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À partir d’avant-hierLe blog de Seb Musset

chroniques du bazar à l'Assemblée - jour 3

Ces jours post-législatives sont intéressants. 

A gauche, ça persiste à croire que le résultat du second tour est un succès, alors qu'il est au mieux une survie politique fragile dans un paysage de droite (faudra revenir sur le pourquoi la France est de droite, même la gauche mais elle ne le sait pas, je me le garde pour un prochain billet). Il n'en reste pas moins que cette propension, chez certains à gauche, à accuser tout le monde (de Macron aux électeurs) pour le résultat du RN est confondante de débilité. Le jour où le RN sera à 60% ce sera quoi exactement leur discours ? Je suis toujours fasciné par l'esprit d'ouverture et de dialogue des gens qui qualifient de "fascistes" ceux qui ne votent pas pour eux. 

LR, malgré ses dires, est bien parti pour co-gérer ce pays. La seule question est : qui vont-ils réussir à faire tomber puis imposer au gouvernement ? 

Pour le RN, c'est jour de fête médiatique. On jugera sur la durée. Gardons en mémoire qu'ils ont toujours été passablement nuls à l'assemblée. De toutes les façons, on va bientôt pouvoir juger de qui est vraiment qui avec les votes relatifs à la prolongation du Pass sanitaire et autres ravissements liberticides et médico-douteux à prétexte sanitaire qui se repointeront à l'approche de nouvelles vagues de virus toujours plus disruptives.

J'en viens au plus drôle dans ce bazar. Macron. 

Le gars est passé de tout à rien en 8 semaines. Il a la gueule du pauvre type qui s'est mangé une caisse de briques sur la tête et n' a pas dormi depuis dimanche. Pensez-vous, il doit emmagasiner trois concepts en moins d'une semaine : peuple, démocratie, dialogue. A ce stade, Jupiter rétrogradé Pluton ne doit plus compter que sur un cataclysme ou l'arrivée des troupes russes à Charleville-Mézières pour fédérer le pays derrière lui.

Oui vraiment nous vivons des jours savoureux. A un internaute qui me demandait ce qu'on a à gagner dans cette histoire, j'ai répondu : rien. On est là pour payer.


L'étrange assemblée (et pourquoi c'est une bonne nouvelle)

Je m’attendais à quelques réjouissances pour ce second tour des élections législatives, mais pas à un tel feu d’artifices. 

Ensemble : 245 sièges  38,6 % 
NUPES : 131 sièges  31,6 % 
RN : 89 sièges  17,3 % 
LR : 61 sièges 7 %

Quelques réflexions au lendemain des festivités : 

L’abstention à près de 54% devrait tout simplement déligitimer ce résultat, mais en bon parisien je vais faire comme si les Français n’existaient pas et prendre au premier degré les résultats. 

Première réjouissance et pas des moindres, deux mois après l'avoir élu par défaut, les Français ont bien envie d'emmerder Macron. Le peuple a volé son jouet, la chambre d’enregistrement des prouts législatifs du cyborg constipé est fermée. c’est tellement bien fait pour sa gueule. Il lui fera désormais ruser et jouer des alliances pour passer ses saloperies. Le prince du "en même temps" va rechanger son fusil d’épaule et, après avoir dragouillé la gauche, fera des oeillades à la droite (ce qui ne devrait pas être top compliqué pou lui). 

Second joie : des cadors du gouvernement du cyborg et des figures symboliques de son règne (Ferrand, Castaner) sont dégagés comme des mal propres. C’est beau. 

Venons à la NUPES, comme redouté pour les raisons énoncées ici, si l’alliance et la belle campagne sont à saluer, le score final confirme qu'il y a un déficit structurel de voix à gauche dans ce pays. Comme à chaque scrutin, la gauche citadine découvre avec effarement que les Français sont de droite. L’alliance hétéroclite de la gauche radicale avec la droiche en perdition et les écolos bourgeois macron-compatibles apparait ce dimanche pour ce qu’elle est : non pas (encore) une force de conquête, mais une stratégie de survie politique. La Nupes est peut-être même morte née au-delà de cette campagne, vu les contradictions internes sur un nombre de points du nucléaire à la sécurité. 

