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Le nouveau gouvernement polonais tiraillé entre Bruxelles et la colère des paysans…

Par : pierre

Paradoxale Pologne ! On décrivait son peuple comme frénétiquement pro-ukrainien, prêt à tout pour aider ses voisins de l’Est. On découvre que le gouvernement en place depuis décembre 2023, sous pression d’importantes manifestations de paysans, continue de bloquer les importations massives de céréales en provenance de Kiev.

Le nouveau premier ministre, Donald Tusk, ancien président du Conseil européen et donc très pro-UE, a accédé au pouvoir sous les acclamations de la Commission européenne ; l’on s’attendait donc qu’il suive la ligne de celle-ci de manière zélée. Pourtant, Varsovie n’a pas hésité à mettre en cause l’autorité de l’UE sur un deuxième dossier : le « Pacte vert ».

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Le nouveau gouvernement polonais tiraillé entre Bruxelles et la colère des paysans

Par : pierre

Paradoxale Pologne ! On décrivait son peuple comme frénétiquement pro-ukrainien, prêt à tout pour aider ses voisins de l’Est. On découvre que le gouvernement en place depuis décembre 2023, sous pression d’importantes manifestations de paysans, continue de bloquer les importations massives de céréales en provenance de Kiev.

Le nouveau premier ministre, Donald Tusk, ancien président du Conseil européen et donc très pro-UE, a accédé au pouvoir sous les acclamations de la Commission européenne ; l’on s’attendait donc qu’il suive la ligne de celle-ci de manière zélée. Pourtant, Varsovie n’a pas hésité à mettre en cause l’autorité de l’UE sur un deuxième dossier : le « Pacte vert ».

Certes, le gouvernement a retiré les recours juridiques contre certaines mesures de ce dernier, censé sauver la planète. Mais le ministre de l’agriculture a annoncé qu’il va « exiger de mettre des limites » audit Pacte, notamment en matière d’utilisation de pesticides et de contraintes pour l’exploitation de terres arables. Il a en outre refusé de s’inscrire dans un nouvel objectif, la diminution de 90% des émissions de CO2 d’ici 2040.

Enfin, un troisième terrain de friction pourrait bien apparaître prochainement : les réformes adoptées par une majorité des Vingt-sept en matière de migration et d’asile. M. Tusk va probablement se révéler plus proche… de la politique de son prédécesseur honni, issu du PiS (national-conservateur), que des orientations de Bruxelles.

Libre échange avec l’Ukraine, environnement, migrations : les points d’achoppement sont stratégiques. Pour autant, l’arrivée du nouveau pouvoir à Varsovie reste un soulagement pour les dirigeants européens, pour qui le PiS, désormais dans l’opposition, était la bête noire.

Ursula von der Leyen a confirmé le déblocage de 137 milliards d’euros destinés à la Pologne

En témoigne la visite enthousiaste qu’a effectuée la présidente de la Commission à Varsovie le 23 février. Ursula von der Leyen n’est pas venue les mains vides : elle a confirmé le déblocage de 137 milliards d’euros destinés à la Pologne, mais qui avaient été gelés par Bruxelles du fait des griefs européens à l’encontre du gouvernement précédent, notamment en matière d’« Etat de droit ».

« Enfin, on l’a (…) cela constitue une montagne d’argent », a jubilé Donald Tusk qui avait fait de ce feu vert sa première priorité. Plus précisément, ladite montagne d’argent (c’est le moins qu’on puisse dire !) provient de deux paquets. D’une part du fonds de relance économique post-Covid, adopté par les Vingt-sept en 2020, réparti sous forme de subventions et de prêts entre tous les Etats membres, et financé par un emprunt commun de 750 milliards. (A noter que la Commission prévoyait des « recettes nouvelles » pour le rembourser ; à ce jour, aucune n’a été mise en place si bien que nul ne sait vraiment comment sera remboursé cet emprunt communautaire géant).

