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À partir d’avant-hierContrepoints

Les vrais chiffres de la balance commerciale 2023 

Comme chaque année, les chiffres de la balance commerciale sont minorés et présentés en retirant les frais de transport du montant de nos importations.

Les frais de transport sont pourtant une partie intégrante du coût de revient et sont répercutés sur le prix de vente au consommateur. Mais pourtant, ils sont retraités afin de les comparer aux chiffres des exportations qui, eux, n’intègrent pas les frais de transport. L’opération semble contestable…

Les « vrais » chiffres de la balance commerciale de 2022 avaient ainsi frôlé les 200 milliards d’euros de déficit pour se « rétablir » en 2023 à -135 milliards d’euros.

Rappelons qu’en 2019, c’est-à-dire avant la crise sanitaire et avant la guerre déclenchée par la Russie contre l’Ukraine, la balance commerciale s’établissait à un déficit de 77 milliards (quand l’Allemagne dépassait les 200 milliards d’excédent commercial).

Pour résumer, en l’espace de deux ans : 2019 à 2022, notre déficit commercial a quasiment triplé et le déficit de 2023 est maintenant équivalent au double de celui de 2019.

 

Une lueur d’espoir ? L’éternelle marotte de la solution par les exportations 

Face à des résultats accablants, l’idée selon laquelle la progression de nos exportations viendrait redresser la balance commerciale continue de perdurer et d’être promue comme la solution de reconquête de notre souveraineté. Est-ce bien réaliste ? Avec des exportations qui progressent mollement (+3 % en un an) et dont la hausse intègre nécessairement l’inflation, peut-on vraiment penser qu’elles seront à même de compenser notre dépendance structurelle aux importations sur la quasi-totalité des secteurs industriels ?

Pour comprendre la réalité de la balance commerciale, reprenons chaque secteur en distinguant les secteurs déficitaires des rares secteurs excédentaires.

 

Les secteurs déficitaires… Toujours plus déficitaires

Énergie : un déficit de 75 milliards, ou comment la France fait passer les intérêts de ses partenaires commerciaux avant les siens

Rappelons que dans les années 2000, date à laquelle la balance commerciale passe dans le rouge, le déficit énergétique s’affiche déjà à près de 25 milliards. En vingt ans, il double pour atteindre les 50 milliards en 2019. Puis de 2019 à 2022, il double à nouveau (quasiment 120 milliards !) et se redresse en 2023 à près de 75 milliards soit 50 % de plus qu’en 2019…

Si l’on entre dans les détails, on comprend bien la folie de notre politique énergétique qui nous place en position de dépendance vis-à-vis du gaz naturel que nous importons à des prix toujours plus élevés, sans pouvoir tirer profit de l’électricité que nous vendons… Au prix auquel nous la produisons !

Prenons notre premier poste d’importations énergétiques : les hydrocarbures naturels (gaz dont gaz de schiste et huiles brutes de pétrole) qui affichent à eux seuls un déficit de 56 milliards d’euros.

La guerre en Ukraine a lourdement marqué notre balance en matière d’hydrocarbures naturels avec une flambée des prix et un recours aux États-Unis très marqué et coûteux : le coût de nos importations a ainsi quasiment triplé de 2019 à 2022 avec un déficit atteignant les 75 milliards en 2022. Déficit qui s’est redressé à plus de 56 milliards en 2023. La situation est donc loin d’être rétablie.

Second poste du déficit énergétique, les produits pétroliers, a quant à lui doublé sur la période 2019-2022 passant de 15 à 30 milliards pour se rétablir à 20 milliards en 2023.

Si notre dépendance en hydrocarbures et produits pétroliers a toujours été avérée, notre force nucléaire, en revanche a toujours constitué un atout majeur.

Malheureusement, pour ce qui est de l’électricité, troisième grand poste de nos dépenses énergétiques, il est clair que nous ne tirons absolument pas avantage de notre force nucléaire dans laquelle nous avons tant investi. En 2022, le mécanisme de l’ARENH nous a fait atteindre une situation ubuesque de déficit commercial en électricité (8 milliards) en devant acheter plus cher à des fournisseurs étrangers un produit que nous devons leur vendre au prix coûtant. En 2023, les choses se rétablissent avec un excédent de 3 milliards qui, on le comprend bien, si nous n’étions pas entrés dans l’ARENH, devrait être nettement supérieur.

En synthèse, l’énergie que nous vendons et achetons se traduit par un solde déficitaire de 50 milliards. Notre position de leader nucléaire historique ne permet en rien de redresser ces résultats du fait des mécanismes de prix fixés par l’ARENH.

 

Le textile et l’habillement

Un redressement en demi-teinte porté par la croissance des exportations de produits de luxe.

Le déficit avait atteint les 12 milliards en 2019, frôlé les 13 milliards en 2022 et s’est contracté à 8 milliards en 2023. Ce rétablissement est entièrement porté par la progression des exportations sur le seul secteur du cuir/bagages/chaussures. En revanche, pour le reste de l’habillement, le montant des importations est en progression avec l’apparition marquée d’acteurs étrangers intervenant en vente directe, sans intermédiation, comme l’emblématique Shein.

 

Le déficit ancré de l’agro-alimentaire : une perte de souveraineté confirmée

Les résultats sont chaque année présentés comme positifs… À tort. En effet, les boissons (vins et spiritueux) viennent corriger ce qui est devenu un déficit structurel de la balance commerciale sur la totalité des produits à l’exception des produits laitiers. Corrigés des seuls chiffres des boissons les résultats sont alarmants : la dépendance aux produits étrangers, pour ce qui est de notre consommation de viande, de conserves, de fruits et légumes, et d’huiles est bel et bien confirmée. Tous ces secteurs sont déficitaires, entre 2 et 4 milliards chacun.

La balance commerciale du secteur agro-alimentaire marque donc, en réalité, un déficit de 10 milliards d’euros (soit 3 milliards de déficit supplémentaire par rapport à 2019).

Ce déficit n’est pas corrigé par la balance commerciale agricole, qui, après une progression en 2022 enregistre un excédent de 1,4 milliard. On peut donc dire que le secteur agricole, hors spiritueux, enregistre des déficits records, proches de 9 milliards !

 

Métallurgie, électronique, machines… : la chute libre

De nombreux autres secteurs historiquement déficitaires continuent leur plongée respective comme l’industrie métallurgique (doublement du déficit de 2019 à 2023 pour atteindre 15 milliards d’euros), les produits en plastique (-10 milliards), les produits informatiques (+50 % de déficit soit -10 milliards), la fabrication d’équipements électriques et de machines (-21 milliards).

 

Les rares secteurs excédentaires… En très fort recul

De façon encore plus inquiétante, on voit également se contracter des secteurs qui avait su rester excédentaires.

Premier concerné : l’industrie du transport (automobile, aérospatiale, navire) qui est passé de 15 milliards d’excédent en 2019 à… 6 milliards ! Cet effondrement est principalement corrélé à l’effondrement du secteur automobile dont le déficit passe de 15 à 25 milliards d’euros et dont les résultats de l’aérospatiale ne parviennent pas à compenser.

Deuxième secteur historiquement fort : l’industrie pharmaceutique qui voit un effondrement dans la balance commerciale que toute personne ayant besoin de se soigner peut constater. L’excédent de 6 milliards de 2019 s’est amoindri à moins d’un milliard en 2023.

Enfin l’industrie chimique, toujours présentée en bonne santé, doit à l’instar du secteur agro-alimentaire et des boissons, être retraitée de la cosmétique. Le solde le plus excédentaire de la balance commerciale, 20 milliards en 2023, se réduit à la peau de chagrin de 2,5 milliards une fois les cosmétiques retirés…

Globalement, sur 2023, en dépit de la contraction du déficit, les tendances lourdes se confirment et semblent ancrées de façon indélébiles dans les chiffres de la balance commerciale et dans la réalité de notre consommation quotidienne.

Au-delà des aides, des subventions, et des « encouragements », il est temps que l’industrie redevienne réellement une priorité nationale. La France doit revoir les normes et dispositifs dans lesquelles elle s’est enfermée au profit de ses partenaires et au détriment de ses propres intérêts commerciaux.

En 2024, supprimons les droits de succession !

Les droits de succession sont assez généralement considérés comme justifiés, et on en donne en particulier une justification prétendue morale. En effet, on considère qu’il n’est pas juste que certaines personnes puissent hériter d’un capital plus élevé que d’autres sans avoir fait les efforts nécessaires pour cela et sans le mériter.

On évoque souvent de ce point de vue l’idée selon laquelle il faut assurer « l’égalité des chances » entre tous les citoyens. Mais il faut estimer ce point de vue comme étant totalement injustifié, et c’est précisément pour des raisons éthiques que je critique l’existence des droits de succession.

En effet, lorsqu’on parle d’éthique il est essentiel de faire une distinction fondamentale entre « éthique universelle » et « éthique personnelle ». L’éthique universelle implique de définir des droits qui soient cohérents entre eux pour tous les individus du monde.

 

Une question d’éthique

Ces droits sont les droits des individus sur leur propre personne et sur leurs propriétés légitimes. Par ailleurs, chaque individu peut avoir des préférences personnelles, par exemple en ce qui concerne des décisions d’ordre généreux ou égoïste à l’égard de telle ou telle autre personne ou catégorie de personnes. Mais ces préférences personnelles sont nécessairement diversifiées et ne peuvent pas donner lieu à la constitution d’une société cohérente.

Et tel est le cas de l’égalité des chances, et de manière plus générale de tous les arguments en faveur de politiques de redistribution, celles-ci impliquant nécessairement de ne pas respecter les droits de propriété légitimes relevant de l’éthique universelle.

C’est par respect pour l’éthique universelle qu’il convient de s’opposer aux droits de succession.

En effet, ce qui est en cause, ce ne sont pas les droits personnels des héritiers, définis de manière arbitraire (on décide de manière discrétionnaire de prélever une part plus ou moins importante du capital reçu par les héritiers), mais ce sont les droits des légataires.

Si un individu est le propriétaire légitime d’un capital qu’il a accumulé pendant sa vie, il est profondément immoral de considérer qu’on ne doit pas respecter ses droits du fait de son décès.

En effet, il a fait l’effort d’épargner des ressources – c’est-à-dire de renoncer aux satisfactions apportées par la consommation – afin d’accumuler ce capital, par exemple précisément pour pouvoir le léguer à ses enfants ou à une organisation charitable ou culturelle.

 

Les droits de succession : une atteinte au droit de propriété

Au nom de quoi peut-on mépriser ces efforts et porter atteinte aux droits de propriété de celui qui décède ? L’une des remarquables spécificités des êtres humains vient précisément du fait qu’ils sont capables de se projeter au-delà de leur vie.

Comparons les activités de deux individus disposant des mêmes ressources tout au long de leur vie : l’un d’entre eux épargne, pas l’autre. Pourquoi serait-il juste de punir celui qui a fait l’effort d’épargner une partie de ses ressources, et pas l’autre ?

Si l’existence de droits de succession doit être critiquée pour des raisons éthiques, il est vrai par ailleurs qu’elle doit être aussi critiquée pour des raisons utilitaires. Par conséquent, si on respecte l’éthique universelle il en résulte des situations satisfaisantes.

Ainsi l’incitation à accumuler du capital profite à tout le monde puisque cela permet, par exemple, d’améliorer la productivité des salariés d’une entreprise et donc le montant de leurs salaires. On pourrait considérer cela comme une justification suffisante pour ne pas imposer de droits de succession.

 

Le capital est surtaxé en France

De ce point de vue, il convient de souligner qu’en particulier dans le cas de la France, le capital est surtaxé, car il existe différents impôts prélevés sur sa valeur, sur ses revenus ou sur sa transmission, et l’on peut même démontrer que l’impôt sur le revenu constitue une atteinte à l’accumulation du capital. Or, il est important d’évoquer le fait que la croissance économique implique l’accumulation de capitaux.

En taxant le capital – par exemple par les droits de succession – on diminue l’incitation des individus à accumuler du capital, et c’est toute l’économie d’un pays qui en est ainsi affectée en subissant une croissance moindre que celle qui serait sinon possible.

C’est donc pour des raisons pratiques aussi bien que morales qu’il convient de supprimer les droits de succession.

Plus qu’une semaine pour nous aider : 5 bonnes raisons de donner

Chers lecteurs,

Le temps presse : il ne nous reste qu’une semaine pour boucler notre budget annuel et nous n’avons pas encore réuni les 100 000 euros nécessaires pour maintenir la production actuelle et financer les améliorations du site que vous êtes nombreux à réclamer.

Si vous avez lu notre rapport annuel 2023, vous savez que nous sommes entièrement transparents sur nos actions et nos finances ; croyez bien que nous serions heureux de pouvoir vous annoncer le succès de cette campagne de financement s’il était déjà acquis. Beaucoup d’entre vous donnent dans les derniers jours de décembre, c’est pourquoi nous avons bon espoir d’atteindre l’objectif, mais cela n’arrivera pas sans une action de votre part.

Vous avez déjà donné ? Merci de tout cœur !
Vous hésitez encore ? Voici 5 bonnes raisons de le faire

 

1. Vous financez un média alternatif

Et cependant reconnu pour son sérieux par le SPIIL (Contrepoints est adhérent du Syndicat de la Presse Indépendante d’Information en Ligne) et régulièrement cité dans la presse nationale, à droite comme à gauche.

 

2. Vous permettez à d’autres que vous de découvrir vos idées

Même si vous-même nous lisez moins qu’avant, car vous êtes convaincu depuis longtemps. Mais vous jugez important que plus de gens soient touchés par un message humaniste, économiquement sain et ancré dans le réel.

 

3. Vous rendez possible le plan « Wikibéral 2025 »

Grand chantier de remise à jour et d’amélioration de notre célèbre encyclopédie collaborative des idées libérales.

 

4. Vous maintenez la pression sur les bureaucrates

À l’aide de vos nombreuses suggestions, nous ferons la lumière par des enquêtes rigoureuses sur l’inefficacité croissante des administrations dont la plupart des Français ignorent jusqu’à l’existence, alors qu’elles ruinent progressivement le pays.

 

5. Vous réduisez  vos impôts

Tout le monde est gagnant, sauf le Léviathan ! Vous réduisez votre IRPP à hauteur de 66 % de la somme donnée1, vous aidez concrètement à dénoncer l’illusion fiscale, tandis que l’État reçoit moins d’argent à gaspiller dès l’an prochain.

 

 

  1. Nous vous envoyons un reçu fiscal. Réservé aux contribuables français, sauf dons en bitcoin

La gratuité, quoi qu’elle en coûte ?

Notre pays entretient des rapports difficiles et ambigus avec l’argent, la création de richesses, mais aussi la rémunération des services rendus tant par les entreprises que par la collectivité.

Jeudi 21 décembre 2023, Montpellier est devenue la plus grande agglomération d’Europe à rendre ses services publics de transports entièrement gratuits. La crise aidant, la tentation pourrait être grande de proclamer l’avènement du tout gratuit et son corollaire : la fin du travail.

Dans cet article, notre chroniqueur Didier Cozin analyse les enjeux et les non-dits de cette politique.

 

Tout a un coût, tout a un prix

Alfred Sauvy l’écrivait il y a 80 ans dans ses leçons magistrales d’économie : pour que les produits que nous consommons soient offerts ou gratuits il faudrait qu’ils soient aussi disponibles et accessibles que l’air que nous respirons (il en est déjà autrement pour l’eau, puisqu’elle doit être puisée, canalisée, filtrée, traitée, ce qui a un coût).

Tout ou presque a donc un prix (et un coût) et le débat actuel qui consiste à s’interroger sur l’intérêt de faire payer ces coûts à l’usager (ou à l’utilisateur), pourrait être à la fois vain, contre-productif et générateur de grands désagréments.

Jusqu’à présent les Français acceptaient -sans trop renâcler- de payer de leur poche les produits, les appareils ou les biens qu’ils utilisaient ou consommaient. Il n’en était pas tout à fait ainsi pour les biens immatériels (ou services). Habitués et confortés par la gratuité ancienne de l’école, de la santé ou de la sécurité, certains estimaient que d’autres services, comme ceux des transports en commun (ou du logement) pourraient être collectivisés et devenir « gratuits ».

 

La gratuité, ce prolongement séduisant de l’assistanat

Le socialisme a pour devise « toujours plus ». Non seulement il a contribué à bâtir une société surendettée, sur-importatrice et sous-travailleuse mais il se croit obligé d’aller toujours plus avant.  Plus loin pourrait être promouvoir la gratuité intégrale des services devenant tous publics, les transports aujourd’hui, le logement demain (par exemple).

En France, à l’instar de Montpellier depuis cette fin d’année, ce sont donc près de 40 collectivités qui ont mis en œuvre la gratuité (parfois totale, parfois partielle) des transports collectifs alors que des usagers, des associations, des partis politiques militent ou revendiquent déjà la gratuité de tous les transports collectifs (y compris inter-régionaux) en prétextant de leurs coûts (le travail est malheureusement, et pour des raisons idéologiques, très cher en France) ou des enjeux climatiques (l’autobus remplacerait les voitures sans contraindre trop l’automobiliste moyen).

La gratuité, qui est l’étape ultime de l’aide sociale généralisée (sans condition de ressources) rendrait-elle pour autant les citoyens libres, égaux et notre société meilleure ou plus juste ? Il est permis d’en douter, tant les inconvénients de la gratuité sont innombrables et croissants :

a) La gratuité envoie un signal délétère au citoyen en l’empêchant de devenir adulte, de s’autonomiser, de devenir libre et indépendant (socialement comme financièrement) de l’État.

b) Le signal prix disparaît également puisque la ressource paraît illimitée, éternelle et gratuite. Tout comme le prix de l’énergie (KWH ou litre d’essence) nous fait prendre conscience qu’on peut et qu’on doit éviter de gaspiller, le prix des transports implique une réflexion et des arbitrages. Qu’en serait-il dans la société du tout gratuit ?

c) La concurrence est également faussée entre les différents modes de transports : les taxis (qui participent des transports publics) ou les autobus privés ne pourraient plus fonctionner, la gratuité et la simplicité de la marche à pied ou du vélo seraient remisées au rang de gadgets écolos.

d) Une surcharge et une congestion des réseaux rendraient les services déclinants ou médiocres.

e) Une baisse de la qualité du service, de la sécurité perçue (ou réelle avec la disparition ou la réduction de la présence humaine) apparaîtrait nécessairement, ainsi qu’une chute des investissements pour de nouveaux transports.

f) Le travail, l’activité économique et laborieuse deviendraient secondaires, ne seraient plus nécessaires pour la plupart des actes de la vie quotidienne. L’illusion de la fin du travail (une torture pour certains) tromperait des citoyens devenus passifs, soumis et aux ordres (le pouvoir revient toujours à celui qui paie).

g) Dans cette société massivement orientée vers le temps libre et les loisirs, l’offre de transports ne serait plus reliée au travail, mais aux sorties ludiques, aux déplacements nocturnes ou aux vacances (non indispensables et consommateurs de beaucoup de ressources)

 

À l’attention de Michael Delafosse, maire socialiste de Montpellier

La gratuité des transports est illusoire et fallacieuse puisque les matériels, l’énergie ou les salaires doivent être payés par quelqu’un (le contribuable ou nos créanciers). La gratuité est une facilité de caisse dangereuse, une pente glissante qui a des effets pervers et nécessiterait toujours plus de moyens financiers pour des résultats de moins en moins avérés (les rendements décroissants des aides).

Si les Français semblent séduits par la gratuité, les résultats de cette politique dans l’éducation, la santé (aide médicale), les transports ou les loisirs (pass culture) sont-ils à la hauteur des résultats attendus et ne provoquent-ils pas des dégâts importants ?

Nos concitoyens s’illusionnent s’ils pensent pouvoir mieux vivre et se développer dans un monde de gratuité, l’exemple des ex-« démocraties populaires » atteste du contraire : dans ces pays – non libres- les services publics quasi gratuits étaient dans un état lamentable, les salariés non managés et totalement abandonnés ne donnaient pas 10 % de leur implication ou de leurs compétences pour travailler.

Dans une société essentiellement matérielle et matérialiste, ce qui est gratuit ne vaut au final (presque) rien. Les progrès qu’ont pu représenter en leurs temps l’école gratuite (Jules Ferry), la sécurité sociale (après 1945), les HBM (devenues HLM) tout cela risque désormais de se retourner contre leurs bénéficiaires, citoyens éternellement mineurs, ne votant plus et maintenus sous tutelle par l’État ou ses administrations.

Sortir des aides, de l’assistanat, de la fausse gratuité, et permettre à chacun de jouer un rôle dans la société (autre que celui de consommateur passif) ne serait-il pas un projet plus engageant pour l’avenir que la multiplication infinie des aides, des dettes et des gadgets sociaux ?

Peut-on défendre l’individu sans recourir au collectif ?

« Les libéraux ne jurent que par l’individu et rejettent le collectif sous toutes ses formes » .

Voilà probablement la PIRE caricature que l’on peut faire de la philosophie que nous partageons.

Qui peut nier que l’être humain ne survit et ne peut prospèrer qu’en communauté ? L’économie de marché est la plus belle illustration de ce que peut accomplir la coopération d’individus laissés libres d’agir. C’est même pour cela que les nationalistes rejettent le marché : la société ouverte est par définition basée sur l’interdépendance et donc sur la co-existence pacifique.

La « guerre économique » que nous vendent les médias et les politiques est un non-sens absolu : le libre-échange est un jeu à somme positive ! La notion même d’entreprise est une merveille de collectif résultant d’un ordre spontané. Que dire enfin des institutions de la société civile comme la famille, les congrégations religieuses et les nombreuses associations ?

Rejeter la contrainte de l’État et son obsession pour l’uniformisation n’est en rien un rejet de la communauté, bien au contraire !

 

 

Un collectif de défense de l’individu

Contrepoints est une success-story collective : fondé par des bénévoles, le journal a gagné sa reconnaissance dans le paysage médiatique par un travail quotidien, laborieux, contre des vents idéologiques contraires. L’équipe a parfois changé, mais l’institution demeure grâce à la constance du travail accompli par tous : bénévoles, auteurs, salariés… et donateurs ! Car sans votre soutien – même modeste mais renouvelé chaque année – Contrepoints n’existerait pas. Nous pensons que les petits donateurs comme vous sont la plus sûre garantie de la pérennité de Contrepoints tout en maintenant son indépendance.

Une contribution à la hauteur de vos moyens mais régulièrement renouvelée est le plus précieux soutien pour une rédaction indépendante capable de se projeter dans le futur.

 

La mobilisation doit s’accélérer pour atteindre l’objectif

Nous parvenons à toucher des millions de lecteurs avec un budget minimal. Il n’existe pas de moyen plus efficace pour transformer un euro en pédagogie libérale. Mais héberger un site et rémunérer des salariés dédiés au journal coûte de l’argent, et nous n’avons pas encore atteint la somme nécéssaire pour équilibrer notre budget en 2024. Si nous le répétons chaque année, c’est parce que c’est toujours aussi vrai : notre existence n’est jamais garantie à l’avance. Vous seul avez ce pouvoir.

Faire un don prend littéralement deux minutes, et tous les moyens de paiement sont acceptés : carte bancaire, chèque, Paypal et même virement bancaire ou transaction en bitcoin.

Pour les résidents fiscaux français cela peut même réduire votre impôt sur le revenu des deux tiers de votre don, alors pourquoi ne pas financer librement un collectif qui défend la souveraineté individuelle plutôt que laisser votre argent nourrir le collectivisme d’État ?

Si chaque lecteur de cet article donnait ne serait-ce que 20 euros dès maintenant, notre équilibre financier serait immédiatement assuré pour 2024.

 

 

Si ce n’est pas vous qui financez une voix 100 % libérale, qui d’autre le fera ?

L’état d’esprit victimaire rend les gens impuissants

Dans son article « Unraveling the Mindset of Victimhood », le psychologue américain Scott Barry Kaufman a recommandé de passer le court test suivant pour déterminer si vous avez un « état d’esprit de victime » :

« Évaluez dans quelle mesure vous êtes d’accord avec chacun de ces éléments sur une échelle de 1 (« pas moi du tout ») à 5 (« c’est tellement moi ») :

– Il est important pour moi que les personnes qui m’ont blessé reconnaissent qu’une injustice m’a été faite.

– Je pense que je suis beaucoup plus consciencieux et moral dans mes relations avec les autres que dans la façon dont ils me traitent.

– Lorsque des personnes proches de moi se sentent blessées par mes actes, il est très important pour moi de préciser que la justice est de mon côté.

– C’est très difficile pour moi d’arrêter de penser à l’injustice que les autres m’ont faite.

Si vous avez obtenu un score élevé (4 ou 5) sur tous ces éléments, vous avez peut-être ce que les psychologues ont identifié comme une « tendance à la victimisation interpersonnelle ».

J’ajouterais la déclaration suivante : « Je me définis d’abord et avant tout comme un membre d’un groupe social distinct (de préférence une minorité) qui a été discriminé partout dans le monde et pendant des siècles ou des millénaires. »

 

Définir la tendance à la victimisation 

Le psychologue israélien Rahav Gabay définit cette tendance à la victimisation interpersonnelle comme « Un sentiment continu que le soi est une victime, qui est généralisé à de nombreux types de relations. Par conséquent, la victimisation devient un élément central de l’identité de l’individu. Ceux qui ont un état d’esprit de victimisation perpétuelle ont tendance à avoir un  »locus de contrôle externe ». Ils croient que la vie d’une personne est entièrement sous le contrôle de forces extérieures à elle-même, telles que le destin, la chance ou la miséricorde des autres. »

Le « locus de contrôle externe » signifie : je ne me considère pas comme le façonneur de mon propre destin, je blâme toujours les forces extérieures. Je blâme la société, la discrimination, le capitalisme, etc. pour les défaites et les revers. Si d’autres personnes réussissent, j’envie leur succès et je l’attribue à la « chance » ou à « l’injustice sociale ».

Cette attitude rend les gens impuissants. Les mouvements radicaux qui cultivent ce mythe victimaire et promettent que seul un renversement de la société changera leur situation personnelle leur donnent alors une force supposée.

 

Un handicap n’est pas nécessairement un frein

Les histoires de personnes handicapées qui ont réussi et que je raconte dans mon livre Unbreakable Spirit montrent que ce ne sont pas les circonstances extérieures, mais surtout sa propre attitude intérieure, l’état d’esprit, qui a une influence décisive sur la vie d’une personne :

Comme le montre le livre, Ludwig van Beethoven a utilisé son incroyable volonté pour dépasser de loin ses propres ambitions et surmonter ses capacités physiques supposées limitées et a composé certaines de ses plus grandes symphonies alors qu’il était déjà sourd. Comme il l’a dit : « La force est la morale de l’homme qui se démarque des autres, et c’est la mienne. ». Frida Kahlo, qui a été frappée par la poliomyélite dans son enfance, puis handicapée physique lors d’un grave accident de la route, est devenue la peintre la plus célèbre d’Amérique latine. Le physicien de renommée mondiale Stephen Hawking a exploré les trous noirs et nous a expliqué l’univers, bien qu’il soit confiné à un fauteuil roulant et qu’il communique via un ordinateur vocal.

Ray Charles, Stevie Wonder et Andrea Bocelli sont devenus des superstars de la scène musicale parce qu’ils ont refusé d’accepter leur cécité comme un désavantage, et ont même réussi à en faire un atout. Michael J. Fox était déjà devenu célèbre à Hollywood lorsqu’on lui a diagnostiqué la maladie de Parkinson. Cela signifierait normalement la fin de la carrière d’un acteur, mais la star de Retour vers le futur a prouvé le contraire. À l’aube de la vingtaine, Felix Klieser était déjà devenu l’un des plus grands cornistes du monde, même sans ce qui est en fait une condition préalable indispensable pour jouer du cor : les bras.

Thomas Quasthoff est un survivant de la thalidomide, il est né avec de graves malformations des bras et des jambes – il est devenu l’un des plus grands ténors vivants. Nick Vujicic, né sans bras ni jambes, est un conférencier très recherché et a inspiré des millions de personnes dans 63 pays et rencontré 16 chefs d’État à travers le monde. « Je crois », dit Vujicic, « que si vous créez la vie que vous voulez dans votre imagination, il est possible de la créer dans la réalité minute par minute, heure par heure et jour par jour. »

Un puissant désir de dépasser les limites fixées par le corps ou l’esprit est ce qui motive chacune de ces incroyables personnes. L’alpiniste aveugle Erik Weihenmayer a notamment conquis les sept sommets les plus redoutables des sept continents, dont le mont Everest. La force mentale de personnes comme Weihenmayer leur permettait de ne jamais se considérer comme des victimes ou des membres d’une minorité « défavorisée », mais comme des personnes fortes qui contrôlaient leur propre destin.

C’est toujours ça que l’État n’aura pas !

Chers lecteurs,

Peu importe qui gouverne depuis 30 ans, la pression fiscale s’accentue chaque année et la caste au pouvoir invente des règlementations toujours plus improbables, qui découragent les forces vives du pays et freinent le progrès économique. Mais il y a pire : les impôts s’auto-renforcent. Plus on embauche de fonctionnaires, plus on finance des clientèles électorales, et moins on entend la voix de ceux qui payent, c’est-à-dire VOUS.

 

Brisons le cercle vicieux

Saviez-vous que l’association qui édite Contrepoints est reconnue d’utilité publique ? Contrepoints, Wikibéral et nos autres projets sont librement accessibles et destinés à informer le grand public. Notre trésorier peut donc vous fournir un reçu fiscal qu’il suffit de reporter en case 7UF de votre déclaration d’impôt : ainsi chaque don fait à notre association ne vous coûte qu’un tiers du montant versé, les deux tiers restants sont tout bonnement effacés de votre ardoise fiscale !

 

 

Pour le dire de manière plus provocante : non seulement votre don nous permet de sensibiliser sur l’urgence de faire RECULER l’État, mais la majorité de cet argent lui passe sous le nez dans le même mouvement, et avec son accord. Pourquoi se priver de cette double bonne action ?

EXEMPLE : en donnant 120 euros, il ne vous en coûte que 40 euros, employés à défendre vos idées. Plus important : vous privez les bureaucrates de Bercy de 80 euros.

 

La contre-offensive libérale couve déjà

Nos équipes de bénévoles et notre rédaction salariée travaillent inlassablement pour que chaque jour le paysage médiatique français puisse savoir ce que pensent les libéraux (à ce sujet lisez notre rapport annuel 2023), mais sans votre aide nous ne pourrons pas continuer sur cette lancée. Notre discours est certes moqué et souvent ignoré, mais cela est en train de changer.

Pensez à l’élection triomphale de Javier Milei, candidat authentiquement libertarien : si un pays historiquement socialiste comme l’Argentine a voté en conscience pour un programme de rigueur budgétaire et coupes claires dans les ministères inutiles, les Français le comprendront aussi. 

Si vous hésitez encore, nous vous rappelons que tous les moyens de paiement sont acceptés : chèque, carte bancaire, virement, Paypal, et même bitcoin (non éligible à la déduction). Mais ne tardez pas : il vous reste à peine dix jours pour que ce don réduise vos impôts dès l’an prochain. Il ne reste donc qu’à vous demander :

Où votre argent durement gagné sera-t-il mieux employé : dans le seul média authentiquement libéral, ou dans les poches trouées du trésor public ?

Vous connaissez déjà la réponse.

 

Loi immigration : en finir avec l’État-providence ?

Le système de protection sociale français se caractérise par une grande et excessive générosité à l’égard des immigrés. Les récents débats sur la loi immigration, qui a abordé plusieurs volets tels que le travail, l’intégration, l’éloignement ou encore l’asile, ont mis en lumière la difficile recherche de consensus sur la question.

Parmi eux figuraient des propositions telles que la révision de l’aide médicale d’État (AME), la régulation des sans-papiers dans les métiers en tension, le durcissement du regroupement familial et de l’accès à la nationalité française, et d’autres mesures censées encadrer plus strictement l’immigration. Rejetée par l’Assemblée nationale en première lecture et adoptée par le Sénat après modification, la proposition de loi a été envoyée en Commission mixte paritaire (CMP) par le gouvernement.

 

Les limites de l’État providence français

Un constat se dégage : le modèle de l’État-providence a atteint ses limites.

Une nouvelle loi ne pourra résoudre, à elle seule, les problèmes complexes liés à l’immigration sans une réforme structurelle de notre système. Selon un dernier sondage Ifop, l’immigration clandestine, le coût économique de l’immigration, et l’intégration préoccupent le plus les Français lorsque l’on évoque ce sujet. La France a effectivement connu un assouplissement notable de sa politique migratoire depuis les années 1980. L’ère mitterrandienne a posé les prémices de cet État-providence qui favorise la régularisation du plus grand nombre. Aujourd’hui, l’assistance prime sur l’intégration : allocation de demandeur d’asile (ADA) versée pendant la durée de traitement du dossier ; revenu de solidarité active (RSA) pour les étrangers réguliers après cinq ans de détention d’un titre de séjour ; allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) pour les réfugiés de plus de 65 ans ; aide médicale d’État (AME) pour les clandestins présents sur le sol français depuis trois mois ; sans mentionner les multiples autres aides au logement ou facilités pour les transports.

La France se démarque de la plupart des pays européens en octroyant des aides quasiment identiques aux étrangers réguliers et aux nationaux, que ce soit en termes de minima sociaux (RSA), de protection maladie, de logement ou encore d’allocations familiales. Un rapport publié en mars 2023 par le think tank Fondapol démontre qu’il est le plus permissif de l’Union européenne en matière d’asile et d’immigration. Par exemple, elle offre l’ADA la plus élevée parmi ceux qui l’octroient (soit 426 euros par mois en l’absence d’hébergement). Contrairement à des pays comme l’Allemagne ou l’Autriche, le regroupement familial n’est pas conditionné à la maîtrise du français par le résident ou sa famille. Plus encore : la durée de résidence minimale est la plus faible d’Europe – cinq ans – contre le double en Autriche, en Espagne, en Lituanie, en Pologne, en Slovénie ou en Italie. Quant au taux d’obligations de quitter le territoire français (OQTF), il ne s’élève qu’à 12 % entre 2015 et 2021, contre 43 % dans la moyenne des pays de l’Union. La France est aussi le seul pays à délivrer des cartes de séjour temporaires pour raisons de santé.

 

La question culturelle

Ces politiques n’ont pas que des conséquences financières pour les comptes publics ; elles soulèvent également des difficultés d’ordre culturel.

On ne peut parler honnêtement d’immigration sans prendre en compte la montée de l’islamisme et les problématiques croissantes d’intégration. Les soutiens massifs et décomplexés de l’attaque terroriste du Hamas contre l’État d’Israël illustrent l’importance du fait ethnique et religieux, et l’inconséquence des responsables politiques ayant encouragé une certaine forme d’immigration en faisant fi des incompatibilités culturelles. L’immaturité de notre système politique, marqué par la verticalité, l’opposition permanente et la quasi-impossibilité de parvenir à un consensus, ne fait qu’accroître les crispations au sein de la société française.

La France aurait tout intérêt à s’inspirer de pays plus démocratiques comme la Suisse.

En Helvétie, il est d’usage de considérer que l’effort d’intégration doit venir de l’immigré, et non de la société qui l’accueille. Cette approche est bien plus efficace, puisque contrairement aux idées reçues, près d’une personne sur quatre est de nationalité étrangère (environ 25 % contre 10 % en France), sans que cela ne semble poser de problèmes majeurs. Tout d’abord, l’absence d’État-providence a un impact direct sur la nature de l’immigration : en l’espace de vingt ans, la Suisse a connu un accroissement d’une immigration hautement qualifiée. Ensuite, les initiatives populaires sont au cœur de sa tradition démocratique, de sorte que la population puisse régulièrement s’exprimer sur les politiques migratoires selon les cantons, sans attendre le fait du Prince. Il ne s’agit que de choix politiques.

Sondage : votre idée, notre enquête !

Chers lecteurs, au lancement de Contrepoints en 2010 nous voulions proposer un média décentralisé, à l’écoute de tous les Français, proche de vos préoccupations réelles et des tracas quotidiens que l’État vous impose soi-disant pour votre bien. L’an dernier nous vous demandions un avis sur Contrepoints pour nous améliorer (plus d’annonces à ce sujet d’ici 2024).

Allons plus loin cette année en faisant appel directement à vos suggestions : quels sujets vous semblent assez importants pour mériter une enquête dans nos colonnes ?

L’élite médiatique subventionnée sort rarement de la capitale et prétend éduquer ses lecteurs, mais elle reflète surtout ses propres biais, tandis qu’Hayek nous apprend que la connaissance se trouve dispersée en chacun de nous. Votre profession, votre environnement, votre entourage, vos voyages, tout cela vous donne une perspective qu’ils ne pourront jamais avoir seuls.

Donnez-nous des idées de sujets pas, peu ou mal traités par le reste de la presse et que vous savez importants dans le monde réel. Nous sélectionnerons les meilleures suggestions et enquêterons dessus avec rigueur et indépendance en 2024, afin que nos confrères et leurs lecteurs ne puissent plus ignorer votre vécu.

 

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Enquêter demande des moyens humains et financiers, de même que publier et diffuser le plus largement possible les articles qui en résulent. Il nous reste encore 50 000 euros à récolter d’ici le 31 décembre pour assurer notre fonctionnement et faire entendre la voix des libéraux en 2024. Êtes-vous prêt à nous soutenir ? Cela prend moins de 5 minutes, et la déduction fiscale pour les résidents français vous permet de réduire votre impôt sur le revenu tout en nous aidant à défendre des baisses de dépenses publiques.

 

LFI & RN : la théorie du fer à cheval est-elle si pertinente ?

Peut-on dire que la motion de rejet du projet de loi immigration votée le 11 décembre 2023 est une illustration de la théorie du fer à cheval ? Forgée dans les années 1970, elle considère le spectre politique sous la forme d’un arc de cercle dont les extrémités gauche et droite se rejoignent. Mais disons-le d’emblée, la « horseshoe theory » est moins un postulat étayé qu’un jugement spontané. Il a pourtant eu l’intérêt de mettre la lumière sur la structure de l’offre et de la demande politique. Côté demande, si un tiers des électeurs de La France Insoumise (LFI) ont choisi de voter pour Emmanuel Macron au second tour des présidentielles de 2022, 43 % d’entre eux se sont abstenus[1]. Côté offre, n’avons-nous pas vu LFI et le Rassemblement national (RN) soutenir le mouvement des Gilets jaunes ou rejeter le projet de loi de réforme des retraites ?

Soutenir la thèse d’une similitude doctrinaire des extrêmes serait verser dans le syllogisme. La proximité idéologique de deux partis politiques ne peut se mesurer uniquement à des prises de position ponctuelles. C’est une condition probablement nécessaire, mais loin d’être suffisante, pour au moins trois raisons. D’abord parce que la démocratie accorde une place essentielle à l’opposition. Il est sain dans une société que l’individu puisse devenir citoyen et se dresser contre ce qui lui parait injuste. Afin d’endiguer le risque de la tyrannie de la majorité, la théorie libérale prévoit d’institutionnaliser le conflit, c’est-à-dire de protéger celui qui se refuse à adhérer à l’avis des autres. À la suite de Marc Sadoun, on se rappellera la maxime suivante dont Benjamin Constant a la paternité : « Si tous les hommes moins un partageait la même opinion, ils n’en auraient pas pour autant le droit d’imposer silence à cette personne, pas plus que celle-ci, d’imposer silence aux hommes si elle en avait le pouvoir[2] ».

En deuxième lieu, la proximité politique des partis qui se situent aux extrémités du spectre politique peut s’étudier de façon objective, ce qui signifie qu’elle est mesurable. La base de données DatAN met à notre disposition de précieuses informations sur la vie parlementaire. On peut y recueillir la répartition des votes qui rythment le calendrier législatif. Arrêtons-nous sur les 39 textes recensés pour la XVIe législature, amorcée en juillet 2022. Le RN a voté à 24 reprises avec la NUPES, et à 17 reprises avec Renaissance (RE), le groupe de la majorité présidentielle. DatAN fournit une classification des votes en fonction du thème des textes[3]. En économie, le RN et la NUPES se sont plus fréquemment rejoints (8) que le RN et RE (2). Il en est de même dans le domaine des affaires étrangères et européennes (RN-NUPES : 4 ; RN-RE : 0) ou dans celui des Affaires sociales et de santé (RN-NUPES : 9 , RN-RE : 4).

La proximité idéologique des extrêmes peut enfin s’étudier du point de vue du contenu de leurs propositions. On trouve dans la recherche anglo-saxonne, hélas trop souvent caricaturée par nombre de nos universitaires locaux, des enquêtes d’une utilité certaine. Une équipe de politistes a mis au point la PopuList, une banque d’informations qui établit le caractère populiste et eurosceptique des partis européens depuis 1989. Elle établit que le RN et la NUPES sont des partis populistes, eurosceptiques et respectivement d’extrême gauche et d’extrême droite. La définition du populisme à partir de laquelle le classement est construit nous intéresse : « Les partis populistes sont ceux qui soutiennent l’ensemble d’idées selon lequel la société est finalement divisée en deux groupes homogènes et antagonistes, les « gens purs » contre « l’élite corrompue » et affirment que la politique devrait être une expression de la volonté générale du peuple[4] ». Souvent, ils partagent un euroscepticisme plus ou moins exacerbé selon la conjoncture. Dans un second temps, les chercheurs qui ont forgé cet inventaire caractérisent différemment le populisme des extrêmes gauche et droite. Le premier est fondé sur un rejet du capitalisme et sur le désir de rénovation totale des institutions existantes. Le deuxième sur un nationalisme « nativiste » – dans cette optique, l’État doit être « exclusivement habité par les autochtones » – et autoritaire. Les plus perspicaces l’auront deviné, la LFI et le RN cochent les cases. Ce travail a le mérite de dépasser la théorie du fer à cheval car il pointe les différences de ces partis tout en fixant leurs dénominateurs communs.

Pour enfoncer le clou, j’importerai à ces observations le raisonnement de Gérald Bronner. Selon lui, « la spécificité de la pensée extrême tiendra au fait qu’elle adhère radicalement à une idée radicale[5] ». Un extrémiste défend inconditionnellement des positions qui sont intrinsèquement radicales. Mais comment alors jauger la radicalité d’une idée ? Dans le sillage de Raymond Boudon, Bronner définit les idées radicales comme « faiblement transsubjectives » et fortement « sociopathique ». La transsubjectivité d’une idée correspond à sa « capacité à être endossée par un ensemble de personne ». En ce sens, malgré leur irrationalité objective – par exemple : la terre est plate – certaines idées peuvent avoir du succès sur le marché cognitif. Les idées extrêmes sont faiblement transsubjectives. Elles sont peu convaincantes car éloignées de la vérité scientifique. Une idée sera sociopathique si elle contient une dimension conflictuelle. Elle interdit la coexistence entre des blocs de la société qu’elle voit comme antagoniste (par exemple riches et pauvres, étrangers et autochtones etc.).

Le 16 décembre, Manuel Bompard a prononcé la phrase suivante : « Notre projet politique, c’est de renverser le capitalisme dans la septième économie mondiale, et ça ne se fera pas avec des bouquets de fleurs ». Rien que ça. L’objectif du député de LFI serait-il donc de faire passer la 7e économie mondiale au 57e rang ? En plus d’espanter les Hommes de raison, cette déclaration concorde avec les définitions de la PopuList et de l’héritage boudonien. Mais n’allez pas croire que ce dérapage n’est pas programmé. On pourrait faire le florilège des affirmations sensationnelles de la gauche extrême. Elles s’inscrivent dans une stratégie assumée de conflictualisation du politique, imaginée par la chercheuse Chantal Mouffe. Qu’a-t-elle trouvé, cette politiste belge dont les titres de livres ne donnent pas envie de les disposer au pied d’un sapin de Noël ? Au choix, pour pimenter vos fêtes vous pourrez trouver dans L’illusion du consensus (2016), ou dans Pour un populisme de gauche (2019), un tutoriel pour conquérir le pouvoir en faisant revivre la conflictualité entre les familles politiques. Du combat entre le peuple opprimé et les élites néolibérales corrompues, la gauche devrait sortir victorieuse. C’est en peu de mots le résumé caricatural de la pensée caricaturale qui guide l’attitude démagogiques de LFI. Pourquoi marcher contre l’antisémitisme quand on peut défiler au son d’un mélodieux « Dieu est grand ! » dans Paris ?