Le résultat inattendu du RN avec 89 députés au terme d’une campagne (nationale) somme toute discrète renvoie au second plan le score des députés de gauche. Le RN réussissant la performance d’être à lui seul le premier parti d’opposition à l’assemblée. LFI, en tant que parti, est renvoyé derrière. Traiter près de la moitié des électeurs français de fascistes n’est pas une stratégie de prise de pouvoir viable. A écouter les prises des paroles des un-e-s et des autres hier soir sur les plateaux télés, il semble que ce dur code diplomatique ne soit pas encore totalement intégré à gauche. 

Non, le vrai gagnant ce dimanche c’est l'assemblée. Pour une fois, le machin est vaguement proportionnel et les courants du pays (relativement) bien représentés. Ça va débattre, ça va s’engueuler et ça va voter contre aussi. Ajoutons à cela l’arrivée de gens de la vie civile, de jeunes et de nouvelles têtes et le résultat du scrutin s’il n’est une garantie d'avancée pour le peuple (mais d'abord une garantie de revenus pour les élus), ouvre les portes et les fenêtres et brasse l'air sur une assemblée qui sentait le vieux bourgeois moisi. Il reste donc quelques traces de démocratie dans ce pays. Et ça, croyez-moi, ça doit foutre hors de lui notre cyborg suprême. 

La suite reste à écrire.

Quand est-ce que les socialistes vont trahir ? Qui chez LR vendra son cul le plus vite à Macron ? Et qui du PCF ira chez LR ? La NUPES votera-t-elle les mêmes textes que le RN sans s’auto-traiter de fasciste et si oui, se sabordera-t-elle ? D'i'ci là Macron dissoudra-t-il ? Deux 49-3 est-ce que ça fait 98-6 ? ... et bien d’autres questions encore dans les prochains épisodes de Bienvenue en Ingouvernabilie

On peut sortir le pop-corn et brancher le poste sur LCP-AN, ce sera mieux que Netflix. 







L'étrange victoire

C’est donc hier en fin de journée que je me suis rappelé que oui, tiens à propos, il y avait des élections législatives ce jour. Mon week-end à la campagne soudainement remis en cause, me voilà plongé dans un tumulte de perplexité. 

Pour qui voter ? 

Ceux qui ont plébiscité le Pass sanitaire ou ceux qui, au fond, n’ont rien trouvé à y redire et s’y sont faits ? Devant tant de perplexité, je restais comme 25 millions de Français sur ma chaise longue à profiter d’une belle journée ensoleillée de liberté. 

Avec 52% d'abstention, le premier enseignement de ce dimanche de premier tour des législatives c’est d’abord que plus personne ne vote. Dès lors crier victoire pour quel camp que ce soit est déplacé. A droite, c’est la continuation du coup d’état ouaté des retraités sur les salariés. A gauche, c’est la révolution du peuple sans le peuple. 

Néanmoins, je dois avouer que voir la NUPES, alliance de gauche hétéroclite certes mais tant espérée, arriver en tête en nombre de voixau premier tour comme une couille explosive dans la purée LREM est un spectacle savoureux.

Pourtant, c’est pas gagné. Très loin de là. 

1 / D’abord le mode de scrutin imbitable, dont le calendrier est pensé pour renforcer le côté monarchie de la Ve république, peut entraîner une victoire des perdants et rendre les premiers en score minoritaires à l'Assemblée. Quant au RN qui représente 20% des voix et qui est, rappelons-le, arrivé second tour des deux dernières présidentielles, il peut se retrouver avec une micro poignée de députés. 

2 / Tout porte à croire que l’union de gauche étant faite, et la NUPES étant à peu près la seule force à avoir fait campagne, elle aura fait le plein de voix au premier tour dans un pays qui reste très majoritairement de droite. Sept semaines après avoir appelé à « faire barrage » et avoir méprisé 42% des électeurs, se retrouver trop court de quelques voix pour le second des législatives, ce serait moche mais pas complètement immérité. 

3 / Il est à prévoir aussi que la bourgeoisie effrayée par le grand méchant rouge et les boomers de droite molle chauffés à blanc par la clique d’éditorialistes des chaines d’info se mobiliseront en masse au second tour. 

Sans opposition à la source des lois, ce quinquennat sera une agonie.

