Lateo.net - Flux RSS en pagaille (pour en ajouter : @ moi)

🔒
❌ À propos de FreshRSS
Il y a de nouveaux articles disponibles, cliquez pour rafraîchir la page.
À partir d’avant-hierLe blog de Seb Musset

L'arnaque électrique

Le 8 juin dernier, le Parlement européen a voté l’interdiction de la vente de voitures à moteur thermique à partir de 2035 en Europe. Les conducteurs européens seront obligés d’acheter de la voiture électrique d'ici 12 ans. Non ce n’est pas du commerce, mais préparez-les sous c’est pour « sauver la planète ». Dans la nuit du 28 juin au 29 juin, on apprend que tout se complique un peu. Chacun, à commencer par les fabricants de voitures de sport, y allant de sa demande d'exception. 


Derrière le greenwashing et le bullshit écologique que constitue 99,9% du temps d’antenne des marques et des politiques dès lors qu’ils collent leurs slogans sur le sujet, pour ce qui est de la voiture, je ne connais réellement que deux moyens d’être « écolo » :

Le premier, c’est de couper le problème à la source : ne pas utiliser de voiture, donc ne pas acheter donc  ne pas contribuer à la construction de la dite voiture. Radical et efficace mais, pour un ensemble de raisons (revenant à l’essentiel à un modèle économique et foncier occidental basé sur la mobilité et l’éloignement), pas faisable au-delà des grandes villes. 

La seconde hypothèse est de garder sa voiture toute sa vie et ainsi réduire la pollution (la construction de la bagnole, les efforts publicitaires pour vous la faire acheter, son acheminement étant des aspects non négligeables). Une voiture pour une vie, c'est théoriquement possible. Nous avons la technologie, les compétences humaines pour faire durer les véhicules très très longtemps. Enfin ça, c’était avant que les constructeurs inquiets que l'on puisse réparer nous-mêmes nos moteurs se mêlent de transformer nos bagnoles en extensions Windows pétées d’électronique, immobilisées au premier bug et littéralement désactivables en un upgrade par satellite. 

Avec le passage forcé à la voiture électrique nous éviterons fièrement les points 1 et 2 puisque nous aurons à la fois la surproduction et le renforcement de l’obsolescence programmée. Il faudra ré-équiper tout le monde en voiture, pensées et conçues depuis notre entrée dans la modernité pour faillir dans les trois ans. Avec l’électrique attendons-nous à la poursuite du festival du renouvellement et du leasing à gogo. 

La liste des désagréments de la voiture électrique est à ce jour chargée : autonomie merdique, absence de bornes, incompatibilité entre elles, recyclage impossible des batteries ultra-polluantes nécessitant l’extraction dans des conditions humaines terribles de ressources dont nous sommes tout aussi dépendants que le pétrole… C’est dans le domaine des voitures thermiques que les vrais progrès de réduction de la pollution ont été accompli ces dernières années, pas dans l’électrique. Ça marchait mal il y a dix ans, ça ne marche toujours pas bien. Rappelons qu’ici bas, en terme de technologie high-tech on tâtonne encore sur le scannage les tickets au stade de France, alors pour un Paris-Marseille non-stop en auto-tamponneuse c'est pas gagné. Comme le précise Jean-Baptiste Fressoz historien des sciences, des techniques et de l'environnement dans un passionnante interview (en bas d’article), la moitié des voitures électriques qui roulent actuellement dans le monde se trouvent en Chine, et 80% de leur énergie est tirée du charbon. Paye ton Co2 vert. On apprend même ces jours-ci que les dirigeants européens, fiers de leurs sanctions contre la Russie pénalisant en priorité leurs propres populations, s'apprêtent jeter à la poubelle les accords de Paris pour réouvrir leurs centrales à charbon. C'était bien la peine de trier nos pots de yaourt. 

La voiture électrique se substituerait donc au thermique ? La réalité c’est qu’on ne change pas comme ça. Si on peut refaire s’endetter les occidentaux en les culpabilisant et leur faire intégralement renouveler leur automobile, ce ne sera pas le cas dans le reste du monde. On n’imagine pas plus pour le moment qu'avions et porte-conteneurs (pour traverser les océans et amener chez nous les voitures soi-disant « non-polluantes ») fonctionnent à l’électrique. Les deux technologies se cumuleront encore longtemps. Il n’y aura donc pas de réduction mais continuation de l’augmentation de la pollution et très long passage de relais de l’une à l’autre avec d’autres conséquences toutes aussi désastreuses pour l’environnement. 