Mais ne faisons pas de jaloux. L’extrême droite ne s’est pas épargnée de retentissantes sorties tribuniciennes. Voyons-voir la dédiabolisation. Dès la deuxième minute de son débat avec Mathilde Panot, Marion Maréchal annonce sans mauvais jeu de mots la couleur : « Ce débat politique qui va nous confronter ce soir est le grand débat politique des prochaines années. C’est un véritable enjeu de civilisation qui va se jouer […]. Moi je suis contre la disparition de la France, sous le poids de l’immigration et de l’islamisation, vous vous en félicitez, vous l’encouragez, vous l’accélérez. Je suis contre le phénomène de grand remplacement de la population et de la culture française…[6] ». La théorie du grand remplacement, forgée par Renaud Camus est un archétype de la pensée extrême. Faiblement transsubjective car scientifiquement démontée et sociopathique car il n’est pas chaleureux d’être xénophobe dans la vie politique, elle s’accroche au populisme de droite comme une moule à son rocher. On avait presque oublié que le lepénisme dispose également de ses intellectuels. Ne les traiteraient-on pas d’académo-militants s’ils enseignaient leurs pseudo-vérités à l’Université ? Ce n’est pas la question à laquelle je souhaite répondre aujourd’hui, mais elle permet de souligner la présence d’idéologues néfastes de ce côté-ci également du spectre politique.

Extrême gauche et extrême droite s’équivalent-ils ? Non, tout n’est pas relatif. Mais qu’ils soient anticapitalistes, nativistes ou eurosceptiques les populismes sont des antithèses de la pensée libérale et par là du projet républicain. Radicalement radicaux, dangereusement sociopathiques, leur montée en puissance nous impose le retour permanent à une lucidité rigoureuse et au sang froid de la raison. Cela implique, lorsqu’il s’agit de les affronter, de ne pas les renvoyer dos à dos comme les deux faces d’une même pièce, mais bien de forger des argumentaires singuliers pour répondre à chacun d’eux. Les vases ne communiquent probablement pas. Si c’était le cas, la tâche qui incombe au libéralisme serait plus simple. En réalité, il a affaire à deux ennemis distincts, aux visages distincts. Préférons la métaphore du funambule. Sur son flanc gauche, le péril anticapitaliste. Sur son flanc droit, le péril ultranationaliste. Au sol, la fosse aux lions.

[1] IPSOS, Second tour : profil des abstentionnistes et sociologie des électorats, https://www.ipsos.com/fr-fr/presidentielle-2022/second-tour-profil-des-abstentionnistes-et-sociologie-des-electorats

[2] Marc Sadoun, « Opposition et démocratie », Pouvoirs, Le Seuil, 2004

[3] Sur ce point précis, le site n’explique cependant pas sa méthodologie, ce qui peut s’avérer problématique concernant certains textes

[4] https://www.cambridge.org/core/journals/british-journal-of-political-science/article/populist-a-database-of-populist-farleft-and-farright-parties-using-expertinformed-qualitative-comparative-classification-eiqcc/EBF60489A0E1E3D91A6FE066C7ABA2CA

[5] Gérald Bronner, « A la recherche de la pensée extrême », Cités, Presse Universitaire de France, p. 141-150

[6] Mathilde Panot/Marion Maréchal, le débat, BFM TV, https://www.youtube.com/watch?v=OdCvq3ViEsM&t=1307s

Loi immigration – un texte détricoté au pied du sapin

« Depuis des semaines, la loi immigration a été tricotée, détricotée et à l’arrivée, tout le monde la trouve moche. Finalement, cette loi, c’est un peu un pull de Noël. »

Ce bon mot de l’humoriste Philippe Caverivière sur France 2 samedi soir résume parfaitement le sac de nœuds – ou de laine – qu’est devenu ce qui devait être un des piliers du second quinquennat Macron.

Lors de mon dernier billet sur le sujet il y a maintenant plus d’un mois, nous nous étions quittés sur le texte voté par la majorité Les Républicains au Sénat, chambre représentant les territoires souvent les plus durement touchés par la problématique.

L’immigration touche des sujets aussi vastes et différents que le social, l’économie, la culture, la sécurité et le climat, la question de l’impact des catastrophes météorologiques innervant l’histoire de l’immigration depuis le jour où les Hommes ont appris à se mouvoir sur de longues distances.

L’étendue des sujets touchés par la thématique n’a d’égale que l’impossibilité d’y apporter des solutions simplistes comme on peut les lire ici et là, à grands coups de positions « ultra simples » ou de remèdes prétendument réalistes.

Le texte voté au Sénat n’y fait pas exception, et a provoqué plusieurs rebondissements.

 

La gauche vent debout

Nous nous étions quittés après le vote par les sénateurs d’un texte renforcé supprimant l’AME, instaurant des quotas économiques et abrogeant la mesure phare du projet de loi : l’obtention automatique de titre de séjour pour les travailleurs exerçant des métiers en tension.

Ce texte a instantanément entraîné une levée de boucliers d’associations et d’organismes vivant grassement d’argent public.

La directrice générale de France Terre d’Asile (50 millions d’euros de dotations annuelles, ce qui en fait l’association la plus subventionnée du pays), dont la présidente est l’ancienne ministre socialiste Najat Vallaud-Belkacem, a dénoncé un « catalogue des horreurs ».

Depuis début décembre, ce sont une quarantaine d’associations qui manifestent leur mécontentement devant le texte adopté au Sénat.

Du côté du Défenseur des droits, énième autorité administrative indépendante destinée à masquer les lacunes de notre système judiciaire, l’actuelle titulaire du poste, Claire Hédon, a dénoncé une « surenchère démagogique ».

À ces réactions se sont ajoutées celles de la Macronie. Dès le lendemain du vote, cette dernière a immédiatement appelé à un « rééquilibrage », pour reprendre les propos de la ministre déléguée à la lutte contre les discriminations Bérangère Couillard soutenue par le président de la commission des lois Sacha Houlié, déterminé à rétablir le texte initialement porté par le gouvernement.

Les députés de la majorité sont alors sommés par plusieurs soutiens du président de la République, Daniel Cohn-Bendit en tête, de mettre fin à ce qui est vu comme une « dérive dangereuse ».

 

Darmanin défait par LR

Ces réactions n’ont pas empêché les débats de continuer. Après avoir été présenté en commission des lois, le texte est débattu dans l’Hémicycle.

Un texte ainsi revu et dénoncé par LR comme un texte « au rabais ». De ce fait, les députés de droite ont voté le 11 décembre la motion de rejet déposée par les écologistes. Cette motion est destinée à rejeter avant tout débat un texte qui serait susceptible d’enfreindre manifestement une disposition constitutionnelle, ou de décider qu’il n’y a pas lieu de délibérer.

Cette motion est votée, essentiellement du fait de l’absence de neuf députés de la majorité, dont l’un a subi les affres de la SNCF, l’amenant à avoir 1 heure 30 de retard. Aussi ironique qu’exquis.

Suite à ce camouflet, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a présenté sa démission au président de la République, qui l’a refusée. Certaines mauvaises langues estiment alors que s’il l’avait présenté à Elisabeth Borne, celle-ci l’aurait vraisemblablement acceptée. La vraie raison est institutionnelle, le pouvoir de nomination et de révocation des ministres relevant de l’Élysée avec contreseing du Premier ministre.

Le vote de cette motion est une nouvelle victoire pour Les Républicains après le vote sénatorial. Une victoire d’autant plus forte qu’elle a mis en déroute un de ses parjurés les plus médiatiques. Depuis le début des discussions, le parti gaulliste s’est positionné en point d’équilibre entre le gouvernement et le Rassemblement national, tout en faisant du sujet migratoire un cheval de bataille, un mois et demi après le lancement d’une pétition qui a pour l’instant recueilli plus de 24 300 signatures au moment où ces lignes sont écrites.

 

Le retour de l’hyperprésidentialisme

Dans une France qui n’a plus l’habitude de la vitalité de la démocratie parlementaire, cette séquence est considérée par certains journalistes et élus comme une « crise politique », terme utilisé pour désigner tout événement qui dévierait de la volonté du Prince.

Conformément à la pratique hyperprésidentialiste à laquelle notre république nous a tristement habitués, ce même Prince, clé de voûte des institutions qui dévie aujourd’hui largement de son centre de gravité, n’a pas hésité à s’immiscer dans les travaux parlementaires en rejetant l’usage de l’article 49.3, sur lequel les Sages n’ont pas apporté de réponse claire, tout en appelant les députés à voter le texte avant Noël, quelques jours avant la réunion de la commission mixte paritaire.

 

Un espoir nommé commission mixte paritaire

Cette dernière s’est réunie ce lundi 18 décembre pour un vote en milieu de semaine.

La commission mixte paritaire réunit sept députés et sept sénateurs nommés par les présidents des chambres en respectant scrupuleusement les équilibres politiques. Cet équilibre peut se résumer ainsi : la Macronie dispose de trois parlementaires sur 10, comme LR aidé par sa majorité au Sénat, tandis que la NUPES compte pour un quart des parlementaires et le Rassemblement national, 10 % avec 88 députés et 4 sénateurs sur un total de 925 parlementaires.

De ce fait, la commission mixte paritaire sera composée comme suit : 5 macronistes, 5 LR, 3 NUPES et 1 Rassemblement national.

De cette commission, dont nous n’avons pas le résultat au moment où nous écrivons ces lignes, ne peut émerger que trois réponses :

  1. Soit les parlementaires se mettent d’accord, et le texte est voté en séance
  2. Soit les parlementaires se mettent d’accord, mais le texte est rejeté en séance
  3. Soit les parlementaires ne se mettent pas d’accord

 

Cette dernière option arrivant une fois sur trois, l’avenir du texte est plus que jamais incertain.

 

La solution référendaire

Pourtant, le pays pourrait sortir de cette incertitude d’un outil qui n’a pas été utilisé depuis plus de 18 ans : le référendum, porté depuis longtemps par la droite. Un temps étudié par l’Élysée fin octobre pour obtenir les voix LR, la perspective de sortir du débat par la consultation des Français n’a pas été retenue faute de consensus politique, et par crainte d’une réponse nécessairement « populiste » à la manière de l’ancien ministre et défenseur des droits Jacques Toubon.

Pourtant, ce référendum permettrait de proposer un grand débat afin de libérer la parole et de sortir d’une chape de plomb démocratique sur un sujet, à tort, tabou dans le débat public français, et qui ne fait que nourrir les préjugés et les relents complotistes en remettant au cœur du débat la question du consentement qu’une certaine gauche adore arborer, à raison, dans certains domaines, mais qu’elle refuse lorsqu’il s’agit de demander aux individus qui ils souhaitent accueillir chez eux et de quelle manière.

Iran : 40 ans de crimes impunis, 40 ans de résistance pour la liberté

Bien que le récent rapport choquant d’Amnesty International sur les tortures sexuelles infligées aux détenus de la révolte de 2022 en Iran ait mis en lumière la cruauté du pouvoir clérical en Iran, rares sont ceux qui, dans ce pays, aient échappé à cette violence d’État venue du fond des âges.

La première confrontation des combattants de la liberté avec les mollahs remonte à 1980 quand Téhéran et d’autres villes étaient le théâtre d’une lutte pacifique en faveur des libertés et des droits fondamentaux. Lorsque Khomeiny a vu que les femmes et les jeunes rejoignaient massivement les opposants, en particulier l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran, l’OMPI, il a ressenti une grave menace.

Dans une allocution publique le 25 juin 1980, après un rassemblement massif de l’OMPI au cœur de la capitale, il a martelé :

« Notre ennemi n’est pas en Amérique, ni en Union soviétique, ni au Kurdistan, mais ici-même, sous nos yeux, à Téhéran. »

À la fois démocratique et musulmane, l’OMPI a attiré des centaines de milliers de jeunes, surtout des femmes, en prônant l’égalité des genres. Cela a posé un défi majeur aux fondations misogynes de la République islamique, instaurée par Khomeiny.

Lorsque la dictature naissante a fait exécuter des adolescentes pendant le soulèvement de l’été 1980, Khomeiny a émis une fatwa stipulant qu’il fallait violer les vierges avant de les fusiller pour leur barrer le chemin du paradis. Le viol ainsi consacré s’est généralisé, n’épargnant aucune génération. Des milliers de filles et de garçons ont été livrés aux poteaux d’exécution sans même avoir été identifiés. Les mollahs sont allés jusqu’à demander aux parents des victimes de payer pour récupérer les corps. C’est à cette époque qu’une fatwa de Khomeiny a annoncé qu’il ne fallait respecter ni la vie ni les biens de toute personne liée à l’OMPI.

 

Quarante années de fatwas

Une autre confrontation majeure a eu lieu en 1988.

Le régime estimait que si les dizaines de milliers de prisonniers politiques qu’il détenait étaient libérés à la fin de leur peine, ils deviendraient un moteur puissant pour mobiliser la population. D’autant plus que les Iraniens étaient laminés par huit années de guerre inutile, et que Khomeiny, dans la défaite, voyait sa chute imminente.

Aussi a-t-il décidé à nouveau de recourir à un massacre massif pour se maintenir en place. Il a lancé une fatwa annoncant que quiconque maintenait son soutien à l’OMPI ou s’opposait au régime devait être exécuté. Il ne savait pas que cette fidélité allait se transformer en emblème de résistance et de liberté. En l’espace d’un été, des procès minutes ont envoyé à la mort quelque trente mille jeunes prisonniers politiques, dont beaucoup avaient déjà purgé leur peine. Les corps ont été ensevelis sans distinction dans des fosses communes secrètes. Ils ont été exécutés, non pas en raison de leurs actions, mais pour leurs opinions opposées à celles de la dictature religieuse.

Il est donc vrai de dire que l’ennemi du régime iranien n’est pas l’Amérique ou Israël, mais la résistance iranienne pour la liberté. Cependant, le massacre est devenu une réalité dans la conscience de la société iranienne. Les parents et les proches des victimes recherchent toujours leurs tombes. Ils restent fascinés par ce qui leur reste, des montres brisées aux aiguilles bloquées sur le moment de l’exécution.

 

Les femmes pionnières de la lutte pour la liberté

Ebrahim Raïssi, actuel président du régime iranien, et d’autres hauts responsables sont impliqués dans ce massacre. C’est lui qui, des années après, a déclaré que ceux qui adhèrent aux idéaux des victimes sont condamnés à mort. Et des individus de son acabit ordonnent des sévices cruels dans les rues, les prisons et les maisons « sécurisées »… Le régime iranien cherche à détruire la résistance pour la liberté.

Face à une telle monstruosité émergeant des ténèbres, les femmes en Iran se sont placées en première ligne de la résistance ; car la survie du régime dépend aussi de l’hostilité envers les femmes et de la discrimination sexuelle. C’est pourquoi les mollahs infligent les pires tourments aux femmes Ce régime clérical n’est pas seulement l’ennemi du peuple iranien, il est aussi en guerre contre l’humanité.

Si l’ampleur des crimes des mollahs, comme le reflète le rapport d’Amnesty International, est illimitée, les sacrifices de la génération qui lutte pour la liberté sont également illimités. L’audace des résistants repose sur le fait qu’ils tentent de viser la tête de l’hydre de l’intégrisme et du terrorisme à Téhéran.

L’impunité du régime iranien

La communauté internationale n’est pas consciente des conséquences de la politique de complaisance avec la dictature religieuse, une politique dont ce régime tire pleinement parti pour faire du chantage, lancer des actes terroristes et prendre en otage les gouvernements occidentaux et leurs principes éthiques. Les événements des derniers mois et la guerre à Gaza, avec des milliers d’enfants innocents tués, sont le résultat direct de cette politique de complaisance. Les mollahs utilisent toujours leur impunité et leurs moyens diplomatiques pour s’ingérer dans les pays du Moyen-Orient et mener leur terrorisme en Occident.

Au niveau international, il est temps de mettre fin à l’impunité de quarante années des mollahs et les traduire en justice pour leurs crimes contre l’humanité. Khamenei, Raïssi et autres responsables du massacre de 1988, ainsi que ceux qui ont ordonné le meurtre de jeunes Iraniens lors des récentes manifestations, en particulier les commandants des pasdarans, doivent être jugés devant la Cour pénale internationale.

Libéralisme et sexualité : qu’en disaient les libéraux du XIXe siècle ?

Le libéralisme classique français a été porté par des auteurs presque exclusivement masculins, et qui pour certains des plus fameux (Turgot, Bastiat, Tocqueville) n’ont pas laissé de postérité : ce qui devrait engager à ne pas rechercher leur opinion sur la sexualité. C’est pourtant ce que je ferais, et la démarche n’est peut-être pas vaine.

 

Les premières conceptions religieuses

Aux premiers âges de l’histoire de l’humanité, la sexualité, incomprise, est déifiée : des autels sont dressés devant des pierres d’apparence phallique, où l’on s’agenouille avec dévotion, et où les filles viennent se frotter lascivement le ventre. Étant source des plus grands plaisirs, elle devient aussi l’objet de pratiques sacrificielles, soit par l’abstinence et la privation, soit par des mutilations dont la circoncision juive et l’excision africaine sont vraisemblablement des formes (Benjamin Constant, De la religion, t. I, 1824, p. 257).

Supposément pleine d’impureté, l’union des sexes est exclue des conceptions vraiment sublimes. Les Égyptiens tiennent que le dieu Apis est le fruit d’une jeune vache encore vierge, fécondée par le Soleil. En Inde, Krishna naît sans accouplement, mais par l’intervention d’un cheveu abandonné par Vishnu. Chez les chrétiens, Jésus, fils de la vierge Marie, est conçu du Saint-Esprit. C’est qu’en s’incarnant la divinité ne saurait se rabaisser à naître d’un acte tenu pour honteux (Idem, t. IV, 1831, p. 283-285).

Le commerce charnel est une souillure, et la faute en est placée principalement sur la femme. C’est toujours elle, dans les religions, qui pousse l’humanité à sa perte, et qui comme Ève corrompt l’homme. Sur elle pèse une double réprobation morale (Idem, t. III, 1827, p. 147).

 

La liberté de la sexualité récréative

À rebours, le libéralisme doit se conduire, non par les préceptes religieux, mais par les faits. Il n’a pas besoin de recommander le passage devant un prêtre pour que l’accouplement ne soit pas obscène et immoral, ou d’éloigner la nouvelle épouse de son milieu pour rejeter dans un lointain commode la faute qu’on vilipende (Yves Guyot, Études sur les doctrines sociales du christianisme, 1873, p. 119).

Le désir sexuel répond à un besoin immédiat de l’espèce : la nature a besoin que les êtres soient doués d’une force d’expansion surabondante, et que leurs penchants à la reproduction soient très développés. C’est ensuite à eux à en régler l’accomplissement, d’après leurs désirs et leurs forces.

Pour limiter la mise au monde d’une tourbe de misérables, Malthus (un prêtre anglican) recommandait dignement la contrainte morale, c’est-à-dire l’abstinence, et le mariage tardif. Au sein du libéralisme français, Joseph Garnier et Charles Dunoyer (plutôt libres-penseurs) réclament autre chose encore : la substitution de la morale de la responsabilité et du plaisir innocent au dogme du renoncement chrétien. La sexualité récréative, disent-ils, n’est ni immorale ni coupable : elle entre dans la catégorie des actes vains, si l’on veut, mais non des actes nuisibles, les seuls dont la morale et les lois doivent s’occuper (Charles Dunoyer, Mémoire à consulter, etc., 1835, p. 177 ; Joseph Garnier, Du principe de population, 1857, p. 93).

Pratiquer, en termes savants, l’onanisme ou coitus interruptus, et l’acte solitaire, n’est pas répréhensible. Mais pour tous ces auteurs, l’avortement reste un crime, car il interrompt la vie d’un être en développement. Partout, il faut équilibrer la liberté par le consentement et la responsabilité.

 

La question du consentement

La sexualité libre ne peut être fondée, en toute justice, que sur le consentement des parties. Elle ne peut pas non plus s’émanciper des contrats et des promesses verbales, et par conséquent l’adultère est répréhensible.

Le mariage se fonde sur un contrat, qui doit être respecté. C’est un consentement global à une union de vie, et il emporte avec lui une certaine acceptation tacite de rapports, qu’il est difficile de définir. Mais les actes individuels qui sont refusés, ne peuvent être accomplis.

La difficulté pratique de fixer les bornes du consentement sexuel est très réelle. L’union des sexes se fait par acceptation non verbale, comme aussi par étapes, et sans contrats. Une difficulté plus grande s’élève même quand il s’agit de sanctionner les infractions commises. Car les actes qui se passent dans l’intérieur du foyer échappent presque toujours à l’atteinte des magistrats, sauf s’ils conduisent à des marques de violences graves, par lesquelles on peut distinctement les reconnaître (Charles Comte, Traité de législation, t. I, 1826, p. 478).

La question de l’âge est aussi très embarrassante. À l’évidence, la limite numérique des dix-huit ans, par exemple, n’est pas plus rationnelle qu’une autre. Mais tant qu’une limite numérique subsiste, et tant qu’elle n’a pas été remplacée par une autre fondée sur les faits et les individus, cette limite doit être respectée.

 

Les contrepoids de la responsabilité

La liberté sexuelle a besoin d’être contenue par la responsabilité individuelle ; mais les moyens pour cela doivent être bien entendus. Jusqu’à une époque récente, des lois ont existé pour interdire le mariage à l’indigent, sous le prétexte qu’il fallait endiguer le paupérisme (G. de Molinari, La Viriculture, 1897, p. 177-180.). C’est le principe de précaution appliquée à la procréation.

La responsabilité bien entendue suit les actes, et ne les précède pas. Quand un chétif commerçant se donne douze enfants pour lui succéder, c’est à lui, et pas à d’autres, à fournir les moyens de les élever : les contribuables n’ont rien commandé, rien acquiescé de tel. Une responsabilité légale pèse sur lui, par suite de ses actes. Il peut la partager par l’assurance et l’assurance et la mutualité, mais non l’éteindre (Edmond About, L’Assurance, 1866, p. 112).

Celui qui cherche à échapper à cette responsabilité doit y être ramené par la loi. C’est la question de la recherche de la paternité, qu’ont soulevée avec beaucoup d’ardeur les libéraux classiques français (voir notamment Société d’économie politique, réunion du 5 octobre 1877.). Car on ne peut pas faire impunément banqueroute de ses obligations.

 

Les industries de la prostitution et de la pornographie

Chaque individu est propriétaire de lui-même, et si les mots ont un sens, ils signifient le droit d’user et d’abuser de notre propre corps, de nos facultés (Jules Simon, La liberté, 1859, t. I, p. 308). La prostitution, la pornographie, ne sont pas répréhensibles tant qu’elles s’exercent dans le respect des contrats, avec le consentement total des parties.

Fût-elle libre, on pourrait encore réprouver moralement l’industrie de la prostitution, mobiliser l’opinion contre elle, et même demander qu’elle soit classée dans la catégorie des industries dangereuses et insalubres, et soumise à des règles spéciales de localisation, de publicité, etc (G. de Molinari, La Viriculture, 1897, p. 239). Les mêmes impératifs de discrétion dans l’espace public peuvent être étendus à la pornographie (Frédéric Passy, réunion de la Société d’économie politique du 5 septembre 1891).

 

L’homosexualité

L’homosexualité, quoique dans la nature, n’est pas dans l’intérêt de l’espèce. On peut à la rigueur la réprouver moralement, sur cette base (G. de Molinari, La morale économique, 1888, p. 413). Mais sa pratique étant inoffensive pour les tiers, elle doit être tolérée par les lois. Et si ce n’est pas l’enseignement des anciens auteurs, c’est la suite logique de leurs principes.

Car encore une fois, pour traiter de ces questions, il ne faut pas autre chose que des principes.

La surveillance devient le prix à payer pour vivre en France

Article disponible en podcast ici.

Jadis, seuls les criminels se retrouvaient sur écoute. La traque du citoyen par les bureaucrates était une exception. Les surveillances de masse étaient réservées aux régimes totalitaires, impensables dans nos démocraties.

Or depuis le 11 septembre, nos gouvernements nous considèrent tous comme des potentiels criminels qu’il faut espionner constamment. Et toute comparaison aux régimes totalitaires fera glousser nos fonctionnaires devant une telle allusion.

J’ai déjà longuement commenté cette dérive à travers les dernières actualités comme la volonté d’interdire les VPN, de mettre un mouchard dans nos navigateurs, d’interdire le chiffrement, de l’égaliser la reconnaissance faciale, d’interdire les cryptomonnaies.

Tous ces abandons de nos droits ont été faits en 2023, vous pouvez constater l’imagination sans limites de nos bureaucrates dans nos privations de liberté.

 

Une nouvelle dérive de surveillance à la française

Aujourd’hui j’aimerais porter l’attention sur une nouvelle dérive de surveillance à la française. L’État français profite de nos nombreux impôts, taxes, redevances, cotisations, charges pour justifier une surveillance afin d’éviter les fraudes.

D’un côté, on va créer un impôt inquisiteur, pour de l’autre mettre en place une surveillance pour cet impôt. Double punition pour le citoyen.

L’impôt sur le revenu permet de légitimer une surveillance de notre train de vie sur les réseaux sociaux par le fisc.

La taxe sur les piscines permet de légitimer une surveillance par satellite des maisons françaises par le fisc.

L’URSAFF peut demander vos conversations de votre téléphone professionnel, si elle juge son usage trop personnel, votre téléphone devient un avantage en nature dissimulé, et vous êtes bon pour un redressement.

L’impôt sur la fortune permet à l’État de connaître tous nos comptes bancaires y compris à l’étranger, ainsi que tous nos biens immobiliers et mobiliers.

Vous devez maintenant déclarer les occupants de vos logements, directement aux impôts, pour vérifier l’impôt sur le revenu de l’immobilier.

Et si par miracle, toute cette surveillance ne suffit pas, je rappelle que le fisc analyse toute transaction supérieure à 1000 euros à travers tracfin, sachant que l’État a par ailleurs rendu illégale toute transaction en espèces supérieure à 1000 euros. L’État interdit donc toute transaction non traçable par lui au-dessus de cette somme.

 

Deux poids, deux mesures

Fort heureusement, il existe encore des moyens d’éviter la surveillance.

Si vous continuez de louer une HLM alors que vous ne remplissez plus les critères, vous pouvez dormir tranquille. L’État ne semble pas inquiet, d’ailleurs il souhaite 25 % de HLM partout, plutôt que de réguler l’existant.

Si vous réclamez votre chômage depuis vos vacances à l’étranger, là aussi, soyez rassuré, il ne se passera rien.

L’État est capable de repérer les piscines par intelligence artificielle depuis l’espace, mais ne parvient pas à bloquer le site pôle-emploi aux adresses IP en dehors de France.

Si vous fraudez la sécurité sociale, ne vous troublez pas. Aux dernières nouvelles, il y a 2,6 millions de cartes vitales actives de plus qu’il y a d’inscrits à la sécurité sociale.

Le mieux est encore d’être dans l’État. Mon patrimoine intrigue le fisc, mais après avoir été banquier d’affaires durant quatre années, le maigrichon patrimoine de Macron n’a déclenché aucune investigation.

Savoir quel locataire habite chez moi semble hautement important. Mais Cahuzac, qui proposait ses services de consultant à BigPharma à travers son EURL Cahuzac Conseil, tout en travaillant au ministère de la Santé, ne semble pas choquer. Cette double activité, en plein conflit d’intérêts, ne lui a pas été reprochée, seul un compte en banque suisse alimenté par ses « missions » auprès de BigPharma lui a valu condamnation. Il n’a passé qu’un an en prison, il est à l’heure actuelle médecin en Corse.

En résumé, être innocent ou coupable ne dépend plus de vos agissements. Vous serez constamment innocent si vous participez au pillage de l’État.

Mais si vous vous tenez à l’écart de l’État, alors vous voilà un citoyen présumé coupable à perpétuité. Afin de vous disculper du terroriste, pédophile, trafiquant, fraudeur qui sommeille en vous, une surveillance de tous vos faits et gestes devient nécessaire.

Javier Milei investi président en Argentine : une inspiration pour la France ?

Un article de Benjamin Gomar

Ce dimanche 10 décembre 2023 à 11 heures (heure locale) Javier Milei a été officiellement investi président de la République d’Argentine. Le pays est en ébullition. Mais faisons un petit retour en arrière.

Lors de la soirée du 19 novembre dans la capitale argentine Buenos Aires, Sergio Massa, second candidat en lice pour l’élection présidentielle, annonce de façon anticipée sa démission du gouvernement et laisse entendre sa défaite : « … les résultats ne sont pas ceux que l’on attendait… » dit-il lors de son dernier discours.

Un peu plus tard ce soir-là, le résultat final du scrutin est publié : 55,95 % pour Javier Milei, 44,04 % pour Sergio Massa. Les péronistes sont en larmes, Milei est élu avec une majorité écrasante qui le positionne comme le président élu avec le plus de voix depuis le retour à la démocratie. Un événement d’ores et déjà gravé dans l’Histoire.

 

Les réactions d’une gauche désorientée

Les médias argentins ne perdent pas de temps et n’hésitent pas à poursuivre leur cabale contre le candidat libertarien. Ils s’inquiètent de la réaction du secteur économique et relaient les réactions des sympathisants péronistes sur les réseaux sociaux. En effet, ceux-ci ne tardent pas à publier leur mécontentement. Par tweet, vidéos ou messages vocaux, ceux qui ont voté Sergio Massa partagent leur angoisse à l’idée de perdre les aides sociales dont ils bénéficient, et paniquent devant la fin annoncée de la toute-puissance de la fonction publique.

Au niveau politique, les réactions sont mitigées. Si de nombreux chefs de gouvernement latino-américains saluent et félicitent Javier Milei pour sa victoire, d’autres exposent leur inquiétude et déception.

Nicolas Maduro, le chef d’État du Venezuela, et héritier d’Hugo Chavez n’hésite pas à écrire que « l’extrême droite néonazie a gagné en Argentine ».

D’autres dirigeants publient des messages ambigus, peut-être pour ne pas compromettre leurs relations avec le pays.

La presse française subventionnée ne tarde pas à donner son avis : « économiste ultra-libéral », « candidat d’extrême droite », « ultra conservateur misogyne », les journalistes s’en donnent à cœur joie dans une succession d’anathèmes que l’on n’avait plus connue depuis l’élection de Donald Trump aux États-Unis.

De façon cocasse, certains médias, pourtant bien discrets lorsqu’il s’agit de dénoncer les risques liés à la mise en place de l’identité numérique européenne, s’inquiètent d’une possible dérive autoritaire du nouveau président argentin.

Mais qu’en est-il réellement en Argentine, Javier Milei fait-il vraiment si peur ?

 

À qui Javier Milei fait-il peur ?

Oui il fait peur, mais principalement à l’establishment péroniste, aux politiciens professionnels et à tous ceux qui depuis trop d’années vivent des subsides de l’État.

Il est bien normal que les kleptocrates et les malhonnêtes aient peur : avec plus de 20 millions d’Argentins vivant sous le seuil de pauvreté, dont 4,5 millions de sans-abri, le résultat de la gestion socialiste du pays est sans appel.

Leur peur n’est pas injustifiée, ils sentent bien que l’heure a sonné pour le système corrompu qui leur a donné richesse et puissance au détriment des autres. Leur machine à imprimer de l’argent risque bien de disparaître sous la tronçonneuse de Milei !

En deux ans seulement, Javier Milei est passé d’économiste dont tout le monde moquait le style fantasque et le caractère extravagant à président élu avec le plus de voix depuis les années 1980.

Et contrairement aux inquiétudes des médias, depuis sa victoire, tout ne va pas si mal. Certaines actions du pays ont connu jusqu’à 42 % de hausse, de nombreuses multinationales annoncent leur retour en Argentine, et en une semaine seulement, la valeur des entreprises argentines aux États-Unis a augmenté de 12 milliards de dollars.

C’est un reflet tangible qui prouve l’intérêt du marché pour la victoire d’un programme économique libéral, et un signe important pour que Javier Milei puisse mener à bien ses réformes.

 

Quelle équipe pour réaliser son programme ambitieux ?

Le programme de réformes de Javier Milei est très ambitieux et celui-ci est bien conscient qu’un seul homme ne pourra jamais réaliser toutes les actions promises. Pour cela il faut une équipe, équipe que le candidat Milei avait commencé à former avant les élections.

Le nouveau président a souhaité composer celle-ci de professionnels dont certains ont fait de très bonnes carrières dans le secteur privé, à l’image de la ministre des Affaires étrangères Diana Mondino qui a notamment travaillé chez Standard and Poor’s et au sein de la banque Supervielle, ou de Luis Caputo, ancien trader à succès à Wall Street, qui devient ministre de l’Économie et sera chargé de mener les réformes économiques telles que la fermeture de la banque centrale.

D’autres profitent d’un long parcours dans le secteur public, comme Patricia Bullrich, arrivée troisième au soir du premier tour et qui s’est associée à Milei entre les deux tours de la présidentielle. Elle devient ministre de la Sécurité, un poste qu’elle avait déjà occupé sous la présidence de Mauricio Macri. Citons aussi Sandra Pettovello qui débute le nouveau ministère du capital humain, regroupant la santé, l’éducation, le développement social et le travail. Mariano Cuneo Libarona, avocat, prend en charge le portefeuille de la Justice, et Guillermo Ferraro, un entrepreneur, devient ministre de l’Infrastructure.

Notons que Javier Milei a tenu sa promesse de limiter son gouvernement à neuf ministères.

L’équipe maintenant formée, il reste à savoir si les personnes désignées par le président Milei seront à la hauteur du défi qu’elles ont devant elles : reconstruire le pays et faire de l’Argentine une puissance mondiale.

Bien qu’il puisse y avoir des inquiétudes, des doutes et beaucoup de spéculations, le premier président ouvertement libertarien du monde garde sa volonté de faire avancer ses réformes « sans donner un mètre aux gauchistes ». Seul le temps nous dira si el Leon réussira à changer définitivement le destin de l’Argentine.

Mais vous vous demandez sans doute en quoi cette victoire nous interpelle ?

 

La victoire de Javier Milei : une inspiration pour la France ?

Alors que les regards du monde entier se tournent vers Buenos Aires, l’émergence du libertarianisme en Argentine offre une opportunité unique de réfléchir sur la pertinence de ces idées dans le contexte français. Les aspirations partagées pour une société plus libre, transparente et prospère résonnent au-delà des frontières nationales, et l’impact de cette élection peut servir de catalyseur pour une réflexion profonde sur le chemin que nous souhaitons emprunter ici en France.

Notre pays est complètement polarisé et aveuglé. La catastrophe de la dette, la réglementation et les démarches administratives abusives, ainsi qu’une fiscalité confiscatoire rendent très rude l’entrepreneuriat. Nous nous demandons si cette liberté promise par notre devise est bien réelle.

La centralisation du pouvoir et la concentration de celui-ci aux mains d’une élite technocratique, l’absence de représentativité des syndicats, un système de santé en faillite et une Éducation nationale défaillante, sans compter le système de retraite étatique au bord du gouffre, sont des problèmes bien réels en France, les chiffres parlent d’eux-mêmes.

Malgré tout, l’élite au pouvoir s’efforce de maintenir le statu quo et continue d’entretenir un système fait de prébendes et d’entre-soi. Peut-être est-il temps pour les Français d’embrasser eux aussi les idées de la liberté, de prendre leur destin en main, et d’arrêter d’espérer que l’État viennent résoudre tous leurs problèmes.

Ne vaut-il pas la peine de se battre pour un futur où la liberté individuelle et l’autonomie sont célébrées et non restreintes ?

Le succès de Javier Milei et de ses partisans en Argentine démontre que les principes libertariens ne sont pas simplement des concepts théoriques, mais bien des forces dynamiques capables de générer des changements concrets. Les politiques axées sur la responsabilité individuelle, la libre entreprise et la limitation du pouvoir gouvernemental ont déjà montré leur efficacité, il est désormais temps de faire résonner ces idées inspirantes au sein de notre propre pays.

En tant que défenseur des idées de la Liberté, vous êtes déjà conscient des défis auxquels notre pays est confronté. Cependant, l’ascension de Javier Milei en Argentine devrait servir de source d’inspiration, renforçant notre conviction que le libertarianisme peut également prospérer en France. C’est un appel à l’action, une invitation à s’engager activement dans la promotion des idéaux qui animent notre mouvement.

Ne restons pas les bras croisés, notre silence pourrait être notre perte, il est l’heure de construire la liberté. Il est l’heure de défendre la plus petite minorité qui existe, celle de l’individu. Il est l’heure de travailler pour une France qui progresse et se dynamise et laisser derrière nous cette France statique et funèbre. La liberté est là, toute proche et elle n’attend que vous.

VIVE LA LIBERTÉ BON SANG !

Record historique du CAC 40 : pas de raison de vendre pour autant

Par Alexis Vintray.

Alors que depuis 2000 le CAC 40 évoluait sous son record historique, il bat record sur record et est aujourd’hui 14 décembre pour la première fois au-dessus des 7600 points. Même si l’économie mondiale résiste bien malgré l’inflation, on peut s’interroger sur le fait que la bourse soit ainsi au plus haut dans un contexte qui reste anxiogène.

Alors faut-il prendre ses bénéfices ? Pas si simple…

 

Le CAC 40, un indice sans dividendes

Le premier point à garder à l’esprit est que le rendement d’une action provient de l’évolution de son cours, mais aussi des dividendes versés. Il est donc essentiel, en regardant un indice boursier, de savoir s’il inclut les dividendes ou non. Le CAC 40 tel qu’on le connait généralement ne les inclut pas, seul le CAC 40 GR le fait.

Le CAC 40 « usuel » minore donc largement la création de valeur réalisée par les sociétés qui y sont cotées. En regardant le CAC 40 GR, la hausse est impressionnante :

 

Rendez-vous compte : en mars 2021 d’après les calculs du Revenu : le CAC 40 GR gagnait 25 % sur trois ans, 63 % sur cinq ans, et 124 % sur dix ans contre respectivement +17 %, +53 % et +106 % pour le Dax.

Le S&P 500 américain dividendes réinvestis reste largement devant sur toutes ces périodes. Sur 10 ans, la hausse est de… 265 %. En performances annualisées, le CAC 40 GR a rapporté 8,4 % par an sur dix ans. C’est presque deux fois plus que le CAC 40 classique (+4,3 %). En 2023, la tendance n’a pas changé et les chiffres sont dans la même veine.

De quoi laisser songeur devant les 0,5 % du livret A qu’on connaissait encore il y a peu, et qui sont le bon benchmark sur la période. Même face au 3 % actuels, l’indice boursier écrase la concurrence. Avec un niveau de risque différent évidemment.

 

Le record historique du CAC 40, c’est fréquent en fait !

Si cette hausse pourrait laisser songeur sur la valorisation des marchés boursiers, il ne faut pas oublier que les marchés financiers sont bien souvent sur leurs points hauts. Le record de 2000 a en fait été battu déjà en 2007. Puis celui de 2007 a été battu en 2015. Et depuis battu chaque année.

Février 2020 était déjà un plus haut historique pour le CAC 40 dividendes réinvestis, à près de 16 500 points. Ce record a été battu dès mars 2021, malgré la crise du covid, à la faveur des espoirs apportés par la vaccination. Depuis, l’accélération de la croissance mondiale l’a porté encore bien plus haut, à plus de 22 000 points désormais, un record comme pour le CAC 40 hors dividendes, évidemment. Lors de notre dernier article sur le plus haut historique du CAC, en 2021, nous n’étions qu’à moins de 20 000, et c’était déjà un plus haut.

Cette tendance des marchés boursiers à toujours battre leur record et à évoluer la majeure partie du temps sur des niveaux record est particulièrement visible sur le graphique ci-dessous, repris de engaging-data.com.

Les bourses comme le CAC 40 au plus haut historique, c'est fréquent !

En vert les jours où le S&P 500 (principal indice américain) était à moins de 1 % du dernier plus haut historique. En bleu à moins de 5 %, en jaune à moins de 10 % , en orange à moins de 20 % et en rouge à plus de 20 %. Vous l’aurez remarqué, le vert prédomine, et le rouge ne dure pas. Surtout, les marchés retombent très rarement à leurs plus bas d’avant la phase de croissance.

 

Attention aux biais psychologiques quand on investit

Il est humain de vouloir acheter au meilleur prix. Craindre d’investir quand on est proche d’un point haut est un biais psychologique compréhensible. Mais, on l’a vu, c’est un biais très coûteux si l’on se fie au passé.

L’explication en est simple : prédire le marché est impossible, même pour des professionnels qui y consacrent leurs journées, avec des moyens bien supérieurs à ceux de l’épargnant lambda.

Ainsi, l’étude SPIVA, qui fait référence, a montré une fois de plus en 2020 que 90 % des gérants de fonds n’ont pas réussi à faire mieux que l’indice boursier qu’ils suivent ! En cause très fréquemment, l’envie des gérants de « timer le marché ». Cela signifie parier sur l’évolution future de la bourse, généralement à la baisse. Vu que le marché est tendanciellement haussier, ne pas investir devient vite très coûteux si le marché ne baisse pas. Au final, comme le dit l’adage boursier : « Time in the market is better than timing the market ». Même en achetant au plus haut.

Le lecteur curieux pourra par exemple regarder cette vidéo intéressante de Zone Bourse :

La meilleure façon d’investir en bourse

Dans ces conditions, on comprend pourquoi il est inutile voire néfaste d’essayer d’investir « au meilleur moment ». Comme le dit un autre adage boursier, le meilleur moment pour investir c’était lors du dernier krach. Le deuxième meilleur moment, c’est maintenant.

Mais investir au plus haut peut inquiéter, et l’investisseur prudent pourra vouloir limiter son risque. L’approche consensuelle dans ces conditions est de faire un investissement progressif si vous avez une grosse somme à placer, par exemple étalé sur six mois. Si c’est le fruit de votre épargne, avec un versement mensuel régulier, encore mieux !

À lire aussi :

 

Et si vous n’avez pas déjà de PEA

Les banques en ligne sont toujours bien plus avantageuses que les banques classiques et proposent toutes le PEA. En plus, on vous donnera de l’argent pour le faire en plus des économies de frais bancaires, comme Boursorama qui aura l’offre boursière la plus complète. En termes de frais de courtage si vous investissez en bourse, Fortuneo sera probablement le meilleur choix pour vous.

Sur le web

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Conflits d’intérêts et politiques de dépenses : le dessous des cartes économiques

La plateforme Spotify annonce le licenciement de 1500 employés, soit le sixième du total. Twilio, la plateforme d’hébergement de sites web, annonce le licenciement de 5 % de ses salariés. En plus de baisses des cours depuis deux ans, les entreprises perdent l’accès à des financements pour les pertes sur les opérations. Les levées de fonds, à travers le monde, baissent de 100 milliards de dollars par rapport aux niveaux de 2021.

Ainsi, les entreprises ont moins de moyens à disposition. Les gérants gagnent moins de primes. Les actionnaires subissent des pertes en Bourse. Un dégonflement de bulle a lieu depuis le début de hausse des taux.

À présent, l’espoir du retour à l’assouplissement par les banques centrales remet de l’air dans les marchés. La bulle reprend de l’éclat. Selon Reuters, le marché s’attend à une baisse de taux par la Banque centrale européenne de 1,40 % à fin 2024.