La liste de ce qui ne m'enchante pas dans cette NUPES est longue comme le bras, à commencer par la présence des socialistes dont l’ADN est la trahison, mais il y a une minime opportunité - totalement légale et gratuite - de sérieusement contrer la politique du cyborg pour les cinq prochaines années. Ce serait dommage de s’en priver. Macron a un destin à la Sarkozy qui l’attend désormais. Vu la configuration économique et la hausse des prix qui inexorablement s’amplifier, l’enfant star des inactifs et des rentiers finira détesté de tous, même de sa garde rapprochée et de son fan-club gériatrique. Mais cinq ans ça va être long, et surtout très violent, avec ce type en roue libre.  De droite ou de gauche, qu’on ne l’aime pas ou qu’on le déteste, il est essentiel de lui barrer la route le plus possible. Question de survie sociale. 


L'étrange défaite

Le premier acte de la comédie 2022 s'achève. 


Il est temps de faire les comptes. 

Le cyborg obtient 18 779 809 voix.
Marine Le Pen obtient 13 297 728 voix. 
Abstention : 13 656 109
Blancs ou nuls : environ 3 000 000 

Sur une corps électoral de près de 50 millions, ça ne fait pas des masses pour notre gourou banquier, mais à l'image de Bruno Lemaire qui a fait volte face sur la réforme des retraites passant du statut "discutable" au statut "on va vous la passer en 49-3 bande de connards" à la faveur du scrutin, la ligne est claire : la victoire du cyborg est avant tout une adhésion populaire. C'est deux derniers mots étant, chiffres à l'appui, mensongers. L'adhésion est plus que relative, est clairement loin d'être "populaire" au sens social du terme. Le bloc bourgeois lui est bien soudé, aidé en cela par le réflexe anti fasciste médiatiquement réactivé deux semaines tous les cinq ans. 

Le triomphe du cyborg, légitime,  est surtout très peu représentatif de la réalité "vive" du pays. En écartant, les votes des + de 65 ans, il est même probable qu'il n'accédait même pas au second tour.  J'avais déjà évoqué l'importance du "vote vieux" au moment de l'accession au pouvoir de Sarkozy, là c'est sans appel. C'est un constat, la France est un pays de vieux, mais ce n'est pas le plus gros problème : nous vivons dans un pays qui se ment à lui-même, via une doxa médiatique du "dynamisme" (le travail, l'effort) alors que la réalité est à l'opposée : le travail ne paye plus et la rente rapporte bien plus  que le labeur. D'où le délire de tout discours sur la retraite à 65 ans, tout bonnement inaccessible pour la majeure partie des jeunes d'aujourd'hui qui rentrent de plus en plus tard dans l'emploi stable. 

Nous vivons sur un mensonge. Même mensonge sur l'immobilier, angle mort de la campagne électorale tout candidat confondu. Nous vivons dans un pays où il est toujours plus rentable d'être multi-propriétaire que salarié. Le coût des dépenses de logement ne rentrent que pour 7% dans le "panier de l'Insee" pour calculer les dépenses de consommation des Français, alors dans les classes populaires, chez les salariés en bas de l'échelle, il peut représenter 30 à 50% des dépenses, voire plus. Ce décrochage ne date pas d'hier, cette bulle immobilière, ignorée des débats politiques de chaque présidentielle, a déjà vingt-cinq ans de bouteille et a déjà plombé deux générations. 

Intéressant également, la leader du RN est en tête chez les employés et les ouvriers. 


Vous me direz pourquoi donc Mélenchon, qui était un des seuls à avoir quelques propositions sur le logement, n'a pas fait plus au premier tour ? "Peut-être" que ses priorités de campagne dans la dernière ligne droite n'ont pas été celles-ci et qu'une partie de son électorat n'est pas si impactée que ça par les coûts du logement et l'inflation des tarifs énergétiques. C'est jute une hypothèse. Une partie non négligeable du vote Mélenchon est urbaine, et/ou proche des zones de richesses et de pouvoir. Une relative précarité y est apparement un peu plus supportable qu'à 80 kilomètres de son lieu de travail. Le vote de "colère" dans ces zones a été dissout au second tour entre une abstention pour les plus courageux et dans un vote Macron, garantie d'une non remise en cause de cette "richesse" par proximité. 

La progression du vote RN entre 2017 et 2022 est nette. En noir, les communes ou ça vote Marine, en jaune c'est Macron. On notera les bastions jaunes urbains au milieu de zones entièrement foncées. 