En l’état actuel de la technologie pour assurer vaguement la même fluidité de mouvement routier dans une version 100% électrique, il faudrait recouvrir le territoire de parkings et de station de rechargement et électrifier les routes (autre hypothèse) ce qui reviendrait à utiliser des milliards de tonnes de matériaux nocifs pour l’environnement et à achever nos sols déjà bien pourris par des décennies d’engrais chimiques et d’agriculture intensive. Ravager le sol pour protéger la terre, le genre de destructions créatrices que le capitalisme collectionne. La « transition énergétique » dans le domaine du déplacement routier est pour le moment une opération strictement commerciale. Le segment cadre supérieur urbain a été bien séduit, il faut faire payer les revenus "moyens". Et les pauvres ? Et bien ils se serreront en bus ou, mieux encore, ne bougeront pas. Notre soumission aux messages angoissants (alerte à la canicule spontanée au moindre pet de chaleur) étant le levier à actionner en cas de tensions à la pompe : Restez-vous, ne roulez pas, sauvez des vies. on connait la chanson. On notera d’ailleurs, dans une tribune ce week-end, que les trois principaux producteurs et distributeurs d’énergie nationaux appellent, dans d'émouvants sanglots, les Français à réduire drastiquement leur consommation, indice que cette transition s’annonce bien et s’appuie volontiers, entre deux pages de publicité, sur la  culpabilité schizophrène de consommer. 

Les effets dévastateurs de l’homme sur son environnement sont indéniables. Il est absurde de penser que l’on peut continuer de croître sur le même modèle occidental tout en minimisant son impact dans le même temps, d’autant que la moitié de la planète piaffe d’impatience de nous rejoindre. Non, rouler à l’électrique ne va pas sauver la planète (indice : elle vous survivra). Cela sauve juste votre conscience et vous vous allégerez de quelques milliers d’euros au passage. 

Vous voulez protéger votre environnement ? Marchez. La démarche « écologique » est dans la transition effective de nos comportements et de nos corps et non dans nos contributions financières à une idéologie marchande. Ce n’est pas d’une transition gérée par les services marketing d’un capitalisme qui ne veut sauver que lui même dont nous avons besoin, mais d’un ralentissement du capitalisme, voire de son arrêt. 

Et, comme on dit dans les bandes-annonces pour la prochaine saison du feuilleton : "vous n'êtes pas prêts".

#confinement jour 26

1968. Un an après être partie de Hongkong, la grippe fait, en deux mois, 31 226 morts en France. A l'époque, ni les médias ni les pouvoirs publics ne s'en étaient émus.  A lire dans Libération (07/12/2005)

Pas de confinement à l'époque, pas de BFM non plus, tout ça été relayé dans un entrefilet en page 5 de Libération et nos anciens profitaient du joli mois de mai.

A lire aussi : "Quand l'Europe se moquait des épidémies" sur le site du Temps.

Restons chez nous donc. Mais ne fumons pas (73000 morts/an en France). Restons chez nous et après tout ira bien. Après quand ? Où en est-on à bientôt quatre semaines de confinement ? Nous n’avons toujours pas de masque, pas de test, pas de place dans les hôpitaux, pas de remède, pas de solution, même pas de chiffres clairs. On a "gagné du temps". Lequel ? On ne sait même pas. Le tout pour un nombre de vies sauvées qu’on ne pourra par définition jamais connaître et qui ne sera jamais assez. Restez chez vous, c’est la seule réponse à toutes les questions. Combien de temps ? Bah, comme le reste : on ne sait pas. La seule issue du confinement étant, dans sa volonté de ne pas se confronter au virus, encore plus de confinement.

Cet article du Monde sur les scénarios de sortie de la crise sanitaire est plutôt bien foutu. Je n'en retiens pourtant qu'une phrase, la seule certitude : On ne peut donc compter pour l’instant que sur la protection naturelle des personnes déjà contaminées. 

Le spectre du désastre économique et les catastrophes sociales et humaines engendrées par cette paralysie de l'activité, s’invitent timidement dans le débat sur la date du pic. Entre deux recettes de cuisine et les conseils bien-être de France Inter pour faire de ses deux mois de privation de liberté, une expérience enrichissante et chaleureuse, ça commence à peine à esquisser du bout des lèvres le mot récession alors qu’on est déjà en plein dedans. Là non plus on ne peut pas chiffrer, mais ce sera bien plus que le nombre victimes total de ce maudit virus. Personne ne semble y croire au moins aussi fort que personne ne pensait en décembre qu'une épidémie de chinois pourrait nous concerner un jour.

On ne va pas être totalement pessimiste, on a quand même gagné deux trois trucs en quatre semaines : Des tutos pour faire des masques en slip, l’interdiction de péter dans la rue bientôt inscrite dans la loi d'urgence et une course d’audace des maires de France pour décrocher le pompon au concours de l’apprenti dictateur. Un salarié français a même réussi à décrocher un test (certes positif) en allant chercher des masques en Chine.

Que demande le peuple ?


Les jours d'avant :
Jour 2 - Jour 3 - Jour 4 - Jour 5 - Jour 6 - Jour 7 - Jour 8 -  Jour 9 - Jour 10 - Jour 11 - Jour 12  - Jour 13 -  Jour 14 - Jour 15 et 16 -  Jour 17 - Jour 18 - Jour 19 - Jour 20  - Jour 21Jour 22 et 23 - Jour 24 - Jour 25

Point de rentrée sur l’auto-entreprise

Tiens donc. J'apprends dans Le Parisien du jour que certains auto-entrepreneurs conduisant pour/par Uber le font désormais "au noir" au motif que la plateforme (mot moderne pour "société sans salariés") a changé ses conditions générales d'exploitation et que bon bah c’est pas si rentable que ça pour les chauffeurs au final.