En France, le rendement sur les obligations du Trésor baisse depuis octobre. Sur les emprunts à dix ans de maturité, les taux passent d’un sommet de 3,6 %, le 4 octobre, à 2,8 % à présent.

Un retour des assouplissements plaît aux entreprises et aux marchés. Le Nasdaq prend 12 % depuis le sommet pour les taux, en octobre. Le CAC 40 grimpe de 9 %. Les autorités remettent en marche la création d’argent. Pourtant, selon les communications dans la presse, le gouvernement continue la lutte contre les hausses de prix.

Il annonce à présent le gel des tarifs de trains. Il a pris le contrôle des tarifs d’électricité. Il empêche les hausses de prix des péages.

Des ONG demandent davantage de contrôles sur les prix en magasins, avec des limites sur les marges. Les autorités – à l’origine de la création d’argent – prennent le rôle de sauveteurs contre les hausses de prix !

 

Plans de relance : retour des assouplissements

Les plans de relance ont de nouveau la cote autour du monde.

Les taux sur les obligations américaines à dix ans passent de 5 % en octobre, à 4,1 % à présent, en réponse aux déclarations de la Fed sur l’évolution de la politique de taux.

Autour du monde, les autorités préparent des incitations à l’endettement. En Chine, le gouvernement augmente le déficit à 4 % de la taille du PIB, et fournit davantage de garanties au secteur de l’immobilier. Selon la société d’analyse Gavekal, les promoteurs de projets d’immobilier chinois ont des impayés à hauteur de 390 milliards de dollars – envers des sous-traitants, fournisseurs, ouvriers, et créanciers.

La perspective d’un emballement de la dette du gouvernement – en raison des soutiens à l’immobilier – pousse Moody’s à une dégradation de la note de crédit.

Bloomberg donne des détails :

« L’économie de la Chine cherche à reprendre pied cette année, durant laquelle le rebond de l’économie – après la levée des restrictions du zéro covid – a déçu les attentes, et la crise de l’immobilier sème le doute. Les données économiques montrent que l’activité, à la fois dans les services, et l’industrie, chutent sur le mois de novembre, ce qui augmente les chances d’une politique de soutien de la part du gouvernement.

[…]

En octobre, le président chinois, Xi Jinping, a signalé qu’un ralentissement soudain de la croissance, et les risques de déflation, ne vont pas être tolérés, ce qui mène le gouvernement à tirer le déficit au niveau le plus élevé en trois décennies. »

Après un peu de répit à la dévaluation des devises, les autorités mettent à nouveau en marche les planches à billets, via les déficits et l’enfoncement des taux d’intérets.

 

Conflits d’intérêts sur les programmes de dépense

Le gouvernement français vient en aide à l’immobilier. Les ministres créent des mesures d’aide aux emprunteurs. La presse les présente comme un sauvetage du secteur face à la crise.

Vous ne verrez pas beaucoup de questions sur la nécessité de mesures. Peu de gens remettent en cause les programmes de dépenses. En effet, les mesures créent des conflits d’intérêts, en particulier dans la presse, les entreprises, et Think Tanks.

Les entreprises de bâtiment gagnent de l’argent sur la construction de logements. Des promoteurs font des bénéfices sur les volumes de vente aux particuliers. Les journaux font de la publicité et attirent des lecteurs sur le thème de l’investissement en immobilier. Les banques et courtiers génèrent des frais sur l’émission de crédits. Les sociétés de conseil proposent des études et rapports – sur l’impact des mesures – au gouvernement. Les particuliers voient dans l’accès au crédit une forme d’aide à l’achat.

Le même genre de conflit d’intérêts touche la plupart des programmes et interventions. Par exemple, la cybersécurité et l’IA créent des opportunités pour des contrats avec le gouvernement, et des sources de revenus pour les entreprises.

La société CapGemini publie un rapport au sujet de l’entrée en vigueur des normes de l’UE sur les services digitaux.

Dans l’introduction :

« En somme, le règlement DORA est prévu pour résoudre les risques de cybersécurité et de défaillances informatiques, en mitigeant la menace des activités illégales, et la disruptions aux services digitaux, avec des conséquences directes sur l’économie et la vie des gens. »

CapGemini n’ose pas les critiques de la loi. En effet, la société tire beaucoup d’argent des programmes du gouvernement. Selon Le Monde, la société de conseil a tiré 1,1 milliard d’euros de revenus grâce aux contrats avec le gouvernement, de 2017 à 2022 ! Elle ne veut pas courir le risque de perdre des contrats avec les autorités à l’avenir. Le groupe a ainsi un conflit d’intérêts dans l’analyse des décisions par les gouvernements.

De même, avec le projet d’un cadre de normes autour de l’IA, les entreprises et la presse ont des conflits d’intérêts. Elles les passent en général sous silence. Par exemple, Les Échos publie une tribune en soutien à la création de normes sur l’IA.

Selon l’auteur, le projet de loi crée « un cadre nécessaire à la protection et l’innovation ».

Il précise :

« Grâce au projet de règlement sur l’intelligence artificielle (AI Act), le législateur européen a l’opportunité de doper les investissements dans les secteurs de la culture et de l’innovation en Europe, et de montrer au monde la manière dont les entreprises d’IA peuvent prospérer au bénéfice de tous. »

L’auteur présente la loi comme une protection des artistes et créateurs de contenus contre la réutilisation par des IA, sans rémunération. Les régulations reviennent à bloquer l’activité des gens sous couvert de leur protection, incluant les consommateurs et les artistes.

L’auteur de la tribune, Robert Kyncl, a le même genre de conflit d’intérêts que les sociétés de conseil au sujet des projets du gouvernement. Il occupe le poste de PDG chez Warner Music Group. La société détient les droits d’auteur des catalogues de groupes comme Daft Punk ou David Bowie. Le groupe travaille aussi sur l’exploitation de l’IA pour tirer davantage de revenus des catalogues d’artistes. Il a en préparation un film sur la vie de la chanteuse, Édith Piaf, à base d’IA.

Les règles sur l’usage de l’IA, et la possibilité de barrières à l’entrée, présentent donc un intérêt pour M. Kyncl. Il a un avantage à la création de complications pour la concurrence. Les géants de la musique mettent à profit l’hystérie de la presse autour de l’IA – et l’envie de contrôle de la part des bureaucrates et représentants.

 

Climat : enjeux de centaines de milliards d’euros

L’Ademe publie une étude sur les coûts des dégâts faits à l’économie en raison de la hausse du carbone dans l’atmosphère. Ils estiment le bilan à 260 milliards d’euros par an à l’avenir. Comme le rapporte la presse, l’étude fait partie d’une commande du gouvernement.

Elle revient à une forme de communication en faveur des programmes – et des dépenses à hauteur de 110 milliards d’euros par an, selon les estimations du gouvernement, après 2030.

Une info-lettre que je reçois, au sujet du climat, effectue une campagne de dons. Des journalistes sont présents aux Émirats pour la COP28.

Dans la missive, de la part de Inside Climate News, l’auteur écrit : « Les journalistes sont des témoins. Nous sommes des diseurs de vérités. »

Sur le sujet du climat, les journalistes rapportent les décisions des dirigeants sans beaucoup de scepticisme. L’argent des programmes remplit beaucoup de poches.

(Suivez mes idées du moment sur la Bourse et les placements. Cliquez ici.)

Déclaration de biens immobiliers et embrouilles fiscales : amateurisme ou filouterie ?

Année après année, mesure après mesure, étape par étape, technologie après technologie, le fisc augmente son pouvoir, sa surface de jeu, et son « efficacité » de collecte pour l’État, toujours en manque d’argent.

 

Le prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu

Souvenons-nous du prélèvement automatique des impôts sur le revenu, une mission dont l’ambitieux Gérald Darmannin s’est brillamment acquitté, confortant ainsi l’État dans son assurance d’être payé, dans le coût de sa collecte (maintenant déléguée aux employeurs qu’il ne rémunère pas pour cela), dans la gestion de son cash-flow (maintenant plus rapide de plusieurs mois par rapport à avant). Qui plus est, il a eu le mérite, pour les tenants du pouvoir, de faire passer cela pour un bénéfice pour le contribuable : c’est un souci de moins. Enfin, pour les prêteurs à l’État, qui lui font notamment confiance grâce à la capacité supposée de ponctionner l’argent du peuple, par un coup de force si besoin le jour venu (attention, assurance vie sans doute dans le viseur), il a magistralement montré qu’en effet, l’État savait plumer un peu plus l’oie contribuable sans qu’elle crie.

Et pourtant, malgré l’argument selon lequel cela se fait déjà ailleurs, on peut avoir une opinion radicalement différente de celle des pouvoirs en place et de ceux qui lui prêtent de l’argent à gaspiller ; on peut voir dans cette affaire une privation supplémentaire de liberté, et une mise en danger du citoyen, contraire à l’esprit de la démocratie (le gouvernement du Peuple, par le Peuple, pour le Peuple).

En effet, avec un prélèvement automatique, on enlève au citoyen l’occasion de calculer avec attention ce qu’il doit, on dote le pouvoir d’un accès permanent et incontrôlable au cash flow individuel (ouvrant ainsi une brèche universelle, une pompe permanente et continue d’accès aux salaires, pour y prélever une somme arbitraire par loi ou décret si besoin un jour), on anesthésie le citoyen dans son énergie de vigilance et contestation.

Par expérience des pratiques de facturation et prélèvement des diverses administrations, je suis plutôt de l’avis des méfiants. Vous verrez plus en détail pourquoi dans ma dernière mésaventure.

 

Un espion dans mon jardin

Autre exemple de prouesse du fisc : l’emploi de l’intelligence artificielle pour trouver des biens à taxer qui lui auraient échappé.

Un cas a fait couler pas mal d’encre ces derniers mois : la détection de piscines par traitement d’images, à partir des photos satellite. Une piscine de plus de 10 m2 est en effet taxable, au titre de la taxe foncière (celle qui subsiste et explose). Et le montant de la taxe se calcule comme la valeur nominale (250 euros/m2 en 2023), multipliée par la surface, multipliée par un taux communal – 4 % en moyenne entre 1 % et 5 %), et un taux départemental -1,5 % en moyenne (quand la soupe est bonne, tout le monde y vient ; la région devrait sans doute suivre un jour – il n’y a pas de raison). Soit, pour 20 m2, 275 euros par an.

Or, avec le traitement par intelligence artificielle, les services fiscaux reportaient mi 2022 la détection de 20 000 piscines non déclarées dans neuf départements, pour un montant de plus de 10 millions d’euros de taxes, et annonçaient que le dispositif allait être généralisé.

Il l’a été en effet, avec des effets retard remarqués pour la Corse et l’Outre-mer, territoires dont on a pu se demander s’ils bénéficiaient d’une faveur pour une raison inavouable, ou juste, comme l’a prétendu le gouvernement, d’un délai à obtenir les photos nécessaires… Par contre, pas un mot sur les éventuels constats de piscines déclarées dans le passé et ayant disparu, converties par leurs propriétaires à d’autres usages. Un phénomène rare peut-être, mais pas inexistant, puisque je connais un citoyen qui a couvert en dur sa piscine pour en faire une terrasse. Il n’a jamais été informé par le fisc qu’il ne devait plus rien, et qu’il serait même remboursé pour les années passées (trois ans rétroactifs, me semble-t-il).

Le fisc aurait-il cette vertu spontanée, ou attendrait-il que le contribuable s’en aperçoive enfin de lui-même ? Quand on est ministre des Finances ou dirigeant des services fiscaux, la réponse à cette question révèle une considération particulière du rapport entre le pouvoir et le peuple, et de qui doit être au service honnête de l’autre. On attend de savoir, peut-être un jour.

En attendant, un incident récent laisse à soupçonner que peut-être, hélas…

 

La chasse aux biens immobiliers

Tous les contribuables ont en effet vu récemment que leur patrimoine immobilier faisait soudain l’objet d’une attention redoublée et très détaillée.

À l’origine de ce nouveau coup de zoom, sans doute le désarroi d’un État affolé par la montée du coût de la dette et son incapacité à maîtriser les vraies dépenses (pas cellles, ironiquement classées ainsi par les calculateurs de Bercy, des remises d’impôts/ niches fiscales, mais les vrais coûts des actions des gouvernants, toutes ces politiques jamais ou mal évaluées, où se sont engouffrés des milliards sans résultat) et l’effet de l’intenable promesse démagogique d’Emmanuel Macron de la suppression de la taxe d’habitation, promesse dont l’effet boomerang continue d’engendrer des pompages dérivatifs dans d’autres poches du budget, des usines à gaz de calculs compensatoires, et une explosion de la taxe foncière, dernière ressource autonome significative des communes.

De fait, comme pour les piscines, un des premiers usages de ce recensement de la population immobilière est la chasse aux biens qui pourraient « bénéficier » d’une taxe d’habitation perdue lors de la prise de pouvoir par En Marche.

Et, à ce titre, un citoyen que je connais a eu la surprise de recevoir cette année, pour la première fois depuis des années, un avis de taxe d’habitation de près de 1000 euros pour un bâtiment situé à la même adresse que sa résidence principale, une ancienne maison de gardien reconvertie en gîte rural, pour lequel il est loueur professionnel, et paye à ce titre des impôts sur les sociétés comme la CFE (Cotisation Foncière des Entreprises). Or :

  • On ne saurait être à la fois imposé comme une entreprise (CFE) et comme un particulier (taxe d’habitation) pour le même bien.
  • Le fisc est toujours le premier bénéficiaire de toutes les avancées techniques possibles pour améliorer le service public. En particulier, il paraît certain que toutes ses bases de données sont connectées entre elles, et qu’un bien donné avec une adresse connue doit pouvoir sans problème être détecté comme déjà soumis à la CFE.

 

Aussi cette taxe d’habitation d’un bien, connu comme soumis à la CFE, pose clairement question.

Ce citoyen taxé, plus éveillé et moins docile sans doute que beaucoup d’entre nous, a soulevé la question auprès des services fiscaux qui ont reconnu une erreur, et l’ont invité à faire une demande d’annulation. On se demande bien comment, avec tous les moyens dont il dispose, le fisc a pu commettre cette erreur. Oubli involontaire de contrôle dans les bases de données disponibles (une erreur de débutant en science des données) ou oubli volontaire/conscient pour aller à la pêche ?

 

Les erreurs des citoyens/entrepreneurs dans leurs déclarations au fisc, URSSAF ou autres sont en général surtaxées de 10 %, sauf (depuis peu) en cas d’erreur de bonne foi (dont l’appréciation revient au collecteur).

Alors on pourrait aussi attendre que l’agent du fisc qui reconnaît l’erreur fasse lui-même les démarches de demande d’annulation/rectification, et que le fisc soit pénalisé d’une amende de 10 % du montant demandé, sauf si le citoyen considère qu’il s’agit d’une erreur de bonne foi (ce qui en l’occurrence paraît soit incertain, soit inacceptable compte tenu des accès aux données dont le fisc dispose).

 

Alors, nos services fiscaux, amateurs ou filous ? Monsieur le ministre, exprimez-vous et convainquez-nous. En attendant, citoyens, contribuables, à vous de juger.

Disney : quand les réalités du marché remettent les entreprises sur les rails

Début décembre, Bob Iger faisait grand bruit :

« Les créateurs ont perdu de vue ce que devait être leur objectif numéro un. Nous devons d’abord divertir. Il ne s’agit pas d’envoyer des messages. » 

Cette mise au point tardive mais bienvenue de l’actuel PDG de Disney tranche avec la politique menée ces dernières années par ce géant du spectacle, encore renforcé par les rachats de l’univers de super-héros Marvel et de Lucasfilm.

Disney perd de l’argent alors que cette compagnie a longtemps eu l’habitude d’en gagner énormément. La plateforme Disney + a ainsi peiné à convaincre, les séries adaptées de l’univers Marvel étant pour la plupart considérées comme étant particulièrement médiocres, et de nombreux amateurs de Star Wars jugeant que la postlogie de Kathleen Kennedy avait trahi le travail de George Lucas.

Bref, tout n’est pas rose du côté de la firme aux grandes oreilles avec l’essoufflement du genre super-héroïque au cinéma. L’overdose de super slips aura en effet fatigué jusqu’aux amateurs, suites et séries en pagaille rendant cet univers de plus en plus difficilement compréhensible.

Pis encore, la volonté d’« inclusivité » a planté un dernier clou dans le cercueil de ce type de films, Marvel et Disney semblant lutter à chaque instant pour trouver des super-héros de couleur ou d’orientations sexuelles minoritaires censément « représentatifs » de la « diversité ».

Cette politique s’est toutefois traduite par des succès commerciaux. Ce fut le cas de la série de films Black Panther inspirée du super-héros du même nom créé dans les années 1960 et 1970. Désormais personnalité fictive emblématique de la communauté afro-américaine, Black Panther vient du pays imaginaire du Wakanda, îlot de prospérité technologique caché au cœur du continent noir. Dans le deuxième volet sorti en 2022, intitulé Wakanda Forever, le réalisateur Ryan Coogler se permettait d’ailleurs d’amener une intrigue jouant de la rhétorique antifrançaise et faisant passer notre pays pour une État prédateur, colonial et soutien du terrorisme…

Il est amusant de se dire que l’œuvre créée par l’immense Walt Disney est désormais aux mains d’activistes politiques appartenant au pire de la gauche dite « woke » d’Amérique du Nord. Le vieux Walt se retournerait d’ailleurs probablement dans sa tombe s’il avait connaissance de cette forfaiture, lui qui n’aimait rien tant que la magie de l’imagination et du rêve. Disney n’a pas eu besoin de politiques « inclusives » pour proposer des films qui l’étaient par essence. Quoi de plus universel en effet qu’une jeune femme devant déjouer la jalousie d’une rivale plus âgée ? Quoi de plus traditionnel que le message de la transmission paternelle véhiculé par Le Roi Lion ? Mais l’époque est au grand renversement : il faut tuer l’héritage de Disney, l’occulter et le cacher afin de ne pas offenser cette tyrannie des minorités qui domine d’une main de fer l’État de Californie et l’Hollywood contemporains.

Certains films ont même été retirés du catalogue de la plateforme Disney +, à l’image de Peter Pan parce qu’on y trouve des peaux-rouges ou des Aristochats dont le personnage de chat siamois serait insultant pour les Asiatiques…

En revanche, Disney ne se gêne pas pour changer l’ethnie de la Petite Sirène d’Andersen née pourtant au Danemark, pays européen s’il en est. Le monde anglo-saxon semble s’abandonner à une folie révisionniste, voire dans certains cas négationnistes, touchant même les personnages historiques. La BBC n’a par exemple pas hésité à proposer des séries avec des vikings incarnés par des Africains subsahariens. Disney est dans ce genre exemplaire, allant au-delà des attentes de son public le plus radical. Car, au fond, le problème est que Disney ne s’adresse plus aujourd’hui uniquement aux enfants, mais bien à une part croissante du public occidental bloqué dans l’enfance, réagissant hystériquement à chaque sortie de film.

Reste que la résistance passive ou active s’organise. « Go woke, go broke », disent aujourd’hui certains analystes de la vie économique américaine. Avec sa campagne inhabituelle convoquant Dylan Mulvanay, célèbre trans américain, le brasseur Budweiser a perdu énormément de clients.

Cela a aussi été le cas pour Gillette qui a misé sur une campagne inclusive pour… vendre des rasoirs à des hommes.

La règle d’or de la publicité est de s’adresser à ses consommateurs. La règle d’or du commerce est de vendre le produit qu’attendent les clients. Disney doit offrir des films de grand spectacle aux valeurs universelles afin d’entrer dans ses comptes. Les messages politiques le desservent. Gageons que nous retournions vite à la normale, la tyrannie des minorités aura une fin.

Paternalisme et centralisation : les bons remèdes de monsieur Attal

Jeudi 5 décembre 2023. L’ange Gabriel (Attal) descend sur la France, porteur d’une bonne et d’une mauvaise nouvelle.

Commençons par la mauvaise : les conclusions de la dernière étude PISA pointent les résultats catastrophiques des petits Français, en particulier en mathématiques. Une « baisse historique » des performances, peut-on lire çà et là. Rien de surprenant pourtant : l’enseignement public est en piteux état depuis des décennies. Il ne se relèvera pas spontanément de cette longue maladie.

Heureusement – et voilà la bonne nouvelle ! – Gabriel Attal apporte des remèdes. Une thérapie à base d’électrochocs : « le choc des savoirs ». « Pour chaque élève, il y aura un avant et un après » assure-t-il. On se prend à croire aux miracles…

À sa décharge, M. Attal n’est ministre de l’Éducation nationale que depuis peu. Ce n’est pas à lui mais à ses prédécesseurs qu’il faut imputer la déroute de l’école publique. Enfin… n’oublions quand même pas que c’est ce gouvernement qui a permis à M. Pap Ndiaye d’imposer ses lubies écologico-sexuelles et à M. Jean-Michel Blanquer de se déguiser en réac afin d’amadouer la droite tout en interdisant l’instruction en famille et en instaurant l’obligation scolaire à 3 ans…

Monsieur Attal se voit en homme providentiel : grâce à des mesures qu’il présente lui-même comme « de bon sens », il s’engage à renflouer une institution à la dérive et à réformer un corps professoral de 860 000 personnes, coiffé d’une administration pléthorique.

N’écoutant que son courage, il souhaite « lever un tabou » en permettant aux enseignants de décider du redoublement des élèves. Notons au passage que le redoublement est généralement demandé par des parents, et refusé par les enseignants… Bref. Il promet aussi de créer des groupes de niveaux « dans chaque collège ». Il a bien insisté sur le fait qu’aucun collège n’échapperait à cette mesure. Cela me rappelle le bon temps où Najat Vallaud-Belkacem jurait que 100 % des élèves seraient dotés d’une tablette dans 100 % des classes, elles-mêmes équipées de tableaux numériques interactifs. Le démon uniformisateur habite nos ministres, et passe de l’un à l’autre sans perdre de sa puissance.

Gabriel Attal annonce aussi qu’il mettra très vite au travail le Conseil supérieur des programmes pour que ceux-ci s’articulent autour de quatre priorités : clarté, exigence, sciences et culture générale. Après « l’école de la confiance » et « l’école de l’engagement », on comprend qu’il veut un revirement à 180 degrés. Et d’ailleurs, est-ce bien le même homme qui nous promettait des cours d’empathie ?

 

Juste constat, fausses solutions

Avec ce retournement, il marque des points : l’école souffre en effet de ne plus transmettre de connaissances, de privilégier le bien-être plutôt que l’effort.

Mais elle pâtit surtout d’un manque d’autonomie. Ses acteurs réclament davantage de liberté et de responsabilité : comment accepter que le remplacement d’une chaudière prenne des semaines, en plein hiver, alors que des lycéens grelottent en doudounes ? Comment supporter que tous les écoliers soient évalués avec un livret scolaire unique (le LSU) obligeant des centaines de milliers d’enseignants à jongler entre compétences et pastilles de couleurs ?

Pourtant, lorsqu’on écoute attentivement monsieur Attal, on entend un ministre fier de tenir en sa main le sort de 12 millions d’élèves.

« Je suis à la tête de la plus grosse administration européenne » a-t-il rappelé avec un sourire satisfait lors d’un récent reportage télévisé1. Il est issu d’un établissement privé renommé. Pourtant, à aucun moment il n’a évoqué la liberté pour les parents de choisir la meilleure école. Il ne remet pas en cause la sectorisation qui assigne à résidence les familles les plus modestes. Il n’est plus question d’autonomie des chefs d’établissements mais, au contraire, de faire labelliser des manuels par le ministère. Par qui seront-ils rédigés ? Les enseignants ne souhaitant pas utiliser ces manuels d’Etat devront-ils se justifier auprès des inspecteurs ? Quid de l’innovation pédagogique dont font preuve les éditeurs privés ?

Il souhaite que les professeurs aient le dernier mot quant au redoublement. Mais – faut-il le rappeler ? – la France est signataire de conventions internationales affirmant que les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Plutôt que « lever le tabou du redoublement » monsieur Attal pourrait mettre en place un nouveau certificat d’études. Seuls les heureux détenteurs de ce « certif » accéderaient au collège, ce qui rendrait caduques les tractations privées.

 

Opposition du corps enseignant

Il a à peine évoqué la formation des enseignants.

Elle constitue pourtant un problème crucial : on confie aujourd’hui sans vergogne des cohortes d’enfants à des professeurs n’ayant que de vagues connaissances disciplinaires et qui, pour nombre d’entre eux, embrassent cette carrière pour décrocher le statut de fonctionnaire, Graal moderne.

Il faut revoir d’urgence le contenu des formations délivrées par les Inspections dont les sites vantent « l’appropriation de l’éducation à la sexualité » (Inspection de Lille) ou les formations sur les « inégalités de genre » (Inspé de Toulouse), en écriture inclusive bien sûr. Il faut redonner aux enseignants des raisons d’être fiers : enseigner est le plus beau métier du monde à condition de l’exercer librement, dans un pays qui valorise la transmission d’un patrimoine, la responsabilité individuelle, et non l’engagement à tout prix.

Monsieur Attal se montre tour à tour paternaliste et autoritaire. Malheureusement, il ne suffira pas de repeindre l’école de 2023 en école de la Troisième République pour résoudre les graves problèmes auxquels elle fait face.

Ce que refusent de voir les ministres successifs, et Gabriel Attal n’échappe pas à la règle, c’est d’abord leur impuissance face à un corps professoral fortement syndiqué, formé dans des centres où règne sans partage une idéologie gauchiste, et à une administration tentaculaire. Rappelez-vous monsieur Blanquer exigeant que l’on rétablisse la méthode syllabique, et se heurtant à l’inertie du corps professoral. Quatre années plus tard, la méthode semi-globale est encore très largement utilisée dans les classes de CP… Voyez la façon dont le « pacte » proposé aux enseignants a été écarté d’office par la plupart des syndicats, suivis par leurs ouailles. Les réactions aux annonces de ce jour ont été immédiates : les mêmes organisations syndicales dénoncent un ministre « loin des réalités », inconscient des conséquences de ses annonces, en particulier celle de l’organisation de classes de niveaux qui nécessite une réorganisation complète du collège.

 

La fuite vers l’enseignement privé

Les occupants de la rue de Grenelle ignorent aussi superbement la fuite des élèves vers les écoles privées dites hors contrat, libres de la tutelle étatique. Elles sont pourtant souvent plus chères car les salaires des enseignants, les locaux, l’ensemble des dépenses y sont couvertes par les parents. Alors, qu’est-ce qui les rend si séduisantes ? N’ayant pas adhéré au fameux contrat avec l’État, elles peuvent recruter, former (et licencier !) leurs professeurs car ceux-ci ne sont pas fonctionnaires ; elles sont aussi libres de leurs horaires et de l’affectation de leurs budgets. Elles doivent atteindre les objectifs de fin de cycle, mais ne sont pas tenues d’appliquer les programmes ni de se laisser envahir par les nouvelles technologies, l’écologie, l’idéologie… Elles évaluent leurs élèves comme bon leur semble. Cette liberté s’exerce dans le respect de l’ordre public bien sûr : elles sont inspectées bien plus souvent et minutieusement que les écoles publiques. Elles scolarisent environ 120 000 élèves, soit 1 % des effectifs, nombre encore jamais atteint en France, et en croissance constante.

Autrefois réservées aux riches et aux initiés, elles se démocratisent largement grâce à des fondations, comme Excellence ruralités qui bataille pour recréer des écoles dans les déserts français, et des projets personnels originaux. Au cours Candelier par exemple, dans le Nord, les enfants apprennent la grammaire « à l’ancienne », le dessin académique, les mathématiques avec la fameuse méthode Singapour que vient de découvrir M. Attal, le chant choral et la calligraphie. On n’y enseigne ni les écoquartiers ni les dangers d’internet, et on n’oblige pas les élèves à ramasser des mégots ou à reboiser le pays pour servir l’État. Depuis sa création en 2010, cette école joue à guichets fermés. Rigueur, exigence, responsabilité : les parents, les professeurs et leurs élèves en redemandent.

Devant le gaspillage de l’argent public, 56 % des Français souhaitent que l’État finance l’école de leur choix2, quel que soit son statut. Ils sont de plus en plus nombreux à le faire eux-mêmes, alors qu’ils paient régulièrement leurs impôts : ils « double-paient » donc pour échapper à la mainmise du ministère, pour sauver leurs enfants du naufrage. Comme l’écrit Chantal Delsol : « on n’entre pas dans le public parce qu’il est meilleur, mais parce qu’il est monopolistique. »3

 

L’enseignement à la peine en Occident

Ne nous y trompons pas : nous sommes loin d’être les seuls à rencontrer des difficultés pour instruire nos enfants.

Les ravages du covid, l’hétérogénéité des élèves, la concurrence des écrans et l’abandon d’un certain modèle transmissif ne sont pas spécifiques à la France. De nombreux pays occidentaux voient leurs résultats régresser. Il faudra nous montrer créatifs et cesser d’appliquer à des problèmes modernes des solutions anciennes (qui n’ont parfois jamais vraiment fonctionné). Il faudra ouvrir le système à la concurrence, favoriser la transparence, permettre aux enseignants de se former vraiment, en Inspé ou ailleurs si ceux-ci ne s’acquittent plus de leur office.

Souhaitons que les mesures qu’envisage M. Attal portent leurs fruits. Espérons qu’elles permettent de gommer un peu les inégalités que l’école française reproduit et amplifie plus que les autres. En attendant, ne sacrifions pas plus longtemps des millions d’enfants sur l’autel de l’égalitarisme. Permettons-leur de bénéficier des meilleures pratiques, d’où qu’elles viennent, sans a priori politique.

  1. « Zone interdite » du 12 novembre 2023. M6
  2. Sondage IFOP de mai 2023 sur « l’égalité d’accès à une éducation de qualité en France ».
  3. La Détresse du petit Pierre qui ne sait pas lire.

LFI : La Faction Insurrectionnelle

75 députés LFI peuplent -un terme chéri du parti…- les bancs de notre Assemblée nationale. Souvent, il semble qu’ils soient bien plus nombreux tant la discrétion et l’élégance paraissent leur faire défaut. En effet, depuis les élections législatives de 2022, nous sommes en proie aux vociférations de ces représentants du « peuple » qu’ils prétendent représenter à l’exclusion de tous les autres.

Il serait impossible de recenser l’ensemble des déclarations agressives, démagogiques, haineuses ou vulgaires, c’est selon, dont certains de leurs membres se sont fait une spécialité. Ne parlons pas de leurs connaissances historiques ou de leur culture générale, telle cette députée qui comparait, le 8 janvier 2023, le capitalisme, évidemment immonde, au stakhanovisme par un retournement historique affligeant. Ne parlons pas non plus de leur prétendu programme, par exemple celui concocté par la coordinatrice pour la campagne européenne qui déclarait le 21 novembre qu’il fallait « rompre avec le libre-échange, l’austérité (sic) et le tout-marché pour imposer le protectionnisme, la solidarité et les biens communs », un programme qui ferait reculer la France et l’Europe de plusieurs décennies au moins. Un programme financé bien entendu par un « impôt sur la fortune européenne », les riches devant rendre gorge.

 

Qui représente LFI ?

Il fût un temps où, lors d’élections, il s’agissait d’élire les meilleurs. Une idée qui fera sourire, mais qui avait le mérite de rappeler que les élections ne sont pas démocratiques, elles sont de nature aristocratique. La démocratie peut certes être représentative, c’est même un pléonasme aujourd’hui, mais c’est le tirage au sort qui est associé historiquement à la démocratie. Manière de souligner les deux grandes catégories de la représentation : la représentation-miroir et la représentation-filtre.

L’idée des populistes, de droite comme de gauche, c’est qu’une Assemblée doit représenter le peuple, c’est-à-dire que les représentants doivent, autant que possible, présenter des caractéristiques proches de leurs électeurs : sexes (avant le wokisme…), âges, catégories socio-professionnelles, etc.

Les représentants ne doivent plus être ceux qui ont des « capacités », comme on disait au XIXee siècle, ils ne doivent plus avoir fait des études et/ou ils ne doivent plus exercer des professions qui préparent à la fonction politique, et plus particulièrement à la rédaction de la loi et au contrôle du gouvernement, tels les juristes. Non, n’importe qui, quelle que soit sa formation ou son absence de formation, quel que soit son métier, quel que soit son âge aussi (le « jeunisme » étant à la mode avec des députés à peine majeurs ou des sénateurs de 25 ans, ce qui est étymologiquement une hérésie), n’importe qui donc peut être représentant du peuple, égalitarisme oblige. LFI en atteste.

 

LFI, le Rassemblement national en pire ? 

Il semble que les parlementaires LFI se soumettent à une sorte de concours Lépine du représentant le plus incongru. Les insoumis soumis ?… Par exemple, les déclarations stupéfiantes sur l’énergie nucléaire ou les allégations rances et communautaristes au sujet des évènements en Israël, entre autres, laissent songeur.

Digne (?) successeur du Parti communiste (prétendument) français, LFI se présente comme un parti populiste au cryptomarxisme éculé allié à une ignorance encyclopédique. Cette culture de la bêtise et de l’envie se veut hyper-démocratique dans le sens où LFI se présente comme le canal unique de la volonté populaire, les autres partis n’étant que les représentants des « classes » et des minorités bonnes à écraser.

Dans la perspective des élections européennes, les sondages montrent que plus de la moitié des intentions de vote vont à des partis extrémistes de droite et de gauche sans programme de gouvernement, et dont l’objectif est de flatter les plus bas instincts des électeurs. Les dernières déclarations de députés LFI invitent même certains à se demander si ce parti n’est pas le Rassemblement national en pire. C’est que deux années de présence à l’Assemblée nationale de LFI ont permis au Rassemblement national de passer pour un parti fréquentable, voire modéré. Beau résultat !

 

LFI : La Faction Insurrectionnelle 

Il n’est bien entendu pas dans notre intention de dire que tous les parlementaires LFI ou la plupart d’entre eux ont une intelligence défaillante. Leur meneur, même s’il ne fait pas partie de l’Assemblée nationale, est d’ailleurs bien loin d’appartenir à cette catégorie, ce qui le rend d’autant plus dangereux… Plusieurs députés LFI surfent aussi fort habilement sur la vague démagogique.

On peut considérer que la fin justifie les moyens, que toutes les affirmations jusqu’aux plus absurdes, peuvent être émises. On peut aussi considérer que, dans la sphère limitée qui devrait être la sienne, la politique doit être une école d’ennoblissement, de culture, d’intelligence et de bon sens. Là encore, notre conception pourra être qualifiée de naïve, voire d’utopique, mais il nous semble qu’il serait bon de s’y… soumettre.

Ne sacrifions pas l’Occident pour combattre l’islamisme : réponse à Marion Maréchal

Samedi soir, un terroriste islamiste a semé la mort au pied de la Tour Eiffel. Armand Rajabpour-Miyandoab avait déjà été condamné en 2018 pour association de malfaiteurs terroristes, condamnation qui lui a valu d’être fiché S.

Ce n’est pas le premier terroriste à être passé à l’acte en France alors qu’il était déjà suivi pour ses accointances avec l’islamisme et l’entreprise terroriste. Cette répétition doit évidemment nous interroger sur l’efficacité de notre système de surveillance des individus dangereux, et en particulier des islamistes. S’engouffrant dans la brèche, Marion Maréchal a appelé dans les colonnes du journal Le Figaro à ce que tous les islamistes fichés S soient arrêtés et incarcérés immédiatement. 

 

On ne peut défendre l’Occident en détruisant son génie

S’il est vrai que la grande majorité des terroristes étaient fichés S, tous les fichés S ne sont pas des terroristes.

Marion Maréchal le sait, et ce n’est pas une erreur de logique qu’elle commet. Mais elle propose ni plus ni moins d’abandonner le droit à la sûreté, c’est-à-dire la protection contre les arrestations arbitraires, consacrée aux articles 2 et 7 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen, inspiré de l’Habeas Corpus anglais qui fut la première pierre de la tradition juridique libérale qui caractérise l’Occident. Cette pensée juridique originale née en Occident a illuminé le monde et continue de rayonner auprès de tous les peuples opprimés, y compris par l’islamisme. 

Nous ne défendrons pas l’Occident contre ses ennemis en détruisant son génie. Abandonner la démocratie libérale qu’abhorrent les islamistes et autres illibéraux à la culture viriliste et adulescente qui voient la culture humaniste, non comme une sagesse mais une faiblesse, c’est leur donner la victoire.

En ne protégeant que les clochers, Reconquête! s’enferme dans une vision folklorique de la civilisation occidentale. À l’inverse, dans son chemin vers la « dédiabolisation », le Rassemblement national semble avoir intégré à son discours la défense des minorités sexuelles et des femmes comme partie intégrante de la tradition occidentale. On ne peut d’ailleurs que déplorer que la gauche abandonne de plus en plus cette défense inconditionnelle du droit à la différence à l’extrême droite, comme elle a abandonné l’hymne et le drapeau, cédant devant la culture intolérante ce qu’elle voit comme les nouveaux damnés de la Terre. 

Par ailleurs, nous ne rappellerons jamais assez que toutes les lois d’exception ont fini par être détournées de leur objectif initial.

 

Les risques de dérives d’une telle mesure

Combien de fois les lois antiterroristes ont-elles été instrumentalisées pour intimider des individus qui n’avaient rien en commun avec le terrorisme islamisme, comme les militants de la ZAD de Notre-Dame des-Landes ? Réprimer les manifestations ? Peut-être devrait-on rappeler à Marion Maréchal que parmi les manifestants de l’ultra-droite descendus dans les rues pour protester contre la mort du jeune Thomas à Crépol, on comptait probablement des fichés S ? Combien de sympathisants de Reconquête! pourraient être inquiétés à la veille d’une élection au simple motif qu’ils ont pu approcher de près ou de loin une idéologie radicale ?

Rappelons que le simple fait de côtoyer sans le savoir un fiché S peut faire de vous un fiché S. Dès lors, la mécanique d’enfermement généralisé pourrait très facilement s’emballer, ou être instrumentalisée par le politique qui n’aurait alors plus aucune limite dans son pouvoir. Consentir à l’arbitraire, même dans l’objectif noble de lutter contre le terrorisme, est la voie la plus sûre vers la tyrannie.

Ce serait d’autant plus une trahison envers notre civilisation que ce serait une solution simpliste adoptée au détriment d’une autre facette du génie occidental : sa capacité de séduction.

 

La plus belle arme de l’Occident : sa capacité de séduction

Notre démocratie libérale, longtemps considérée comme un horizon indépassable de la modernité, ne séduit plus. Non seulement l’Occident n’est plus le phare du monde, mais il est remis en cause en son sein, que ce soit par les descendants d’immigrés qui adoptent l’islamisme que leurs parents ont fui, ou les tenants d’un Occident fantasmé qui voient dans Poutine le « salut de la blanchitude ».

Notre démocratie libérale, qui permet à chaque individu de s’émanciper et de se déterminer, peine à produire une métaphysique commune qui soit accessible au plus grand nombre, qui se tourne alors vers les prêts-à-penser que constituent les idéologies radicales, que ce soit au sein de l’islam politique, de l’extrême droite ou de l’extrême gauche.

Pour se défendre, la démocratie libérale doit se réarmer intellectuellement. Le refus de la radicalité et du populisme, s’il n’est pas justifié pour soi, ne sera jamais à même de peser face aux idées faciles. Mais elle doit aussi être cohérente et défendre cet idéal occidental à chaque fois qu’il est attaqué, comme en Ukraine, et non pas comme en Arménie qui, malgré quelques prises de paroles sentencieuses, a été abandonnée au profit de nos intérêts gaziers.

Enfin, il faut rappeler que si la première mission de l’État doit être d’assurer la sécurité des citoyens et qu’il est indispensable que nous perfectionnions sans cesse notre appareil sécuritaire, seul un régime tyrannique pourrait approcher le risque zéro. Personne ne doute que la Corée du Nord connaît un taux d’homicides (non gouvernementaux) plus faible que le nôtre. En définitive, nous devons assumer que dans une société libre, le risque zéro n’existe pas, et que nous aurions bien davantage à perdre en sacrifiant notre État de droit.

Crépol, révélateur du fossé entre les citoyens et les élites

Le meurtre de Thomas à Crépol a fait apparaître comme jamais le profond clivage entre l’opinion publique majoritaire et les dirigeants politiques. L’alignement des médias dominants, en particulier ceux du service public, sur le déni politicien, traduit leur incompréhension de la situation ou leur asservissement au pouvoir.

Pour tous ceux qui vivent dans la « France profonde », la perception du fossé, devenu gouffre béant, séparant gouvernants et gouvernés, est ancienne mais devient aujourd’hui alarmante.

 

La bien-pensance persiste dans le déni

On aura en effet tout entendu après ce meurtre odieux et particulièrement significatif. Un épisode de « la guerre des boutons » selon Pablo Pillaud-Vivien (BFMTV), « un fait divers banal » selon Isabelle Veyrat-Masson (Arte), des assaillants « venus pour s’amuser et draguer des filles » selon Patrick Cohen (France 5).

Face à un meurtre révélant le face-à-face belliqueux de deux France par le passage à l’acte de jeunes issus de l’immigration et vivant dans la marginalité, les intervenants de gauche ne songent qu’à nier l’évidence. Pitoyable.

La France entière a été profondément émue et révoltée, mais les missi dominici de la bien-pensance n’y voient que la banalité de la vie quotidienne. Ils « communiquent ». Ce verbe si galvaudé a malgré tout un sens profond.

Il existe désormais deux mondes : celui de la réalité vécue dans lequel se trouvent 90 % des Français, et celui de la communication médiatique qui concerne les politiciens, les journalistes, les animateurs et les invités habituels des émissions d’actualité. Une petite couche totalement irréelle de communication recouvre une réalité infiniment complexe et prétend la représenter. Le monopole du verbe n’induisant ni la connaissance ni la clairvoyance, ces gens-là ne comprennent pas grand-chose au pays dans lequel ils vivent.

Pourquoi ?

 

Les décideurs parisiens

Explication la plus évidente : ils vivent à des années-lumière de leurs concitoyens. Parisiens en général, très aisés financièrement presque toujours, voyageant beaucoup et côtoyant des personnes venues des quatre coins du monde, leur vie ne ressemble en rien à celle du Français moyen. Celui-ci est provincial, ne voudrait pour rien au monde vivre à Paris, a des revenus modestes ou moyens et voyage peu et pas très loin. Deux modes de vie radicalement différents entraînent deux perceptions incompatibles de la société.

Deuxième élément : ce sont des décideurs ou des relais des décideurs. Les décisions politiques sont aujourd’hui complexes et reposent sur des analyses multifactorielles qu’il est impossible d’aborder dans une interview de quelques minutes ou même dans une émission d’une heure. Il faudrait une formation longue pour maîtriser les tenants et aboutissants de la plupart des sujets. D’où la communication.

De mauvais comédiens expliquent donc aux Français, comme on s’adresse aux enfants de la maternelle, les rudiments de l’économie, du droit constitutionnel, de la géopolitique, etc. Exercice particulièrement ambitieux qui a toutes les chances de se solder par un échec. Le Français moyen saisit intuitivement qu’on le prend pour un imbécile, qu’on lui cache bien des choses réservées aux décideurs.

Les communicants ont surtout réussi à transformer les politiques en professionnels de l’hypocrisie. Où sont Churchill, de Gaulle, qui ressentaient profondément ce qu’ils disaient car ils l’écrivaient eux-mêmes ? Nos politiciens et nos journalistes de l’audiovisuel sont des comédiens pas très doués, prisonniers d’un scénario élaboré par d’autres.

 

L’héritage calamiteux

Troisième cause de la fracture : le passé. Il faut désormais assumer les erreurs massives du demi-siècle écoulé et en particulier deux dérives majeures :

  1. L’immigration totalement incontrôlée avec régularisation de clandestins, regroupement familial de plus en plus large et instrumentalisation systématique de vieilles conventions internationales sur le droit d’asile. Ces conventions ne correspondent plus du tout aux réalités actuelles, mais sont utilisées par les gouvernants comme justification de leur inefficacité.
  2. La fuite vers une dette publique abyssale pour ne pas faire face politiquement à la fin de la période exceptionnelle de forte croissance des trente années d’après-guerre.