(infographie Ouest France)

Les moqueries qui suintent le bon gros mépris de classe envers cette France boueuse qu'on ne voit pas de Paris se sont multipliées sur les réseaux dès la victoire du Cyborg. L'exemple le plus frappant est cette séquence tournée à Hénin-Beaumont où l'on voit le désarroi de femmes apprenant la victoire du Cyborg. Mieux que tout test politique sur Facebook, ce que l'on ressent à la vision de cette séquence indique instantanément où l'on se situe sur l'échiquier de classe. Interrogée par la Voix du Nord, une des protagonistes déclare  : Je ne m’attendais pas à un tel écart. On vit vraiment dans un pays de riches et de vieux qui ne pensent pas à leurs enfants". C'est plus pertinent que l'ensemble des propos tenus par les journalistes et les politiques dans l'ensemble des soirées électorales de dimanche dernier. 

Venons-en à l'acte II de la comédie 2022 : les législatives en juin. 

J'espère me tromper, mais tout porte à croire que l'histoire se répètera et qu'au jeu des alliances et d'une élection conçue, dans son mode de calcul et son calendrier, pour renforcer le pouvoir du président élu celui-ci sera effectivement renforcé. La stratégie de Mélenchon après la premier tour est grandiloquente  mais périlleuse. Il a offert "ses" voix à Macron sans négociation dans l'heure qui a suivi l'annonce des résultats du premier tour, alors même que le barrage médiatique n'avait même pas encore osé se lancer. A vrai dire, il a lancé le coup de feu du départ. Je ne sais pas ce qu'il vaut au pouvoir, mais en termes de négociation, il est très mauvais. Après vingt ans d'un combat anti-FN qui n'a fait que le renforcer, cette persistance dans le déni est fascinante et le révélateur d'une déconnexion avec une partie du pays qu'il est pourtant censé représenter.

La réalité est la même en plus appuyée qu'en 2017. Sans une convergence des représentants du vote populaire de gauche à droite sur des thématiques concrètes et immédiates : logement, prix, salaires, relocalisation des emplois, il n'y aura jamais d'accession au pouvoir, ni au contre-pouvoir. Il est probable que ni LFI, ni même le RN, avec leurs millions de voix (majoritaires à eux deux) n'aient de représentation digne de ces chiffres à l'Assemblée ou juste quelques sièges, assurant une poignée de salaires de députés et la prolongation d'une couverture médiatique pour les impétrants.

A moins d'un entracte populaire surprise. 

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Le "nouveau" gouvernement : 50 nuances de droite


Depuis l’annonce du nouveau gouvernement d’Edouard Philippe, premier de l'ère de Frère Emmanuel, il semblerait que des "gens de gauche", fins stratèges, ayant payé pour voter Juppé à la primaire de droite afin de virer Sarko, avant de voter Macron à la présidentielle pour se retrouver avec des Sarko boys dans son gouvernement (entre douze Bayrouistes et treize Juppéistes), se mettent subitement à pondre des posts et statuts Facebook dithyrambiques sur la clairvoyance unificatrice et transclivage de la nouvelle équipe.

Ne paniquez pas, ne jugez pas. Il s'agit d'une hémiplégie politique temporaire. Laissez faire le temps. D'ici quelques mois, ils devraient avoir récupéré toutes leurs facultés cognitives.

Il convient néanmoins de faire un petit point, la contamination étant également médiatique. En survolant quelques journaux télévisés, l'esprit embrumé pourrait même caresser l'idée que ce gouvernement est pris d’assaut par la jeune garde de l’anticapitalisme à tendance flowerpower.

Reconnaissons-le : ce gouvernement jetable à 100% électoraliste (voir le post précédent sur les législatives) est très ouvert. Très ouvert à tous les genres de droite. Il vise d'abord à rassurer le spectateur de Michel Drucker qui, à l'approche des prochains scrutins, est le vrai client cible de la jeune Macronie (de la start-up nation de la win de ceux qui s’achètent des costumes chic).