Varsovie s’était vu attribuer 59,8 milliards en provenance de cette source (25,3 milliards de subventions et 34,5 milliards de prêts à faible taux). La somme est si considérable qu’une étude privée a affirmé qu’une large part ne pourrait probablement pas être dépensée. Les projets qu’elle doit financer (environnement, numérique…) doivent en effet être bouclés d’ici 2026, ce qui ne sera probablement pas le cas. Quoiqu’il en soit, une première tranche de 6,3 milliards pourrait être débloquée dans les prochaines semaines.

D’autre part, la Pologne va pouvoir accéder aux 76,5 milliards des « fonds de cohésion ». Ces fonds, qui proviennent du budget général de l’UE, sont censés favoriser le développement des pays les moins riches, c’est-à-dire dans les faits financés par les pays ayant les plus gros PIB. Les versements à la Pologne avaient été suspendus car cette dernière était accusée d’avoir mené des réformes portant atteinte à l’indépendance de son appareil judiciaire.

Certes, le nouveau ministre de la Justice a bien annoncé un plan de neuf mesures censé rétablir une organisation plus conforme aux obligations européennes. Mais lesdites mesures sont loin d’être effectives, ce qui a provoqué quelques grincements de dents au sein de l’europarlement : la célérité de Bruxelles à rétablir les financements contre seulement des promesses pourrait bien nourrir les accusations du PiS. Celui-ci semble fondé à constater que les sanctions précédentes étaient dirigées contre lui – un « délit de sale gueule », en quelque sorte ; et que la simple arrivée d’un gouvernement pro-européen a suffi a lever la punition. Un reproche qui ne manque pas de vraisemblance.

A l’instar des leurs collègues de nombreux pays de l’UE, les agriculteurs polonais ont su faire monter la pression

Le contraste est donc bien là : d’un côté, un gouvernement qui affiche sa fidélité de principe à l’intégration européenne, et qui jouit ainsi de la reconnaissance de Bruxelles, de Berlin et de Paris ; de l’autre, ce même gouvernement contraint de tenir compte de la colère des agriculteurs.

A l’instar des leurs collègues de nombreux pays de l’UE, ceux-ci ont su faire monter la pression. Notamment par des mobilisations qui ont connu deux temps forts, le 20 février où la capitale a vu converger des milliers de tracteurs ; et le 26 février, où les manifestants ont bloqué les postes frontières avec l’Ukraine et les grandes routes y conduisant. Des camions ukrainiens ont même vu leurs denrées déversées sur la chaussée.

Au menu des revendications, il y a d’une part l’hostilité au Pacte vert, qui grandit partout dans l’Union européenne, et pas seulement dans le monde agricole. Au point que, proximité des élections européennes aidant, le redoutable consensus qui rassemblait toutes les forces politiques européennes en faveur de « la planète » (!) commence à se lézarder un peu partout.

Mais les paysans ont aussi dénoncé les conséquences catastrophiques de la levée de toute taxe à l’importation des céréales ukrainiennes, alors que celles-ci sont produites à bas coût et sans contrainte (souvent pour le compte de gros propriétaires occidentaux). Depuis que cette mesure a été décidée par Bruxelles pour établir des « corridors de la solidarité » en faveur de Kiev, les marchés agricoles des pays en première ligne ont été littéralement inondés de produits – cela concerne aussi la volaille, les œufs, le sucre, les fruits rouges – avec pour conséquence la dégringolade des cours et donc des revenus des producteurs.

Au point que Bruxelles, sous pression, avait, en avril 2023, temporairement autorisé un embargo sur le grain ukrainien à destination de la Pologne, de la Hongrie, de la Roumanie, de la Bulgarie et de la Slovaquie, avant d’annuler cette mesure en septembre 2023.

Le gouvernement du PiS, lui, avait à ce moment unilatéralement maintenu un embargo national, violant ainsi les traités qui attribuent à la Commission l’exclusivité du pouvoir en matière de commerce international. Donald Tusk a choisi de faire perdurer le blocage, tout en se disant prêt à négocier avec le président ukrainien ; de son côté, ce dernier a dénoncé l’« érosion de la solidarité ».