 

Il s’agit donc de gérer l’héritage calamiteux de François Mitterrand, allégrement poursuivi par ses successeurs. Pas facile ! Le mensonge et le cynisme d’antan conduisent au désespoir et à la violence d’aujourd’hui.

 

Le clientélisme électoral

Enfin, cerise sur le gâteau, la politique politicienne fait intervenir un dernier élément : le clientélisme électoral.

Logiquement, les électeurs se sont progressivement détournés des partis traditionnels de gouvernement (social-démocratie et droite modérée) puisque leurs leaders s’étaient eux-mêmes éloignés d’eux. Les extrêmes ont conquis le corps électoral. Une recette très simple a été utilisée : le populisme, qui consiste à dire aux électeurs cibles ce qu’ils veulent entendre. La France insoumise convoite l’électorat d’origine immigrée et adapte son logiciel en conséquence. Le Rassemblement national rassemble, comme son nom l’indique, tous les déçus, toutes les victimes des tromperies politiciennes des décennies antérieures. L’absence de politique migratoire, l’abandon de la classe ouvrière par la gauche lui ouvrent un boulevard vers la conquête du pouvoir.

Avec une violence verbale et comportementale de mauvais aloi, LFI joue la carte du communautarisme, du wokisme et de l’écologisme radical. En choisissant l’image de la sérénité et de la respectabilité, le Rassemblement national part à la conquête des oubliés de l’histoire récente, attachés à la nation, à la culture européenne, aux frontières, à l’autorité de l’État.

Deux France totalement incompatibles, représentées par deux partis aux antipodes l’un de l’autre s’affrontent. Entre les deux, l’espoir s’évanouit peu à peu.

Le « capital républicain » d’Olivier Faure, vide socialiste

Oliver Faure, premier secrétaire du Parti socialiste a pris la plume car il a un rêve, qu’il estime révolutionnaire et qu’il souhaitait partager avec l’ensemble de la population : réaliser une plus grande égalité réelle entre les Français. Pour atteindre cet objectif impératif, il a une méthode qu’il présente comme originale : distribuer aux citoyens des aides supplémentaires, en euros sonnants et trébuchants, qu’il fera abondamment financer par une augmentation de la fiscalité pesant sur les plus riches et contrôler par une administration pléthorique…

C’est, à peu de chose près, tout ce qu’il y a retenir du petit livre (une quarantaine de pages) qu’il vient de publier aux éditions conjointes de l’Aube et de la Fondation Jean-Jaurès, et dont toute la réflexion part d’un constat… au mieux erroné.

 

L’obsession égalitaire

Olivier Faure relève ainsi qu’en France, la durée des études est corrélée à l’origine sociale des étudiants. Ces éléments sont statistiquement incontestables, et il y a longtemps qu’une succession de rapports et de livres l’a montré et dénoncé à juste titre.

Ils sont toutefois incomplets : les études montrent que les élèves qui obtiennent les meilleurs résultats ne sont pas que les « gosses de riches », mais aussi les « fils de profs », car le capital intellectuel compte autant que le capital financier dans notre système scolaire. On comprend toutefois que le député de Seine-et-Marne ne souhaite pas s’en prendre à cette clientèle électorale, probablement la dernière du parti qu’il accompagne dans son agonie

Qu’importe ! Fort de ce relevé statistique établi en introduction de sa réflexion, Olivier Faure tire la conclusion que certains peuvent plus facilement réaliser leurs projets que les autres. Il en déduit l’obligation de corriger une « inégalité », qui est en réalité une injustice.

Ce qui, bien que déjà connu de tous, aurait pu être l’ouverture d’un renouvellement des propositions de la gauche, dont on attend avec illusion, mais sans espoir, qu’elle se préoccupe de la réussite de chacun, se perd alors dans un entremêlement de confusion et de banalité socialiste.

Car la réponse apportée à cette situation injuste est de mettre à disposition de tous ceux qui arrêtent leurs études de façon prématurée une coquette somme d’argent.

Plus doué pour le marketing politique que la rénovation programmatique, Olivier Faure propose d’appeler cette nouvelle aide le « capital républicain », qu’il décrit ainsi :

« Le capital républicain prendrait la forme d’un soutien monétaire de l’ordre de 60 000 euros pour toute personne qui sortirait du système scolaire sans diplôme […] Il serait ensuite dégressif, de l’ordre de 30 000 euros pour une sortie au niveau du bac par exemple, jusqu’à atteindre 0 euro au niveau bac+2 ».

Évidemment, « ce capital républicain serait mobilisable à tout moment de la vie ».

À l’évidence, le Parti socialiste n’a jamais entendu parler d’un concept secret mais déterminant que les économistes appellent « incitation ». Quel effet aura sur un jeune qui hésiterait à poursuivre ses études la possibilité de percevoir immédiatement une somme équivalente à plus de trois années de SMIC net ?

À l’évidence également, il n’a pas bien intégré non plus que des études courtes n’étaient ni un déshonneur ni un nécessaire échec humain et social…

Plus grave encore : à la lecture de l’ouvrage, on peine à comprendre quelle injustice cette somme permettra de réparer. En réalité, cette proposition qui se veut audacieuse correspond, comme souvent avec la pensée redistributionniste, à un renoncement : à défaut de permettre aux jeunes de poursuivre leurs études, le Parti socialiste leur propose une compensation, une réparation. Ils n’auront pas les mêmes chances, mais au moins auront-ils un gros chèque !

Attention, Olivier Faure insiste : le socialisme est responsable et refuse « la redistribution aveugle de subventions sans contrepartie ».

Dès lors, « il est proposé que ces versements soient liés à la présentation d’un projet détaillé de la part du récipiendaire et que le bénéfice du capital républicain soit conditionné à un accompagnement complet du service public à l’emploi et à la formation et de la Caisse des dépôts ».

Bien sûr, « il semble particulièrement opportun de confier son pilotage à une structure nationale ». Autrement dit, il recommande de mettre en place un gigantesque appareil administratif de validation et de contrôle. La France en manquait !

Le lecteur se frottera les yeux. Toute prétention à l’originalité s’effondre. L’intelligibilité de la proposition également, tant les pages d’explication de la mesure semblent obscures.

 

Que conclure de cette lecture ?

D’abord, que l’obsession égalitaire qui consiste à vouloir réaliser l’égalité de fait et à voir dans l’égalité réelle la réponse à toute question sociale est décidément mortifère pour la société et fatale pour l’intelligence. La lecture du livre d’Olivier Faure reprend ainsi la rengaine de la culpabilité des riches, de la taxe comme solution à toute question politique, du pilotage administratif de la société comme toute ambition sociale.

Ensuite, qu’à l’évidence, une partie de l’élite politique n’a toujours pas fait le diagnostic de ce qui dysfonctionne dans le pays. En matière d’égalité des chances, le principal défi consiste à réformer ce qui constitue le principal obstacle à sa réalisation : le système éducatif, qui s’effondre non en raison d’un défaut de ressources mais d’un excès de contraintes administratives et d’un défaut de pilotage criant. Aussi difficile que cela soit à admettre pour un parti qui vénère la dépense publique, les défaillances du service public sont aujourd’hui les principales sources d’injustice en France.

Enfin, évidemment, qu’aucune proposition sérieuse n’est susceptible d’émerger du Parti socialiste avant longtemps – s’il survit jusque-là. C’est le seul et bel intérêt de ce livre.

L’Europe populiste nous salue bien

On s’habitue sans se résigner, ni peut-être comprendre.

Jadis qualifiées de séisme suscitant la sidération, les victoires de partis qualifiés de populiste, ou d’extrême droite (nationaliste-conservateur serait plus exact) par analystes et commentateurs deviennent habituels en Europe. Une tendance inquiétante, vu la faible appétence de la plupart d’entre eux pour les libertés, ou leur complaisance envers le Kremlin. Mais qui devrait surtout pousser dirigeants et relais d’opinion, au lieu d’évoquer rituellement le « retour aux heures les plus sombres », à se poser LA question fondamentale ; « qu’est-ce qu’on a foiré grave pour que ça tourne ainsi ? ».

La dernière déflagration en date est évidemment venue des Pays-Bas où le parti PVV a triomphé lors des législatives du 22 novembre dernier, avec 24 % des voix, neuf points de plus que le second de centre gauche. Un choc pour une société néerlandaise longtemps prise pour exemple de la « coolitude cosmopolite ». Mais la coolitude, visiblement, on en revient.

Le PVV s’ajoute à une liste qui commence à être impressionnante dans l’Union européenne. Les partis dits populistes figurent désormais, selon les sondages, ou les dernières élections nationales, à la première ou la deuxième place, avec 20 à 25 % des voix, dans plus de la moitié des pays de l’Union européenne, regroupant les trois quarts de la population de l’ensemble. Alors qu’il y a quinze ans ils se trouvaient dans les tréfonds électoraux, sauf en France et en Autriche.

 

L’extrême droite aux deux premières places dans la moitié des pays de l’Union

Ils sont premiers, donc, aux Pays-Bas, mais aussi en France, avec le Rassemblement national, en Italie, où Giorgia Meloni est même chef du gouvernement depuis quatorze mois, en Pologne (PiS, au pouvoir jusqu’aux dernières législatives), en Belgique (N-VA), Slovaquie (Smer), Croatie (HDZ), Autriche (FPO), Hongrie (Fidesz au pouvoir). Et au deuxième rang en Finlande (où ils participent à la coalition au pouvoir), Suède (soutien sans participation), Estonie, Slovénie, Tchéquie, et surtout en Allemagne, où l’AfD, avec 22 % des voix selon les sondages et les dernières élections partielles dans des Länder, n’est plus qu’à 4 points du parti historique, la CDU-CSU. Impensable il y a quatre ans.

Ces quinze pays concentrent exactement 78 % de la population de l’Union européenne.

Les douze pays échappant au phénomène sont Malte, Chypre, Grèce, Irlande, Bulgarie, Lituanie, Lettonie, Danemark, Roumanie et Espagne. Et encore, Madrid n’a-t-il dû de ne pas figurer dans la première liste qu’à l’effondrement durant la dernière campagne des législatives du parti Vox, qui a terminé troisième, alors que les sondages lui laissaient entrevoir une deuxième place aisée.

De quoi cet essor, qui ne semble pas encore avoir atteint son apogée et laisse présager d’élections européennes… dévastatrices au printemps, est-il le signe ?

 

Le populisme, concept intellectuellement paresseux

Le concept de populisme, tout d’abord, n’est pas dénué (tout comme son cousin le complotisme, mais c’est une autre histoire) d’une certaine paresse intellectuelle, et semble surtout servir à discréditer les trublions et tout nouvel entrant sur le marché politique qui menaceraient « les gens en place et les corps en crédit », comme disait Beaumarchais.

Attention à ne pas dénoncer la « populace » avec trop de condescendance, car il ne faut pas oublier que populo désigne le peuple par lequel et pour lequel on gouverne en démocratie (même s’il faut admettre, comme disait Churchill qu’« aucun sentiment démocratique ne peut sortir complètement indemne de cinq minutes de conversation avec un électeur ordinaire »). Certes, populo, qui vient du latin, est moins chic que le grec démos, racine de démocratie, mais ne pas oublier que, à l’inverse, on retrouve démos dans « démagogie », gouverner en jouant sur les peurs et des solutions simplistes qui ne marchent pas.

Or, si les partis dont il est question ici sont clairement démagogues, ils n’ont pas l’exclusivité de la chose, les partis dits mainstream ne rechignant pas à promettre que demain on rase gratis, que le système de retraite par répartition est insubmersible, ou que ce n’est pas bien grave d’aligner 50 exercices budgétaires dans le rouge…

« Parti voulant renverser la table, ou critiquant de manière virulente la classe politique traditionnelle » semblerait donc plus pertinent, quoiqu’un peu long. À moins qu’il ne faille tout simplement les désigner comme « nationaliste », ou « souverainiste ».

 

Contre l’immigration, Bruxelles et la classe politique en place

Au-delà de différences logiques, vu leur diversité géographique et historique (certains sont impeccablement atlantistes, comme la formation de Giorgia Meloni, d’autres admirent Vladimir Poutine, comme les chefs du PVV, du RN, ou de Fidesz), ces partis semblent avoir trois points communs : un rejet viscéral de la classe politique actuelle, de l’immigration, et de l’Union européenne.

Un rejet, dangereuse déclinaison de l’éternel « tous pourris », et injuste envers une bonne partie des élus. Mais cela aiderait si la classe politique en place tendait moins le bâton pour se faire battre par certains discours condescendants, ou déconnectés de ce que vivent « les gens ».

Juste deux exemples parmi mille : le « sentiment d’insécurité contraire aux chiffres » mis en avant par le ministre français de la Justice pour estimer qu’en fait la sécurité est satisfaisante, et la dénonciation d’une « récupération » après le meurtre du jeune Thomas à Crépol, comme s’il devait être interdit aux politiques de s’exprimer sur un fait de société, en l’occurrence l’existence de bandes prêtes à tuer parce qu’elles se sont vu refuser l’entrée à un bal.

Ces partis fustigent aussi l’Union européenne, mais ne vont pas, ou plus, jusqu’à en prôner la sortie. Seul le PVV veut un référendum en vue d’un équivalent néerlandais du Brexit, et il n’est pas certain que ce projet survive aux tractations pour former une coalition.

Il faut toutefois admettre que le projet européen tel qu’il se tricote depuis Maastricht voudrait se faire détester qu’il ne s’y prendrait pas autrement. Pondant interdits et obligations tatillonnes avec une régularité de poule en batterie, comme si Bruxelles était désormais en roue libre sous le contrôle désinvolte des gouvernements.

Saluons la dernière trouvaille, la tentative d’interdire les boîtes à camembert en bois. Les technocrates et férus de fédéralisme pourraient se douter que cela risque de mal finir, et qu’un jour les électeurs jettent le bébé (la respectable construction européenne de 1957-1992) avec l’eau du bain des règlementations tatillonnes donnant envie de crier « mais foutez-nous la paix ! », alourdie depuis quelques temps par une écologie punitive (qui a suscité l’essor en quelques mois, aux Pays-Bas encore, du parti anti écolo BBB devenu première formation du pays aux sénatoriales, avant de s’écrouler aux législatives de mi novembre, faute de programme national) à l’impact désastreux sur prospérité et emplois.

Mais on dirait que c’est plus fort qu’eux : interdisons, règlementons, imposons, encore et toujours.

 

Trop tard, trop peu

Enfin, et surtout, l’essor des partis nationalistes, ou d’extrême droite, illustre un rejet désormais majoritaire, parfois massif dans l’opinion (et pas seulement à droite), de l’immigration extra-civilisationnelle, c’est-à-dire appelons un chat un chat, en provenance de pays musulmans. Une immigration sur-représentée, malheureusement, dans la délinquance et la violence politique, comme l’illustrent les meurtres, ou attentats commis au cris d’Allah Akbar en France, ou en Allemagne.

Les partis de gouvernement ont compris le message, qui durcissent depuis quelques années leur politique, en mode un pas en avant deux en arrière, à l’image du parti du Premier ministre Mark Rutte, aux Pays-Bas. Trop tard, trop peu aux yeux des Néerlandais, ce qui explique qu’il ait perdu le pouvoir. Noter, toutefois, qu’on peut être dur sur l’immigration sans être « facho » pour autant, comme l’illustre la politique suivie par la coalition de centre gauche au Danemark. Pays où, sans doute pas un hasard, l’extrême droite n’existe quasiment pas. Et un parti de gauche anti-immigration vient d’être lancé en Allemagne.

Enfin, les partis anti-système profitent de l’exaspération générale sur le niveau des impôts (sans proposer eux-mêmes grand-chose de convaincant sur ce point) pour des services publics déficients et l’appauvrissement de la classe moyenne, ou du moins la stagnation en Europe du revenu net disponible hors dépenses contraintes. Selon le cabinet GFk, le revenu brut moyen par habitant dans l’Union européenne était équivalent l’an dernier à 43 245 euros, soit 31 % de plus, inflation déduite, qu’au début du siècle. Une progression d’à peine 1,15 % par an. Aucune autre grande zone économique au monde n’a enregistré un résultat aussi piteux.

 

Le brun n’est malgré tout pas à l’ordre du jour

Tout cela augure-t-il d’une « vague brune », comme le redoutent les éditorialistes ? Encore faudrait-il pour cela qu’ils soient authentiquement « bruns », c’est-à-dire fascistes. Si les mots ont encore un sens, cela impliquerait qu’ils cochent peu ou prou les six principales cases de la définition du fascisme reconnue par les historiens :

  1. Endoctrinement de masse
  2. Chef charismatique
  3. Fusion État/Parti
  4. Refus du multipartisme
  5. Économie au service de l’État/nation
  6. Projet d’expansion territoriale, avec en option l’antisémitisme (le parti de Mussolini ne l’était toutefois pas jusque vers 1935).

 

À peu près aucun des partis concernés ne correspond à cette définition.

S’il n’y a pas lieu de craindre un retour du fascisme, concept hyper dévoyé par des gens à la culture historique quasi nulle, en revanche, cette vague a des aspects inquiétants.

Tout d’abord, s’il est légitime de critiquer les politiques d’immigration, ou de croire très aventureux une société multi-civilisationnelle, ces partis « populistes » s’appuient généralement sur un vieux fond xénophobe. Le racisme affleure derrière les discours devenus policés. En outre, ils sont pour la plupart, hormis en Italie, très indulgents envers le Kremlin, qui n’a clairement pas que la prospérité et la stabilité de l’Europe comme priorité.

Enfin, leurs programmes ne tiennent pas debout sur le plan économique, sauf là encore en Italie (dont le gouvernement Meloni ne s’est pas révélé être fasciste, au grand dam de Libé). En raison de l’insatisfaction légitime des citoyens devant le délabrement des services publics, ou la concurrence des industries étrangères, ils proposent simplement… davantage d’argent pour les services publics, sans s’interroger sur management, concurrence, etc, c’est-à-dire davantage d’impôts et de dette, comme si on n’était pas déjà au taquet là-dessus. Et succombent aux sirènes du protectionnisme sans visiblement réaliser que les pays protectionnistes, généralement, s’appauvrissent.

Bref, il n’existe pas encore de populiste libertarien européen à la sauce Javier Milei, élu président en Argentine, qui viendrait au moins dépoussiérer le débat, voire donner un coup de pied dans la fourmilière…

Ne laissons pas Sylvie Brunel devenir la prochaine victime de la cancel culture des collapsologues français

#climat #agriculture Suite (et fin ?). Par « appréhension », la géographe Sylvie Brunel interviendra finalement en visio ce vendredi soir à @ChemilleenAnjou https://t.co/cAnvmG6NiI via @courrierouest

— Yves Boiteau (@YvesBoiteau1) November 24, 2023

Bien plus qu’un faits divers : la grande géographe Sylvie Brunel est en voie de cancellisation

Une lectrice de mon blog m’a mis sur la piste d’un – appelons-le ainsi pour le moment – fait divers. Mme Sylvie Brunel devait animer le vendredi 24 novembre 2023 une conférence-débat à Chemillé-en-Anjou (Maine-et-Loire) à l’invitation de la municipalité. Selon le site de la commune :

 

« Face aux nombreux défis qui se dressent devant nous dans notre monde contemporain : climat, énergie, migrations, eau, vivre ensemble, la commune de Chemillé-en-Anjou souhaite alimenter nos réflexions collectives. Elle organise pour cela une conférence-débat animée par Sylvie Brunel, géographe. Vous êtes tous invités à participer à cette soirée.

[…]

Convaincue que :

  • ces enjeux mondiaux sont l’affaire de tous, touchés que nous sommes dans notre quotidien,
  • c’est la mobilisation de tous qui permettra de construire des solutions à toutes les échelles,
  • le préalable à l’action est une bonne compréhension de la situation, des enjeux, des points de vue chacun,

la commune de Chemillé-en-Anjou vous invite à participer à une conférence débat organisée… »

 

Sylvie Brunel : la nouvelle cible des collapsologues et des décroissantistes

Mme Sylvie Brunel est une des grandes voix françaises de l’humanisme. Ancienne présidente de l’association Action contre la Faim, elle est une spécialiste de l’Afrique et des questions de développement et de famine. Elle est aussi une des (hélas rares) avocates de l’agriculture qui nous nourrit.

Son discours, solidement étayé, est aux antipodes de ceux qui ont pignon sur rue, des collapsologues, prêcheurs d’apocalypse et autres missionnaires de la décroissance, bref des défaitistes et capitulards face aux défis qui doivent être relevés.

Cela tombe bien pour cette faune et leurs adeptes : Mme Sylvie Brunel a aussi contribué à des écrits et tenu des propos qui ont été taxés de climatoscepticisme (qu’elle réfute aujourd’hui). Le très neutre et objectif (ironie) Wikipedia relève ainsi, par exemple :

« À plusieurs reprises, elle est contredite par des climatologues pour des positions jugées climatosceptiques. »

Et :

« En juin 2022, lors de la canicule qui frappe la France, Sylvie Brunel déclare que ces températures excessives, « c’est quand même le quotidien quand vous vivez à Dakar« . Ces propos sont qualifiés de climatosceptiques par plusieurs spécialistes dont Magali Reghezza, géographe spécialisée dans la vulnérabilité sociale aux changements environnementaux, qui contestent la légitimité scientifique de Sylvie Brunel. »

C’est aussi un horrible blasphème que d’écrire dans Le Monde, en 2019, que « Le changement climatique n’est pas forcément une mauvaise nouvelle » – dans un article bien plus subtil que ce que le titreur en a retenu – en faisant référence à notre histoire du climat, et des disettes et famines. C’est ici, incidemment, une occasion d’honorer la mémoire d’Emmanuel Le Roy Ladurie. Notons que madame Brunel est revenue sur cette tribune de 2019, expliquant qu’elle ne la signerait plus aujourd’hui.

 

Retour sur la tentative d’annulation de la conférence de Sylvie Brunel par un collectif 

Et donc une pétition a circulé pour s’opposer à la venue de Mme Sylvie Brunel, à l’initiative de Raphael Traineau, conseiller municipal de Chemillé-en-Anjou.

« Il est inconcevable de laisser une tribune à une telle personne qui utilise sa notoriété médiatique pour diffuser de fausses informations auprès de personnes non initiées aux sujets scientifiques, y compris des citoyens et élus de bonne foi. De plus, cette conférence doit se tenir sans contradicteur, ce qui, dans ces conditions, va à l’encontre de toute démarche d’information sérieuse. 

Hé bien voilà ! La liberté d’expression à la mode activiste de l’écologisme politique…

La presse rapporte que parmi les initiateurs figurent des élus locaux. Nous avons aussi trouvé sur X (anciennement Twitter) deux incitations à signer la pétition, dont une d’un directeur de recherche du CNRS et élu municipal EELV d’Angers. La liberté d’expression, les principes fondamentaux de notre démocratie, vous dis-je…

Ah oui, sans contradicteurs selon la pétition ?

Citons-la à nouveau : 

« Dans ces conditions, nous demandons à la mairie de Chemillé-en-Anjou d’annuler la conférence de Sylvie Brunel. Dans le cas où elle serait maintenue, nous n’y assisterons pas afin de ne pas apporter de crédit à cette entreprise climatosceptique. »

Ce qui a été organisé était pourtant une… « conférence-débat » ! On pourra entendre la réaction du maire de Chemillé-sur-Anjou ici sur YouTube, à partir de la minute 28.

Mme Sylvie Brunel avait aussi expliqué :

« Ma conférence porte sur les risques qui nous menacent et les réponses qu’il faut leur apporter, en mobilisant tous les acteurs et à toutes les échelles. Cette conférence ne remettra absolument pas en question les périls climatiques. »

Il faut croire qu’il n’y a pas eu qu’une pétition. Par « appréhension », Mme Sylvie Brunel a décidé d’intervenir en visio… Mais à l’heure où nous écrivons, nous ne savons pas si la conférence-débat a eu lieu.

#climat #agriculture A @ChemilleenAnjou en #MaineetLoire, une pétition s’est élevée contre la venue ce vendredi pour une conférence-débat de la géographe Sylvie Brunel, jugée « climatosceptique ». Ses initiateurs s’expliquent… 1/2⤵ https://t.co/LqfJzXd7OG via @courrierouest

— Yves Boiteau (@YvesBoiteau1) November 23, 2023


Que faut-il comprendre par « appréhension » ? Ouest-France n’en a pas dit plus. Ce n’était certainement pas l’appréhension de devoir affronter une horde de contradicteurs…

 

Ne laissons pas le dernier mot aux décroissantistes et aux terroristes intellectuels

On peut fort bien comprendre que, tout compte fait, cet événement n’est pas un simple fait divers, mais une atteinte grave aux fondamentaux de notre démocratie. Ou d’un avant-goût des chasses aux mal-pensants qui se produiront si, d’aventure, un groupe transpartisan de députés (hors RN et LR) parvenait à produire et faire passer une proposition de loi sur « la responsabilité des médias dans le traitement des enjeux environnementaux et de durabilité ».

Tensions sociales en France : l’étatisme à l’origine du chaos

Alors que la France est aujourd’hui confrontée à des tensions sociales et ethniques d’une ampleur inédite dans son histoire contemporaine, la principale réponse politique consiste à réclamer un renforcement du rôle de l’État. Cet automatisme étatiste est pourtant ce qui a conduit le pays dans son impasse actuelle.

 

Depuis la fin des années 1960, l’État a construit un arsenal sans précédent de politiques sociales censées corriger les inégalités et prévenir les conflits supposément inhérents à la société française. Las, non seulement ces politiques n’ont pas empêché la montée des tensions, mais elles les ont largement alimentées.

Tout d’abord, l’augmentation significative du salaire minimum en France, initiée en juin 1968 et poursuivie au cours des quatorze années suivantes, a eu des répercussions notables sur l’accès des jeunes issus de l’immigration au marché du travail légal. Dès les années 1970, le niveau élevé du SMIC a rendu coûteuse leur embauche pour les employeurs, poussant ainsi ces jeunes vers l’économie souterraine et ses divers trafics.

Après un certain âge, les jeunes des quartiers qui parvenaient finalement à accéder à l’emploi bénéficiaient de contrats subventionnés, financés par des milliards alloués aux réductions de charges sociales. Cette stratégie visait à atténuer le risque d’un chômage de masse, conséquence directe du niveau élevé du salaire minimum.

 

Parallèlement, les politiques de logement de masse en faveur des immigrés, amorcées elles aussi au cours des années 1960, ont créé une incitation puissante à la venue et au maintien sur le territoire français de nouveau immigrés, surtout d’Afrique du Nord. L’État s’est trouvé pris au piège de ces politiques dès les années 1970, étant donné l’impossibilité de procéder à des expulsions massives face à des grèves de loyers généralisées dans les logements sociaux.

Pire, l’État a, involontairement, encouragé les activités illicites et la violence en dirigeant des financements vers les quartiers sensibles. Ces fonds, alloués à travers diverses allocations et programmes sociaux, tels que des salles de sport, des maisons de jeunes et des programmes d’éducation prioritaire, ont représenté des milliards de francs, puis d’euros. Autrement dit, plus un quartier générait de désordres et de violences, plus il recevait de subsides de la part de l’État.

Difficile dans ces conditions de s’étonner que la délinquance et les comportements violents soient enracinés au sein de communautés vivant depuis des décennies, non pas de l’échange marchand librement consenti, mais de trafics illicites et de l’extorsion des subventions étatiques.

 

Certes, diront certains, l’État a largement échoué dans ses politiques sociales.

Mais maintenant qu’il est question d’insécurité croissante, ne revient-il pas à ce même État d’intervenir énergiquement ? Là encore, le bilan des dernières décennies devrait inciter à la prudence. Même dans le domaine de la sécurité, l’État a failli à assurer un degré élevé de protection des personnes et des biens, et a parfois même aggravé la situation.

Ainsi l’État s’est-il lancé dans les années 1970 dans une politique migratoire visant à restreindre les mouvements de personnes, que rendaient pourtant inéluctables les révolutions dans les transports et les communications à l’échelle mondiale, sans parler des incitations créées par les politiques sociales elles-mêmes. Cette politique migratoire restrictive a surtout eu pour effet de grossir les rangs des migrants clandestins.

Ces derniers, ayant souvent dépensé toutes leurs économies pour payer les réseaux criminels facilitant leur passage irrégulier, se retrouvaient endettés et parfois contraints à la criminalité par ces mêmes réseaux. Face à cette situation, l’État a opté pour des régularisations périodiques des clandestins, tentant ainsi de les intégrer, de les éloigner de la marginalité et de la criminalité, mais consolidant paradoxalement un circuit d’immigration irrégulière.

En opposition à la criminalité ainsi alimentée par les politiques publiques, n’oublions pas que la majorité des services de sécurité est assumée par des acteurs privés, via les installations anti-intrusion, les sociétés de surveillance, ou les instruments de défense personnelle. Autant de preuves que le marché libre est souvent plus efficace que l’État pour répondre à ce type de besoins.

Ces observations conduisent à un constat clair : les politiques étatiques des dernières décennies ont échoué à atténuer les tensions sociales et ethniques ainsi que l’insécurité. Loin de réduire les inégalités, ces politiques n’ont fait que renforcer la spirale de la violence dans les quartiers en confortant indirectement les comportements délinquants.

Il est urgent de tirer les leçons de l’échec manifeste des politiques actuelles et de rompre avec l’illusion étatiste. Cela implique, à terme, de renoncer à des politiques migratoires inefficaces et contreproductives. Mais plus immédiatement cela nécessite de mettre fin à l’excès de réglementations, d’allocations et de programmes sociaux qui, sous couvert de justice sociale, ont mené à l’exclusion et à la mauvaise utilisation des fonds publics.

Seul un changement de paradigme, avec un désengagement de l’État au profit du marché libre, permettra de restaurer les incitations positives à la responsabilité individuelle et de renforcer le lien social. C’est de cette manière que la France retrouvera cohésion, stabilité et prospérité.

Quels remèdes pour la crise du secteur immobilier ?

Le Parisien donnait récemment la parole à un courtier en crédit immobilier qui se plaignait de voir sa clientèle divisée par deux. Moins d’acheteurs, effrayés par des taux qui sont passés de 1 % à 4,5 % par an pour des prêts d’une durée de 20 ans.

Le magazine Challenges évoque les fermetures et même les liquidations d’agences immobilières.
Un directeur d’agence Century21 se plaint d’avoir vu son chiffre d’affaires divisé par deux.

 

Le secteur immobilier est en panne

Oui, l’époque est révolue où dès qu’une enseigne commerçante changeait de mains dans un quartier, c’était presque toujours au profit d’une agence immobilière. Or, que je sache, on achète moins souvent de biens immobiliers que de pains, de gâteaux, de fleurs, de viandes ou encore qu’on va chez le coiffeur… La multiplication excessive des points de vente est bien souvent un signe de bulle.

Les promoteurs s’angoissent nous indique Immomatin : « on ne réduit pas les coûts fixes aussi vite que la baisse des volumes. L’équilibre d’exploitation devient difficile à trouver. Il est donc nécessaire de compter un peu plus. Les fonds propres vont être touchés, de l’argent sera perdu sur les ventes en cours. »

Comme d’habitude, si personne ne se plaint lorsqu’une bulle gonfle, tout le monde pleurniche dès qu’elle commence à très légèrement se dégonfler. Car pour l’instant, le secteur immobilier est en panne, mais l’ajustement des prix à la baisse n’est pas fait.


Certes, les prix ont légèrement chuté alors même que 2022 et 2023 sont des années de fortes hausses des prix à la consommation. Mais il s’agit d’une baisse anecdotique par rapport à la hausse précédente.

Les professionnels malheureux sont unanimes : les vendeurs ne veulent pas encore suffisamment baisser leurs prix pour allécher les acheteurs. Les ventes immobilières contraintes (divorces, décès, naissances) représentent maintenant la moitié des transactions selon Capital, dont le volume total est en baisse de 16 %.

Les promoteurs, les banques (qui prêtent aux promoteurs), les agents immobiliers… tous ont leur petite idée qui consiste à demander au gouvernement d’intervenir afin de leur éviter de subir les désagréments du grippage du marché.

Tout ce beau monde s’est regroupé dans une Alliance pour le logement pour demander des « mesures d’urgence » :

  • davantage de Pinel (baisse d’impôt pour les propriétaires bailleurs qui achètent un logement neuf)
  • davantage de prêts à taux zéro (PTZ) pour les primo-accédants modestes donc toujours
    plus de création monétaire
  • alignement de la fiscalité des plus-values des locations meublées
  • TVA réduite sur les logements locatifs sociaux
  • éco-PTZ pour les copropriétés

 

Comme d’habitude, un enchevêtrement de taxations, subventions, « niches », réglementations, au profit des uns ou des autres qu’on tricote et qu’on enchevêtre inlassablement…

 

La loi doit servir l’intérêt général, c’est-à-dire celui de l’acheteur

Dans ses Sophismes économiques, Frédéric Bastiat dégage une règle simple exposée dans le chapitre « Abondance, disette ».

Le législateur ne devrait avoir qu’un seul objectif : faciliter la vie du consommateur, de l’acheteur, pour une raison très simple : n’importe qui est potentiellement acheteur de quelque chose. L’intérêt est donc général pour qu’il y ait le plus de biens proposés. Tandis que les producteurs ou intermédiaires ne voient que leurs spécialités. Ils sont mus par des intérêts particuliers et la rareté ne leur est pas
nécessairement nuisible.

 

Les Français veulent des logements accessibles et peu chers

« L’État prend le contrepied des Français. Ceux-ci aspirent manifestement à devenir propriétaire, d’une maison, neuve, dans un environnement pas trop dense ; on leur répond qu’il serait préférable de louer un appartement ancien (mais rénové) dans une métropole. Je ne juge pas les motivations de l’État, je dis simplement qu’on ne fait pas le bonheur des gens contre leur gré. Il est temps de remettre de l’humain dans la politique du logement » – Yannick Borde, président de Procivis

Monsieur Borde n’a peut-être pas tort pour les aspirants propriétaires qui seraient 61 % selon un récent sondage. Mais il existe aussi 39 % des gens qui recherchent des logements à louer à un prix abordable pour certaines autres raisons : mobilité professionnelle, tourisme, etc.

Les remèdes consisteraient donc à détricoter tout ce qui nous a conduits au pied du mur : moins d’impôts, de taxes, de droits de mutation, de normes pénalisantes pour le bâtiment ou les logements déjà construits, de réglementation des loyers, de rigidité sur le foncier, de contraintes sur les communes.

Sans oublier aussi l’éléphant dans le placard : les manipulations de taux d’intérêt par la Banque centrale européenne qui ont aussi contribué aux prix excessifs.

David Lisnard, le président de l’Association des Maires de France, qui fustige sur M6 le logement social, déclarait :

« S’agissant du logement, la crise est structurelle. Elle marque l’échec du dirigisme d’État. On a tué le marché du logement, c’est-à-dire que ce qui devrait être l’exception, le logement social pour les plus pauvres est devenu la règle : 68 % des Français sont désormais éligibles au logement social ».

Crépol : l’éléphant dans la pièce

C’est une fable russe de 1814 qui a donné lieu à l’expression éponyme en anglais « The elephant in the room », pour désigner quelque chose d’énorme que tout le monde fait semblant de ne pas remarquer (1) car ce serait admettre quelque chose d’embarrassant, voire terrifiant.

L’attaque de jeunes gens par une bande armée de couteaux à Crépol, il y a dix jours, lors de laquelle un adolescent, Thomas, a été tué, est seulement le dernier évènement illustrant cette fable. Tout le monde peut voir de quoi il s’agit, mais beaucoup font semblant de croire qu’il s’agit juste d’un banal fait divers, comme il en a toujours existé et en existera toujours.

Eh bien, pas du tout.

Cette attaque sidère et révolte, plus encore que les attaques commises par des « déséquilibrés » comme il en a toujours existé (ce qui ne les empêche pas forcément d’être endoctrinés ou téléguidés), peu ou prou oubliés après les traditionnels peluches-bougies-marches blanches, à l’image des trois jeunes poignardés à Angers en juin 2022 par un Soudanais, de la petite Lola kidnappée, torturée et tuée par une Algérienne sous OQTF, des quatre enfants blessés à Annecy par un Syrien en situation irrégulière en France, etc.

 

Une icône attaquée

Plus encore parce que l’attaque à Crépol a touché une icône, que l’on croyait préservée, de la ruralité française, une fête de village joyeuse et tranquille. Un drame équivalent avait d’ailleurs failli se produire deux semaines auparavant dans un village du Lot et Garonne, Saint-Martin-Petit.

Elle est aussi, par son ampleur, un mort et dix-huit blessés, sans commune mesure avec les bastons de bals de jadis. Il s’agit bel et bien d’un meurtre en bande organisée, un des chefs d’inculpation des neufs suspects, mené par des jeunes voulant « planter du Blanc », d’après ce qu’ont entendu neuf témoins. Si les comparaisons de certains avec des razzias ou des pogroms sont très exagérées, l’aspect raciste de cette sorte de « ratonnade » (comme il n’en existe heureusement presque plus à l’encontre des Maghrébins depuis 1973) à l’envers, fait peu de doute.

Enfin, et sans doute surtout, parce que les réactions des proches des mis en cause à Romans-sur-Isère, sur les réseaux sociaux ou BFM, montrent un univers mental totalement étranger, pour ne pas dire antagoniste, à celui de la grande majorité, autochtones ou d’origine immigrée, de la population de ce pays.

Derrière les dénonciations convenues de la violence, leur première inquiétude n’est pas que les habitants de Crépol soient traumatisés, mais plutôt, « moi d’abord, » d’être eux même ostracisés (ben, quand des jeunes issus de votre quartier en tuent d’autres, c’est un peu logique d’être circonspect, voyez-vous). Ils jugeaient aussi « normal » que leurs amis fussent armés de couteau pour se défendre en cas d’embrouilles. Aucun ne semble ébaucher un début de questionnement sur leurs responsabilités, ou défaillances de parents, éducateurs, ou copains ; non, il n’est pas normal d’emmener au bal une lame de 25 cm. Tous adhèrent au récit selon lequel leurs camarades draguaient tranquillement des filles après avoir payé l’entrée de la fête, avant d’être agressés par des rugbymen jaloux (les participants à la fête évoquent plutôt l’attaque de vigiles voulant les refouler après avoir repéré des couteaux).

Cet esprit tribal instinctif, cette réalité psycho-sociale parallèle illustre bien les propos il y a cinq ans de l’ancien ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, décédé samedi, trop peu écouté dans son propre camp, la gauche, selon lequel le vivre ensemble serait devenu « vivre côte à côte », avant peut-être demain de devenir « vivre face à face ». La simple coexistence, avant l’antagonisme, voire un jour l’affrontement.

 

La sécession à l’œuvre

Les agresseurs de Crépol font partie visiblement de cette jeunesse laissée à elle-même, pour qui la vie humaine ne vaut pas grand-chose, traînant dans ces quartiers où plus grand monde n’écoute les chibanis (les vieux sages en arabe dialectal algérien) mais qui ne sont pourtant pas si démunis que cela en équipements, ou dépenses de la politique de la Ville ; la maire de Romans-sur Isère a reconnu que sa ville avait bénéficié de 140 millions d’euros de l’État ces dernières années. Ils n’ont pratiquement pas d’autre horizon que leur bande, et le port d’un couteau leur paraît une condition sine qua non de virilité. Une contre-société avec ses codes sommaires, prévalence de la bande, territorialisation à l’extrême et mépris pour les « autochtones » et leurs institutions.

Quand des gens vous désignent comme des « eux », il vient fatalement un moment où il est difficile de les considérer comme des « nous ». Cette partition officieuse ne se cantonne d’ailleurs pas aux aspects sécuritaires. Dans le système éducatif, selon une étude récente, en ZEP, 79 % des élèves ne comprennent pas vraiment la langue française et 83 % ignorent les bases du calcul…

Ce n’est pourtant pas faute d’alertes sur la montée de cette « contre-société », depuis notamment la parution des Territoires perdus de la république (Emmanuel Brenner et al, 2004), ou Une France soumise (Georges Bensoussan, 2017), sans oublier L’étrange suicide de l’Europe (Douglas Murray, 2018).

 

Le déni et pas de vagues

Mais les pouvoirs publics, et certains médias « progressistes » continuent de récuser ce constat.

À l’image des dépêches d’agence évoquant d’abord une simple « rixe » à Crépol, mot évoquant un simple échange de coups de poing où les torts seraient partagés, ou du ministre de la Justice fustigeant « la récupération », forcément d’extrême droite, de ce « fait divers ».

Pour ne pas être accusé d’extrémisme, ou de récupération, il faudrait donc ne pas commenter ces évènements, ni chercher à en tirer les leçons, ce qui serait pourtant sain et humain ? Faire même semblant de croire qu’ils n’existent pas serait un plus…

Encore une fois, le déni, repousser la poussière sous le tapis et ne pas voir le fameux Élephant dans la pièce, déjà exprimé à maintes reprises par ministres, élus, associations et médias. Qui, il faut « tuer le messager », assimilent toute colère, ou exaspération après ce genre de drame, ou après des attaques habituelles de commissariat, émeutes & tirs de mortiers, à une tentative d’ostraciser l’ensemble de nos compatriotes musulmans, dont la majorité vit aussi mal que les autres l’existence de ces bandes.

"Ceux qui nous gouvernent savent tout, simplement ils voudraient que personne ne dise ce qu'ils savent pour perpétuer le temps d'un mandat l'illusion de l'unité nationale"

➡ C’est l’édito politique de @vtremolet sur #Europe1 pic.twitter.com/F3YF6g4v7n

— Europe 1 (@Europe1) November 27, 2023

Les exemples abondent, mais le plus ridicule est certainement celui du ministre de l’Intérieur prétendant que les bandes de « kaïras » du 9-3 venus dépouiller des supporters lors de la finale de la coupe d’Europe de football en mai 2022 étaient en fait des supporters anglais sans billets…

Sans oublier ceux qui dénoncent un deux poids deux mesures, à savoir que parler de Crépol sans évoquer l’attaque d’un immigré par un septuagénaire raciste dans le Val-de-Marne, reviendrait à repérer les attaques « d’un côté mais pas de l’autre ».

 

Port d’arme blanche : une interdiction fictive

Ce genre de drame interroge aussi sur le fonctionnement de la justice, sans doute tétanisée, comme d’autres, par le « pas de vague » en vigueur depuis sans doute les émeutes de 2005.

La faiblesse des peines prononcées, quelques mois avec sursis, et non exécutées en dessous de deux ans, pour des agressions pourtant souvent graves, a de quoi laisser perplexe, surtout quand on compare avec ce qui se pratique dans d’autres pays européens pour des crimes et délits équivalents. Les adversaires du tout carcéral font valoir, pas forcément à tort, qu’on entre en prison délinquant et qu’on en sort criminel, mais une stratégie « douce » à base de stage de réinsertion ou travaux d’intérêt collectif (qui font bien se marrer les prévenus) a surtout pour conséquence qu’elle persuade des névrosés du couteau qu’ils ne risquent strictement rien.

En fait, en théorie le port d’arme blanche « non justifié » (là est l’astuce) sur la voie publique est puni d’un an de prison ferme. Les racailles y regarderaient sans doute à deux fois avant de se promener armés s’ils savaient qu’ils feront un an de cabane au moindre contrôle policier. Sauf que, savez-vous combien de peines de prison ont été prononcées pour cela depuis dix ans ? À ma connaissance, zéro.