Perso, j'ai un truc pour jauger d'entrée l'orientation du gouvernement (et ça marche toujours) : je regarde qui est nommé à l’économie. Par exemple, quand Ayrault a choisi Moscovici pour Bercy (avec son étonnant passif Anti Hollande, et multiples déclaration d'amour à Merkel), j’ai tout de suite su que c’était mort pour les cinq prochaines années. Et bien là, c’est Bruno Lemaire, ministre sous Sarkozy et auteur d'un magnifique 2,4% à la primaire de droite, qui s’y colle, un pur LR totalement Macro-compatible (pêle-mêle : pour la suppression de l'impôt sur la fortune, pour la réduction des indemnités chômage, pour les bullshit jobs sous-payés pour les bénéficiaires de minima sociaux...). Le ministre de la fonction publique disparait pour devenir celui de « l’action et des comptes publics  » (aka : des fonctionnaires rentables) sous la coupe de Gérald Darmanin, ex porte-parole de Nicolas Sarkozy et, au passage, pro-manif pour tous : du vrai hippie altermondialiste (et gay friendly). Jean-Michel Blaquer, idéologue autoritaire du management scolaire chez qui tous les candidats de droite ont pioché leurs idées sur l’école est nommé à l’Éducation nationale. Bayrou l’inutile devient Garde des Sceaux (je ne critique pas, dans ce paysage c’est presque le plus à gauche). Que dire de Nicolas Hulot à la transition écologique ? Il se murmure déjà qu'une ligne de pari est ouverte chez Betclic pour miser sur le jour de sa démission, tant la ligne du gouvernement auquel il appartient est aux antipodes de ce qu'il défend. On trouvera bien une ou deux barons socialistes en fin de course, pour permettre la titraille  sur "l'ouverture". Enfin "de gauche"...  de la droite de la gauche du centre (à tendance modérée).  

Bref, il manquait Fillon à la justice et Hannibal Lekter aux affaires sociales et on était pleinement opérationnel pour une révolution complète. 

Les électeurs de gauche peuvent donc être un peu perdus dans les prochains jours. Ne vous inquiétez pas, même s'ils ont encore quelques réparties mécaniques comme "ah mais c'était ça où les fascistes" et autres sursauts de naïveté à base de "t'es pessimiste" ou "on va bien voir" et autres "oh mais il faut leur laisser leur chance, on sait jamais" : ils devraient bientôt retrouver la raison. 

Le sevrage sera certes douloureux. Comprenons. Ils pensaient avoir élu le plus jeune des présidents français, ils réaliseront qu'ils ont porté au pouvoir le plus jeune Juppé de la Ve République. 

Les coulisses cool d'une victoire

 

Je vous invite (ou pas) à voir ce sympathique film publicitaire d'1h30 sur la campagne de notre nouveau président miraculeusement diffusé en prime-time sur TF1 (à la place de Camping Paradis)  le lendemain de son élection  :

Les coulisses d'une victoire (Lien VOD)

Il faut battre les foules tant qu'elles sont encore chaudes et continuer à vendre le produit dans la perspective des législatives. Des millions de gens ont voté Macron par peur de Le Pen, sans adhérer au projet ou sans trop savoir ce qu'il défend ou entend casser. Ces trois catégories constituent l'écrasante majorité de ses voix au second tour. 

Pour eux, aucune réponse autre que l'énergie communicative du candidat en mouvement. Dans ce film, il n'est quasiment jamais question du projet économique, fiscal et social de Macron, ça serait peut-être un peu trop clivant. "Jamais" est inexact, la question du temps de travail y est réglée en mode "casual brainstorming" autour d'un Latté avec Daniel Cohn-Bendit, et on entend notre force de vente nationale promettre à des handicapés que leur structure ne fermera pas. C'est à peu près tout. Certes, Macron ne va pas à Whirlpool pour "faire des selfies" comme MLP, mais il y emmène un réalisateuret sa caméra qui fait les belles images. Comme dit ma fille : "c'est plus stylé".

Le film n'est que forme, forme brillante avec son lot de répliques fun et courtes calibrées pour internet. Sous couvert de "making of" façon Les yeux dans les bleus (avec un off de pacotille, puisque sous contrôle du principal intéressé) les codes du dynamisme, du "team building" et de l'abnégation au travail (spécialement pour les jeunes) sont parfaitement dilués avec la pointe de cynisme (d'autres appelleront ça de "la transparence" du mec qui sait très bien qu'une caméra le filme (avec en prime un poster de Kennedy qui apparait souvent dans le cadre).

Je ne sais pas ce que Macron vaut comme Président, mais en com' il a compris l'époque et son public. Il sait que l’État de grâce sera expéditif, la construction d'une nouvelle dynamique passe en partie par le récit de sa précédente conquête.

Enfin... Le cine-story-telling (qui aurait tout aussi bien pu s’appeler "Je vais vous faire m'aimer") a beau être de qualité : je n'ai pas voulu du produit en avril et en mai, je n'en voudrai pas plus en juin.

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