Bossant illégalement, les conducteurs de leur destinée risquent également de se faire avoir une deuxième fois par le fisc et l’Ursaff, même si le nombre d’inspecteurs du travail (pourtant les fonctionnaires les plus rentables pour l’État) reste dramatiquement bas face à l’étendue de la "révolution" de l’"économie collaborative" (expression moderne pour "chacun pour sa gueule, et tout l'argent pour moi").

Il aura fallu sept ans pour que chacun (enfin ceux qui bossent) convienne que l’auto-entreprise est une fumisterie. Peu de mesures sociales auront eu un impact aussi violent et rapide sur le monde du travail sans l'améliorer (hormis une baisse mécanique du taux de chômage. Même si ce n’était pas le but recherché, c’est toujours ça de pris pour les gouvernements successifs histoire de prouver l’efficacité de leurs autres réformes couteuses et/ou inefficaces.

Moi-même j’ai tenu tant que j’ai pu, j’ai cédé à l'AE. Dépassons le cas Uber, qui aura au moins eu le mérite d'exposer l'indécence au grand jour, dans certains secteurs on ne peut tout simplement plus travailler autrement. Nombre de connaissances sont maintenues dans cette zone grise à précaires, voire à précariser.

Si on comprend l’avantage pour les entreprises qui remplacent ainsi de la main d’œuvre salariée, en main d’œuvre à moitié prix ou moins encore, corvéable à merci, disponible sur demande et se concurrençant elle-même à la baisse, pour le travailleur individualisé le statut d'AE est une arnaque du sol au plafond.

C'est une destruction :

- De ses droits (pas de garanties, sécurité sociale au rabais, pas de médecine du travail, pas de cotisation retraites, pas de défense syndicale…)

- Du travail (sans jeter la pierre à nombre de gens qui font bien leur boulot, suivant les métiers c’est la porte ouverte à n’importe quoi. C’est également l’entrée de l’hypothèse d’un travail permanent et sans fin dans notre quotidien, et jusqu'à notre dernier souffle).

- De la solidarité (Mettre chaque individu en concurrence était le fantasme des néo-libéraux pour La France, c’est en passe de réussir au-delà de toutes les espérances).

- C’est également préjudiciable pour les petites entreprises. Elles-mêmes obligées de composer avec cette armée de francs-tireurs non-soumise aux mêmes règles.

Comme quoi, on peut faire beaucoup avec un bon titre marketing. La ruse sémantique étant d’avoir collé "entrepreneur" sur l’emballage. "Auto-servage" c’était moins vendeur. L’auto entrepreneur n’est qu’une main d'œuvre à prix cassée, socialement délocalisée et physiquement disponible.

Mais essayons d'être positifs. Même si cette boîte de Pandore n’aurait jamais dû être ouverte, l’auto-entreprise est un statut qui peut être intéressant :

1 / Comme complément de revenus, salaire ou retraite (même si à l’ère du chômage de masse, permettre à ceux qui gagnent quelque chose de gagner plus en prenant du travail à ceux qui n’en ont pas, ne semblait pas être LA priorité).

2 / Le statut peut s’envisager comme un tremplin vers autre chose. Le salariat ou la création d’entreprise.

Après tout, si l’AE remplace le stage peu ou pas payé (qui est l’autre grande fumisterie du monde du travail depuis un quart de siècle), on pourrait presque le considérer comme une amélioration. Encore mieux, il pourrait déboucher sur un emploi. Ne pas se leurrer : c’est encore trop rarement le cas.

Pour la création d'entreprise, l'AE permet de se constituer une expérience et surtout des clients (mais une entreprise c'est fiscalement très différent et ça nécessite un bon pécule de départ. Avec moins de 32000 euros – 25% par an, dans le meilleur des cas et à condition de ne rien manger et de ne pas avoir de loyer, convenons-en : c’est pas le top).

Dans les deux cas, il faut en sortir au bout d'un an ou deux. Et là surprise : c'est moins simple que d’y rentrer. Entre ceux qui n’ont pas les moyens, les épaules ou tout simplement l’envie de passer en entreprise et ceux qui, même devenus salariés, ont du mal à se réaligner sur le régime général (le RSI étant aussi opaque qu’ingénieux à vous garder dans ses filets), l’auto-entreprise confirme encore sa nature piégeuse. 

J’espère me tromper, j’ai bien peur que ce débat soit écarté des prochaines élections présidentielles.

Pendant ce temps, Uber planche déjà sur des voitures sans chauffeur, débarrassées de leurs entrepreneurs auto-proclamés et grevant encore trop les marges auto-défiscalisées de la société.


P.S : je n'évoque pas ici les cas très nombreux d'AE ne faisant AUCUN chiffre d'affaire.

Articles en lien :
Ils roulent pour Uber au black
Uber veut lancer des voitures sans conducteur
Comment Uber ne paie pas d’impôt
❌