Au passage, combien de morts par arme blanche ? Eh bien, les données précises et fiables n’existent pas, à ma connaissance. Comme si on avait peur de savoir. Les statistiques sur les circonstances, âge des victimes et des prévenus, lieux et motifs des 900 meurtres commis chaque année en France sont détaillées, mais rien sur le type d’armes employées. Tout juste une enquête il y a quelques années établissait-elle que les deux tiers des agressions, suivies ou pas de décès, étaient à l’arme blanche.

Dans le même ordre d’idée, l’interdiction des statistiques ethniques empêche d’évaluer en France la sur-représentation, ou pas, des personnes d’origine étrangère parmi les criminels et délinquants. La Suède et la Finlande n’ont pas ces pudeurs, avec des résultats guère rassurants.

Un déni, une volonté de mettre ce qui dérange sous le tapis qui s’explique au demeurant assez logiquement, par la trouille et la vanité.

 

L’intégration ne va pas toujours de soi

La trouille (le déni est un puissant mécanisme de protection psychologique) de pressentir que tout cela pourrait mener un jour à la guerre civile (évoquée par Jean-Pierre Chevènement, que l’on peut difficilement soupçonner de tentation lepéniste, soulignant en 2019 que « toutes les guerres civiles débutent à bas bruit ») ; ou du moins à des affrontements récurrents qui obligeraient, par exemple, à la constitution de milices privées. Ce serait fun, des hommes armés de fusils fouillant les participants aux fêtes de village…

Et la vanité de croire que l’intégration d’immigrés se ferait naturellement, sans accompagnement spécifique, car cela aurait été condescendant, ou discriminant, du fait que notre société serait si cool et séduisante. Comment pouvoir détester un pays si riche en opportunités de job, de soins et d’éducation gratuits, ou d’allocations, qui avait d’ailleurs su absorber les innombrables vagues migratoires (européennes) jadis ? Les lobbyistes de l’immigration, dont des libéraux un peu candides sur les questions civilisationnelles, ont prétendu pendant quarante ans que, nonobstant des incidents isolés, tout se passerait bien.

En fait, pas vraiment.

Sauf à vivre barricadé dans le huitième arrondissement, la réalité paraît moins angélique. Qui n’a jamais vu quelqu’un se faire traiter de « sale Blanc » ? L’intelligentsia progressiste a, au passage, sa part de responsabilité, qui prétend, narcissisme de culpabilité, que « les Blancs sont le problème » et que les descendants de colonisés auraient au fond raison de nous détester, ou de vouloir prendre une revanche. À force, rien d’étonnant à ce que certains les aient cru.

La réalité est que l’intégration de l’immigration arabo-musulmane, irréprochable pour la majorité, n’a pas du tout marché pour une minorité non négligeable comme l’illustre le drame de Crépol. Certains font semblant de découvrir soudainement l’ensauvagement, selon les termes du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin (un autre titulaire du poste, Jean-Pierre Chevènement, avait évoqué dès 1999 les « sauvageons », terme toutefois moins riche en couteau, évoquant plutôt un arbre non greffé).

L’intégration, surtout en provenance d’un système juridico-politique, l’Islam, qui a une très forte identité et perception de sa singularité/mission d’expansion, ne fonctionne pas bien au-delà de certains effectifs. C’est au demeurant logique et renvoie aux dynamiques à l’œuvre quand une population A d’une certaine culture se mélange à une population B.

Quand, dans un pays, vous êtes ultra minoritaire, sur le plan culturel ou ethno-religieux, vous avez puissamment intérêt à vous fondre dans le moule. Pas forcément à adopter les mœurs locales, personne en France n’a jamais obligé quiconque à manger du saucisson, porter une jupe, ou accrocher un crucifix dans son logement, mais au moins vous avez intérêt à comprendre et accepter les mœurs du pays d’accueil (Montesquieu disait qu’un pays « est fait de ses coutumes bien plus que de ses lois ») et donc, dans l’espace public vous n’imposez pas vos normes, et ne cherchez pas à constituer un bloc politique de défiance, à la limite du sécessionniste. Au-delà d’une certaine proportion (10 % ?), au contraire, le communautarisme, bien au-delà du voile sur la voie publique, des demandes d’horaires de piscine spécifiques, ou du conducteur de bus qui refuse de répondre au salut des femmes, devient une option plus alléchante …

L’intégration a d’ailleurs tellement bien marché que les thuriféraires du vivre ensemble se gardent bien d’aller vivre, ou faire scolariser leurs enfants à Romans-sur-Isère…  Comme disait Péguy, en une variante de la fable russe, il faut un peu de courage pour « voir ce que l’on voit ».

(1) La fable d’Ivan Krylov raconte le périple d’un homme dans un musée qui s’attache aux détails sans remarquer à aucun moment l’éléphant présent à côté de lui.

Crépol : Patrick Cohen met sur le même plan victimes et bourreaux

Il arrive que des « faits divers » fassent tache d’huile, soient plus commentés que d’autres et suscitent une réaction vive dans la société. Ils deviennent alors des faits de société, généralement parce que leur nature s’inscrit dans un arc plus global illustrant un phénomène touchant l’ensemble de notre vie collective. Les Français se disent alors que cela peut « arriver à tout le monde ». La nuit tragique de Crépol, durant laquelle un bal populaire a été attaqué par une bande de jeunes d’une cité voisine de Romans-sur-Isère, causant la mort d’un adolescent et 15 blessés, est de ceux-là.

Pis encore, les divers témoignages de victimes diffusés par les médias à la suite, notamment ceux du Dauphiné Libéré, ont donné une couleur supplémentaire à ce drame, puisque neuf personnes ont rapporté avoir entendu des insultes et des menaces à caractères racistes proférées par les agresseurs qui ont manifesté leur intention d’attaquer des « Blancs » ou des « gwers ». Le terme « gwer », désignant péjorativement les Européens en arabe vulgaire, peut d’ailleurs être distinctement entendu sur l’une des vidéos documentant l’attaque.

 

Un édito sinistre et relativiste

Pourtant, une petite musique sinistre se fait entendre depuis quelques jours, notamment relayée par le chroniqueur de France 5 Patrick Cohen, auteur d’un éditorial d’une outrance et d’une suffisance tristement remarquables. Intitulé « Crépol, la mécanique de la haine et du mensonge », cette sortie télévisuelle de trois minutes entend démonter nos « préjugés », forcément haineux et racistes. Pour Patrick Cohen, les mis en cause n’auraient pas causé d’incident avant la diffusion de la chanson Chiquita du rappeur marseillais Jul, étant venus à l’origine pour « s’amuser et draguer des filles ». Un rugbyman aurait tiré les cheveux longs d’une de ces victimes au moment où passait ce morceau, se moquant de lui en le faisant passer pour la « fille sexy » de la chanson.

Comme de bien entendu, les choses auraient alors dégénéré, les « offensés », pour reprendre le terme employé par Patrick Cohen se voyant dans l’obligation de « sortir les couteaux » pour éviter leur lynchage. Un partout, la balle au centre ? Pensez-donc, une moquerie dans un bal… Si la chose était vraie, ce dont il est toujours permis de douter, qu’est-ce que cela changerait ? Est-ce que ce serait une circonstance atténuante ? Sûrement pas.

Primo, il est interdit de se promener avec des couteaux, et plus encore de s’en servir.

Deuxio, l’ « offense » était bien innocente, propre à l’esprit adolescent et ne saurait placer la victime au niveau du bourreau, ni bien entendu constituer un argument valable pour dédouaner, même partiellement, les assaillants. Tue-t-on pour des plaisanteries ? Pas en France où la culture du droit a fort heureusement supplanté la culture de « l’honneur » depuis plusieurs siècles.

 

Patrick Cohen n’avait pas eu la même pudeur pour le petit Nahel

En outre, Patrick Cohen et les autres n’ont pas eu les mêmes pudeurs lors de l’affaire Nahel. Durant ces quelques jours qui ont fait basculer la France dans un état pré-insurrectionnel, l’infortuné Nahel était présenté comme un « enfant » sans que les circonstances de son décès, provoqué par un refus d’obtempérer et une conduite dangereuse sans permis, ne soient évoquées. Mais le bal de Crépol renvoie probablement à un petit fumet rance, celui de la France des villages, de la France renfermée sur elle-même, qui n’aime pas se mélanger et recevoir des visiteurs de cités qui viennent simplement séduire quelques filles et danser.

Patrick Cohen, donc, mélange sciemment le vrai et le faux. Personne n’a dit que les jeunes de la cité de la Monnaie s’étaient rendus au bal dans l’unique objectif de tuer. Ils auraient probablement préféré éviter devoir passer par la case prison. Non, ce qui a été dit, et qui est vrai, c’est qu’ils sont imprégnés d’une culture violente. Ces « jeunes » ne savent pas se contrôler et tuent dès qu’ils se sentent « offensés », c’est ainsi qu’ils vivent. Cela, la mairesse de Romans-sur-Isère, madame Marie-Hélène Thoraval, l’a dit avec force. Elle connait sûrement bien mieux ce quartier, Tonneau des Danaïdes qui a reçu pas moins de 150 millions d’euros ces dernières années, qu’un éditorialiste parisien placé là pour donner des leçons à la Terre entière.

 

Quand un anti-populiste fait la courte échelle au populisme

Ce que ne comprennent pas certains acteurs médiatiques, c’est que nier les ressentis et les souffrances bien réelles des Français ne fera pas reculer cette « vague populiste » dont ils craignent la puissance. Tout au contraire, cela n’aura pour résultat que de la renforcer. Car ce qui est arrivé à Thomas n’est pas une exception ou un fait isolé, c’est malheureusement devenu banal les week-ends festifs en ville comme à la campagne. La haine des Blancs est aussi une réalité, de la même manière que la haine antijuive. Il ne sert à rien de cacher ce que tout le monde sait depuis bien longtemps. Seule la vérité rend libre.

Et la vérité est simple : la France abrite en son sein un serpent qu’elle ne sait pas du tout contrôler. Nos pouvoirs publics sont incapables de faire respecter l’ordre public. Nous sommes en situation d’intranquillité permanente. Si nous continuons ainsi, nous serons définitivement soumis par la force la plus absurde et brutale à laquelle la France a été confrontée dans sa longue existence, l’arbitraire de la rue et la tyrannie de la bêtise que la lâcheté alimente quotidiennement.

Pierre Valentin : « Vivre dans des milieux « inclusifs », c’est frôler quotidiennement l’exclusion. »

Pierre Valentin est diplômé de philosophie et de science politique, ainsi que l’auteur de la première note en France sur l’idéologie woke en 2021 pour la Fondapol. Il publie en ce moment Comprendre la Révolution Woke chez Gallimard dans la collection Le Débat.

Contrepoints : Bonjour Pierre Valentin. Avant d’entrer dans le vif du sujet : le wokisme, ça existe ou pas ? Pourquoi utiliser le terme wokisme plutôt qu’un autre, comme gauche identitaire ou encore gauche postmoderne ?

Pierre Valentin : J’utilise le terme car, initialement, c’est une auto-revendication, et non un terme « créé par et pour l’extrême droite » comme on peut l’entendre. Aussi, je ne crois pas à l’idée que ça puisse être un pur épouvantail dans la mesure ou la signification du terme (« éveillé ») est intrinsèquement positive.

Je cite par exemple Alex Mahoudeau qui parle lui-même de « panique morale », et qui pourtant dans une note de bas de page concède qu’il y a très peu de mouvements qui se revendiquent être les « endormis », les « inconscients »…

Enfin, il y a une filiation intéressante avec le protestantisme aux États-Unis, qui a connu dans son histoire plusieurs grands « revival », trois ou quatre selon les historiens que l’on interroge, et qui à chaque fois se vivaient comme des « grands réveils ». Là, on a un mouvement qui se veut à la fois athée et original, et qui a repris sans le savoir ce terme « d’éveil », qui est très chargé symboliquement.

Donc pour toutes ces raisons j’y tiens !

Ensuite, pourquoi est-ce que je ne parle pas simplement de « militants d’extrême gauche » ? Car il y a encore, par exemple, des marxistes « pur jus », à l’ancienne, qu’il faut classer à l’extrême gauche, et qui pourtant vont critiquer le wokisme, estimant que les questions économiques sont trop reléguées au second plan. Sinon on pourrait parler de « gauche intersectionnelle », mais ça parle très peu au public français. Bref, j’ai essayé et, sincèrement, je n’ai pas trouvé de meilleur terme.

Souvent dans l’espace public, les gens qui critiquent l’usage du terme sont rarement dans une critique purement sémantique. C’est davantage qu’ils sont dérangés par le sujet en tant que tel, car ils ne veulent pas apparaître marqués. Certains centristes par exemple, aiment dire que les vrais sujets sont ailleurs (IA, par exemple), et ne veulent pas traiter de sujets « controversé » et « polémique », et donc disent « le wokisme, après tout, ça ne veut rien dire »…

Sur la définition du wokisme, je donne la mienne dans l’ouvrage. Pour le dire simplement, je dis que c’est une idéologie qui perçoit les sociétés occidentales comme étant fondamentalement régies par des structures de pouvoirs, des systèmes d’oppressions, des hiérarchies de dominations qui ont pour but d’inférioriser l’Autre, c’est-à-dire la figure de la minorité sous toutes ses formes, par des moyens souvent invisibles, et le woke est celui qui est « éveillé » à cette réalité néfaste et qui se donne la mission d’aller « conscientiser » les autres.

 

Contrepoints : On comprend en vous lisant qu’il y a une importance considérable apportée à la question de la sémantique, du langage, du discours, du symbole. Vous expliquez dans l’ouvrage qu’il y a une volonté claire de ne pas se laisser nommer, que le wokisme cherche constamment à minimiser l’apparence de son influence pour la maximiser dans les faits. Pourquoi ?

Pierre Valentin : Oui, il y a un rapport très paradoxal au pouvoir. Samuel Fitoussi explique ça très bien : si on est sur un plateau et qu’on a un militant qui se présente en « antiraciste », toute contradiction vous placera dans la position de celui qui défend le racisme. Donc ils forcent une certaine forme de binarité, de manichéisme, faisant disparaître toute notion de neutralité à laquelle ils ne croient pas.

Toutefois, il y a des gens qui, à nouveau, s’en revendiquent. On peut citer Rokhaya Diallo qui a défendu le terme récemment, ainsi que Jean-Michel Apathie. Un sondage montre qu’au Royaume-Uni, 12 % des Britanniques en 2021 revendiquaient le terme.

Je trouve que le débat public est moins faussé en utilisant ce terme que si on entre dans « l’antiracisme face aux autres ».

Par ailleurs, c’est la première fois que la gauche a perdu le contrôle d’un terme qu’elle a elle-même créé. On essaye donc de tuer l’animal de compagnie qui se serait évadé de l’enclos. Une fois qu’on ne le maîtrise plus, il faut qu’il meure et on va dire qu’on ne l’a jamais revendiqué – ce qui est faux et je le démontre dans l’introduction du livre – et que par ailleurs il ne voudrait rien dire, ce qui, à nouveau, est faux car on peut le définir.

 

Contrepoints : La thèse centrale de votre ouvrage est de dire qu’au fond, l’idéologie woke ne possède aucune unité conceptuelle conséquente, si ce n’est le fait qu’elle est, sur le plan des idées, une pure négation, et sur le plan normatif, une simple volonté déconstructrice. Pouvez-vous développer ?

Pierre Valentin : Je suis vraiment rentré dans l’analyse du wokisme il y a plusieurs années maintenant avec une approche la plus analytique possible, en cherchant à dénicher l’unité de ce mouvement. Et j’ai mis beaucoup de temps avant de trouver un axe commun car les contradictions étaient gigantesques.

Prenons l’exemple de la formule médiatique « la communauté LGBT ». De façon arbitraire on s’arrête à la quatrième lettre alors qu’il y a une quantité infinie de lettre dans cet acronyme. De plus, l’ordre des lettres – qui est déjà une hiérarchisation implicite, ce qui pose question dans un mouvement égalitariste – n’est pas adoubé par qui que ce soit et change tout le temps. Il y a parfois des lettres exclues. Au Royaume-Uni il y a « l’alliance LGB », qui veut exclure les Trans du reste. Il y a de surcroît la question du logiciel du sexe VS le logiciel du genre. Enfin, selon l’aveu des lesbiennes et de beaucoup d’homosexuels que je cite dans le livre, ces lettres ne se côtoient pas souvent. Qu’est qu’une « communauté » qui ne se côtoie pas ?

Outre l’acronyme, si l’on prend du recul, et qu’on la mélange avec la question décoloniale, la question du racialisme américain, la question du handicap… Bref, quelle est la cohérence dans cette myriade de contradictions ? Typiquement, l’éloge de la fluidité dans le mouvement queer contraste avec l’éloge de la rigidité dans leurs courants racialistes.

Et pour autant, on sent qu’il y a une forme d’unité dans le désir du racialisme de se « queeriser », et à l’inverse dans le désir du mouvement queer de se racialiser. Il y a là une affirmation d’un désir d’unité, que l’on retrouve avec le slogan de la « convergence des luttes ».

L’autre élément d’unité, c’est celui de l’ennemi commun. Il y a même un rapport dialectique entre les deux, qui est qu’au fur à mesure que vous fragmentez votre schéma intersectionnel avec de plus en plus de catégorisations, plus l’importance d’un ennemi commun est centrale pour réunir tout ce beau monde.

Avec l’effondrement des grands récits qui structuraient la gauche (communisme, social-démocratie, proposition libérale), la seule unité possible va devenir celle du bouc émissaire. Pascal Perrineau écrit dans La logique du bouc-émissaire en politique (PUF) : « On peut avoir l’impression que plus la gauche et la macronie pâtissent d’un déficit d’idéologies de référence plus elles n’hésitent pas à manier la diabolisation de l’adversaire de droite pour retrouver une raison d’être ».

 

Contrepoints : Ces contradictions vous amènent à faire le pari suivant : le wokisme semble condamné, à l’instar peut-être de tout mouvement révolutionnaire, à reproduire ce qu’il dénonce, et donc, pour reprendre une phraséologie marxisante, à s’effondrer sous le poids de ses propres contradictions. Pourquoi ?

Pierre Valentin : Oui, je pense que nous sommes face à une spirale de pureté. L’inclusion, d’ailleurs, n’est pas un état de fait, mais une dynamique derrière laquelle il faut toujours courir. On revient d’ailleurs à l’étymologie du mot, initialement sous la forme d’un hashtag en deux termes, « #Stay Woke », « restez éveillés ». Donc on est toujours menacé d’extrême droitisation, et l’exclusion est une possibilité quotidienne. Vivre dans des milieux « inclusifs », c’est frôler quotidiennement l’exclusion.

Sur les contradictions, je pense qu’il faut faire le parallèle avec le communisme. On sait aujourd’hui que le communisme était voué, lui aussi, à s’effondrer sous le poids de ses propres contradictions. Or, est-ce que L’archipel du Goulag de Soljenitsyne a été futile pour autant ?

Encore une fois, on n’a pas de goulags en Occident fort heureusement, mais Soljenitsyne aurait été ravi que l’URSS s’effondre avant les goulags. Donc la notion de temporalité est loin d’être secondaire dans ce débat.

J’ajouterais également que, là ou il faut tempérer l’optimisme que peut nous inspirer l’idée d’une autodestruction, c’est que, pour prendre une métaphore, si le boulet coulera forcément au fond de l’océan, il menace toutefois de s’accrocher à notre cheville sur son passage. Aux États-Unis, le monde universitaire a déjà aboli toute notion de sélection et de mérite, ce qui veut dire une « médiocrisation » folle de leurs élites. On commence à mettre en place des mathématiques « décolonisées » pour se défaire des mathématiques blanches…

Bref, ce ne sont pas des questions neutres, et la question du moment auquel on va réussir à arrêter cette vague idéologique n’est pas secondaire.

Ce qui m’intéresse aussi, c’est l’état de désarroi existentiel et spirituel dans lequel devaient se trouver les communistes au moment de la chute du mur de Berlin. Redémarrer idéologiquement après cet effondrement sera très compliqué si tous sont « convertis ».

 

Contrepoints : Au fond, le wokisme n’est-il pas une volonté de la part de ces militants et idéologues de simplement prendre le pouvoir ? Et pensez-vous qu’il serait pertinent de parler d’ingénierie sociale pour définir l’idéologie woke sur le plan normatif ?

Pierre Valentin : Oui, tout constructivisme génère un utopisme. Pour les libéraux et les conservateurs, le mal est une donnée inhérente de l’âme humaine que l’on ne parviendra jamais totalement à éradiquer. Quand on dit que tout est construit, la présence du mal dans la société devient d’un même geste scandaleux car elle pourrait ne pas être. Le constructivisme implique un utopisme déconstructeur. Ce qui fait qu’on a des mentalités à changer, une culture à changer…

Je cite par exemple Antonio Gramsci comme le chaînon manquant entre le marxisme à l’ancienne et ce néo-marxisme que l’on a là, notamment sur l’aspect racial, et qui va réhabiliter le militantisme. Si l’on dit que c’est uniquement l’économique qui détermine le culturel, on vient de mettre tous les militants, tous les relais culturels, tous les artistes au chômage moral et intellectuel. Or, pour un militant cela n’est pas acceptable, il faut qu’il ait un rôle à jouer dans la révolution, et ainsi Gramsci va faire l’éloge de la prise des relais culturels pour faire advenir la révolution.

Sur la relation paradoxale au pouvoir elle me paraît fondamentale, et se traduit de différentes façons. Premièrement, ils sont absolument certains, dans leur compréhension d’eux-mêmes, d’être des dissidents. Ils ne sont jamais les dominants, et c’est pour cette raison qu’ils insistent tant sur le terme de « colon », que ce soit pour parler et des Juifs en Israël ou des Français en France, car cela permet de rigidifier la catégorie de dominant. Donc d’un seul coup, ceux qui luttent contre les colons deviennent de gentils résistants courageux.

Ils ont un problème qui est que, lorsque les grandes entreprises mettent en avant leur logo aux couleurs LGBT, lorsque la marque Lego arrête de faire la publicité de leur boîte de police car cela ferait l’éloge des violences policières, lorsque l’on a un unanimisme occidental pro-woke, à ce moment-là ils sont dans une position délicate. Dans le fond ils sont contents que leurs idées soient diffusées, mais ils espèrent également maintenir l’image de dissidents ; garder le statut de David contre des Goliath.

C’est à mon sens l’objectif de la formule de « woke-washing » : résoudre cette contradiction terrible et douloureuse, ou en tout cas atténuer sa portée. Les grandes entreprises seraient de leur côté uniquement dans les paroles et non dans les actes.

C’est ce qui m’a poussé à théoriser la notion de « dissideur », c’est-à-dire de décideurs qui se veulent dissidents, et qui tiennent coute que coute à cette posture. On a le sentiment que pour être un pouvoir aujourd’hui, il faut nécessairement se présenter comme un contre-pouvoir. Pour le dire autrement, si Greta Thunberg, FIFA, l’ONU, Europe Écologie Les Verts, l’UNICEF et l’UE arrivaient à tomber d’accord sur le contenu d’une tribune, ils l’intituleraient « lutter contre le système ». Cet « antisystémisme » me fascine et se révèle une contradiction centrale au cœur de leur œuvre et de leur conception du monde.

 

Contrepoints : Vous évoquez dans un chapitre la question des liens entre la philosophie woke et la psychologie. Pourquoi ?

Pierre Valentin : Je tiens à dire en préambule que je n’ai pas de formation en psychologie, mais que je m’intéresse à ce sujet. Déjà, ce qu’il faut noter, c’est qu’indépendamment de la question du wokisme, il y aurait en soi un immense sujet sur le rapport au corps, sur le rapport aux écrans, sur le rapport à la sociabilité, à la santé mentale en général dans ces jeunes générations.

Depuis les confinements, certains de ces phénomènes se sont même amplifiés, comme l’atomisation sociale et la bureaucratisation des rapports sociaux. Pour moi, ce sont des tendances lourdes à la fois du wokisme et des problèmes plus généraux de santé mentale.

Se pose ensuite la question complexe et délicate de la direction du lien causal. Est-ce leur idéologie qui provoque ces troubles, ou est-ce ces troubles qui favorisent l’émergence de cette idéologie ? Je ne tranche pas définitivement la question, mais je pose les deux directions comme étant possibles, voire probables.

Du psychologique à l’idéologique, il y a énormément de témoignages, comme celui de Nora Bussigny, qui montrent que la phrase « je dois aller voir mon psy » est extraordinairement commune et répandue. Ils ont, souvent, des rapports compliqués avec leurs parents. On voit également qu’il y a au même moment trois choses dans une bonne part du monde occidental : une explosion de l’usage d’Instagram chez les jeunes filles, une explosion des troubles du rapports au corps (anorexie, boulimie) et une explosion de la « transidentité ». De plus, le taux de suicide des trans avant et après transition est deux fois supérieur à celui des homosexuels, qui est déjà très élevé.

Donc il y a une tendance lourde de gens profondément déstructurés, qui ensuite, dans un second temps, chercheraient une idéologie pour justifier cet état de fait. J’ai trouvé que la série de Blanche Gardin sur Canal + était intéressante, car son hypothèse implicite était que c’est d’abord le narcissisme qui va se chercher une cause, et non la cause qui génère le narcissisme.

Quand on a des jeunes qui disent « j’adoube Shakespeare et Jeanne d’Arc uniquement à la condition qu’ils soutiennent mes points de vue ; aujourd’hui, en 2023 » nous avons là du narcissisme pur : le monde extérieur doit venir renforcer mes idées sinon il doit disparaître. Les grandes figures occidentales peuvent continuer à exister à la condition qu’elles soient d’accord avec Moi.

Pour la causalité de l’idéologique vers le psychologique, disons pour commencer qu’il est difficile de tenir ne serait-ce que plusieurs semaines en essayant d’être le plus cohérent possible avec la théorie critique de la race sans tomber en dépression. Cette théorie postule deux prémices : d’abord que le racisme est le pire péché qui existe, et deuxièmement qu’il est présent dans toutes nos structures sociales, dans nos discours… Si on essaye vraiment d’appliquer ces deux prémices, la conclusion qui s’impose est que toute la réalité sociale est condamnable. Le monde devient forcément très sombre et déprimant.

Le psychologue Jonathan Haidt montre que quand on guérit des gens de la dépression, on emploie la CBT (thérapie cognitivo-comportementale) afin de pousser les patients à identifier les distorsions de la réalité et qu’ils arrêtent de les pratiquer.

Le wokisme, assez explicitement, pousse à faire l’inverse : « vous pensez avoir eu un rapport cordial avec quelqu’un d’une autre couleur de peau, vous ne vous rendez pas compte qu’en réalité il y avait un soubassement cynique, raciste, qui fait que vous n’avez pas eu un rapport sain avec cette personne ».

Il me semble difficile de dire qu’il n’y a pas au moins un rapport, une causalité, en ce sens-là.

 

Contrepoints : Vous parlez d’une génération plus fragile, surprotégée, profondément narcissique, dans le culte de la victimisation… Et vous en déduisez que cela mène inévitablement à un besoin accru de protection qui passe par une forme de bureaucratisation et une attente de protection de la part de l’État et de la collectivité dans son ensemble. Pouvez-vous développer pour nous ce point ?

Pierre Valentin : Le psychanalyste Ruben Rabinovitch avait écrit avec Renaud Large une note sur le wokisme très intéressante sur le sujet. Ce qu’il dit aujourd’hui, c’est que s’il est très inquiet du wokisme, il l’est encore davantage de « l’après-wokisme ». On pousse tellement loin dans le désordre, qu’il va y avoir un désir d’ordre, d’une figure du père qui siffle la fin de la récré, brutalement s’il le faut.

Sur la bureaucratisation, il y a un rapport très ambigu entre les associations et l’État. Pour parler, là-encore, en termes psychanalytiques, l’État est pour eux à la fois le père tyrannique et la mère nourricière. L’État c’est celui qui est « systémiquement raciste », mais dont j’ai quand même besoin des subventions mensuelles pour faire marcher mon association. C’est un guichet dont on est dépendant mais que l’on déteste.

Ça touche encore une fois au sujet du narcissisme. La conception de la liberté que l’on a en Occident depuis un certain temps et qui se caractérise par l’absence de contraintes, honnit tout rapport de dépendance, tout en concédant par ailleurs, et là vient la contradiction, que dans les faits l’homme moderne est très dépendant de différentes formes de bureaucraties, privées ou publiques. Donc il y a une tension entre ce désir d’indépendance et l’absence d’indépendance réelle qui génère de la frustration.

 

Contrepoints : On a parfois le sentiment que votre livre est en fait un livre sur l’histoire des fractures de la gauche qui semblent, selon-vous, être la meilleure grille de lecture pour comprendre le wokisme ?

Pierre Valentin : Oui ! Ce n’est pas très original mais il faut rappeler que l’affaire du foulard de Creil en 1989 est un moment de rupture. D’ailleurs, 1989 est l’année de toutes les décisions : Fukuyama écrit sur la fin de l’histoire, Kimberlé Crenshaw publie son premier article sur l’intersectionnalité, et il y a l’affaire du foulard où la gauche est face à un choix décisif entre ses différentes options intellectuelles.

On peut énumérer ces options de façon purement horizontale : il y a l’universalisme, le rationalisme, la croyance dans le progrès, la fascination pour la figure de l’Autre etc. Le problème de cette façon de les poser, c’est que certaines sont entrées en conflit, et que la gauche a été obligée de les hiérarchiser. Or, si ce choix est intellectuellement fascinant, c’est parce qu’il révèle quelles idoles comptaient plus que les autres.

Au moment de Creil, il y avait donc la laïcité, l’universalisme et le rationalisme d’un côté, et la fascination pour la figure de l’Autre combiné à un certain sens de l’histoire de l’autre côté. Dans cette deuxième option, il y avait cette idée de « nouveaux damnés de la terre », des nouvelles minorités qui sont pratiques car, quand on a cette idée de sens de l’histoire, de bougisme, tout ce qui est nouveau est toujours mieux. Donc cette fascination pour la figure du musulman, cet nouvel « Autre », entrait en contradiction avec les idéaux de la laïcité, de l’universalisme, du rationalisme, qui ne sont pas des idéaux que ces nouveaux damnés de la terre tiennent en haute estime.

Et au moment de ce conflit, la gauche a hiérarchisé en faveur du second camp, et c’est à ce moment que des gens comme Alain Finkielkraut, Marcel Gauchet, Michel Onfray etc. se sont retrouvés un peu malgré eux déportés vers la droite, voire l’extrême droite.

Quand un mouvement avance rapidement, c’est qu’il a pris de l’élan ! Ce changement prend racine dans des causes plus profondes, et il faut faire la généalogie de ce bouleversement. Donc je partage votre analyse quand vous dites qu’au fond, c’est autant un livre sur la gauche et son évolution que sur le wokisme.

 

Contrepoints : Sur cette généalogie, un des points communs que l’on peut trouver entre le marxisme et le wokisme, c’est le rapport à la violence et à la manière dont on la légitime…

Pierre Valentin : Oui ! Ce que je trouve intéressant, c’est qu’il y a un quelque chose de vaguement chic qui consiste à dire que cela n’aurait rien à voir avec du marxisme. Sauf que les points d’accords restent très profonds. Je cite les sociologues Jason Manning et Bradley Campbell qui parlent d’une « conflict theory », une « théorie du conflit » qui structure à la fois le marxisme et le wokisme.

Cette théorie repose sur quatre hypothèses.

D’abord, les conflits d’intérêts sont inhérents à la vie sociale. Deuxièmement, ils produisent des résultats à somme nulle, une partie gagnant au dépend de l’autre. Troisièmement, à long terme les élites gagnent aux dépens des autres. Et enfin, seul un changement radical révolutionnaire peut réduire de façon significative la domination des élites. Wokisme et marxisme partagent ces prémisses très structurantes.

On voit également le lien avec la légitimation de la violence. La fin justifie les moyens, la fin étant de faire la révolution, ce qui fait que tout est bon pour la faire advenir, avec un conséquentialisme assumé. La violence serait cette grande accoucheuse de l’Histoire. Le paradoxe étant que ce conséquentialisme a des conséquences désastreuses, comme nous l’avons vu.

Un entretien réalisé par Baptiste Gauthey, rédacteur en chef de Contrepoints.

« Les fonctionnaires créent des normes et les normes créent des fonctionnaires »

C’est en Angleterre que sont apparus les premiers concepts HACCP suite aux nombreux problèmes d’hygiène rencontrés sur des produits alimentaires. L’origine étant que les salariés des entreprises alimentaires n’avaient pas le réflexe de se laver les mains avant d’opérer sur les lignes de production.

S’en est suivi un certain confort de travail pour les responsables qui, au lieu de se fâcher et risquer les conflits, pouvaient se contenter de se référer aux normes écrites que les salariés avaient eux-mêmes signées. L’autorité était remplacée par la formule : écris ce que tu fais et fais ce que tu as écrit….et signé. Donc le chef n’était plus le mauvais coucheur à cheval sur le travail bien fait mais s’abritait derrière le cahier des charges signé par le salarié.

 

De la normalisation à l’absurdisation

Plus tard, cette normalisation s’est installée à tous les étages des entreprises ou il devenait la règle de ne pas réfléchir mais d’exécuter sans discuter. On ne fonctionne plus en mode de résolution de problème mais en mode de satisfaction au système. Circulez, y a rien à voir…

Afin de faire fonctionner ce qui allait devenir une usine à gaz il fallait des exécuteurs de normes, donc formés dans les écoles et parfaitement capables d’appliquer strictement et sans réfléchir. Les Américains ont toujours eu pour principe qu’un bon produit était celui que le consommateur le plus bête consommait sans poser de questions. Donc standardisé, interchangeable et facile.

Dans les entreprises ont peu à peu disparu les contremaîtres, les chefs d’équipe et surtout les anciens qui avaient encore la compétence pour réparer une machine ou optimiser une ligne de production et surtout pour transmettre. À qui ?

Aujourd’hui, il n’y a plus rien à transmettre puisque tout est digitalisé et, en cas de bug il suffit d’attendre l’intervention des RoboCops de l’informatique.

 

De la bureaucratisation à la déshumanisation

C’est le règne du tableau excel et des webinaires où l’on veut vous apprendre à produire, former, gérer, vendre, exporter etc.

L’humain ? On s’en fout puisqu’il est interchangeable. Avec quand même le retour de bâton sous forme d’arrêts maladie à répétition, de revendications, de droits à tous les étages, de grèves ou d’émeutes. Normal que 16 millions de Français dépriment…

L’État est entré dans la même logique jusqu’à complètement étouffer toute initiative personnelle des députés, des maires ou des régions. La pieuvre est dirigée depuis les bureaux parisiens qui contrôlent les poissons-pilote que sont devenus les organismes de certification nombreuses et variées genre Mc Kinsey, les commissaires aux comptes, les fiduciaires dont le rôle est de veiller à ce que toutes les normes soient appliquées. Le tout secondé par les délégués internes syndicaux, sécurité, conformité, pénibilité, etc. Le Code du travail avec ses 3000 pages est en concurrence avec le code RSE avec seulement 1700 pages… Bientôt un délégué aux droits de l’Homme.

« En France, plus de 37 000 normes facilitent et sécurisent les échanges commerciaux, améliorent les performances des biens et des services, diffusent l’innovation, favorisent l’efficience et l’efficacité des entreprises. »

Voilà la définition Google de ce monstre administratif que notre écrivain-ministre de l’Économie veut changer ? Est-il sur la même planète que nous ?

 

Les fonctionnaires créent des normes et les normes créent des fonctionnaires

Surtout, comment peut-il faire ? On sait que les ministres sont prisonniers de leurs structures composées d’énarques et hauts fonctionnaires qui n’ont pas la moindre idée de ce qu’est un compte d’exploitation, et plus généralement la vie normale d’un Français moyen.

Prisonniers d’idéologues et d’appareils complètement sclérosés, nos dirigeants obsédés de garder leurs petits privilèges ne produiront jamais un grand patron en France qui ose renverser la table. Un patron, un visionnaire, un homme d’État….

On peut rêver…

Bonus réparation vêtements : la bureaucratie française hors de contrôle

Il fût un temps, pas si éloigné, où les mamans avaient investi dans une aiguille et un rouleau de fil pour réparer un vêtement déchiré ou endommagé. Moi-même, je l’ai fait de nombreuses fois, même si j’étais loin du « meilleur ouvrier » de France.

Il fallait donc que notre administration s’en offusque et mette à la disposition des mamans et des papas français un de ces « miracles administratifs « dont elle seule a le secret.

Faire quelques kilomètres, en voiture bien évidemment, pour apporter un vêtement endommagé à réparer pour obtenir une réduction de : 7 euros pour faire repriser un trou, un accroc, une déchirure, 10 euros pour une doublure, 8 euros pour un zip, 6 euros dans le cas d’une couture défaite (8 euros si la couture est doublée).

Je vous épargnerai le « tarif applicable » pour d’autres « sauvetages » de chaussures et autres désagréments dans la vie d’un vêtement. Pour ce « délire », notre gouvernement se dit prêt à investir 150 millions d’euros dans la labellisation d’au moins 500 couturiers et cordonniers, ce qui fait en gros cinq par département.

Me concernant, le plus proche sera à une vingtaine de kilomètres que je devrai donc effectuer deux fois l’aller et retour, un pour apporter le vêtement et un pour le rechercher, soit 80 km au total !

L’indemnisation kilométrique de ma voiture étant fixée par l’état à 0,60 euro, mon petit gain d’une dizaine d’euros me coûtera réellement… 48 euros, sans compter les deux heures perdues. Cherchez l’erreur !

Mais ce délire ne s’arrêtera pas là, car pour notre administration, ce serait trop simple ! C’est compter sans les contraintes imposées au pauvre professionnel pour se faire, sans aucune garantie, rembourser la remise qu’il m’aura concédée. Ce que François Lenglet nomme « le Michel-Ange de la bureaucratie » qui en dénonce sur RTL& TF1 la folie de la taxation prévue pour financer ce « chef d’œuvre » : pas moins de 104 niveaux de taxes pour chaque type de vêtement défini au centième de centime d’euro, par exemple les bas pour homme seront taxés à 0,0231 euro.

Bonus réparation vêtements: "On n'a jamais vu un tel chef d'oeuvre de complexité. C'est le Michel-Ange de la bureaucratie. Les fonctionnaires créent des normes. Les normes créent des fonctionnaires. C'est ce qu'on appelle le mouvement perpétuel…"
Chronique à voir de F. Lenglet pic.twitter.com/4LhSnQEHRU

— Jean Louis (@JL7508) November 19, 2023

 

Cela me conforte dans mon combat pour une réduction drastique du nombre de fonctionnaires, soit proportionnellement quatre millions de plus qu’en Allemagne, selon une étude d’Alain Mathieu, mais surtout ceux affectés aux administrations.

Quand on arrive à ce niveau d’incompétence, c’est la théorie de Joseph Schumpeter sur la « destruction créative » qu’il faut appliquer à notre administration, soit en supprimer un grand nombre pour gagner en efficacité, en n’en conservant qu’un petit nombre.

Car le mal français réside bien dans cette démonstration : plus on augmente le nombre de fonctionnaires, plus ils nous pondent des « âneries »… et plus il faut de nouveaux fonctionnaires pour les gérer ! Le cycle infernal est ainsi enclenché sans aucune limite.

Mais le plus inquiétant dans cette farce, c’est que de nombreux Français vont approuver et, si aucune rupture dans cette dérive n’est envisagée, il est fort à parier que la prochaine proposition sera la création d’une subvention par mètre, voire centimètre, de papier toilette utilisé par personne au sein d’une même famille.

Réveille-toi, peuple français !

Aides à la presse : un bilan scandaleux

Contrepoints ne bénéficie d’aucune aide publique et fonctionne uniquement sur vos dons. Pour aider la presse non subventionnée, cliquez ici !

 

Le 8 septembre dernier, le ministère de la Culture a publié sur son site officiel la liste des titres de presse ayant bénéficié d’une aide financière en 2022. En lisant attentivement sa composition, j’ai pensé que l’oubli dans lequel ce document était tombé ne méritait pas d’être entretenu.

En 2022, 370 titres de presse (et lettres d’information en ligne) ont bénéficié d’un total de 110,4 millions d’euros d’aides publiques (28 millions d’aides au pluralisme, 57 millions d’aides au transport et 31,4 millions d’aides à l’investissement).

Contrairement à Contrepoints, qui ne bénéficie pas d’un sou d’argent public et appartient à une association (Libéraux.org), la majorité des titres subventionnés sont des entreprises de presse rattachées à un groupe (LVMH, Lagardere media news, Sud Ouest, Rossel La Voix, Altice, CMA CGM, SIPA Ouest France…).

Ces aides à la presse sont ainsi assimilables à des aides directes aux entreprises. Elles s’inscrivent dans le cadre d’une concurrence économique dont elles modifient les règles. Deux groupes semblent tirer particulièrement profit de cette forme d’interventionnisme.

D’abord le groupe Les ÉchosLe Parisien, qui reçoit des aides publiques pour Aujourd’hui en France, Le Parisien et Les Échos, cumulant plus de 14 millions d’euros d’aides (14 162 397 euros) en 2022.

Ensuite, le groupe L’Humanité, qui a reçu 3 882 152 millions d’euros pour une diffusion inférieure au million d’exemplaires annuels, un chiffre qui correspond à la moyenne basse des ventes des titres de la presse quotidienne régionale en France.

 

Sur la « neutralité » des critères d’attribution

L’octroi de ces aides reposerait sur « des critères objectifs qui sont les garants de la neutralité et de l’impartialité des décisions d’octroi ».

Les montants de ces subventions dépendent en réalité d’un critère objectif (celui du nombre d’exemplaires vendus en un an) mais qui ne s’appliquent qu’aux titres de presse écrite (les vues des sites d’information et d’opinion en ligne ne sont intégrées dans aucun calcul), et d’une estimation plus brumeuse, qui vise à « compléter les ressources des titres de presse qui ne disposent pas de recettes publicitaires suffisantes afin que la pression des marchés publicitaires ne détermine pas les idées qui auront vocation à s’exprimer dans le débat public. ».

L’allocation des subventions ne tient pas non plus compte du montant des dons que les titres de presse collectent régulièrement auprès de leurs lecteurs, précisément pour combler le manque à gagner publicitaire.

 

Le soutien du gouvernement à la diversité des opinions penche au centre et à l’extrême gauche

Ce savant calcul justifie, sans vraiment les expliquer, les variations étonnantes que l’on retrouvera entre les subventions accordées en 2022 à Valeurs Actuelles (36 182 euros) et à Marianne (293 198 euros), magazines d’opinion dont le nombre d’exemplaires diffusés annuellement est proche (5 283 689 pour Valeurs Actuelles et 6 849 666 pour Marianne) et dont les lectorats se situent sur des segments politiques très différents.

À l’inverse, des titres idéologiquement proches comme Challenges ou L’Obs perçoivent des aides plus conséquentes (408 507 euros pour le premier, 461 835 euros pour le second) tout en bénéficiant de tirages plus importants (7 247 941 pour Challenges, 10 827 896 pour L’Obs).

 

L’accès à l’information des citoyens est entravé par la barrière des abonnements

En 2022, le rapport annuel de Reuters Institute sur la consommation de l’information dans le monde soulignait que les sources d’actualité en ligne étaient devenues les premières sources hebdomadaires d’information (69 % des Français consulteraient la presse en ligne via leurs ordinateurs ou leurs smartphones). Or, la majorité des titres de presse bénéficiant de subventions publiques (disposant d’un format papier et d’une vitrine web ou seulement d’une vitrine web) fonctionnent par abonnements et réservent leurs articles à leurs lecteurs payants.

Le contribuable français finance ainsi Le Monde, dont 60 % des contenus en ligne sont réservés aux abonnés, ou Le Figaro Premium, dont 100 % des contenus sont inaccessibles au public. Des lettres d’information spécialisées comme La Lettre A ou AfricaIntelligence ont bénéficié respectivement d’une enveloppe de 379 743 euros pour l’un, et de 777 928 euros pour le second, alors que la grande majorité de leurs publications est réservée à leurs lecteurs payants.