L’UE a importé 20 millions de tonnes de céréales ukrainiennes en 2022-2023, soit deux fois plus que précédemment

Si cela touche au premier chef les pays de « la ligne de front », les pays de l’ouest ne sont pas épargnés. En tout, l’UE a importé 20 millions de tonnes de céréales ukrainiennes en 2022-2023, soit deux fois plus que précédemment.

En France, les quantités se montaient à 13 000 tonnes, un chiffre certes modeste, mais quinze fois supérieur à la situation antérieure. Et les volailles de Kiev continuent à concurrencer durement les producteurs hexagonaux.

D’un côté, les gouvernements des Etats membres sont donc fidèles à l’« idée européenne » et aux décisions communautaires qu’ils contribuent eux-mêmes à façonner. Mais de l’autre, ils ne peuvent ignorer les colères et mobilisations provoquées par ces dernières. Tout est une question de rapport de force.

Les dirigeants de l’UE ne sont peut-être pas au bout de leurs mauvaises surprises.

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L’improbable horizon de l’élargissement

Par : pierre

L’élargissement n’aura pas lieu. Cette prédiction peut apparaître paradoxale alors que la Commission a publié, le 8 novembre, ses recommandations concernant les perspectives d’adhésion à l’UE de six pays des Balkans, ainsi que de l’Ukraine et de la Moldavie.

Dans son état des lieux annuel, Bruxelles propose d’ouvrir les « négociations » avec ces deux derniers pays, auxquels avait été accordé le statut de candidat officiel en juin dernier. La même proposition est faite à la Bosnie. Pour les pays ayant déjà démarré la phase des pourparlers, la Commission  prévoit de débloquer six milliards d’euros pour accélérer les processus de « réformes » internes.

Bruxelles suggère aussi de faire franchir à la Géorgie le cran précédent, l’attribution du statut de candidat. Toutes ces recommandations sont assorties de conditions, qui seront évaluées en mars 2024. D’ici là, c’est le Conseil européen (les chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-sept) qui devra donner son feu vert lors du sommet des 14 et 15 décembre prochains.

Lors des précédentes vagues d’adhésions, lesdites « négociations » (en fait, une revue générale pour aligner les législations des pays candidats sur les obligations européennes) avaient tous pris de nombreuses années ; il s’agissait pourtant de pays plus proches des normes de l’UE. Cette fois, le processus s’annonce plus complexe encore. Son aboutissement semble en réalité improbable selon plusieurs experts de l’Union européenne.

C’est par exemple le cas d’une étude de deux chercheurs publiée quelques jours avant le Conseil européen du 6 octobre à Grenade, un sommet censé donner un coup de fouet au processus. Les deux auteurs, Hans Kribbe et Luuk van Middelaar, travaillent pour un « think tank » Bruxellois, et sont naturellement à ce titre des partisans de l’intégration européenne. Leur analyse n’en est que plus intéressante.

Les dirigeants de l’UE sont « devant le dilemme d’un objectif à la fois nécessaire et impossible à atteindre »

Dans leur conclusion, les deux auteurs estiment ainsi que les dirigeants de l’UE sont « devant le dilemme d’un objectif à la fois nécessaire et impossible à atteindre ». Chacun des deux termes mérite ici d’être précisé.

« Nécessaire » ? Aux yeux des dirigeants européens, la guerre en Ukraine a accéléré la volonté d’« arrimer » plus étroitement (un verbe plus poli qu’« annexer ») les Etats qu’ils considèrent comme faisant partie de leur zone d’influence. Usant d’un lyrisme quasiment messianique, la présidente de la Commission a ainsi déclaré : « l’élargissement répond à l’appel de l’histoire, il est l’horizon naturel de notre UE ». Repousser sans cesse l’horizon des frontières, n’est-ce pas précisément ce qui définit un empire ? Pour l’ancienne ministre allemande de la défense, « nos voisins doivent choisir » entre « la démocratie » et « un régime autoritaire », autrement dit entre le bien et le mal, entre l’UE et la Russie.

