvert ou déguisé aux indépendantismes en Ecosse et dans l’Ulster, campagnes sur une prochaine pénurie de médicaments ou de papier hygiénique – non, le ridicule ne tue pas – si le Brexit devait avoir lieu…

Imaginer qu’on puisse récupérer les instruments de la souveraineté à travers un Frexit négocié, c’est aussi absurde qu’imaginer que Vichy aurait pu récupérer la pleine souveraineté en négociant avec le IIIème Reich

Ceux qui – et je me compte parmi eux – militent pour un retour à la pleine souveraineté de notre pays doivent prendre conscience que le Frexit – comme n’importe quel « exit » – ne sera pas, ne peut pas être un dîner de gala. Bruxelles fera tout, y compris le pire, pour montrer que hors de l’Union point de salut. C’est pour les institutions européennes une question existentielle. Imaginer qu’on puisse récupérer les instruments de la souveraineté à travers un Frexit négocié, c’est aussi absurde qu’imaginer que Vichy aurait pu récupérer la pleine souveraineté en négociant avec le IIIème Reich. Cela n’existe tout simplement pas. Secouer le joug d’une domination est toujours douloureux, coûteux, tragique. Et ceux qui choisissent cette voie doivent être prêts à assumer le fait qu’à court terme du moins ils n’ont à proposer, comme disait Churchill, que du sang, de la sueur et des larmes. Comme tout choix véritablement politique, le choix du Frexit est nécessairement un choix tragique.

Que serait devenue la France si nos ancêtres, voyant à quel point les britanniques « galéraient » sous le Blitz, avaient conclu que combattre les Allemands était une « folie » ?

C’est là le point faible dans la médiatisation du projet souverainiste. Alors que le champ idéologique est dominé par des classes intermédiaires hédonistes qui tiennent avant tout à leur petit confort, il est difficile de parler d’effort et de sacrifice. Rien n’illustre mieux cette idéologie que le récent « tweet » de Ian Brossat, tête de liste du PCF aux élections européennes, qui décidément commence bien mal sa campagne. Voici ce qu’il écrit : « Quand on voit à quel point la Grande-Bretagne galère avec le Brexit, on se dit que l’idée d’une sortie de l’UE serait une folie pour la France. Pas d’autre choix qu’une transformation profonde de l’Union européenne ». Étonnant de voir un dirigeant communiste invoquer l’esprit de madame Thacher en proclamant « qu’il n’y a pas d’autre choix ». Mais surtout, que serait devenue la France si nos ancêtres, voyant à quel point les britanniques « galéraient » sous le Blitz, avaient conclu que combattre les Allemands était une « folie » ? On a envie de pleurer lorsqu’on pense que ce sont les héritiers du « parti des fusillés » qui tient ce genre de propos. Un parti qui se dit « révolutionnaire » mais qui craint les « galères ». A quand « la révolution sans effort » ?

Et ne croyez pas que c’est mieux ailleurs. S’il y a quelque chose qui réunit Bayrou et Marine Le Pen, Brossat et Hamon, Faure et Wauquiez, Dupont-Aignan et Jadot, Macron et Mélenchon, c’est la croyance que le salut viendra non pas de la reprise en main de nos affaires, mais de la « transformation profonde de l’Union européenne ». Transformation qui, bien entendu sera indolore pour tout le monde sauf peut-être pour le « 1% », c’est-à-dire, l’autre. Tous ces personnages communient dans le rejet de la « galère » que serait une sortie de l’UE. Et c’est logique : cette « galère » terrorise les classes intermédiaires, qui tiennent à leur statut et n’aiment l’effort que quand ce sont les autres qui le font. Remarquez, on a toujours le choix de voter pour l’UPR qui, elle, croit au « Frexit heureux » par la magie du droit…

On ne sortira pas de l’Union européenne en pantoufles

C’est pourquoi le seul espoir du camp souverainiste est de construire un récit qui soit à la foi réaliste et mobilisateur. Inutile de raconter que demain on rase gratis, notre peuple sait très bien ce qu’il faut faire de ce type de discours. La sortie de l’Union européenne serait aujourd’hui, comme la Résistance hier, une aventure. Il est irresponsable – et peu crédible – de dire le contraire. On ne sortira pas de l’Union européenne en pantoufles. Alors autant avoir du panache et raconter le Frexit comme une aventure exaltante, et non comme une noce chez les petits bourgeois. La France populaire est prête à accepter des efforts et des sacrifices – elle en a fait beaucoup ces dernières années – à condition qu’ils soient justement repartis et surtout qu’ils aient un sens, d’où le besoin d’un « récit » d’avenir qui soit plus attractif que le darwinisme social qu’on nous propose. Un « récit » terriblement difficile à construire, dans la mesure où l’ensemble de l’establishment politico-médiatique est bien décidé à en empêcher l’émergence. C’est pourquoi le travail politique fondamental à mes yeux pour les progressistes aujourd’hui est la défense des jeunes pousses de ce « récit », contre tous ceux qui prêchent la soumission et la résignation comme moyen d’éviter les « galères ».

Tant pis si la lutte est cruelle.
Après la pluie, le temps est beau.

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