 

En un coup d’œil : les titres les plus aidés par le gouvernement et les titres aidés les plus lus par les Français

Top 10 des titres de presse les plus aidés Total des aides Diffusion annuelle Groupes ou sociétés de presse d’appartenance
1.  Aujourd’hui en France 12 194 288 25 227 209 Groupe Les Échos – Le Parisien (LVMH)
2. Le Figaro/lefigaro.fr 5 890 263 108 894 681 Groupe Figaro
3. Le Monde / lemonde.fr 5 837 607 145 689 946 Groupe Le Monde
4. La Croix/la-croix.com 5 655 164 27 803 883 Bayard presse
5. Libération 5 389 292 30 070 928 Groupe Altice/Presse indépendante
6. L’Humanité 3 882 152 9 865 608 Groupe L’Humanité
7. L’Opinion 2 074 865 Bey Medias
8. OuestFrance/ouest.france.fr 2 003 382 222 193 126 SIPA Ouest-France
9. Le JDD 1 922 850 7 068 836 Lagardère Media News
10. Le Dauphiné libéré/ ledauphine.com 1 573 450 60 528 885 Ebra

 

Top 10 des titres de presse subventionnés les plus lus                                Total des aides Diffusion annuelle Groupes ou sociétés de presse d’appartenance
1. Ouest-france/ouest.france.fr 2 003 382 222 193 126 Sipa-Ouest France
2. Le Monde/lemonde.fr 5 837 607 145 689 946 Groupe Le Monde
3. Le Figaro/lefigaro.fr 5 890 263 108 894 681 Groupe Figaro
4. 20 Minutes/20minutes.fr 84 110 86 470 742  
5. L’Équipe/lequipe.fr 899 881 79 022 471 Éditions Philippe Amaury
6. Sud Ouest/sudouest.fr 878 848 73 990 975 Groupe Sud Ouest
7. Le Parisien/leparisien.fr 935 887 66 368 594 Groupe Les Échos – Le Parisien (LVMH)
8. La Voix du Nord 424 509 63 858 874 Groupe Rossel La Voix
9. Le Télégramme/ letelegramme.fr 943 259 61 582 406 Groupe Télégramme de Brest
10. Le Dauphiné Libéré/ ledauphine.com 1 573 450 60 528 885 Ebra

 

Guillaume Meurice convoqué par la police : et la liberté d’expression dans tout ça ?

La société française est malade. Elle souffre d’un mal insidieux dont les symptômes se laissent à peine voir. Ils sont pourtant bien-là et ces derniers jours, deux « polémiques » s’en sont fait l’écho.

C’est Guillaume Meurice, d’abord, convoqué par la police pour « provocation à la haine » après une blague de mauvais goût dans lequel l’humoriste avait comparé, au micro de France Inter, Benyamin Nétanyahou (Premier ministre israélien) à un « nazi sans prépuce ». C’est ensuite le rappeur Freeze Corleone, qui a vu son concert annulé par la préfecture de police, au prétexte que ses références antisémites et complotistes feraient planer des risques « sérieux » de trouble à l’ordre public.

Cette judiciarisation à outrance de la vie sociale, culturelle et politique témoigne d’une France fracturée et pétrifiée par une sensibilité maladive. Certes, les idées ici incriminées sont absolument condamnables. Mais cette condamnation doit se faire dans l’arène du débat d’idée plutôt que dans un tribunal.

Cette paralysie du débat démocratique devrait alerter infiniment plus qu’une blague de mauvais goût. Avons-nous atteint un tel niveau de fragilité ? Sommes-nous à ce point incapables d’accepter la contradiction, de supporter l’expression d’une idée que l’on juge en tout point détestable, voire choquante ? Il n’y a plus vil poison, pour une démocratie, que l’idée fallacieuse selon laquelle les mots pourraient heurter, et que de la parole à l’acte, il n’y aurait qu’un pas.

C’est justement en déplaçant la violence dans le monde des idées et de la parole que les institutions démocratiques sont parvenues à pacifier nos sociétés ! Croire une seule seconde qu’interdire l’expression d’idées bêtes, haineuses ou dangereuses, suffira à les faire disparaître est d’une naïveté confondante. De plus, ces institutions démocratiques ont besoin d’un socle sans lequel elles ne peuvent se maintenir : un corps social imprégné d’un esprit démocratique et libéral, acceptant que la diversité et la différence impliquent l’acceptation de l’expression d’idées choquantes et/ou stupides.

Que l’on puisse être convoqué par la police pour une blague de mauvais goût serait ironique, si ce n’était pas le symbole d’une crise profonde de la liberté en France. Du professeur qui s’auto-censure au citoyen juif qui cache sa kippa, en passant par l’humoriste ayant besoin de consulter un avocat avant de faire une blague, ce sont autant de phénomènes qui renseignent du niveau d’intolérance qui règne dans notre pays. L’ultra susceptibilité mène inévitablement à la limitation de la liberté d’expression.

Du reste, faut-il rappeler, encore et toujours, que la liberté d’expression ne s’arrête pas à la simple sauvegarde de sa propre liberté ? Se battre pour la liberté d’expression, c’est avant tout se battre pour la liberté de ses adversaires politiques, et ainsi défendre leur droit de dire des choses qui nous déplaisent et nous choquent.

C’est parce que je déteste les idées de Guillaume Meurice et de Freeze Corleone que je veux qu’ils puissent les exprimer sans être inquiétés, que ce soit par la main du pouvoir politique ou, plus insidieusement, par la pression sociale. Parce que les libertés sont solidaires les unes des autres, leur liberté est la seule véritable garantie de ma liberté.

Laissons-les s’exprimer, nous aurons tout le loisir de les réfuter.

Qu’est-ce qu’une Constitution libérale ?

La France se prépare à modifier sa Constitution, afin d’y inscrire que « la loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté de la femme, qui lui est garantie, d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ».

Sans doute devons-nous savoir ce que nous faisons, nous qui avons conçu assez de Constitutions au cours de notre histoire pour en fournir au monde entier. Et pourtant, il semblerait bien que nous errions.

Ce n’est pas tant la question de l’avortement qui est en jeu : c’est l’idée même de Constitution, qui paraît singulièrement mal comprise et détournée de son but.

En son temps, Frédéric Bastiat s’était attaqué, dans l’un de ses plus fameux pamphlet, à « la loi pervertie… la loi non seulement détournée de son but, mais appliquée à poursuivre un but directement contraire » (La Loi, 1850, p. 3). Peut-être aujourd’hui faudrait-il écrire contre « la loi des lois pervertie… la loi des lois non seulement détournée de son but, mais appliquée à poursuivre un but directement contraire ».

Et l’indignation devrait être au centuple. Mais certainement en devrions-nous être peu surpris.

Car en France, nous avons toujours eu une conception très antilibérale de la loi. Le plus fidèle disciple de Bastiat disait en son temps que c’est parce que nous héritons des Romains, qui en tant que propriétaires d’esclaves, ne pouvaient à la fois reconnaître la liberté, et la violer, comme ils le faisaient (Œuvres d’Ernest Martineau, t. II, p. 61).

Voyez par exemple la propriété.

Le Code civil énonce :

« La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ».

C’est-à-dire que la propriété n’existe pas ; c’est une concession, et par conséquent une fiction : l’État la restreint à sa guise, non seulement par des lois, mais par de simples règlements (Idem, t. I, p. 53 ; t. II, p. 365).

Il en va de même de nos grands principes constitutionnels.

« Tout citoyen peut parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ».

La Constitution américaine parle un tout autre langage : « Le Congrès ne fera aucune loi… qui restreigne la liberté de la parole ou de la presse ». Ce qui se révèle dans cette différence est une conception toute différente du rôle même d’une Constitution.

 

Une Constitution sert à restreindre le pouvoir de l’État

Si nous revenons aux auteurs, nous comprenons qu’une constitution est un acte politique essentiellement libéral.

Ce n’est pas pour célébrer les vertus d’un État divin qu’on la compose et qu’on l’enregistre, mais tout au contraire par défiance, et pour protéger les droits individuels (Œuvres complètes de Benjamin Constant, t. I, p. 502). Par conséquent, son langage et sa teneur doivent se ressentir de ce but : il faut y inscrire nettement les bornes du pouvoir, ses vraies attributions, et les droits politiques et individuels qu’on reconnaît et garantit ; mais il ne faut pas y ajouter des dispositions de détail, qui sortent de ce cadre (Idem, t. XIII, p. 514).

Ce fut la grande (et contribution de Benjamin Constant, comparé à la pensée libérale du XVIIIe siècle, que de reconnaître la nécessité des limites constitutionnelles. Les penseurs qui l’avaient précédé, physiocrates en tête, avaient été trop souvent complaisants pour le pouvoir, et avec la grande force qui s’agitait pour faire le mal, ils songeaient à se servir pour le bien. Une grande partie de son œuvre, et sans doute la meilleure, a servi pour guider ses contemporains sur d’autres voies.

 

Les bornes du pouvoir et la sphère de l’individu

Au XVIIIe siècle, les libéraux français étaient pour la plupart opposés au développement de ce qu’on appellerait la démocratie, c’est-à-dire à la participation politique du peuple.

Établi sur un tout autre théâtre, Benjamin Constant n’eut pas de mal à reconnaître que :

« La direction des affaires de tous appartient à tous ».

Mais c’était pour ajouter :

« Ce qui n’intéresse qu’une fraction doit être décidé par cette fraction. Ce qui n’a de rapport qu’avec l’individu, ne doit être soumis qu’à l’individu. On ne saurait trop répéter que la volonté générale n’est pas plus respectable que la volonté particulière lorsqu’elle sort de sa sphère. » (O. C., t. IV, p. 643)

C’était indiqué assez clairement, non seulement l’utilité de la décentralisation, mais des limites constitutionnelles. Car si le pouvoir n’a pas d’autorité, pas de légitimité pour se mêler de certaines affaires — la religion, l’éducation, l’industrie, par exemple — cela signifie que des actes qu’il accomplirait dans ce but, ne seraient pas légaux. « Il y a des actes que rien ne peut revêtir du caractère de loi », écrivait Constant (Idem, t. XV, p. 379). Et là est la fonction essentielle des Constitutions.

 

Ce qu’il faut encore, outre une Constitution libérale

Sans doute, les déclarations de droits sont de peu de valeur si le pouvoir n’est pas attaché à leur respect, et le peuple prêt à tenir le pouvoir comptable de ses engagements.

« Que les ministres cherchent à nous faire illusion pour leur propre compte, c’est leur métier, disait Constant. Le nôtre est de nous tenir sur nos gardes. » (O. C., t. XIII, p. 227)

Au-delà des limites constitutionnelles, il faut donc la surveillance publique, l’énergie d’une presse libre, et l’opinion entièrement acquise à la bonté des libertés individuelles. Autrement dit, il y aurait pour les libéraux un deuxième travail à accomplir quotidiennement, le premier fût-il achevé. Allons, courage !

La crise de la fonction publique française : à qui la faute ?

Dans un rapport publié en novembre, la Cour des comptes dresse un bilan préoccupant de l’état de la fonction publique française.

Trois ans après la promulgation de la loi du 6 août 2019 sur la transformation de la fonction publique (LTFP), l’État peine à attirer, à recruter et à fidéliser les agents publics. La Cour note que « le nombre de fonctionnaires a diminué de 53 300 dans l’ensemble de la fonction publique, soit une baisse de 1,4 % par rapport à 2016. » La proportion d’agents contractuels dans les trois fonctions publiques est passée de 14 % en 2005 à 24 % en 2020. La fonction publique hospitalière représente, à elle seule, 49 % de la baisse de fonctionnaires entre 2016 et 2020 (- 26 200 agents, soit une baisse de 3,1 %).

La Cour relève en effet un suivi partiel et défaillant de la LTFP.

En principe, cette loi était censée améliorer significativement l’attractivité de la fonction publique :

  • davantage de mobilité chez les fonctionnaires via des changements de poste,
  • introduction d’une rupture conventionnelle pour simplifier les départs volontaires,
  • plus grand recours aux contractuels pour plus de flexibilité dans le recrutement,
  • promotion de la formation continue,
  • valorisation des compétences.

 

Malgré les dispositions facilitant le recrutement contractuel, peu de CDI en primo-recrutement ont été conclus, et seulement 1900 contrats de projet en CDD ont été signés dans la fonction publique d’État.

Un aspect fondamental de cette réforme est resté en suspens : le respect de la durée légale du travail des agents. Des dérogations au droit commun maintiennent des régimes favorables aux fonctionnaires, compromettant l’efficacité du contrôle de légalité exercé par les préfectures. Certaines administrations et collectivités locales ont établi des régimes dérogatoires leur permettant de travailler moins de 1607 heures par an. Malgré les dispositions de la LTFP visant à les supprimer, certains secteurs ou entités ont conservé ces pratiques.

Des collectivités locales ont pu maintenir des cycles de travail inférieurs à la durée légale, arguant de sujétions particulières, comme la commune de Champs-sur-Marne (agents des routes, agents en charge de l’entretien ménager, agents des collèges, etc.) ou la commune d’Oissel qui a « supprimé des jours de congés, mais en a institué d’autres dans le cadre de la mise en place de nouveaux cycles de travail. » D’autres n’ont aucun scrupule à adopter des dispositifs illégaux, comme la commune de Méricourt, qui refuse de mettre en œuvre la délibération du conseil municipal et continue d’appliquer un régime antérieur. En 2022, c’est la mairie de Paris qui se voyait contrainte d’appliquer les 35 heures à ses agents : le tribunal administratif avait annulé les trois jours de RTT supplémentaires qu’elle leur donnait au nom d’une pénibilité spécifique liée au fait de travailler dans la capitale.

Une fois de plus, la fonction publique française fait office d’exception culturelle : le nombre moyen d’heures de travail des fonctionnaires des administrations centrales s’élève à 1620 par an en France selon l’OCDE, contre 1814 en Allemagne, 1739 en Suède ou 1685 au Royaume-Uni. Cela n’empêche toutefois pas une certaine gauche de penser que le statut de la fonction publique serait menacé par « des années de néo-libéralisme et d’austérité », et non par une gestion archaïque qui dilapide les comptes publics. 

La crise immobilière est fabriquée par l’État

La crise immobilière qui sévit actuellement en France ne tombe pas du ciel, et l’État en est grandement responsable. Son interventionnisme tous azimuts a eu finalement raison de la baisse de la construction de logements neufs et de la réduction du parc de logements accessible aux plus démunis. Certes, l’augmentation des taux d’intérêt a sa part de responsabilité dans l’effondrement du marché immobilier, mais la main très lourde de l’État a également sa part, et sûrement pas la plus petite.

Après des hausses très importantes ces dernières années, les prix de l’immobilier baissent enfin depuis un an dans la plupart des grandes villes françaises, y compris à Paris.

A priori, c’est une bonne nouvelle pour ceux qui veulent acheter, surtout les primo-accédants, mais un peu moins pour ceux qui veulent vendre. Ces derniers essayent de résister tant qu’ils peuvent à la baisse et contribuent à bloquer le marché. C’est ainsi que le nombre de transactions s’effondre. Selon Meilleurs Agents, la barre du million de transactions devrait être enfoncée à la fin de l’année 2023. Du côté des locataires, la situation n’est pas plus rose. En effet, de plus en plus de ménages ne sont plus en mesure de trouver un logement correspondant à leurs besoins, que ce soit en termes de superficie ou de localisation, surtout dans les métropoles.

Comme souvent, les origines d’une crise sont multiples. Passons en revue ces différents facteurs qui ont enrayé le marché immobilier :

  • la hausse des taux d’intérêt,
  • la fiscalité immobilière,
  • les injonctions concernant la rénovation énergétique,
  • l’avalanche de normes pour la construction,
  • la gestion de l’urbanisme par les communes,
  • l’encadrement des loyers.

 

La hausse des taux d’intérêt

Afin de combattre l’inflation, les banques centrales ont sorti l’arme des taux d’intérêt, ce qui a naturellement impacté les taux des crédits immobiliers.

Ainsi, selon l’Observatoire du Crédit Logement, les taux des crédits immobiliers moyen ont triplé en un an du 1ᵉʳ trimestre 2022 à 2023, voire davantage. Alors qu’il était possible d’emprunter à un peu plus de 1 % en 2021, c’est maintenant 4 % qu’il faut compter. Cette augmentation considérable du coût du crédit pour les emprunteurs rend naturellement plus onéreuse l’acquisition d’un bien immobilier, surtout pour les jeunes ménages.

À cette augmentation du coût du crédit, il faut ajouter également le renforcement des garanties demandées par les banques auprès des emprunteurs. Tout cela a pour conséquence de diminuer la demande des primo-accédants et reporte sur le marché locatif la demande de logements. Mais encore faut-il que les investisseurs privés répondent présents. Or, pour eux, l’équation est un peu la même : la hausse des taux d’intérêt rabote la rentabilité de leurs investissements. À cela s’ajoute le poids de la fiscalité immobilière.

 

La fiscalité immobilière

L’immobilier est devenu une véritable vache à lait pour l’État et les collectivités locales. Les impôts qui pèsent sur les propriétaires bailleurs sont considérables. Il y a naturellement l’impôt sur les revenus fonciers, mais également les taxes foncières qui ont fortement augmenté, et pour les plus chanceux l’impôt sur la fortune immobilière (IFI).

Tout cela fait qu’aujourd’hui de nombreux petits propriétaires qui avaient investi pour compléter leurs retraites, ont du mal à tirer un revenu net d’impôts satisfaisant de leur investissement. Beaucoup regrettent et ne sont pas prêts à remettre une pièce dans la pierre. Certes, le dispositif de défiscalisation Pinel a été prolongé, mais cela reste bien insuffisant pour compenser les contraintes liées à ce type d’investissement (absence de liquidité, blocage des fonds à très long terme, administration des biens, etc.). Avec cette fiscalité et les contraintes liées au statut de bailleur, les propriétaires voient de moins en moins l’intérêt de louer, et nombreux pensent à sortir du marché ou à louer dans le cadre d’un meublé touristique, style Airbnb. Ce faisant, l’offre locative a tendance à baisser.

 

La rénovation énergétique et les nouvelles normes de construction

La baisse de la construction de logements neufs s’explique aussi par le fait que les promoteurs sont pris en étau entre d’une part la hausse des coûts de construction, provoquée par les prix des matériaux et des normes environnementales toujours plus exigeantes ; transition énergétique oblige.

A cela s’ajoute la chasse aux « passoires thermiques » qui s’inscrit dans le cadre du diagnostic de performance énergétique (DPE). Imposé par Bruxelles dès 2006, le DPE classe les logements selon leur consommation énergétique de la lettre A à G. L’objectif est d’atteindre un parc immobilier de catégorie A ou B d’ici 2050 pour respecter la réglementation européenne.

Dans l’immédiat et depuis le 1er janvier 2023, les logements dont la consommation énergétique est supérieure à 450 kWh par m² sont interdits à la location. Pour réduire l’offre de logements à la location on ne fait pas mieux. Et à partir du 1er janvier 2028, tous les bâtiments neufs devront être à émissions « quasi nulles » en vertu d’une nouvelle directive sur la performance énergétique des bâtiments. Les petits propriétaires doivent donc s’adapter à toujours plus d’obstacles pour louer leurs biens, et certains préfèrent jeter l’éponge.

 

La gestion de l’urbanisme par les communes

De l’avis de nombreux promoteurs immobiliers, la gestion de l’urbanisme par les communes constitue un frein au développement de leurs activités.

Ce constat est partagé par le Sénat qui relève :

« Le droit de l’urbanisme est le droit du paradoxe. Fondé en théorie sur le principe d’économie du territoire, il ne permet cependant pas de gérer de façon souple les conflits d’usages qui résultent en permanence de l’appropriation du sol. Entre le « gel  » des espaces naturels et assimilés, destiné à assurer une protection absolue, et le laisser aller le plus nonchalant -notamment à proximité des villes- il ne parvient pas définir, puis à maintenir un juste équilibre ».

 

L’encadrement des loyers et les difficultés liées à la location

Avec le développement des métropoles, est apparu le concept de zones tendues.

Il s’agit de communes où le nombre de logements proposés à la location est très inférieur au nombre de personnes qui veulent devenir locataires pour en faire leur résidence principale.

Dans ces communes, l’encadrement des loyers pose une limite au loyer que fixe le propriétaire lors de la mise en location d’un logement, loué avec un bail d’habitation (y compris bail mobilité). C’est ainsi que de nombreuses grandes villes voient leurs loyers encadrés. Si cet encadrement est naturellement favorable aux locataires qui ont trouvé un logement (pas les autres), il ne fait pas le bonheur des propriétaires bailleurs qui voient la rentabilité de leur investissement baisser à long terme. En effet, avec l’inflation et le coût des travaux, maintenir des loyers inférieurs au prix du marché est le meilleur moyen pour détruire à long terme un parc immobilier. Toutes les études sur les expériences de blocage des loyers dans tous les pays qui l’ont pratiqué sont unanimes sur le sujet[1].

Mais l’encadrement des loyers n’est pas la seule restriction du droit de propriété des bailleurs.

Il faut également rappeler les difficultés juridiques que rencontrent les propriétaires face à des locataires indélicats. Cette insécurité juridique les pousse souvent à sortir leur logement du parc locatif traditionnel et à le mettre sur des plateformes de location saisonnières comme Airbnb.

 

En conclusion

La crise immobilière que nous connaissons n’a rien de surprenant. Certes, la hausse des taux d’intérêts a contribué à son aggravation, mais beaucoup d’autres facteurs ont favorisé cette crise qui vient essentiellement, comme nous l’avons montré, de l’interventionnisme croissant de l’État sur ce secteur. De ce point de vue, l’État n’est pas la solution, mais le problème.

[1] Voir M. Albouy, Finance Immobilière et Gestion de Patrimoine, 2e éd. Economica, Paris, 2020.

Le libertarien Javier Milei, nouveau président de l’Argentine

Il l’a fait. Javier Milei, ce candidat excentrique qui, il y a quelques mois encore, apparaissait comme un outsider en qui personne ne croyait, tant son profil et son discours étaient loufoques, a remporté le second tour de l’élection présidentielle avec 55,6 % des voix, et devient donc le nouveau président d’Argentine.

Pourtant, les résultats du premier tour et les sondages qui ont suivi laissaient croire à une probable victoire de son adversaire, Sergio Massa. La stratégie de modération pour lisser son image, ainsi que le soutien de la droite et du centre-droit, ont très certainement participé à la victoire de Milei. Il faut croire que les Argentins, lassés du péronisme et assaillis par une situation économique désastreuse et une inflation qui n’en finit pas, ont décidé d’enfin tourner le dos au dirigisme, au protectionnisme et à l’étatisme. Il était temps !

Qu’on enterre des méthodes politiques et économiques dont le seul mérite est d’avoir fait preuve de constance dans l’échec devrait, logiquement, nous réjouir. Cependant, un rapide coup d’œil au traitement médiatique de l’élection de Javier Milei nous fait rapidement déchanter…

Mais par-delà la réception de son élection en France, nous connaissions le « candidat Milei », qui sera et qu’attendre du futur « président Milei » ?

 

Un traitement médiatique caricatural qui manque le sujet principal

La presse française, en général peu prolixe sur le sort de l’Amérique latine, qui subit pourtant depuis des décennies les affres de l’illibéralisme, ne manque pas de qualificatifs pour s’indigner de l’élection du nouveau président argentin. En effet, un vent de panique souffle depuis ce matin sur les rédactions, persuadées d’assister à un nouvel épisode de l’avancée de l’extrême droite populiste dans le monde : après Donald Trump, Boris Johnson, Jair Bolsonaro ou encore Viktor Orbán, Javier Milei rejoint la liste des infréquentables réactionnaires faisant progresser l’extrême droite dans le monde.

Le journal Le Monde annonce par exemple l’élection d’un « candidat d’extrême droite », et Guillaume Erner, au micro de France Culture, parle d’un « économiste ultralibéral fan de Donald Trump ». Sur France Info, c’est encore l’association à Donald Trump qui est mise en avant dans le chapô de l’article. Et l’on pourrait multiplier les exemples.

À nouveau, l’étiquette libérale est associée à tout un tas d’idées qui ont comme dénominateur commun de porter une connotation péjorative : « ultralibérale », « populiste », « polémiste », « climato-sceptique », « anti-avortement », « antisystème ». Cette nébuleuse de représentations négatives permet de construire un homme de paille facile à délégitimer, tout en négligeant de mentionner le vrai sujet : l’avenir de l’Argentine et des Argentins.

Dénoncer ce traitement malhonnête et caricatural ne signifie pas que les libéraux soutiennent sans réserve Javier Milei. La réalité est même tout autre : le « camp libéral » se trouve divisé face à l’interprétation à donner du personnage, de ses idées, et de sa capacité à résoudre les crises qui frappent l’Argentine. Une majorité de libéraux n’est pas dupe des faiblesses de Milei, et ont peu de difficultés à garder un regard critique sur son côté démagogique et excentrique, sur ses positions sur l’avortement, ou encore sur son climato-scepticisme. En revanche, quelle que soit notre opinion sur le personnage et son discours, il apparaît clairement comme la moins mauvaise alternative.

Le péronisme et ses méthodes ont ruiné l’Argentine, et la victoire de Milei est avant tout une sanction (certes tardive…) de ce bilan catastrophique. Que l’économiste soit « libéral », « ultralibéral », « libertarien » ou « anarcho-capitaliste » importe finalement peu, et dissimule l’enjeu principal, c’est-à-dire la nécessité d’une rupture profonde avec le dirigisme économique et politique qui règne sur le pays depuis des années. C’est par exemple le sens du tweet de Ferghane Azihari, qui reconnaît sans difficultés que « le scepticisme à l’endroit de Milei est justifié », mais qui invite surtout les commentateurs à se demander pourquoi « l’un des pays jadis les plus riches de l’humanité est sorti de l’histoire ».

https://twitter.com/FerghaneA/status/1726488502638874869

La confusion des genres entretenue par le traitement médiatique de l’élection de Javier Milei passe donc complètement à côté du sujet principal, au profit d’un récit dans lequel l’Argentine tomberait dans les mains de l’extrême droite et de « l’ultralibéralisme » antisocial. On reconnait ici l’abécédaire des mauvaises critiques du libéralisme.

Faut-il rappeler à tous ces commentateurs peu rigoureux qu’il existe pourtant une contradiction profonde entre les idées libérales et les idées d’extrême droite, caractérisées par un fort dirigisme et protectionnisme économique et des idées fondamentalement étatistes ? Ou encore, que la pensée libérale et la pensée libertarienne ne se confondent pas, et qu’il est donc absurde de qualifier Milei d’être à la fois libertarien, libéral, anarcho-capitaliste, d’extrême droite, réactionnaire…

Le RN, étatiste et dirigiste, est considéré comme d'extrême-droite. Le nouveau président argentin Javier Milei, libertarien, est aussi considéré par nos commentateurs comme d'extrême-droite. Cette contradiction ne dérange personne? Je n'ai guère de sympathie pour Milei mais…

— Laetitia Strauch-Bonart (@LStrauchBonart) November 20, 2023

Bref, le sort des Argentins n’intéresse toutes ces bonnes âmes que lorsqu’elles peuvent l’instrumentaliser pour tenir un discours antilibéral. La véhémence des jugements portés sur Milei contraste avec la faiblesse des condamnations du péronisme, prouvant à nouveau qu’en matière de morale et de politique, l’indignation à géométrie variable règne en maître.

 

Du candidat Milei au président Milei : qu’attendre ?

Alors, qu’attendre de cette victoire ? Quel type de président Javier Milei sera-t-il ?

Il est évidemment difficile de répondre de manière définitive à ces questions. Si le fait que Javier Milei soit un Objet Politique Non Identifié, on peut néanmoins postuler que (et c’est normal) le « président Milei » ne se confondra pas avec le « candidat Milei ».

Le « candidat Milei » était définitivement libertarien plus que libéral, et c’est pour cette raison que son populisme assumé n’entrait pas en contradiction avec le reste de son discours. En effet, le libéralisme classique s’accommode peu d’un discours populiste, en ce que la philosophie libérale est, depuis John Locke, une pensée de l’État ancrée dans le réel, cherchant à concilier la protection de l’individu des excès de l’arbitraire et du pouvoir avec la naissance des États modernes.

En revanche, la pensée libertarienne est une philosophie profondément utopiste qui assume défendre un idéal et des positions principielles, en faisant peu de place à la question de la possibilité de son avènement dans le réel.

Comme l’explique Sébastien Caré dans son ouvrage La pensée libertarienne :

« La valeur de l’utopie libertarienne est essentiellement négative, et s’éprouve dans la fonction critique que Ricœur assignait à toute doctrine utopique » (p. 337).

Cette utopie libertarienne remplit une « fonction heuristique salutaire dans le débat démocratique ainsi que dans la discussion philosophique contemporains » (p. 338).

Autrement dit, les idées et la posture libertariennes s’accommodent parfaitement des exigences électorales qu’impose le statut de « candidat », et sa victoire finale ce dimanche 19 novembre vient nous le confirmer. De plus, la dimension subversive, antisystème et anti-élite du libertarianisme s’accorde assez bien avec une posture politique populiste. C’est ce qu’incarnait le candidat Milei.

Le « président Milei », lui, sera certainement contraint par la réalité du pouvoir d’abandonner les habits confortables de l’utopie pour enfiler ceux du réalisme politique.

Perdant de sa radicalité et de sa pureté intellectuelle, il se rapprochera certainement, dans sa méthode de gouvernement, des positions d’un libéralisme classique, davantage armé pour répondre aux exigences de la responsabilité du pouvoir. Cette interprétation rend encore plus ridicules les inquiétudes partagées par l’ensemble de la presse française, qui juge davantage le candidat que le président.

Car sur le plan économique et politique, on ne peut qu’accueillir positivement son programme, et on espère qu’il réussira à libéraliser l’Argentine. Des questions restent toutefois en suspens, notamment sur sa capacité à pouvoir tout appliquer.

Par exemple, il est probable que sa volonté de dollariser l’économie se heurte à la réalité du déficit massif du pays et à l’absence de réserves suffisantes dans le cas de l’adoption du dollar comme monnaie légale. L’inflation subirait un coup d’arrêt, mais l’économie argentine n’aurait plus de marge de manœuvre pour lutter contre la déflation. En outre, sa politique monétaire dépendrait entièrement des décisions de la Fed pouvant être contradictoires avec les besoins des marchés argentins.

Enfin, son libéralisme et son antiétatisme sont difficilement conciliables avec sa volonté d’être intraitable sur les questions sécuritaires. Si ce positionnement est compréhensible tant la criminalité et la corruption sont des poisons en Argentine, on est en droit de s’interroger sur le rôle qui sera donné à l’État dans cette quête sécuritaire.

 

Cela explique certainement pourquoi les libertariens adhèrent, dans l’ensemble, au discours et au personnage du « candidat Milei », quand les libéraux classiques le soutiennent avec davantage de réserves, et ont le regard tourné vers ce qu’accomplira le « président Milei » confronté au réel.

Révolution libérale, populaire et démocratique en #Argentine

Il était temps de tourner la page du kirchnerisme qui a plongé la moitié de la population dans la pauvreté et lègue un pays au bord d'une des pires crises économiques de son histoire.

La tâche de #Milei est titanesque pic.twitter.com/ZLVU5JvzRX

— Maxime Sbaihi (@MxSba) November 20, 2023

Il nous reste donc à rappeler que non, malgré son excentricité et son populisme, Javier Milei n’est pas plus un Trump Bis qu’il n’est d’extrême droite. Il est simplement le visage d’un ras-le-bol, contre le péronisme et l’étatisme, et d’une volonté, celle d’enfin libéraliser un pays qui en a bien besoin. Pour ces raisons, on est en droit de considérer que dans ce contexte, Javier Milei est la meilleure chose (ou la moins mauvaise) qui puisse arriver à l’Argentine.

Mais cet optimisme doit être raisonné et lucide, et les libéraux seront les premiers à rappeler à l’ordre Javier Milei s’il n’est pas à la hauteur du rendez-vous : rien de plus que l’avenir du pays.

2.13.0.0

[Enquête] Ethnocide des Touareg et des Peuls en cours au Mali : les victimes de Wagner témoignent

Le Mali du colonel Assimi Goïta est devenu une colonie de Moscou. Depuis bientôt deux ans, le groupe Wagner, bras armé de l’impérialisme russe en Afrique, y sème la terreur et ne cesse de monter en puissance. Ses actions destructrices ont des conséquences désastreuses pour la stabilité des pays du golfe de Guinée, du Maghreb et du sud de l’Europe.

Cet article représente le premier volet d’une enquête au long cours destinée à être publiée en 2024 sous une forme beaucoup plus exhaustive. L’actualité récente de la prise de Kidal par les terroristes de Wagner le 14 novembre dernier m’a conduit à bouleverser mon calendrier pour sensibiliser le grand public au sujet d’un double ethnocide qui a lieu en ce moment même au sud des frontières européennes, dans le grand voisinage de l’Europe.

 

Pourquoi enquêter sur les victimes de Wagner au Mali

Depuis le retrait de la force Barkhane, le régime putschiste installé à Bamako s’appuie sur le groupe paramilitaire russe Wagner pour se maintenir au pouvoir et régler des comptes historiques avec deux groupes ethniques : les Peuls et les Touareg.

Moura, Hombori, Logui, Tachilit, Ber, Ersane, Kidal, Tonka… ces noms de lieux sont devenus synonymes de carnages pour des milliers de civils issus de ces deux ethnies. Tout se passe exactement comme si le régime d’Assimi Goïta avait planifié et mis en œuvre le massacre systématique de tout individu targui et peul. Hommes, femmes et enfants sont ciblés sans distinction, pourvu qu’ils soient des Touaregs ou des Peuls.

Ces six derniers mois, j’ai pris contact avec des centaines de victimes de Wagner pour recueillir leurs témoignages. Ces témoins sont majoritairement des hommes originaires de Tessalit, Tombouctou, Gossi, Gao, Kidal et Ménaka, communes du nord du Mali qui étaient sécurisées par l’armée française jusqu’en 2021/2022. La plupart d’entre eux ont fui leurs villes et leurs villages pour se réfugier dans des pays limitrophes en Afrique de l’Ouest (Mauritanie, Niger), en Afrique du Nord (Tunisie, Algérie) et même en Europe du Sud (France). Ceux qui sont restés vivent dans l’épouvante au quotidien. Tous sont polytraumatisés. Leurs récits nous renseignent sur les méthodes sanguinaires de l’impérialisme russe en Afrique. Les citations rapportées sont directes, il n’y a aucune reformulation. J’ai aussi laissé les fautes d’orthographes, lorsqu’elles proviennent de témoignages écrits. Les prises de parole que j’ai retranscrites ou restituées ici émanent toutes d’individus qui ont pris des risques en dialoguant avec moi et en acceptant que leurs récits soient publiés. Il ne s’agit que d’une petite partie des témoignages que j’ai recueillis. Je n’ai volontairement donné aucune indication précise sur les identités et les lieux de vie des témoins, pour ne pas les exposer ni exposer leurs familles à des représailles certaines.

 

Exécutions sommaires, tortures, pillages, viols : récits des premiers actes commis par les Wagner à leur arrivée dans des communes peuplées de Peuls ou de Touareg

Les Wagner dominent par la terreur. Les témoignages de leurs arrivées dans une commune Peule ou Targui comportent de nombreuses récurrences sur leurs modes opératoires. De nuit ou de jour, ils commencent par épouvanter la population locale en tuant des innocents sous couvert de lutte contre le terrorisme. Ensuite, ils détruisent les ressources locales et procèdent à des pillages et à des viols :

« Le jour de leur arrivée ils ont commencé par exécuté 9 personnes dont 3 vieux et 2 enfants. Les autres jours ils entrent dans les maisons pillent les commerces , chaque [jour] ils abattent parmi nos animaux pour leur cuisine. »

« Ils sont venus avec les militaires maliens. Sans chercher à comprendre, ils ont tués des innocents. Ça a été tellement rapide ! Les hommes ont été envoyés loin du village, ensuite les femmes ont été choisies comme des mangues au marché, uniquement pour nous violer. J’ai été violée par 5 hommes pendant 2 h de temps . Mon époux était parmi les personnes tuées. »

« Ils sont venus chez nous après une attaque contre l’armée malienne. Suite aux interrogations, ils ont amenés 14 personnes, des peuls, Touaregs et arabes et jusqu’à présent personne d’entre eux n’est jamais revenu. Bientôt un an Sans aucune nouvelle d’eux. Ils ont des familles, des épouses et des enfants. C’est vraiment déplorable. »

« Ils sont rentrés dans mon village pendant le jour du foire hebdomadaire avec des hélicoptères et chasseurs de DJENNÉ sur les motos , ils ont cernés le village, commencé a tiré sur tout le monde au marché. Ceux qui ont fuit pour se réfugier dans la brousse ont croisés les chasseurs et Wagner et militaires, ils ont été tués immédiatement. Ceux qui se sont réfugiés au village ont été capturés vivants, brûlés vivants sans motif. Chez nous, l’état avait abandonné le lieu pendant 9 ans , tout le monde était sous Influences des djihadistes. Au lieu de nous protéger, ils ont tués des gens comme des animaux. Après avoir tués les gens, ils ont tout pillé et abandonnés les corps dans la brousse et dans les rues. C’était désastreux ! Ceux [Ce] qu’ils disent à la télé n’est que la moitié du nombre de personnes tuées. »

« Quand les wagner sont tombés dans une embuscade sur la route principale de niono , après qu’il y’a eu des morts parmi eux , un convoi s’est dirigé à Ségou pour amener les blessés à l’hôpital et dépose les cadavres a la morgue et le second convoi s’est dirigé dans notre village. Ils ont fait une descende musclée chez un marabout peul qui enseigne les élèves coraniques, après avoir rentré , ils n’ont parler à personne. Ils ont fait le tour de la maison , fouiller les chambres et finit par enlevé 4 élèves coraniques ,tous des peuls , j’ai grandi avec eux au village. Deux ont été amenés à Ségou jamais retourner, et les corps sans vies de deux autres abonnés à la sortie de la ville. C’était la PANIQUE au village. »

« Lorsqu’ils sont venus chez nous , ils disaient que notre communauté informait les djihadistes mais c’était faux. Tous les jeunes et vieux ont été ramenés a 3 km de la ville , pour poser des questions que nous n’avons pas eu de réponse . Ils demandaient pourquoi nous informait les djihadistes ? Nous avons répandu que nous ne connaissons pas de djihadistes. Ils ont tiré avec une arme sur les pieds de 3 personnes dont un a succombé après quelques jours, un à perdus son pied et le troisième n’est toujours pas guéri. Ils m’ont frappé avec un bâton, j’ai des cicatrices sur ma tête actuellement. Après leurs auditions, ils n’ont pas laissé un seul animal, ils ont tous pris ».

« Mon ami tamachec à été tué chez lui et sa femme à été violée par les hommes de Wagner. Il n’a rien fait, son seul tord est d’être né avec la peau blanche. Ils l’ont soupçonné d’être en contact avec les djihadistes. C’était faux. »

« Après avoir été attaqués par les djihadistes qui a causés des pertes de vies dans leur rang , ils sont venus pour se venger des peuls sans motif . Brûlés nos champs, nos maisons et emportés nos animaux. »

« Wagner est arrivé dans mon village, ils cherchaient quelqu’un qui avait été indiqué mais absent depuis 6mois. Après avoir finit de questionnés les Villageois, ils voulaient amenés les femmes dans une maison et les violés. Quand nous nous sommes opposés, ils ont abandonnés l’idée en s’attaquant aux jeunes pourqu’ils disent s’ils ont vues l’intéressés. Moi étant le fils du chef de village, ils m’ont amené en brousse, me torturé et me laisser pour mort et continue leur route. Trois jours plutard, nous avions appris qu’ils arrivent, nous avons fuit en laissant tout derrière nous. Ils sont rentrés au village avec les militaires maliens et brûlés le village. »

« Lorsqu’ils sont venus chez nous, ils nous ont d’abord demander de nous écarté des animaux. c’etait en brousse ! Lorsqu’ils ont commencés à poser des questions, l’un d’entre nous par peur à voulut s’enfuir, et sans hésiter, ils l’ont tirer à bout portant au dos. Il est mort sur place. Ensuite ils ont demandé à mon frère aîné Mohamed  [le prénom a été changé] de se déshabiller, lui voulait savoir pourquoi, ils ont mis une balle en tête. Je tremblait jusqu’à ce que j’ai pissé sur moi. Ils ont embarqué tous les animaux, et me mettre une balle au pied droit. Comme ce n’était pas loin de la ville, je me suis débrouillé Pour rentré en ville, mais j’avais perdu tellement de sang que je me suis évanoui et me réveiller à l’hôpital. Nos parents ont enterrés les corps. »

« Ma Femme à fait une fausse couche et elle a perdue notre bébé de 4 mois. Plusieurs personnes ont été blessés parce qu’elles voulaient au moins récupéré leurs bien dans les maisons qui étaient entrain d’être brûlés par les Wagner »

 

Vivre sous le joug de Wagner : « la peur est devenue notre quotidien »

Avant l’arrivée de Wagner, les témoins que j’ai interrogés avaient une profession ou étudiaient. Ils étaient bergers, commerçants, comptables, réparateurs de motos, vendeurs en boutique, transporteurs, gardiens, étudiants. Aujourd’hui ils ont perdu leurs emplois et leurs ressources. Les étudiants ne vont plus à l’université. Leurs familles sont détruites : ils ont vu des proches se faire assassiner, violer, torturer. Certains éduquent les « bébés Wagner », ces enfants qui sont nés après les viols.

Voici comment ils décrivent leur quotidien :

« Je n’ai plus de vie, je n’arrive pas à faire enlever les mauvais souvenirs en tête. J’ai vu mes parents et amis brûlés vivants par les hommes blancs, militaires maliens et chasseur. »

« Toujours dans la peur de se faire massacrer. Les Wagner tuent des gens partout où ils passent. »

« Les mercenaires ont changé notre train de vie, Tu ne peux plus penser à voyager à l’intérieur de la Région sans que tu ne crains pour ta vie, ils sont devenu les cauchemar des populations depuis leurs arrivés à Ber dans la région de tombouctou »

« Ma vi cest la dépression, des sentiments de nostalgie, la souffrance psychique »

« L’élément majeur c’est l’asile de tous mon village en Mauritanie. »

« Nous avons souffert de l’expulsion de nos familles vers des camps de réfugiés par peur de l’oppression financière et de l’oppression de Wagner. Nous avons perdu nos emplois, nos villes et nos vies auxquelles nous étions habitués, tout comme nos enfants ont perdu leur éducation. »

« A cause de wagner, notre communauté à été obligée de fuir. Nous sommes victimes de racisme sans nom par ce que nous sommes des Touaregs»

« L’image de la Scène est toujours devant mes yeux. Mon meilleur ami et collaborateur à été tué et sa femme violée. C’est terrible ! »

« Nous n’avons plus de travail, animaux et maisons à cause de Wagner. Ils ont bafoués notre dignité en Violant nos sœurs et épouses sous nos yeux »

« Ils m’ont pris des amis et à cause d’eux les peuls de notre village qui ont cohabiter avec nous pendant plusieurs générations ont fuit. Ce n’était pas des djihadistes. »

« Ils nous ont tout pris. Celui qui brûle ton village t’a humilié et détruit ta vie. »

« Ils m’ont rendus rancunier et fou»

« Wagner à détruit notre avenir. Jamais nous ne pardonnons »

 

Les victimes de Wagner accusent la Russie et la junte de Bamako

J’ai demandé à tous les témoins que j’ai consultés si pour eux, la Russie était responsable des actions de Wagner. Bien que les sociétés militaires privées soient interdites en Russie, le groupe Wagner a bien été créé pour servir les intérêts de Moscou de façon officieuse. Cette ambiguïté n’existe plus depuis que le président Poutine a signé un décret contraignant les groupes paramilitaires à jurer « fidélité » et « loyauté » à l’État russe, deux jours après la mort du chef du groupe Wagner Evgueni Prigojine. Il restait à savoir si elle subsistait sur le terrain. Elle n’existe pas. Les victimes de Wagner accusent la Russie et la junte de Bamako d’être responsables de la terreur qu’elles endurent. Certains témoins ont été informés du rattachement officiel du groupe Wagner à l’État russe publicisé en août 2023. D’autres n’ont tout simplement jamais fait la différence entre les deux :

« La Russie est le premier responsable mais surtout le gouvernement malien. »

« Oui le premier responsable c’est la Russie qui veut transférer sa guerre géopolitique contre l’Occident sur notre territoire, une guerre qui ne nous profite en aucun cas. Le kremlin influence beaucoup sur la gestion du pouvoir au mali »

« Bien sûr récemment avec l’actuel réorganisation de l’organisation après la mort de Prigojine. »

« malheureusement, Wagner est la main de la Russie en Afrique et en est responsable. »

« La politique étrangère de Moscou est lamentable et par ailleurs la Russie y sera toujours pour quelques choses »

« Oui parce que ce sont des russes »

 

« Pas d’avenir autre que la mort » : quel futur pour les Peuls et les Touareg au Mali ?