Car plus prosaïquement, les ambitions de l’élargissement sont géopolitiques. Mme von der Leyen (photo) ne s’en cache guère : l’élargissement constitue un « investissement pour notre sécurité » et une façon de « stabiliser notre voisinage ». Ce que l’étude des chercheurs précise sans fard : « maintenir d’autres acteurs géopolitiques, tels que la Russie ou la Chine, à l’écart de cette région potentiellement instable est devenu une priorité absolue ».

Des « défis incroyablement difficiles dans les années à venir »…

Mais une fois la « nécessité » expliquée, l’étude se penche sur les contradictions explosives que le processus va inévitablement provoquer. Ils répartissent ces « défis incroyablement difficiles dans les années à venir » (ce sont leurs propres termes) en cinq domaines.

Tout d’abord « la prise de décisions et les institutions ». Surgit ainsi la question de la « gouvernabilité », déjà complexe à vingt-sept, qui deviendrait quasi-impossible à trente-cinq ou plus. Dès lors, il faudrait que l’UE se réforme, en particulier qu’elle abolisse la règle de l’unanimité dans les derniers domaines où elle subsiste encore, comme la fiscalité et la politique extérieure. Berlin milite fortement pour cela, mais de nombreux petits pays s’y opposent. Problème : pour réformer les traités (comme pour accepter un nouveau membre), il faut… l’unanimité.

Le deuxième domaine concerne le budget de l’UE. Soit celui-ci est très considérablement augmenté, par le relèvement des contributions des membres actuels – une piste totalement irréaliste ; soit le même gâteau est partagé en des parts plus nombreuses et donc plus petites. Comme les pays candidats ont en gros un PIB par habitant inférieur à la moitié de la moyenne de l’UE, les bénéficiaires nets actuels (ceux qui touchent de Bruxelles plus que la contribution qu’ils versent, bien souvent les pays de l’Est), deviendraient contributeurs nets. Cela vaut pour les subventions régionales (un tiers du budget communautaire) comme pour l’agriculture (un autre tiers).

« À elle seule, l’Ukraine possède plus de 40 millions d’hectares de terres agricoles, estiment les auteurs, soit plus que l’ensemble du territoire italien, et deviendrait l’un des principaux bénéficiaires des fonds de la PAC », évidemment au détriment des membres actuels, ce qui promet des bras de fer explosifs. Tout cela s’ajoute aux centaines de milliards que nécessitera la reconstruction, selon Kiev – sans même évoquer l’issue de la guerre.

Dans le troisième domaine, intitulé « marché unique, libre circulation et emploi », les experts relèvent que « sur certains marchés, comme celui de l’agriculture, l’afflux de marchandises, de cultures et de produits moins chers pourrait également frapper les économies locales, entraînant la fermeture d’entreprises et d’exploitations agricoles ». Dès aujourd’hui, rappellent les auteurs, « la décision d’ouvrir le marché unique aux céréales ukrainiennes a déjà provoqué de vives tensions avec la Pologne et d’autres pays d’Europe de l’Est ».

Ce n’est pas tout : les écarts de main d’œuvre « pourraient aussi, à court terme, faire baisser les niveaux de salaire dans l’Union, avoir un effet corrosif sur les conditions de travail et alimenter le mécontentement sociétal et politique ».

Les auteurs rappellent que la flambée de l’immigration intra-européenne vers le Royaume-Uni, alors membre de l’UE, avait contribué au résultat du référendum de 2016 favorable au Brexit. Ils auraient pu aussi citer les milliers de délocalisations industrielles vers les pays entrants, et les centaines de milliers d’emplois ainsi perdus à l’Ouest.

Dans le quatrième domaine, « Etat de droit et démocratie », le rapport pointe la difficulté d’exiger des candidats une réglementation exemplaire, alors que Bruxelles estime que plusieurs membres actuels (Pologne, Hongrie) bafouent les critères requis…

Enfin, le dernier domaine recouvre la « sécurité extérieure ». Après avoir noté que « le centre de gravité territorial de l’Union continuera à se déplacer vers l’est, de l’Atlantique vers la mer Noire », les auteurs pointent la probabilité selon laquelle « la dépendance à l’égard des États-Unis en matière de sécurité augmentera ».