Pas une victime de Wagner ne pense que justice lui sera rendue. Les témoins ne font état d’aucun espoir et n’envisagent aucune issue à la situation actuelle, si ce n’est l’exil (lorsque c’est possible) :

« L’avenir est vraiment ambigu, très effrayant et sombre. Nous ne pouvons rien attendre de l’horreur de ce que nous voyons et de ce que nous voyons d’injustice et de tyrannie et du silence du monde sur ce qui se passe. »

« Un avenir incertain et plein d’embûches avec la volonté de la junte à faire la guerre utiliser ses drones contre le Peuple Touaregs et peulhs »

« Aujourd’hui l’avenir pour nous est incertain, il est presque sans issue. Je n’ai pas de travail. »

« Nous avons besoin d’assistance sur le plan sécuritaire car le Mali le Niger et le Burkina ce sont donner la main pour tuer tout ceux qui ne sont pas avec eux au sahel »

« L’avenir est incertain, nos maisons sont brûlés et nous n’avons plus de boeuf. »

« Je ne crois plus à l’avenir. J’ai besoin que mes enfants étudient et avoir une vie meilleure »

La liberté n’a pas de prix, mais elle a un coût : objectif 100 000 euros pour soutenir Contrepoints

Au nom de toute l’équipe de Contrepoints – rédaction salariée, auteurs contributeurs et bénévoles – j’ai le plaisir de vous annoncer le lancement de notre collecte de fonds annuelle pour nous permettre de continuer notre mission en 2024 !

Campagne de dons 2023 ContrepointsObjectif : 100 000 euros

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À l’inverse, Contrepoints s’est donné pour éthique de ne jamais vivre d’un argent prélevé par la force. Notre rédaction continue régulièrement de se développer, et nous devons assurer une infrastructure solide et fiable. Et vous savez mieux que quiconque qu’il n’existe pas de repas gratuit, ni d’information de qualité sans un travail rigoureux et quotidien.

 

La liberté n’a pas de prix, mais elle a un coût

Contrepoints reste accessible gratuitement, car nombre de nos lecteurs – en particulier les plus jeunes – sont coincés entre le marteau fiscal et l’enclume de l’inflation.

Contrepoints est d’ailleurs le seul journal qui traite sérieusement des causes profondes de l’inflation : la création monétaire en roue libre ! Ce travail d’information, de pédagogie et d’analyse est laborieux, parfois répétitif, et il se heurte encore à des idées étatistes séduisantes. Ne vous y trompez pas, la réalité ne se plie pas aux désirs des adorateurs de l’État. Peut-être devrons-nous aller jusqu’à la faillite budgétaire et morale, mais le bon sens finira par l’emporter.

 

Soutenons la liberté, la guerre n’est pas une fatalité

Le climat social fracturé et une atmosphère de guerre imminente – intérieure comme extérieure – favorisent les extrémistes.

Leurs solutions simplistes ne résoudront rien mais vous ruineront à coup sûr : il ne tient qu’à vous de faire entendre la voix de la raison, de la paix et de la liberté sans laquelle la fraternité est un vain mot. Il faut convaincre nos concitoyens de compter sur l’individu libre et créatif plutôt que sur les administrations obèses et déshumanisées.

Nous le faisons sans relâche depuis bientôt 15 années, et c’est grâce à vous chers lecteurs.

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Votre dévoué,

Arnaud Le Vaillant De Charny

Président de l’association liberaux.org
Directeur de publication de Contrepoints

Arnaud Le Vaillant 2023

 

 

Les Occidentaux sont-ils vraiment dépendants de l’uranium russe ?

Par : Michel Gay

Suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, les sanctions économiques mises en place contre la Russie ont épargné l’uranium. Serait-ce à cause d’une trop grande dépendance ? Mais de quoi parle-t-on ? Que place-t-on sous le vocable « uranium » ? Qui est dépendant de qui et de quoi ?…

Les États-Unis voudraient bien se substituer à la Russie, ce qui changerait simplement la dépendance de l’Europe à un autre pays… comme pour le gaz !

 

De quoi s’agit-il ? Il y a uranium et… uranium

Il existe au moins cinq types d’uranium.

Commençons par le début : l’uranium naturel (Unat, issu du sous-sol) contient 99,3 % d’uranium 238 (U238) et 0,7 % d’uranium 235 (U235). Cet Unat est converti en combustible pour les réacteurs en l’enrichissant (UE) (en général jusqu’à environ 5 %), ce qui appauvri le reste de l’uranium appelé… uranium appauvri (Uapp). À noter que ce combustible est peu radioactif (il se manipule à la main) avant d’avoir été utilisé dans un réacteur.

Après avoir été utilisé quelques années dans les réacteurs, la France a fait le choix de retraiter son combustible « usé » radioactif. Elle sépare donc les déchets des matières valorisables, ce qui a permis de réduire considérablement le volume des déchets à traiter.

Les déchets (les produits de fission et les « actinides mineurs ») représentent 5 % du combustible initial. Ils sont conditionnés dans des matrices de verre pérennes appelées à être stockées pour toujours dans des couches géologiques (stockage géologique).

Les matières réutilisables ultérieurement (95 %), c’est-à-dire le plutonium (Pu) et l’uranium restant après traitement (URT) sont réutilisables en réacteur surgénérateur RNR de quatrième génération, ou dans certains réacteurs actuels.

Cette politique de recyclage pratiquée depuis longtemps pour les combustibles nucléaires usés permet, ou permettra, la valorisation énergétique de 95 % (!) des matières initialement présentes.

 

URT, URE, et Russie

Cette URT obtenu après le traitement des combustibles usés contient encore davantage d’U235 fissile (environ 1 %) que l’Unat initial (0,7 %). Il est donc tentant de l’enrichir une nouvelle fois pour obtenir de nouveau un combustible avec cet uranium réenrichi (URE).

Or, au début, la France ne mettait pas encore en œuvre la technique nécessaire pour convertir l’URT en URE car elle enrichissait l’uranium par diffusion gazeuse, ce qui rendait quasiment impossible cette opération.

Une partie de l’URT a donc été envoyée en Russie (qui utilisait la technique d’ultracentrifugation permettant cette conversion compétitive) pour y être à nouveau enrichi et permettre une nouvelle utilisation en réacteur.

Conformément aux pratiques internationales pour de ce type de contrats, la Russie renvoyait l’URE et conservait l’Uapp issu de l’URT, matière nucléaire valorisable (et non un déchet nucléaire), en particulier dans la filière des surgénérateurs à neutrons rapides de quatrième génération (RNR).

 

Les arrière-pensées des États-Unis

La dépendance des Européens au combustible nucléaire russe inquiétait les États-Unis en mars 2023.

Ils s’inquiètent hypocritement aujourd’hui de leur propre dépendance car ils « découvrent » qu’environ 20 % du combustible utilisé dans leur parc de réacteurs nucléaires sont fournis par des contrats d’enrichissement conclus avec des fournisseurs russes. Cette dépendance toute relative a limité la chaîne d’approvisionnement nucléaire américaine en déversant de l’uranium enrichi bon marché sur les marchés mondiaux…

La Russie, qui contrôle près de 50 % de la capacité mondiale d’enrichissement, gêne aujourd’hui les États-Unis. Ces derniers se verraient bien demain prendre sa place, notamment en Europe, après avoir longtemps délaissé le nucléaire au profit du charbon et du gaz.

Actuellement, L’Europe achète cher une profusion de gaz de schiste américain liquéfiée et acheminée par méthanier à travers l’Atlantique pour compenser l’arrêt des livraisons russes…

Les États-Unis livrent aussi du charbon à l’Allemagne qui se fait passer pour vertueuse avec l’affichage de son Energiewende de plus en plus catastrophique fondée sur des éoliennes et des panneaux photovoltaïques aux productions fatales et intermittentes.

Le chef de la diplomatie américaine (le secrétaire d’État américain Antony Blinken), s’est réjoui en avril 2023 à Bruxelles des mesures prises par l’Union européenne pour réduire sa consommation de gaz russe. Il s’est aussi surtout félicité que les États-Unis soient devenus… le premier fournisseur des 27 pays européens en gaz naturel liquéfié (GNL) qui ont plus que doublé (+140 % en un an) et qui représentent 40 % du gaz importé par bateau en Europe.

Les États-Unis souhaitent, bien sûr, que les liens énergétiques de l’Union européenne avec la Russie se distendent encore davantage ! Ils pressent maintenant les Européens de réduire leurs achats d’équipements et de combustibles nucléaires russes et de diversifier leurs approvisionnements en uranium, de préférence en se fournissant… aux États-Unis.

 

La France serait « sous emprise » russe ?

Malgré le conflit en Ukraine, les relations commerciales continuent dans le domaine nucléaire entre l’Union européenne, notamment la France, et la Russie, car chacun y trouve son compte. Les achats de combustible et de technologie nucléaires russes par l’Union européenne ont même atteint en 2022 leur plus haut niveau depuis trois ans, tandis que, par exemple, la France vend des turbines Arabelle pour équiper les centrales électriques nucléaires russes en construction.

Toutefois, la France ne dépend pas stricto sensu de la Russie pour le bon fonctionnement de ses centrales nucléaires (elle n’a pas les mains liées).

Selon le cabinet de la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher :

« La France ne se fournit pas en Russie pour son approvisionnement en uranium naturel ou la préparation du combustible, comme cela est sous-entendu à tort par Greenpeace. […] Nous ne sommes dépendants d’aucun site, d’aucune société et d’aucun pays. […] Les sanctions doivent avoir un impact sur l’économie du pays visé. Or, des sanctions sur la filière nucléaire généreraient un impact modeste sur la Russie. À l’inverse, la résiliation des derniers contrats subsistants qui portent sur le retraitement de combustibles générerait des indemnités plus avantageuses pour la Russie que leur poursuite a minima ».

Et comme toute société commerciale, la compagnie russe Rosatom ne fait pas de cadeau. Elle réclame trois milliards d’euros au groupe énergétique finlandais Fennovoima, qui a mis fin unilatéralement à leur projet commun de la centrale Hanhikivi-1, en mai 2022. Un tribunal international chargé des différends commerciaux a donné raison au groupe russe : il y a bien eu rupture de contrat.

De son côté, la société EDF a diversifié ses sources géographiques et ses fournisseurs en combustible nucléaire, et continue de le faire. Selon son PDG Luc Rémond, elle ne dépend pas de la Russie pour faire fonctionner ses réacteurs nucléaires, même si ce pays est un partenaire commercial important.

EDF indique qu’elle « applique strictement toutes les sanctions internationales tout en respectant les engagements contractuels pris ». EDF n’a « acheté aucun uranium naturel extrait de mines russes, ni de services de conversion de l’uranium naturel en Russie en 2022, ni augmenté sa part d’enrichissement de son uranium naturel non russe réalisé en Russie en 2022 par rapport à 2021 ».

Petits producteurs d’uranium naturel au niveau mondial, la Russie est en revanche active et compétitive pour enrichir l’Unat en U235 (UE ou URE à partir d’URT) et pour le transformer en combustible nucléaire dont elle détient environ 40 % du marché mondial.

Plus de trente pays achètent tout ou partie de leur combustible nucléaire à la Russie. La France a acheté environ un tiers de son uranium enrichi à la Russie en 2022 car c’était plus économique, mais elle peut en acheter ailleurs et / ou augmenter sa propre production.

Et même les États-Unis ont acheté 28 % de leur combustible nucléaire à la Russie en 2021.

Cette dépendance commerciale explique, en partie, pourquoi l’énergie atomique ne fait pas partie des sanctions internationales contre la Russie.

La Commission européenne, encouragée par l’Allemagne (qui ne manque pas d’air après avoir presque tout misé sur le gaz russe…), les pays Baltes, la Pologne, la Finlande, la République tchèque, voulaient inclure le nucléaire dans l’embargo, mais la présidente Ursula von der Leyen a abandonné l’idée. La Hongrie a indiqué qu’elle mettrait son veto : elle dépend du nucléaire russe pour 50 % de son électricité, et la centrale de Paks (où deux nouveaux réacteurs sont en construction) appartient aux Russes.

Or, l’unanimité des 27 États membres est requise sur cette décision.

Les Européens importent pour 200 millions d’euros d’uranium de Russie chaque année. Avec la pression sur les autres sources énergétiques, les importations ont même augmenté en 2022 : +72 % pour la Slovaquie, par exemple.

 

Se passer de l’uranium russe ?

La filière industrielle nucléaire mondiale et quelques pays commencent à réinvestir pour se passer de l’uranium enrichi russe. La faible demande d’uranium ces dernières années avait conduit à fermer des mines et à ne pas investir dans les centrifugeuses (ultracentrifugation) servant à convertir l’uranium en combustible.

Mais (rappel) la Russie détient aujourd’hui plus de 40 % du marché mondial de l’uranium enrichi. Se passer d’elle prendra du temps. Les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et quelques Européens commencent à vouloir développer des alternatives de long terme qui nécessitent des investissements importants.

Les exportations d’uranium enrichi rapportent environ un milliard d’euros par an à la Russie. C’est peu au regard du pétrole et du gaz qui représentent 200 milliards d’euros.

Cependant, le nucléaire a une dimension plus géostratégique que commerciale.

La Russie est actuellement le plus grand constructeur au monde avec 26 réacteurs en chantier dans dix pays sur les 58 en construction dans le monde qui compte 438 réacteurs en service à ce jour. Elle vend des centrales clés en main (Akkuyu en construction en Turquie ou Paks en Hongrie) et assujettit, par contrat, les pays acheteurs à ses services pour une longue durée (environ un siècle), de la construction au démantèlement, avec une exploitation des réacteurs de 60 à 80 ans.

Le Département américain de l’énergie (DOE) développe depuis quelques mois un programme d’enrichissement supplémentaire d’uranium.

En janvier 2023, la société ConverDyn a reçu quatorze millions de dollars pour convertir de l’uranium en combustible pour les 92 réacteurs nucléaires américains. Elle va réouvrir l’usine située à Metropolis, dans l’Illinois, fermée en 2017 à cause de la concurrence russe.

Depuis janvier 2023, le Royaume-Uni a débloqué 80 millions d’euros pour les industriels qui veulent rendre l’énergie britannique totalement indépendante de la Russie.

 

Souveraineté nucléaire pour la France et les États-Unis

En France, Orano espère aussi capter une part du marché si les dirigeants politiques décident de mettre la Russie au ban des nations. Le groupe vient d’annoncer une extension de son usine d’enrichissement d’uranium au Tricastin (Drôme), afin d’augmenter de 30 % ses capacités de production.

Framatome vient également de signer un accord avec la Bulgarie pour approvisionner une de ses centrales.

Les États-Unis et l’Union européenne sont tout à fait capables de couvrir les besoins actuels du parc nucléaire mondial. Mais ce sera long.

Pour Orano, par exemple, aucun uranium supplémentaire ne sortira du site du Tricastin avant 2030.

EDF a approuvé en 2018 la relance d’une filière robuste et compétitive pour convertir en URE 94 % de l’URT de son parc. Mais là aussi, plusieurs années seront nécessaires.

La dépendance forte à la Russie de quelques pays en Europe de l’Est, telle la Hongrie, est effectivement une réalité pour le fonctionnement de leurs centrales nucléaires (de construction russe) et pour leur approvisionnement en combustible nucléaire.

En revanche, cette dépendance est un mythe pour la France et les États-Unis (une fakenews d’antinucléaires pour décrédibiliser le nucléaire ?). Ces deux pays maîtrisent leur propre technologie, disposent de stocks importants d’uranium et de combustible (plusieurs années), ont diversifié leurs partenaires depuis longtemps, et peuvent s’approvisionner facilement ailleurs dans le monde.

Droits de l’Homme : le double discours de Juan Branco

Les questions des droits de l’Homme et de la morale en matière de politique internationale ont été particulièrement instrumentalisées ces dernières années. Les commentateurs et acteurs de la vie politico-médiatique ne sont pas rares à s’être contredits sur ces questions, invoquant alternativement la morale universelle et la rhétorique réaliste des intérêts, fonction des belligérants d’un conflit.

Cas particulièrement exemplaire de cette disposition d’esprit fallacieuse, l’avocat Juan Branco s’est ainsi illustré par de constants et fréquents discours humanitaires concernant diverses situations de politique internationale, tout en s’affranchissant des principes qu’il professait pour d’autres cas.

 

Ukraine : l’angle mort de l’hypocrisie tiers-mondiste

Ainsi, en août 2022, dans un entretien accordé à VA+, il affirmait dans son style toujours grandiloquent que le soutien français à l’Ukraine allait contre nos intérêts nationaux, demandant aux spectateurs de s’interroger sur les raisons qui poussaient notre pays à aider Kiev à défendre sa souveraineté nationale face à l’invasion russe.

Sur son propre site, on peut aussi retrouver un texte de mars 2022 où il affirme la même chose :

« … La question qui se pose aujourd’hui, ce sont les intérêts de la France, la défense des intérêts de la population française et le rôle que l’État français doit jouer afin de protéger ses concitoyens, et que la zone dont nous parlons n’est pas une zone d’intérêt stratégique primordiale pour la France, contrairement à ce qui a été beaucoup affirmé et ne justifie pas du tout le dispositif qui a été mis en place face aux participants au conflit, avec une posture moralisante. »

Si l’objet de cet article n’est pas de démontrer que la France a intérêt à défendre les frontières légales d’un pays limitrophe de l’Union européenne ainsi que de divers États-membres de la zone OTAN, le problème du propos de Juan Branco est qu’il entre en contradiction totale avec la plupart de ses points de vue.

Aujourd’hui célèbre pour ses gesticulations sénégalaises, en tenue traditionnelle locale s’il-vous-plait, l’avocat germanopratin ne manque pas de fustiger l’État français quand il défend ses intérêts en Afrique, au Levant ou partout ailleurs.

Désormais avocat de l’opposant Ousmane Sonko, panafricaniste qui défendait d’ailleurs la junte malienne sous emprise russe en août 2022, au moment même où Juan Branco ne trouvait rien à redire aux bombardements visant des civils à Marioupol ou Bakhmut, il ne manque jamais une occasion de fustiger le Sénégal et la CEDEAO.

 

Les gesticulations sénégalaises de l’avocat Juan Branco

Serait-il dans notre intérêt que le pays le plus stable de la région, qui affiche selon le rapport 2022 de l’Economic Intelligence Institute un des meilleurs indices de démocratie des institutions parmi les pays francophones d’Afrique, tombe entre les mains d’un révolutionnaire ami des régimes sahéliens qui ont chassé l’armée française pour y installer la milice Wagner dont les exactions nombreuses sont parfaitement documentées, le tout pour satisfaire l’appétit d’une puissance prédatrice ?

Ou alors, faudrait-il considérer que la question des droits humains ne concerne que les pays occidentaux ?

De la même manière, on constate qu’Israël subit une attention toute particulière. Israël peut commettre des crimes de guerre et doit, comme tous les États du monde, se soumettre au droit international. Il est néanmoins permis de s’interroger sur le fait que ses actions suscitent bien plus de protestations que celles, par exemple, d’un Bachar Al Assad qui a employé des armes chimiques et même assiégé le camp palestinien de Yarmouk avec une brutalité sans pareille.

 

L’Ordre international est l’intérêt de la France

De tels crimes n’ont alors dérangé personne, et surtout par nos belles âmes plus promptes à salir la France, dont les intérêts semblent selon eux se limiter à s’aligner sur la Russie et ses alliés.

Disons-le donc tout net : ils ne s’intéressent pas plus aux intérêts de la France bien pensés qu’aux droits de l’Homme, mais ont un agenda qui colle étrangement aux obsessions anti-occidentales du « sud global » dont l’objectif final tient dans l’instauration d’une prétendue « multipolarité » qui mettra à bas un Ordre International patiemment construit, au service exclusif des Empires revanchistes et des irrédentismes.

Notre ordre est certes imparfait, mais il vaut mieux que l’anarchie et la multi-conflictualité. Les Juan Branco et autres agités sont donc des agents du désordre et des propagateurs de la guerre du tous contre tous, bien plus que des humanistes. Ce n’est pas être idéaliste que de vouloir défendre l’Ordre international contre ceux qui entendent le saccager. Ce n’est pas non plus contraire au devoir d’humanité qui est le nôtre.

Tickets-restaurants : une polémique qui en dit long

Le gouvernement a été cette semaine confronté à un nouveau psychodrame : la fin programmée au 1er janvier 2024 de la dérogation permettant d’acheter n’importe quel produit alimentaire avec un titre-restaurant.

En effet, Bercy n’avait pas prévu de reconduire cette dérogation, adoptée durant la crise liée au Covid-19 alors que les restaurants étaient fermés : bronca immédiate parmi l’ensemble des partis d’opposition et des salariés maintenant habitués à faire leurs achats alimentaires quotidiens avec ces chèques subventionnés. Le gouvernement s’est vu obligé de rétropédaler dans les 24 heures. Ne trouvant pas de véhicule législatif parmi ceux qui étaient programmés pour y ajouter un amendement, les groupes de la majorité ont déposé une proposition de loi qu’il a fallu faire entrer au forceps dans le calendrier législatif serré de fin d’année.

On ne peut que déplorer que cette prise de conscience de dernière minute n’ait pas permis, une nouvelle fois, un débat plus large sur les raisons de la colère et l’opportunité du dispositif. Si les Français sont friands de ce bonus en pouvoir d’achat, ils semblent moins réceptifs à ce qu’on leur dise comment gérer leurs dépenses. Le titre-restaurant a été largement détourné de son intention initiale, et on peut s’interroger sur l’actualité de son opportunité.

Le titre-restaurant a été inventé par Jacques Borel, industriel de la restauration, qui vendait aux entreprises ces titres valables chez des restaurateurs partenaires comme des avantages sociaux. En 1967, il convainc le gouvernement de Georges Pompidou de leur donner un cadre légal et de faire bénéficier d’avantages fiscaux la part financée par l’employeur. Le but de cette politique publique était tout autant de fournir un repas sain aux salariés ne disposant pas de restauration collective, que de diriger une partie des revenus salariés vers le secteur de la restauration. Mais en 2010, une partie de la manne est dirigée vers la grande distribution : le gouvernement autorise alors l’achat d’aliments directement consommables avec les titres-restaurants, ainsi que les fruits et légumes. On s’éloignait alors de l’idée initiale, un repas sain pour les travailleurs, puisqu’il est évident qu’un plat micro-ondable n’a pas les mêmes bénéfices nutritionnels qu’un plat de bistrot, mais aussi parce que la restauration perdait en partie l’argent qui lui était destiné (bien que depuis on lui a consenti un allègement de TVA).

En prolongeant la « dérogation Covid-19 », considérée comme une aubaine pour le pouvoir d’achat, voire en la pérennisant comme certains le réclament, le titre-restaurant perd totalement son intérêt, si ce n’est pour ceux qui les émettent.

Pourquoi le restreindre encore à l’alimentation ? Pourquoi un salarié ne pourrait-il pas acheter une brosse à dents ou des produits ménagers avec une partie de sa rémunération ? C’est cette question à laquelle le gouvernement sera rapidement confronté. Ce qui était vu comme un bonus pour aller au restaurant est aujourd’hui perçu comme partie intégrante du salaire. Que la fin de la dérogation ait provoqué autant d’émois est la preuve que les Français n’acceptent pas que le choix de leur dépense soit fait à leur place.

Alors la solution est simple : pour le pouvoir d’achat et la simplification de la feuille de paie, versons tout en salaire. Et plutôt qu’un maquis d’avantages fiscaux pour les employeurs, baissons les charges sur tous les salaires pour redonner un peu de souffle aux classes moyennes qui paient tous les impôts, mais ne bénéficient que de peu d’avantages.

En faisant encore un petit effort, les Français prendront conscience du caractère paternaliste de notre État, et qu’à travers notre fiscalisation hors norme, l’administration se substitue à eux dans de nombreux choix du quotidien, et qu’une part majeure de leurs revenus est placée sous sa tutelle.

L’Agirc-Arrco doit-elle contribuer au financement du déficit du système des retraites français ?

« L’État ayant dépensé
Tout l’été
Se trouva fort dépourvu
Quand il fallut financer ses agents,

Plus d’argent.

Il alla crier famine
Chez l’Argirc-Arrco sa voisine,
La priant de lui donner
Quelques sous pour financer son déficit,

« C’est pour la solidarité », lui dit-il.

L’Agirc-Arrco n’est pas prêteuse ;
C’est là son moindre défaut.

« Que faisiez-vous au temps faste ? »
Dit-elle à ce quémandeur.
« Je dépensais à tout venant, pour de bonnes causes »
« Vous dépensiez ! J’en suis fort aise.
Eh bien ! empruntez maintenant »

 

L’Agirc (Association Générale des Institutions de Retraite Complémentaire des Cadres) et l’Arrco (Association pour le Régime de Retraite Complémentaire) gèrent les retraites complémentaires des salariés.

L’Agirc-Arrco est un système de retraite complémentaire au régime général, c’est un système de retraite par répartition obligatoire, qui fonctionne par points. Les points reçus par chaque pensionné sont fonction du montant des cotisations versées (employeurs et employés) ; le total des points est multiplié par la valeur du point à la date du départ à la retraite. Le montant annuel brut de la retraite est donc égal au nombre de points Agirc-Arrco multiplié par la valeur du point.

 

Une caisse à l’équilibre

C’est, oh miracle, une caisse gérée par les syndicats et qui est à l’équilibre ; ce qui n’est pas le cas du système de retraite général, ni a fortiori du système de retraite des fonctionnaires.

L’Agirc-Arrco est un système à contribution définie, c’est-à-dire que les prestations sont définies par rapport aux cotisations versées. Autrement dit, s’il y a 100 dans la caisse, on distribue une somme inférieure ou égale à 100.

On le fait en jouant sur la valeur du point : si les cotisations dans la caisse s’élevent à par exemple 90, alors, s’ils sont responsables, les gérants de la caisse vont baisser la valeur du point, et on distribuera 90 ; dans le cas contraire, s’il y a 110 dans la caisse, alors les gérants peuvent, soit opter pour le maintien du point à sa valeur et constituer des réserves pour des jours moins fastes, soit distribuer 110. Chaque retraité bénéficiera alors d’une retraite plus élevée, et il n’y aura ni réserves ni déficit.

On voit avec cet exemple simple que ce système de retraite par répartition, avec une valeur du point modulable (à la hausse ou à la baisse) en fonction des recettes, est un excellent système quand il est géré par des acteurs responsables… c’est-à-dire, pas par l’État. C’est le cas à l’heure actuelle, ce qui prouve que lorsqu’ils travaillent hors des projecteurs et des déclarations politiques les syndicalistes savent gérer d’une manière sensée un système complexe.

Or, l’allongement de l’âge de la retraite de 62 à 64 ans a pour effet de gonfler les cotisations, et donc les excédents du régime complémentaire. Il y a, ce que l’on appelle en France, une « cagnotte » (c’est le niveau économique).

Des entrées exceptionnelles, dues à une réforme élémentaire du système de retraite français (on passe de 62 à 64 ans…), sont estimées à 400 millions d’euros en 2024, à 800 millions d’euros en 2025 ; et 1,2 milliard d’euros en 2026.

Ce surplus peut : soit être capitalisé, soit être dépensé, soit être « confisqué » par l’État pour financer le système de retraite des fonctionnaires ou le régime général, tous deux largement déficitaires, ou pour servir à financer des promesses faites dans le feu de la négociation (relèvement des petites pensions).

Dans tous les cas, on appellera cela la solidarité entre régimes. Cette solidarité ne peut être qu’à sens unique étant donné la disparité entre un système de base et un système public des retraites déficitaire, et un système complémentaire excédentaire.

Inutile de dire que la solution choisie par l’Agirc-Arrco a été celle de dépenser immédiatement ce surplus (sans mettre en péril les réserves confortables qu’elle possède, estimées à 68 milliards fin 2022). Les pensions complémentaires des retraités Agirc-Arrco seront revalorisées de 4,9 % dès le début novembre 2023.

Le gouvernement avance que cet accroissement des recettes du système complémentaire n’a rien à voir avec la gestion de l’Agirc-Arrco, mais qu’il est le résultat de la réforme des retraites qu’il a menée, réforme nécessaire et impopulaire. Ce surplus n’appartient donc pas à l’Agirc-Arrco, et il ne serait pas anormal que la totalité, ou du moins une partie, aille à la solidarité entre caisses, la caisse excédentaire finançant une partie des caisses déficitaires (régime général et pourquoi pas, abonder les petites retraites). Cela montre que dès qu’il y a un surplus exceptionnel (Agirc-Arrco, UNEDIC), l’État ne pense qu’à le dépenser quitte à invoquer des économies.

 

L’État est dans une situation désespérée

Toutes ces négociations portent sur le marginal.

Il y a un excédent exceptionnel, comment le dépenser ? Faut-il le réserver pour son destinataire, faut-il le partager ? Et pour qui ? Faut-il augmenter des cotisations ici, et les réduire ailleurs ? Faut-il raboter les allègements de charges des entreprises ?

Toutes ces discussions sont un peu dérisoires compte tenu du problème posé. Elles montrent que l’État est dans une situation désespérée, et cherche par tous les moyens à grappiller des sous pour financer un système de retraite à bout de souffle.

Cela montre ce que dit M. Jouyet dans son dernier livre :

Je n’ai jamais senti chez Chirac, Hollande, Sarkozy et Macron le moindre intérêt pour la réforme de l’État.

Cet immobilisme est conforté par une haute administration pusillanime qui, chaque fois qu’une réforme est nécessaire, répond « Est-ce bien nécessaire monsieur le ministre ? »

Aucune réforme n’est possible sans un diagnostic.

Le système des retraites français repose sur la répartition, c’est-à-dire que les actifs paient pour les pensions des retraités actuels. Pour que le système soit viable, il faut que le montant des cotisations soit égal ou supérieur au montant des prestations la même année. Non seulement les cotisations doivent être égales aux dépenses (prestations versées), mais il faut que les cotisations futures (sur au moins une génération) soient égales aux prestations futures.

Dans le cas contraire, il se forme un déficit qui ne peut être financé que par des emprunts, c’est-à-dire des impôts futurs. Or, il n’y a aucune justification éthique et économique pour que les retraités d’aujourd’hui soient financés par de la dette, c’est-à-dire par les impôts futurs que devront payer nos enfants et petits-enfants.

Le ratio clef est le nombre d’actifs (cotisants) par rapport au nombre de retraités.

Or, nous savons que ce ratio va en diminuant inexorablement (le ratio doit être projeté sur 30 ans). Le problème de la retraite en France (comme partout dans le monde) est un problème démographique et un problème financier. Si c’est un problème démographique, il doit être étudié sur la longue durée, qui n’intéresse pas les politiques, sauf pour l’allongement de l’âge de la retraite qui est une réforme nécessaire, mais très insuffisante.

 

Poser le diagnostic

Quand on parle du système des retraites, les questions à poser sont :

  1. Quel est le montant total des cotisations payées par les actifs ?
  2. Quel est le montant des prestations versées ?

 

Hélas, le débat actuel ne tourne pas sur cette question structurelle que la haute administration ne veut ni ne peut voir. Au lieu de cela, on discute à perte de vue de la répartition d’un hypothétique surplus.

Le montant des recettes du système des retraites par répartition en France s’élève en 2021 à 227 milliards d’euros, soit 8,6 % du PIB. Bien entendu, dans les cotisations on ne tient pas compte des subventions de l’État en faveur de ses fonctionnaires qui, sur le plan économique, s’analysent comme des dépenses publiques (subventions). On considère que la cotisation de l’État est équivalente à celle du secteur privé en faveur de ses salariés, soit 16 % du salaire brut.

Au niveau national, les prestations totales s’élèvent à 345 milliards d’euros, soit 13 % du PIB. Le déficit du budget des retraites français est donc égal aux cotisations moins les prestations (227-345 = -118 milliards) ; ce n’est pas exactement le même chiffre que celui du COR, qui trouve un… surplus de 800 millions cette année. Nous ne reviendrons pas sur les âneries du COR qui est un organisme idéologique dont l’objectif consiste à montrer que le budget retraite en France est équilibré grâce aux subventions de l’État, et que les retraites des fonctionnaires ne pèsent pas dans ce déficit.

 

Ce déficit est couvert par des subventions et des impôts.

  1. Des impôts affectés représentant 46 milliards. On rappelle que dans un système normal et viable de retraite par répartition, les prestations devraient être totalement financées par des cotisations.
  2. Des subventions de l’État pour financer les retraites de ses fonctionnaires et des régimes spéciaux (46 + 7 milliards)
  3. Des subventions de l’État en faveur du secteur privé (5 milliards)
  4. Des transferts provenant de caisses excédentaires (14 milliards).

 

Rappelons que, sur le plan économique, une subvention est une ressource pour le budget retraite (le COR s’est limité à cet aspect) et toujours une dépense pour l’État. Donc quand on consolide ces deux comptes, les subventions et les transferts d’une caisse à une autre disparaissent. Il est curieux que le COR ait un niveau aussi faible en économie.

Tableau : Le système des retraites par répartition en France n’est pas viable, il y a 100 dans les caisses et on dépense 152.

 

Les marchés imposeront le changement

Une fois le diagnostic fait, les questions à poser sont les suivantes :

  1. Le système est-il viable à long terme ?
  2. Est-il normal que l’État (les contribuables) finance, par des subventions, les retraites confortables des fonctionnaires, fixées a priori en fonction de leur dernier salaire ?

 

Ici, nous ne sommes plus dans un système pouvant être corrigé en modulant la valeur du point d’indice, mais dans un système fou, où les prestations n’ont rien à voir avec les cotisations. Cela s’appelle un système à prestations définies par un groupe de pression sans préoccupation du montant dans la caisse. Si on regarde le tableau, on constate qu’il y a 100 dans la caisse (en recette) et 152 en prestations. Ce n’est pas viable.

Ces discussions autour de la répartition du surplus sont dérisoires par rapport à l’enjeu.

Le nœud du problème consiste à supprimer le ratio de 75 % du dernier salaire pour les fonctionnaires, mais ici nous entendons les hauts fonctionnaires dire : « Est-ce vraiment nécessaire, Monsieur le ministre ? Pensez à la rue (et pensez à notre propre intérêt) ».

En admettant que ceux qui décident dans notre pays aient fait le diagnostic, ils n’ont aucun intérêt à ce que ça change (non seulement ils n’ont pas intérêt, mais ils demandent que leurs retraites soient calculées sur leur dernier salaire plus leurs primes). Les retraites françaises sont financées par l’accroissement de la dette qui représente environ la moitié du déficit budgétaire français. Quelle que soit la réponse du haut fonctionnaire et de la rue, la question sera sans doute posée un jour par les marchés.

Antisémitisme : les masques tombent, et les œillères aussi

L’antisémitisme est en vogue cet automne. Suite à la guerre déclenchée le 7 octobre par l’attaque du Hamas, des croix gammées apparaissent sur des portes de logements et entreprises de Juifs dans divers pays occidentaux (en Orient il n’y en a presque plus). Des étudiants juifs sont menacés sur des campus américains où certains professeurs ont fait part de leur euphorie après l’attaque des djihadistes.

À Paris, New York, Berlin, ou Londres on arrache les affichettes d’enfants kidnappés par le Hamas. Des manifestations dénoncent Israël à Paris, ou Berlin aux cris de « Allah Akbar » en omettant soigneusement de critiquer les crimes du Hamas, et même d’appeler à la libération des otages.

L’Allemagne se réveille avec la gueule de bois. 3000 personnes ont manifesté dans les rues d’Essen, avec de nombreux drapeaux islamistes et en défendant le califat mondial. 1/2 pic.twitter.com/W51ubq4yWk

— Mathias Ulmann (@MathiasUlmann) November 4, 2023

 

À Sidney, un cortège a appelé à « égorger les Juifs ». Quant à la marche de dimanche à Paris contre l’antisémitisme, bien des acteurs politiques et cultuels ont refusé d’y participer au prix de positions ambiguës et alambiquées. À l’image du Conseil français du culte musulman refusant de s’y associer de peur sans doute d’être en porte-à-faux vis-à-vis de sa base, au prétexte qu’elle ne dénoncerait pas parallèlement… l’islamophobie.

 

Quatre vagues d’antisémitisme depuis 1945

Cet antisémitisme décomplexé s’étend aussi à certains dirigeants politiques un peu partout en Occident, même s’ils ont la prudence, ou l’habileté, de ne pas reprendre des slogans des années Trente, se contentant de refuser de qualifier de terroriste le Hamas, ou le renvoyant seulement dos à dos à Israël. C’est-à-dire mettant sur le même plan l’État hébreu et une organisation terroriste ayant exécuté de sang froid des femmes et des enfants, comme en attestent notamment les vidéos récupérées auprès des combattants du Hamas abattus, ou capturés, visionnées par l’auteur de ces lignes.

Un dos à dos auquel Israël, accusé d’être un État colonial (superficie, l’équivalent de la Bretagne) et réalisant un nettoyage ethnique (si c’était son objectif, vue la puissance de son aviation, il n’y aurait déjà plus âme qui vive à Gaza) est renvoyé par les gouvernements d’une soixantaine de pays du monde, qui représentent les deux tiers de l’humanité. Tandis qu’une trentaine de pays, presque tous d’Afrique du Nord et Proche-Orient, soutiennent carrément le Hamas. Lequel n’est condamné clairement que par les pays occidentaux, en sus de l’Inde et d’une huitaine de pays d’Afrique noire.

Il faudrait être d’une candeur féroce pour être surpris et croire que l’antisémitisme serait mort avec un certain Adolf H. dans un bunker berlinois en avril 1945. Ce jour-là n’a été détruit qu’un projet génocidaire mené par un État industriel. Pas l’antisémitisme, qui resurgit depuis par vagues, au gré des soubresauts du conflit israélo-palestinien, mais pas seulement.

Simon Epstein, historien spécialiste de la question, identifie quatre vagues d’antisémitisme en Occident depuis la Deuxième Guerre mondiale :

  1. Une, à l’instigation apparemment du KGB, en 1959, en Europe occidentale et États-Unis
  2. Une autre, déclenchée par la guerre du Kippour, de 1973 à 1982
  3. Une autre, en Allemagne, France et États-Unis, de 1989 aux accords d’Oslo de 1994
  4. Une dernière, à partir de l’intifada de 2000, qui ne s’est jamais vraiment terminée, et s’accentue encore depuis le 7 octobre

 

Un adulte sur quatre est antisémite

Ailleurs, cela n’a pas vraiment de sens de parler de vagues, pour la simple raison que l’antisémitisme y est stable à un niveau élevé, voire au taquet.

Selon un sondage de l’Antidefamation league mené en 2014 (depuis, plus rien…) dans 102 pays sur cinq continents, un adulte sur quatre dans le monde approuvait au moins six des onze opinions négatives sur les Juifs qui leur étaient proposées. Ce pourcentage ne dépassait pas 15 % en Amérique du Nord, ou en Océanie, mais montait à 24 % en Europe occidentale (17 % en France), comme en Amérique latine, 22 % en Asie (20 % en Chine et Inde… et 6 % au Vietnam), 23 % en Afrique subsaharienne, 34 % en Europe orientale (32 % en Russie) et… 74 % en Afrique du Nord et Moyen- Orient. Aucun pays musulman ne comptait un pourcentage d’antisémites inférieur à 75 %, avec des pointes fréquentes à 98 %, sauf… l’Iran à 60 % !

Ce qui n’a rien de très surprenant. Loin des caméras occidentales, les écoles de nombreux pays musulmans martèlent chez les enfants la détestation des Juifs en citant notamment un hadith (tradition orale de Mahomet et ses compagnons) appelant à les tuer (on peut interpréter différemment le Coran lui-même, aux versets exprimant une défiance certaine envers les Juifs, mais apparemment contradictoires sur la question, comme sur bien d’autres, ce qui explique que, heureusement, tous les musulmans pratiquants ne sont pas antisémites).

 

Antisioniste ou antisémite, beaucoup de ressemblances

Certes, en théorie, il existe une différence entre antisémitisme et antisionisme : on peut en effet juger illégitime l’existence même d’Israël (comme on a pu le faire pour de nombreux autres pays, URSS, RDA, Pakistan oriental, etc), sans détester pour autant les Juifs.

Des Juifs orthodoxes citent même un obscur passage des textes hébraïques proscrivant la création d’un État à Jérusalem.

En pratique, toutefois, la quasi-totalité des antisionistes sont antisémites sur les bords dès qu’on creuse un peu lors d’une conversation, ou comme l’illustre une expérience de pensée ; croyez-vous vraiment qu’une demi-douzaine d’États arabes auraient mené quatre guerres à Israël, et que des manifestations incandescentes dénonceraient ce pays 75 ans après sa naissance si les Israéliens étaient musulmans ?

Sans oublier que ceux qui fustigent Israël n’objectent pas aux différentes oppressions de peuples musulmans ailleurs, Ouïghours en Chine, Rohingyas en Birmanie, etc.

 

L’antisémitisme, principe géopolitique de nouveau structurant

Bref, l’antisémitisme semble être redevenu, pour la première fois depuis la Deuxième Guerre mondiale un principe géopolitique structurant à l’échelle planétaire.

Et cela risque de s’accentuer avec les victimes collatérales des opérations de l’armée israélienne face à un Hamas se servant des civils comme de boucliers humains. On voit monter partout une émotion (Israël est clairement en train de perdre la bataille des images, voire de l’opinion) poussant nombre de dirigeants à réclamer un cessez-le-feu, à l’image du président Macron, sans toutefois expliquer comment Israël pourrait alors détruire le Hamas. S’opposeraient-ils à toute riposte militaire si un groupe terroriste commettait en France l’équivalent de 70 Bataclan, qui correspond, en proportion de la population israélienne, au bilan de l’attaque du 7 octobre ?

De ce fait, se pose une question essentielle pour la paix civile en Occident : l’antisémitisme pourrait-il devenir incandescent au point d’y provoquer une vague d’affrontements, voire des sortes de pogroms dont les provocations devant les synagogues seraient le prélude ? Une partie des immigrés d’origine musulmane peuvent-ils tenter « d’importer » le conflit chez nous ?

Ce scénario n’est heureusement pas le plus probable, mais mérite d’être pris au sérieux. Le nombre d’incidents antisémites avait déjà augmenté de 40 % l’an dernier dans les pays (États-Unis, Royaume- Uni, France, Allemagne) où des enquêtes sérieuses sont menées. Ils représentent désormais la majorité des incidents à caractère racial ou religieux. Un essor, depuis des années, lié à celui de l’idéologie islamiste, c’est-à-dire de conquête du pouvoir au nom du Coran. S’il existe des islamistes non antisémites, ils ne se sont pas encore exprimés…

 

Un projet plus large de conquête de l’Occident

Cet antisémitisme sous-jacent à l’islamogauchisme a désormais largement supplanté celui, traditionnel, d’extrême droite, souligne Simon Epstein.