En résumé, les dirigeants européens ne peuvent résister à leur envie de « ruée vers l’Est » du fait de leurs ambitions géopolitiques, tout particulièrement face à la Russie. Mais s’engager sur cette voie provoquera à coup sûr des tensions fatales au sein des Vingt-sept.

Un défi supplémentaire, et pas des moindres, les attend : « trouver des moyens de rallier leurs propres électeurs ». Les auteurs rappellent en effet que le double Non, français et néerlandais, au projet de traité constitutionnel européen de 2005 suivait l’élargissement de 2004.

Les auteurs évoquent « la réaction populaire potentielle non seulement contre l’une ou l’autre des adhésions, mais aussi contre l’Union elle-même »

D’où ce cri d’alarme : « l’Union commence à peine à s’attaquer aux défis, aux coûts, aux risques et aux inconvénients qu’une UE élargie pourrait entraîner, sans parler de la réaction populaire potentielle non seulement contre l’une ou l’autre des adhésions, mais aussi contre l’Union elle-même ».

Sauf à faire exploser l’UE, on peut donc penser qu’il y aura, le moment venu, des dirigeants réalistes qui gèleront le processus.

Hélas !

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L’improbable horizon de l’élargissement…

Par : pierre

L’élargissement n’aura pas lieu. Cette prédiction peut apparaître paradoxale alors que la Commission a publié, le 8 novembre, ses recommandations concernant les perspectives d’adhésion à l’UE de six pays des Balkans, ainsi que de l’Ukraine et de la Moldavie.

Dans son état des lieux annuel, Bruxelles propose d’ouvrir les « négociations » avec ces deux derniers pays, auxquels avait été accordé le statut de candidat officiel en juin dernier. La même proposition est faite à la Bosnie. Pour les pays ayant déjà démarré la phase des pourparlers, la Commission  prévoit de débloquer six milliards d’euros pour accélérer les processus de « réformes » internes.

Bruxelles suggère aussi de faire franchir à la Géorgie le cran précédent, l’attribution du statut de candidat. Toutes ces recommandations sont assorties de conditions, qui seront évaluées en mars 2024. D’ici là, c’est le Conseil européen (les chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-sept) qui devra donner son feu vert lors du sommet des 14 et 15 décembre prochains.

Lors des précédentes vagues d’adhésions, lesdites « négociations » (en fait, une revue générale pour aligner les législations des pays candidats sur les obligations européennes) avaient tous pris de nombreuses années ; il s’agissait pourtant de pays plus proches des normes de l’UE. Cette fois, le processus s’annonce plus complexe encore. Son aboutissement semble en réalité improbable selon plusieurs experts de l’Union européenne.

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Pendant le drame arménien, Bruxelles continue de choyer l’Azerbaïdjan pour son gaz…

Par : pierre

Le 20 septembre, l’Azerbaïdjan a parachevé sa reprise en main du Haut-Karabakh. Cette province appartient certes administrativement à ce pays, mais elle est historiquement peuplée d’Arméniens – elle est même parfois considérée comme le berceau de la culture arménienne.

Entre cette date et aujourd’hui, soit en moins de deux semaines, plus de 100 000 habitants, soit la grande majorité de la population, ont fui l’enclave dans des conditions dramatiques, par peur des exactions redoutées de l’armée azerbaïdjanaise.

Le conflit entre l’enclave séparatiste et Bakou (la capitale azérie) remonte à l’éclatement de l’URSS (même s’il a des racines historiques séculaires). Il en est même l’une des conséquences puisque, pas plus que la guerre entre la Russie et l’Ukraine, l’affrontement armé entre forces arméniennes et azerbaïdjanaises n’aurait pu se dérouler entre Républiques alors soviétiques…

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Pendant le drame arménien, Bruxelles continue de choyer l’Azerbaïdjan pour son gaz

Par : pierre

Le 20 septembre, l’Azerbaïdjan a parachevé sa reprise en main du Haut-Karabakh. Cette province appartient certes administrativement à ce pays, mais elle est historiquement peuplée d’Arméniens – elle est même parfois considérée comme le berceau de la culture arménienne.

Entre cette date et aujourd’hui, soit en moins de deux semaines, plus de 100 000 habitants, soit la grande majorité de la population, ont fui l’enclave dans des conditions dramatiques, par peur des exactions redoutées de l’armée azerbaïdjanaise.

Le conflit entre l’enclave séparatiste et Bakou (la capitale azérie) remonte à l’éclatement de l’URSS (même s’il a des racines historiques séculaires). Il en est même l’une des conséquences puisque, pas plus que la guerre entre la Russie et l’Ukraine, l’affrontement armé entre forces arméniennes et azerbaïdjanaises n’aurait pu se dérouler entre Républiques alors soviétiques.

Le dernier affrontement massif entre ces deux pays remonte à l’automne 2020, à l’initiative de l’Azerbaïdjan. Il avait débouché sur une victoire de Bakou, fort du soutien militaire, politique et diplomatique de la Turquie, et de livraisons de nombreuses armes israéliennes.

Les combats avaient provoqué la mort de près de 7 000 militaires et civils, et des dizaines de milliers de déplacés. Ils avaient débouché sur un cessez-le-feu, conclu sous l’égide de la Russie, dont 2 000 soldats sont ensuite arrivés sur place en tant que force de paix entre les belligérants. Sur le terrain, Bakou recouvrait des territoires préalablement sous contrôle arménien. Mais le Haut-Karabakh lui-même restait administré par les Arméniens sur place, dont le rêve est le rattachement à la mère-patrie.

Pour Bakou, qui voulait récupérer le contrôle total de la région, c’était encore trop. Sentant que la situation internationale lui était favorable – Moscou ayant d’autres priorités que de faire pression pour que les deux capitales négocient – le président azerbaïdjanais lançait, en décembre 2022, un véritable blocus de l’enclave. Une manœuvre facilitée par le fait que celle-ci n’est reliée à l’Arménie que par une seule route (le corridor de Latchine). Une fois cette route bloquée, les approvisionnements de première nécessité – alimentation, médicaments… – se sont progressivement taris, plaçant la population civile dans une pénurie de plus en plus catastrophique.

Dès lors, il ne suffisait plus que de donner le coup de grâce. Le 18 septembre dernier, le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, ordonnait une ultime offensive militaire, sous couvert d’opération « anti-terroriste ». L’Arménie a alors dénoncé une « agression à grande échelle »particulièrement meurtrière.

Mais le rapport de force ne laissait aucun autre choix aux séparatistes que de capituler et de rendre les armes. Grand seigneur, Bakou a promis de garantir les droits civils et religieux aux Arméniens souhaitant rester sur place, tout en comptant que nombre d’entre eux fuiraient vers l’Arménie. C’est ce qui vient de se produire.

En France, où la communauté arménienne est fortement représentée, la plupart des forces politiques – notamment via leurs députés européens – ont eu des mots très durs vis-à-vis de du président Aliev, certains pointant les risques de « nettoyage ethnique ». Pour sa part, le chef de la diplomatie de l’UE a condamné l’offensive militaire lancée par l’Azerbaïdjan, et appelé à la reprise du dialogue. Josep Borrell est d’autant plus contrarié que Bruxelles avait parrainé des pourparlers entre Bakou et Erivan, se vantant même, en août dernier, d’être à deux doigts d’un accord.

Dépité, l’un des adjoints de M. Borrell a accusé Moscou d’être responsable de l’offensive azérie en dénonçant la passivité de la force d’interposition russe. Le calcul du Kremlin serait d’attiser la colère des courant arméniens les plus nationalistes afin de précipiter la chute de l’actuel président arménien, jugé trop pro-occidental. Une thèse reprise par Catherine Colonna, le ministre français des affaires étrangères.