Il semble s’être instaurée une alliance de circonstance entre une partie de la gauche voyant en l’islamisme un facteur de destruction du capitalisme, ou adhérant à la vieille association Juifs = Argent (relire les pages antisémites de Karl Marx) et une partie des jeunes d’origine arabo-musulmane.

Mais les slogans et discours de beaucoup d’entre eux dépassent largement le conflit à Gaza, et s’inscrivent dans un projet plus global des islamistes, décrit en détail dès 2005 par un remarquable livre enquête du journaliste suisse Sylvain Besson La conquête de l’Occident, en commençant par l’Europe, considérée comme son « ventre mou ». Un projet qu’expliquent candidement nombre de jeunes islamistes en France, en Allemagne, au Royaume-Uni.

Des petits soldats biberonnés à la nécessité de prendre tout simplement le pouvoir dans les pays occidentaux au nom d’une sourate prédisant qu’un jour l’humanité entière sera musulmane. D’abord pacifiquement, via l’entrisme dans des associations travaillant à une société séparée ou « réorientée », des horaires de piscines aux codes vestimentaires, en passant par les menus à l’école, ou les programmes scolaires, etc.

Puis en misant sur la dynamique démographique pour devenir majoritaire et imposer la valise, la conversion, la dhimmitude ou le cercueil.

MusIim man in Germany:” when MusIims are in majority, we would take over Germany with force.
Sharia law will be instead of Germany laws.
When Germans stand against our sharia they will be attacked.
Christians and Jews have to pay Jizya,Hindus,Buddhists have to leave or be killed” pic.twitter.com/OiN19m6DYR

— Azzat Alsalem (@AzzatAlsaalem) November 4, 2023

 

Un projet auquel adhère une partie, certes minoritaire mais non négligeable de l’immigration d’origine arabo-musulmane. Une enquête de l’institut Pew Research montrait déjà il y a dix ans que parmi les jeunes musulmans d’origine immigrée, 15 à 40 % suivant les villes aux Pays-Bas, en Belgique, au Royaume Uni, en Allemagne, aux États-Unis, considéraient la religion comme au-dessus des lois de leur pays, adhéraient à un agenda islamiste radical, notamment d’une stricte ségrégation homme/femme, voire approuvaient l’exécution des apostats, ou les attentats suicide au nom du Coran.

Un projet formalisé clairement dans la charte des Frères Musulmans, ou par l’influent prédicateur Youssef al-Qaradawi :

Avec vos lois démocratiques nous vous coloniserons, avec nos lois coraniques nous vous dominerons.

Jusqu’à la doctrine d’Al Qaïda dans « Appel à la résistance islamique mondiale » diffusé sur Internet en 2004, d’un théoricien majeur du réseau djihadiste, quoique méconnu en Occident, Abou Musab Al-Suri. Ce dernier vantait la « stratégie des mille entailles » usant, exténuant, hébétant la société occidentale à coups d’attentats et provocations, et préconisait, selon le journaliste Éric Leser, de « viser les Juifs, les policiers, les militaires, les églises, les grands événements sportifs et culturels. Il faut dresser les populations contre les musulmans, et contraindre ainsi ces derniers à choisir un camp ».

Les masques des antisémites tombent donc depuis le 7 octobre, mais aussi, semble-t-il, les œillères de certains de ceux qui se réfugiaient dans le déni « roooh, ils ne sont pas plus de trois excités ».

Le déni, mécanisme classique de protection psychologique, dont on peut s’étonner qu’il fut encore si vigoureux après Mérah, Charlie, le Bataclan, les meurtres de profs, etc. Eh bien non, les antisémites et islamistes (à ne pas confondre avec les musulmans, les premiers mènent un combat politique de soumission et conquête, les seconds vivent généralement leur foi dans leur coin sans enquiquiner personne) sont bien plus que trois à vivre en Europe sans adhérer à son « socle civilisationnel », pas seulement en ce qui concerne les Juifs, mais aussi les femmes, la démocratie, le rapport à la religion, ou l’État de droit.

Avec 300 000 personnes selon la police, le cortège de soutien à la Palestine à Londres, sans aucun slogan contre le Hamas et à l’appel d’une organisation islamiste, samedi, était la troisième plus importante manifestation des vingt dernières années dans la capitale britannique.

 

La politique d’immigration en question d’un point de vue libéral

Ce qui pose forcément la question de la politique suivie depuis une quarantaine d’années en matière d’immigration. Soyons clair, à défaut d’être politiquement correct.

Cette politique a accueilli/suscité une immigration extra civilisationnelle d’ampleur, dont la majorité adhère, certes, à nos valeurs, mais en oubliant que l’Histoire est faite aussi par les minorités violentes et déterminées.

Combien de Russes en 1917 rêvaient de goulag et de bolchévisme ? Combien d’Allemands en 1934 voulaient vraiment une dictature génocidaire engagée dans un projet de conquête mondiale ? Était-il donc judicieux de faire venir tant de gens dont une partie (10 % ?) n’adhère pas du tout à notre socle civilisationnel, voire veut le supplanter ?

Cette politique d’immigration instaurée, malgré le désir de la majorité de la population selon les sondages (y compris de beaucoup d’immigrés intégrés qui craignent qu’à être trop nombreux à « monter dans l’autobus » ça puisse tourner mal), à grand renfort d’éléments de langage « chance pour la France », « la France est comme une mobylette, elle marche au mélange/multiculturalisme », avait pour carburant imprudent :

  • une demande du patronat (l’immigration comme armée de réserve de la main-d’œuvre, ceux qui viennent de pays où le salaire moyen est de 300 euros mettent du temps avant de tirer les salaires vers le haut, afin de pourvoir les boulots dévalorisants dont nos chères têtes blondes ne voulaient plus)
  • une demande de la gauche, expier la culpabilité post coloniale et « ah je ris de me voir si cosmopolite dans ce miroir », sans se demander au passage si on ne privait pas les pays d’origines de précieuses ressources humaines
  • une demande de retraités d’une population jeune et à forte natalité, ce qui risque un jour de faire cher la partie de scrabble.

 

Pour en comprendre les effets lire l’excellent livre Rue Jean Pierre Timbaud, de Géraldine Smith (2016) et La gauche et la préférence immigrée (2011) de Hervé Algalarrondo, journaliste de L’Obs, du temps où il ne mettait pas sur le même plan le Hamas et le (par ailleurs stupide et odieux) Likoud.

Il découlerait de tout cela qu’il serait judicieux de réduire l’immigration tout en travaillant vigoureusement, à l’école ou dans les prétoires, à assurer une reconquête de nos fondamentaux culturels.

Certes, il est embarrassant pour un libéral de critiquer le droit sous-jacent à l’immigration open bar, celui de tout individu à chercher une vie meilleure sous les cieux de son choix.

Mais c’est oublier deux choses.

La première, c’est qu’il ne faut pas oublier, disait Raymond Aron « que l’Histoire est tragique, et qu’il existe des conflits inexpiables », ainsi que des civilisations, fauves puissants dont on ignorerait à son détriment combien elles structurent profondément les relations entre les humains.

La seconde, c’est que le droit de propriété consubstantiel au libéralisme accorde à une communauté humaine, appelons là un pays, un droit de disposer d’un ensemble immatériel (droits, coutumes, institutions), et donc de désigner qui peut en profiter, ou pas. Sans sectarisme ni phobie. Ce n’est pas parce qu’on apprécie quelqu’un qu’on est pour autant obligé de prendre une colocation avec lui…

L’illusion des e-carburants : le miroir aux alouettes énergétique

Par : Michel Gay

Les e-fuels, aussi appelés e-carburants ou carburants de synthèse, sont reconstitués à partir d’eau, d’électricité décarbonée (nucléaire, hydraulique, éolien et solaire…) et de gaz carbonique (CO2).

Ils pourraient représenter une remarquable solution durable de substitution au pétrole (et à ses dérivés), ainsi qu’au gaz, dans les secteurs les plus difficiles à décarboner en « électrifiant » indirectement les transports aériens, maritimes, les camions et les voitures, tout en créant de l’activité en France et des emplois industriels.

Euréka ! Extraordinaire ! Révolutionnaire ! Miraculeux !

Hélas, il y a des obstacles rédhibitoires et des désillusions sur la route qui mène au Graal d’un monde sans combustibles fossiles…

 

La mariée est belle !

L’idée lumineuse est de faire croire qu’il sera possible de remplacer les énergies fossiles (notamment gaz et pétrole) par ces e-fuels constitués d’hydrogène issu d’électrolyse, et de carbone issu de monoxyde de carbone (CO), ou de dioxyde de carbone (CO2) récupéré de l’industrie (à la sortie d’une usine de ciment par exemple), ou dans l’air ambiant.

Ces e-fuels liquides ou gazeux ont un atout de taille : ils ont l’avantage de pouvoir être utilisés directement dans les moteurs à combustion interne existants sans modifications majeures, puisqu’ils sont quasiment identiques aux carburants fossiles.

Et le CO2 émis dans l’atmosphère lors de leur combustion est équivalent au CO2 capturé qui, sans cette capture, serait directement diffusé dans l’air.

Ces e-fuels, « vecteurs d’énergie électrique », pourraient aussi fournir les réactifs pour l’industrie chimique (plastiques, etc.) et recycler le CO2 non évitable émis par certaines industries comme les cimenteries.

Certains e-fuels sont déjà certifiés et incorporés en faibles quantités dans l’industrie et les transports aériens, maritimes et terrestres.

La localisation en France de la chaîne de valeur de production de carburants et combustibles réduirait les risques d’approvisionnement (en se substituant aux énergies fossiles importées), et améliorerait aussi la balance commerciale, ainsi que la souveraineté énergétique.

Ces avantages pourraient compenser leur coût de revient industriel qui serait environ deux fois plus élevé que leurs équivalents fossiles.

Le modèle financier est encore incertain. Les e-fuels devront faire face à la concurrence commerciale mondiale fondée sur des énergies fossiles relativement bon marché. Ces dernières doivent être extraites et raffinées mais existent déjà « gratuitement » dans le sous-sol de la Terre (il suffit de les récupérer) alors que les e-fuels sont coûteux à fabriquer.

Hélas, la fabrication industrielle de ce « fabuleux » e-fuel nécessite beaucoup trop d’électricité et de CO2 pour répondre aux besoins de la France (et encore plus à ceux de l’Europe et du monde).

 

Un énorme besoin d’électricité et de CO2

Aujourd’hui, les 24 projets identifiés par SIA Partners de production d’e-fuels en France (dont le coût prévisionnel s’élève déjà à 3,6 milliards d’euros) représentent seulement environ 0,5 million de tonnes d’équivalent pétrole (Mtep) par an à l’horizon 2030 (environ 0,25 Mtep d’e-méthanol et 0,25 Mtep d’e-kérosène).

Pourtant, cette quantité minime (0,5 Mtep, soit un centième des 50 Mtep consommées uniquement par les transports) nécessiteront 14 térawattheures (TWh) d’électricité bas carbone par an du mix électrique français, soit presque deux EPR (le procédé d’électrolyse de l’eau représente 85 % de la consommation, et la synthèse des e-fuels 15 %), et 1,7 million de tonnes (Mt) de CO2 par an.

Or, en France, la production annuelle d’électricité est d’environ 500 TWh, et le gisement de CO2 industriel non évitable produit principalement par des industries lourdes comme le ciment (dont les réductions d’émissions induisent des coûts prohibitifs) est estimé par SIA Partners à 12 Mt.

Mais d’où proviendraient alors les énormes quantités d’électricité et de CO2 nécessaires si les e-fuels avaient vocation à remplacer les énergies fossiles (carburants pour les véhicules et combustibles pour le chauffage) ?

 

Des problèmes insolubles à l’horizon 2030…

À longue échéance, une production significative d’e-fuels multipliée par environ… 50 (!) pour commencer à répondre aux besoins de la France fera émerger des problèmes insolubles d’approvisionnement en électricité et en CO2.

Par exemple, remplacer par des e-fuels les 50 Mtep de carburants fossiles consommés actuellement dans nos seuls véhicules en France supposerait de construire… une centaine de réacteurs nucléaires EPR pour produire l’électricité nécessaire à leur synthèse.

Il serait également nécessaire d’extraire 165 Mt de CO2 par an d’une production nationale de 240 Mt de ciment en France pour capter une telle quantité de CO2 (voir explications en annexe).

Or, la production totale française de CO2 est actuellement de moins de… 17 Mt (en 2017), soit 7 % du besoin en CO2.

Une autre source est parfois évoquée : le captage directe de CO2 dans l’air (DAC). Mais elle nécessite des moyens gigantesques techniquement et financièrement impossibles au niveau requis pour la France. Elle ne présente donc aucun intérêt, même lorsque le CO2 industriel ou biogénique est peu disponible localement (explications en annexe).

Pour faire bonne mesure, il faudrait aussi remplacer les combustibles (gaz et fuel) nécessaires pour le chauffage des logements dont encore plus de la moitié (54 %) sont chauffés au gaz et au fuel (27 Mtep, soit 330 TWh) et représente environ la moitié de la consommation d’énergies fossiles des transports. Ce chauffage pourrait être avantageusement directement électrifié pour éviter les pertes (50 %) de transformations en e-fuels.

Le développement de la filière est donc impossible à cause des ressources insuffisantes en électricité et en CO2 qui représentent un insurmontable goulot d’étranglement au moins pour un siècle.

 

Un rêve ruineux assis sur des subventions

Les e-fuels, aujourd’hui poudre de perlimpinpin, deviendront peut-être un jour un petit complément coûteux à la consommation d’énergies fossiles au-delà de ce siècle.

Mais produire des e-fuels pour remplacer majoritairement les énergies fossiles restera ruineux et industriellement utopique au cours de ce siècle. Personne ne sait encore comment trouver les énormes quantités d’électricité et de CO2 nécessaires à la fabrication de ces e-fuels pour remplacer seulement un quart de la consommation de carburant du transport en France.

Cependant, cet idéal merveilleux du recyclage perpétuel du CO2 en e-fuel grâce à de l’eau, du nucléaire, du vent et du soleil, permettra à quelques-uns de rêver longtemps (mais attention aux désillusions…).

Quelques autres (commerciaux, ingénieurs, producteurs de e-fuels) qui cherchent aujourd’hui des « soutiens » (subventions) par des mécanismes liés au développement de l’industrie verte, pourront peut-être vivre de recherches subventionnées pendant des décennies…

L’e-fuel, ça sonne bien, c’est beau, et c’est politiquement correct pour faire croire que l’humanité pourra s’extraire de la consommation des énergies fossiles. Mais c’est, hélas, inefficace et idiot pour encore au moins un siècle !

Annexe

 

Quelques chiffres à placer en face des mots…

La physique et la chimie (CO2 + 3H2 à CH3OH + H2O) indiquent que la production d’une tonne de méthanol (CH3OH) nécessite environ 1,4 tonne de gaz carbonique (CO2) et 0,2 tonne d’hydrogène (H2), lui-même fabriqué industriellement avec au moins 11 MWh d’électricité et de l’eau (H2O).

En résumé, 1 tonne de e-méthanol nécessite 1,4 t CO2 + 11 MWhe

Pour information :

  • 1 t de e-méthane nécessite 2,9 t CO2 + 33 MWhe
  • 1 t de e-kérosène nécessite 3,7 t CO2, 28 MWhe

 

Production d’électricité

La production d’un kilogramme (kg) d’hydrogène par électrolyse (qui contient 33 kWh d’énergie et occupe un volume de 11 m3 à la pression atmosphérique) nécessite, en pratique industrielle, entre 55 à 66 kWh d’électricité.

Le coût de production de l’hydrogène ainsi obtenu serait de 4 €/kg à 7 €/kg selon le coût initial de l’électrolyseur et le temps de fonctionnement sur une année.

Le coût moyen serait d’environ 5 €/kg pour un coût d’électrolyseur de 1,2 million d’euros par mégawatt installé, 7000 heures de fonctionnement par an (80 % du temps), et un coût d’électricité à 70 €/MWh.

Un kg de méthanol (qui ne contient que 5,5 kWh d’énergie) mais qui a nécessité plus de 11 kWh d’électricité, comprend donc au minimum 0,77 € d’électricité.

La cimenterie Vicat de Montalieu-Vercieu vise la production optimiste de 125 000 tonnes par an d’e-méthanol dès 2025 grâce à un électrolyseur d’une puissance de 180 MW, soit une consommation de 1,6 TWh/an, dans l’hypothèse d’un fonctionnement continu (facteur de charge égal à 100 %).

Utiliser uniquement les surplus des pics de production des énergies renouvelables intermittentes (EnRI) quand il y a du vent et du soleil pour profiter de prix faibles influence grandement le temps de fonctionnement annuel des électrolyseurs et leur rentabilité.

De plus, si l’alimentation en électricité est fournie par des EnRI, l’effet d’un fonctionnement variable et intermittent sur la durée de vie des électrolyseurs n’est pas connu. Les quelques unités actuelles fonctionnent industriellement en régime permanent.

Produire de l’hydrogène seulement lorsque les prix de l’électricité sont bas pendant les périodes de surproduction des énergies renouvelables serait techniquement coûteux, voire impossible, même avec un stockage tampon d’hydrogène comprimé à chaque électrolyseur (qui a aussi un coût) pour fonctionner un ou plusieurs jours en autonomie.

Par MW installé, les électrolyseurs alcalins industriels produisent environ 180 tonnes d’hydrogène par an (soit 0,5 tonne par jour (t/j) et par MW) qui permettent théoriquement de produire 960 tonnes de méthanol.

En tenant compte du rendement global (environ 80 %) et des arrêts pour entretien, la production annuelle des électrolyseurs serait de 760 tonnes de méthanol par MW installé, soit une moyenne d’environ 2 t/j d’éthanol par MW d’électrolyseur.

 

Extraction du CO2

Il faudra aussi ajouter le coût d’achat ou d’extraction du CO2 encore inconnu (qui ne sera certainement pas gratuit), l’amortissement des unités de synthèse, et le coût de fonctionnement de l’ensemble (personnel, entretien…).

Le CO2 biogénique issu de procédés mettant en jeu de la biomasse (biogaz, biocarburants, pâte à papier, déchets organiques, bois-énergie, cogénération, etc) ne représente que 2 % (1 Mt), et les 76 % restants (40 Mt) proviendraient de CO2 industriel évitable.

Afin de minimiser les coûts et les émissions liés au processus de captage de CO2, les principaux projets d’e-fuels sont aujourd’hui situés à proximité de complexes industriels fortement émetteurs de CO2.

La région des Hauts-de-France concentre le plus gros gisement captable de CO2 (15 Mt par an), notamment du fait de sa production industrielle d’acier, devant la région de Provence-Alpes-Côte- d’Azur et son hub industriel avec 11 Mt.

Le projet Reuze, situé à proximité de la zone industrielle de Dunkerque, vise à valoriser 300 000 tonnes de CO2 par an (800 tonnes par jour) à partir des émissions des installations de sidérurgie d’ArcelorMittal, avec un objectif de production de plus de 100 000 tonnes de carburants et de naphta par an.

L’utilisation du CO2 industriel non évitable, ou biogénique (produit par la décomposition de matières organiques) est considéré comme neutre pour le climat, car il est issu d’un cycle court du carbone.

 

Les quantités en jeu

La consommation annuelle d’énergie du transport en France atteint 50 Mtep (représentant aussi 600 TWh d’énergie), soit 140 000 tep/jour, (1,65 TWh/j).

Or, il faudrait 110 Mt de méthanol (contenant seulement 5,5 TWh d’énergie) par an pour remplacer uniquement le pétrole importé pour le transport, soit 300 000 t/j nécessitant environ 50 000 t/j d’hydrogène combinées à 450 000 t/j de CO2… par jour.

Un réacteur nucléaire EPR de 1600 MW couplé à des électrolyseurs permettrait de produire 3200 t/j de méthanol (consommant 40 000 MWh d’électricité par jour).

Remplacer la totalité des carburants fossiles consommés actuellement dans nos seuls véhicules en France par des e-fuels supposerait de construire… une centaine (!) de réacteurs nucléaires EPR pour produire l’électricité nécessaire à la synthèse de ces 300 000 t/j de méthanol… sans compter les combustibles (gaz et fuel) nécessaires pour le chauffage des habitations.

 

Le captage direct de CO2 dans l’air (DAC)

L’air ambiant au niveau de la mer pèse 1,3 kg par m3 et contient 0,04 % de CO2 (0,5 gramme par m3). Des aspirateurs électriques et des filtres gigantesques devraient traiter chaque jour 9000 milliards de m3 (près de 12 milliards de tonnes d’air en supposant que tout le CO2 soit capté) pour extraire quotidiennement ces 450 000 tonnes de CO2

La consommation électrique d’une telle « usine à gaz » devra être gigantesque, sachant qu’un réacteur d’un Airbus A380 à pleine puissance (40 MW) n’aspire « que » 100 000 t/j d’air, il en faudrait donc… 120 000 ! (4800 gigawatts (GW) de puissance, alors que la totalité du parc nucléaire en France ne représente que 63 GW).

Les effluents gazeux de l’industrie du ciment contiennent de 14 à 33 % de CO2 en masse et produisent entre 630 et 760 kg de CO2 par tonne de ciment (selon les différentes régions du monde).

En prenant une moyenne de 0,7 tonne de CO2 émis par tonne de ciment, il faudrait produire 650 000 tonnes de ciment chaque jour en France pour capter.

Or, la production française de ciment est de moins de 50 000 tonnes par jour (17 millions de tonnes en 2017), soit actuellement 7 % du besoin en CO2.

 

Les coûts

Une estimation grossière aboutit à environ 1,2 €/kg de méthanol, soit 0,22 €/kWh au minimum à la sortie de l’unité, alors que ce coût est de 0,05 €/kWh pour l’essence ou le diesel.

En effet, ce kg de méthanol contient deux fois moins d’énergie (5,5 kWh) qu’un kg d’essence ou de diesel (12 kWh) dont le coût de production est d’environ 0,6 € à la sortie de la raffinerie.

Le coût de production énergétique du méthanol est donc au moins 4 fois plus élevé que celui de l’essence.

En maintenant les taxes sur les carburants au niveau actuel (presque 1,5 € par litre d’essence contenant 10 kWh, soit 0,1 €/kWh), il faudra payer 3,7 € pour l’équivalent énergétique en méthanol (10 kWh x 0,22 €/kWh + 1,5 € de taxes), contre 2 € aujourd’hui pour un litre d’essence ou de diesel.

Manifestation contre l’antisémitisme : qui, sur l’échiquier politique, pour défendre les juifs en France ?

Il ne sera nullement question de boussole morale ici.

La crédibilité de ce terme est morte avec celle de Gérard Miller qui l’a employée le 11 septembre dernier.

Et pour cause, le parti auprès duquel il officie en tant que « compagnon de route » a visiblement perdu sa propre boussole, refusant de manifester contre l’antisémitisme ce dimanche 12 novembre, pour des prétextes aussi malhonnêtes que contredits par de précédentes déclarations.

Pour autant, celui-ci a proposé un débat particulièrement intéressant sur la place que confère actuellement le champ politique français à ses citoyens de confession juive.

Il est somme toute très difficile de parler de consensus concernant le peuple juif, car selon l’adage, pour deux de ses membres, il y a trois opinions.

Mais il est des constats qui s’imposent d’eux-mêmes.

 

L’extrême droite est historiquement en France l’idéologie politique la plus mortifère envers les Juifs

Rien que depuis les anti-dreyfusards, près de deux siècles de haine anti-juive nous contemplent.

Drumont, Maurras, les Croix-de-Feu, l’Action française, la fédération nationale des Camelots du roi, Pétain, le Front national de Jean-Marie Le Pen et Gollnisch, et plus récemment le GUD qui, dans les années 1970, chantait « Deauville, Sentier, territoires occupés », et encore aujourd’hui appelle à poursuivre « l’intifada de Paris à Gaza », la liste des figures d’extrême droite qui ont alimenté l’antisémitisme français est pléthorique, et malheureusement ici, non exhaustive.

La nature anti-juive de ces mouvements, qui ont sclérosé l’Histoire de notre pays décennie après décennie, n’est plus à débattre, et si le besoin s’en fait sentir pour nombre de nos concitoyens, ce serait une perte de temps colossale tant le sujet a déjà fait le tour de toutes les universités, de toutes les rédactions et de tous les bistrots de France.

Un constat aussi implacable que dérangeant pour bon nombre d’entre nous est le suivant : c’est aujourd’hui le plus gros parti d’extrême droite qui fait figure d’opposition principale au pouvoir en place, et c’est également ce courant idéologique qui est le plus en proue de la lutte contre l’antisémitisme.

Ce constat aurait pu paraître terrifiant au début de ce millénaire, mais dans la France d’aujourd’hui, celle dont la plupart des partis politiques ont concrètement abandonné la lutte pour la défense d’un si petit vivier électoral, c’est une réalité qu’il est de notre devoir d’entendre et d’assimiler.

Il est terrible et ubuesque d’affirmer qu’un parti fondé par un ancien SS (Pierre Bousquet), issu de la division Charlemagne, soit le fer de lance de la lutte pour la protection des Français de confession juive, mais qui oserait affirmer le contraire ?

L’actualité plus ou moins récente nous aide en effet à poser ce constat glacial.

Meyer Habib, grand ami de Benyamin Netanyahou et accessoirement député des français de l’Étranger, notamment d’Israël, déclarait récemment que le Rassemblement national était rentré « dans l’arc républicain ».

 

L’extrême droite est-elle une figure de proue du combat contre l’antisémitisme, ou un cheval de Troie ?

Le président Macron en personne s’est fendu de sa petite déclaration, appelant les Français à prendre garde à l’extrême droite, qui confondrait « le rejet des musulmans et le soutien des Juifs ». De la même manière, il est souvent dit qu’après les musulmans, « ça sera le tour des Juifs ».

Comme s’il ne pouvait exister de soutien aux Juifs innocents, comme si derrière chaque parole de réconfort adressée aux Juifs, il y avait un programme obscur, caché, qui expliquerait ce choix fou et insensé de soutenir ce peuple, qui visiblement ne mériterait pas d’être soutenu pour lui-même.

Cette rhétorique fallacieuse n’est pas étrangère à ceux qui suivent l’actualité au Proche-Orient.

Combien de fois le soutien d’Israël envers la communauté LGBT a été criminalisé par de nombreux médias, notamment l’antenne du pouvoir Qatari que constitue Al-Jazeera, le qualifiant de pinkwashing, mécanisme permettant de faire oublier les persécutions qu’Israël ferait vivre à la population palestinienne…

Houria Bouteldja, écrivait qu’on « ne peut être Israélien innocemment ».

Il semble se mettre en place, par le biais des idiots utiles qui la reprennent bien malgré eux, un corollaire suivant lequel on ne peut pas défendre les Juifs innocemment.

Ces tentatives de criminaliser le soutien aux Juifs, sans preuves concrètes qui plus est, par procès d’intention, sonnent creux : les Juifs sont tellement préoccupés par ceux qui se déclarent ouvertement leurs ennemis qu’ils n’auront pour l’instant pas le loisir, ni l’âme à sonder les cœurs et à deviner lesquels de leurs amis déclarés sont sincères ou ne le sont pas.

Il y a donc à ce sujet, comme l’écrivait récemment Arno Klarsfeld qu’on ne peut décemment pas accuser de compromission avec l’antisémitisme, une « évolution positive de l’Histoire », et tout ami des Juifs ne peut que s’en réjouir.

Ceux qui ne le font pas ont manifestement d’autres objectifs en tête, et un agenda politique bien singulier.

Évidemment, le tableau brossé ici ne peut pas être révélateur de toute l’ambivalence de l’extrême droite, et je rassure ceux qui ne tenaient pas à être rassurés : l’extrême droite reste antisémite.

Du moins, elle n’a pas réussi à se purger intégralement des éléments qui le sont.

Le GUD et ses appels à l’intifada font encore et toujours partie de l’écosystème ultra-droitiste.

Marine Le Pen elle-même entretient d’ailleurs toujours des liens étroits avec certains de ses membres historiques, notamment Frédéric Chatillon et Axel Loustau. Ces individus, ces groupuscules, ont pris officiellement leurs distances avec le parti, et sont marginalisés. Officieusement, ils ne représentent plus rien dans l’organigramme, et sont morts politiquement.

La dédiabolisation a ses limites, mais rien ne nous empêche de penser que le parti converge vers elle.

 

L’antisémitisme ne se cantonne pas à l’extrême droite dans notre pays

L’on peut assimiler ce fléau à un cancer structurel qui n’épargne aucune strate de notre société, tant il est possible d’entendre une remarque antisémite ou anti-israélienne aussi bien au collège que devant la machine au café du travail.

Le Rassemblement national n’est plus le seul parti politique à compter parmi ses ouailles un certain nombre d’individus tendancieux sur la question de l’antisémitisme, même si les squelettes de son placard sont de loin les plus nombreux.

Il est néanmoins devenu moins intéressant de savoir si un parti politique comporte des antisémites que de déterminer à quel point ces derniers y sont influents.

Au sein de LFI, la question ne se pose même plus : Houria Bouteldja, encore elle, autrice du pamphlet violemment antisémite Les Blancs, les Juifs et nous dans lequel elle décrit les Juifs comme « tirailleurs de la politique islamophobe de l’État français » fait partie des meubles, et chuchote dans l’oreille de nombreux notables.

Jean-Luc Mélenchon lui-même nous affirmait « ne pas avoir les moyens d’être antisémite ».

Chez LR récemment, le maire de Valence Nicolas Daragon s’est fait épingler pour ses liens plus que troubles avec une association islamiste liée aux Frères Musulmans, dont l’antisémitisme n’est plus à prouver.

Au sein de l’UDI, l’enquête édifiante de la journaliste Eve Szeftel, retranscrite dans Le maire et les barbares révèle la complicité de Jean-Christophe Lagarde avec les assassins d’Ilan Halimi.

Même au sein de la majorité (relative), un député a été surpris en train de commettre un salut nazi à l’Assemblée nationale.

Le président lui-même avait rendu peu après son élection un hommage particulièrement polémique envers ce « héros de la Première Guerre mondiale » que fut Philippe Pétain, feignant de croire qu’il était possible de séparer non pas l’homme de l’artiste, mais le héros de 1917, et le collabo de 1940.

Enfin, même au cœur d’un parti dirigé par un Juif séfarade pratiquant et dont l’oncle est mort dans un camp de concentration, les accusations d’antisémitisme se font entendre.

Éric Zemmour fut en effet accusé de minimiser la Shoah en affirmant, comme Hannah Arendt avant lui dans Eichmann à Jérusalem paru en 1963, que Pétain eut préféré envoyer à la mort les juifs étrangers que les juifs français.

L’antisémitisme s’est infiltré partout, ses complices sont omniprésents et ne sont plus spécialement la chasse gardée de l’extrême droite.

Pour autant, la plupart des instances représentatives communautaires affiliées au judaïsme semblent se focaliser sur le repoussoir que constitue, à juste titre, le nom de Le Pen, quitte à négliger des menaces bien plus prégnantes.

En effet, quel crédit accorder à un grand-Rabbin de France qui se gausse sur le plateau de BFM quand le recteur de la Grande Mosquée de Paris affirme sans trembler qu’il n’y a jamais eu le moindre pogrom visant la communauté juive en Algérie, ne lui retorquant qu’un timide « au moins, à Oran, il n’y a rien eu » ?

Quel crédit accorder à une UEJF qui se porte partie civile aux cotés d’associations islamistes comme le CCIF pour faire taire des penseurs et intellectuels juifs, et qui manifeste aux cotés du Comité Adama Traoré dont la haine de la France et l’appel aux émeutes sont la marque de fabrique ?

Il est compréhensible que la haine anti-juive soit davantage mise en exergue quand elle émane de partis issus d’une idéologie historiquement aussi connotée, mais ce passé ne doit pas nous empêcher de constater le présent afin de mieux anticiper l’avenir.

Mais, et c’est un autre constat qui en fera frémir plus d’un, et notamment l’auteur de ces lignes, quel autre parti que le Rassemblement national s’échine à ce point à vouloir se montrer intraitable avec ces questions, du moins en apparence ?

La LFI a-t-elle entamé un quelconque processus de dédiabolisation ?

Tout porte à croire qu’au contraire, elle se radicalise dangereusement, et les récentes déclarations et manœuvres de ses membres semblent le confirmer.

Les Républicains et Renaissance sont-ils à même de donner des gages en matière de lutte interne contre les dérives haineuses ?

Pourquoi astreindre la seule extrême droite à un devoir qui devrait tous nous concerner ?

S’il est vrai que le Rassemblement national était le parti qui avait le plus de travail à faire en matière d’assainissement, cela ne justifie en rien que les autres sphères en soient exemptées, et c’est pourtant l’impression qu’elles donnent.

Aussi intrinsèquement lié à notre société qu’il soit, l’antisémitisme doit être combattu partout, et principalement chez ses diffuseurs historiques.

C’est pourquoi l’extrême droite est plus particulièrement ciblée.

Et c’est en tout état de cause son passé trouble qui met en valeur son présent encourageant, ne pouvant être que rayonnant en comparaison, vu que le contraire eut été impossible.

Le passé qui est constamment jeté au visage de l’extrême droite doit aussi nous servir à réaliser le chemin qu’elle a parcouru, quand d’autres partis l’empruntent en sens inverse.

Javier Milei profite de la perte de confiance en l’État des Argentins

Le 19 novembre est le jour du second tour des élections en Argentine entre le péroniste Sergio Massa et l’anarcho-capitaliste Javier Milei.

Dans les années à venir, l’Argentine pourrait être gouvernée par un pro-capitaliste passionné. Ce serait un évènement qui marquerait un changement fondamental dans l’attitude des Argentins vis-à-vis de l’économie de marché et du rôle de l’État. Mais ce changement, en réalité, se profile à l’horizon depuis un certain temps.

Au cours des deux dernières années, j’ai étudié le mouvement libertarien dans 30 pays. Je n’ai rencontré dans aucun de ces pays un mouvement libertaire aussi fort qu’en Argentine. En temps normal, lorsqu’un pays traverse une crise grave, un grand nombre de personnes ont tendance à se tourner vers l’extrême gauche ou l’extrême droite de l’échiquier politique. En Argentine, les libertariens sont les phares de l’espoir, en particulier pour les jeunes. Parmi les électeurs de moins de trente ans, une majorité a voté pour Milei.

Les élections se déroulent dans le contexte d’une crise économique dramatique, avec un taux d’inflation de plus de 100 %, l’un des plus élevés au monde. Il n’y a probablement aucun pays qui se soit dégradé de manière aussi spectaculaire au cours des 100 dernières années que l’Argentine. Au début du XXe siècle, le revenu moyen par habitant était l’un des plus élevés au monde, comme en témoigne l’expression, courante à l’époque, de « riche comme un Argentin ». Depuis, l’histoire de l’Argentine est marquée par l’inflation, l’hyperinflation, les faillites d’État et l’appauvrissement. Le pays a connu neuf faillites souveraines au cours de son histoire, la dernière datant de 2020. Une histoire tragique pour un pays si fier qui était autrefois l’un des plus riches du monde. L’inflation a été à deux chiffres chaque année depuis 1945 (sauf dans les années 1990).

 

L’Argentine a été dirigée par des étatistes pendant des décennies et il est aujourd’hui l’un des pays les moins libres du monde sur le plan économique.

Dans l’indice de liberté économique 2023 de la Heritage Foundation, l’Argentine se classe 144e sur 177 pays – et même en Amérique latine, seuls quelques pays (en particulier le Venezuela) sont moins libres économiquement que l’Argentine. À titre de comparaison : bien que sa position se soit dégradée depuis l’arrivée au pouvoir du socialiste Gabriel Boric en mars 2022, le Chili est toujours le 22e pays le plus libre économiquement au monde, et l’Uruguay est le 27e (les États-Unis sont 25e).

Pour l’opinion populaire cependant, de nombreux Argentins en ont tout simplement assez du péronisme de gauche et se détournent de l’étatisme qui a dominé leur pays pendant des décennies. Dans un sondage que j’ai réalisé l’année dernière, l’Argentine faisait partie du groupe de pays où les gens étaient les plus favorables à l’économie de marché. Du 12 au 20 avril 2022, j’ai demandé à l’institut d’études d’opinion Ipsos MORI d’interroger un échantillon représentatif de 1000 Argentins sur leur attitude à l’égard de l’économie de marché et du capitalisme.

Tout d’abord, nous avons voulu savoir ce que les Argentins pensent de l’économie de marché.

Nous avons présenté aux personnes interrogées en Argentine six énoncés sur l’économie de marché dans lesquels le mot capitalisme n’était pas utilisé. Il s’est avéré que les affirmations en faveur d’une plus grande influence de l’État ont recueilli le soutien de 19 % des personnes interrogées, et que les affirmations en faveur d’une plus grande liberté du marché ont été approuvées par 24 % d’entre elles.

En Argentine, l’affirmation « Dans un bon système économique, je pense que l’État ne devrait posséder des biens que dans certains domaines ; la majeure partie des biens devrait être détenue par des particuliers » a reçu le plus haut niveau d’approbation. L’affirmation « La justice sociale est plus importante dans un système économique que la liberté économique » a reçu le plus faible niveau d’approbation.

Nous avons mené la même enquête dans 34 autres pays et n’avons trouvé que cinq pays (Pologne, États-Unis, République tchèque, Corée du Sud et Japon) dans lesquels l’approbation de l’économie de marché était encore plus forte qu’en Argentine ; dans 29 pays, l’approbation de l’économie de marché était plus faible.

En outre, tous les répondants se sont vu présenter 10 termes – positifs et négatifs – et ont été invités à choisir ceux qu’ils associaient au mot capitalisme, ainsi qu’à répondre à 18 autres questions sur le capitalisme.

Le niveau de soutien au capitalisme n’était pas aussi élevé que dans la première série de questions sur l’économie de marché, où le terme capitalisme n’était pas utilisé. Mais même lorsque ce mot était mentionné, notre enquête n’a trouvé seulement sept pays sur 35 dans lesquels l’image du capitalisme est plus positive qu’en Argentine, contrairement à 27 pays dans lesquels les gens ont une opinion plus négative du capitalisme qu’en Argentine.

C’est pourquoi un partisan avoué du capitalisme comme Javier Milei, professeur d’économie autrichienne, a des chances de remporter les élections dans le pays.

Milei est entré en campagne électorale en appelant à l’abolition de la banque centrale argentine et à la libre concurrence entre les monnaies, ce qui conduirait probablement à ce que le dollar américain devienne le moyen de paiement le plus populaire. Il a également appelé à la privatisation des entreprises publiques, à l’élimination de nombreuses subventions, à une réduction des impôts ou à la suppression de 90 % d’entre eux, ainsi qu’à des réformes radicales du droit du travail. Dans le secteur de l’éducation, Milei a demandé que le financement soit remplacé par un système de bons, comme l’avait proposé Milton Friedman.

Par ailleurs, l’Argentine est un exemple de l’importance des groupes de réflexion (think-tanks) pour ouvrir la voie à des changements intellectuels, qui sont ensuite suivis par des changements politiques. En Argentine, par exemple, il s’agit de la Fundación para la Responsabilidad Intelectual et de la Fundación para la Libertad ou Federalismo y Libertad.

J’ai rencontré des groupes de réflexion libertaires dans 30 pays, mais ils sont rarement aussi actifs que ceux d’Argentine. Reste à voir si les graines qu’ils ont semées porteront leurs fruits le 19 novembre.

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Plaidoyer pour une décentralisation du quotidien : le cas de la Promenade des Anglais

La Promenade des Anglais à Nice est l’une des avenues les plus célèbres au monde, une des promenades les plus fréquentées par les touristes, mais également l’avenue la plus empruntée par les poids lourds de toute la Métropole (jusqu’à 1800 par jour d’après la mairie). En février dernier, un convoi exceptionnel immobilisé sur la Promenade avait totalement bloqué la circulation pendant plus de douze heures. Imagine-t-on l’avenue Montaigne à Paris sous l’assaut incessant de ces mastodontes de la route ? Les impératifs touristiques auraient rapidement amené les autorités publiques à trouver des voies de délestage et à soulager les riverains des nuisances.

Mais les Parisiens ont la chance d’avoir le gouvernement à portée d’engueulade, pas les Niçois. Car ce n’est pas le manque de volontarisme de la ville de Nice qui est en cause, elle a décidé de n’autoriser que les poids lourds Crit’air 1 et 2, mais l’opposition, ou l’indifférence, du ministère des Transports à déclasser la Promenade de la catégorie « route à grande circulation », qui d’après le Code des transports, « quelle que soit leur appartenance domaniale, sont les routes qui permettent d’assurer la continuité des itinéraires principaux ». Nous comprenons bien ici l’opposition des intérêts entre d’une part les riverains niçois mobilisés sur le sujet qui aimeraient préserver leur quotidien de ces nuisances, et l’État qui doit garantir un niveau d’infrastructures satisfaisant pour les besoins de l’activité économique nationale. Pourtant, il est totalement aberrant que ce qui relève d’une particularité hyper locale relève directement du ministre des Transports, occupé par des sujets d’enjeux nationaux par ailleurs.

Le débat local, source de compromis

Voici l’enjeu majeur de la décentralisation : rapprocher le citoyen des décisions qui touchent son quotidien, et elles sont nombreuses, ou plutôt rapprocher le décideur du citoyen, le mettre à portée d’engueulade, pour que le plus grand nombre de citoyens en France bénéficie d’une gestion collective qui corresponde à ses aspirations.

En l’occurrence, les Niçois sont fondés à ne pas être les victimes des externalités négatives du commerce transfrontalier. De plus, en s’éloignant des grands débats idéologiques qui divisent et radicalisent la société, le débat local est une source de compromis. La décentralisation, ce n’est pas l’indépendance, mais c’est tout au moins une forme de liberté des collectivités. Or, cette liberté des collectivités n’existe pas en France en dépit des prétendues lois décentralisatrices.

En premier lieu parce qu’aucune matière n’appartient entièrement aux collectivités territoriales à qui l’État s’est contenté de donner des compétences résiduelles qu’il ne voulait plus voir apparaître à son budget (comme le RSA). Mais surtout parce que les collectivités ne disposent d’aucune ressource fiscale en propre, ce qui réduit d’autant plus leur capacité à prendre des mesures adaptées à leur territoire et la lisibilité des enjeux budgétaires locaux pour le citoyen.

La solution ne réside pas seulement dans une répartition plus claire des compétences.

Les communes, dont les maires ont la confiance des citoyens, devraient être en mesure d’agir en toutes matières, sauf domaine régalien, dès lors qu’elles estiment qu’elles sont plus à même de le faire. Il s’agirait alors d’élargir la clause de compétence générale qui exclut les compétences exclusives des autres échelons (dont l’État) mais qui seraient alors recevable à saisir la justice administrative si elles jugent que la décision locale porte atteinte à l’ordre public ou à un intérêt supérieur.

Ainsi, pour protéger leurs décisions, les communes seraient encouragées à prendre en compte les enjeux qui dépassent leur commune et à trouver des compromis.

Pour revenir à la Promenade des Anglais, la Ville de Nice pourrait alors librement réguler le passage de poids lourds de passage sur la promenade, y compris les convois exceptionnels. Si l’État estimait que la mesure est disproportionnée au regard du but poursuivi, et qu’un intérêt national se voit remis en cause, il pourrait saisir la justice administrative.

Cette proposition est radicale, mais c’est ce dont les Français sont en mal, et qu’ils confondent trop souvent avec le populisme. Pour recréer de l’appétence pour le consensus, revitalisons la démocratie locale !

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