Chacun a bien compris que Bruxelles ne prendrait aucune mesure de rétorsion contre Bakou

L’accusation qui pourrait bien être une diversion. Car, malgré les condamnations formelles, chacun a bien compris que Bruxelles ne prendrait aucune mesure de rétorsion contre Bakou. Et pour cause : le gaz de ce pays doit contribuer à remplacer celui que Bruxelles ne veut plus acheter à la Russie. Ainsi, en 2022, l’Union européenne a reçu 11,3 milliards de m3 de gaz azéri, contre 8 milliards l’année précédente. Et prévoit d’atteindre un rythme annuel de 20 milliards d’ici 2027.

Bref, pour l’UE, sanctionner la Russie – au détriment des consommateurs européens, victimes de prix en hausse – est la priorité. Quitte à se fournir auprès d’un pays dont les dirigeants viennent d’utiliser la force la plus brutale pour régler un problème qui aurait dû être traité de manière diplomatique comme le demandaient tant Moscou que les capitales occidentales…

Par ailleurs, l’Azerbaïdjan n’est pas vraiment un modèle du fameux « Etat de droit » dont Bruxelles se fait le chantre. Il est, de notoriété publique, rongé par la corruption, le népotisme et l’autoritarisme. Le sort des opposants politiques y est fort peu enviable.

Ce qui n’avait nullement empêché la présidente de la Commission européenne de se rendre à Bakou le 18 juillet 2022 pour y signer et fêter un nouveau protocole d’accord sur l’énergie (photo). Ursula von der Leyen n’hésitait pas alors à déclarer : « nous ouvrons un nouveau chapitre de notre coopération énergétique avec l’Azerbaïdjan, un partenaire clé de nos efforts pour abandonner les combustibles fossiles russes (…). Cependant, l’énergie n’est qu’un des domaines dans lesquels nous pouvons intensifier notre coopération avec l’Azerbaïdjan et je me réjouis de la perspective d’exploiter pleinement le potentiel de nos relations ».

Bakou, un « partenaire de confiance » ? Bel exemple du deux poids – deux mesures pratiqué par les Occidentaux en général, les dirigeants de l’UE en particulier.

Et plus tard, ceux-ci s’interrogeront gravement sur le fossé qui s’élargit entre eux et le « Sud global »…

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L’improbable retour de la Convention Giscard (éditorial paru dans l’édition du 23/05/22)

Par : pierre

Le « serment de Strasbourg ». C’est ainsi qu’Emmanuel Macron a baptisé, en toute simplicité, le discours qu’il prononça le 9 mai devant l’hémicycle des eurodéputés. Le (jusqu’au 30 juin) président du Conseil de l’UE ambitionnait ainsi de clore la « Conférence pour l’avenir de l’Europe » lancée il y a un an tout juste. Vous l’ignoriez ? Depuis des mois, 800 « citoyens européens » travaillent d’arrache-pied et ont finalement abouti à 49 « propositions citoyennes » déclinées en 325 mesures… Les participants de base ont été bien sûr tirés au sort ; ce dernier faisant décidément bien les choses, toutes les suggestions exigent fiévreusement plus d’Europe. Et ce, dans les domaines les plus variés, de la défense à l’éducation, en passant par une réforme des institutions dans un sens plus fédéral.

Comme le ridicule ne tue pas ceux qui font mine de s’extasier devant cette europhilie spontanée, le président français a plaidé pour une Europe « plus indépendante » et « plus efficace ». Le premier terme doit se traduire, selon lui, dans les domaines militaire, écologique, alimentaire, et informationnel. Quant à l’efficacité, elle doit être renforcée « par une réforme aussi de nos textes, c’est évident », et donc la convocation d’une convention de révision des traités – lointain successeur de la convention Giscard qui accoucha du projet de constitution européenne, avec le succès que l’on sait. Le président français s’est attiré les hourrah des dirigeants européens les plus fédéralistes, d’Ursula von der Leyen qui préside la Commission européenne, au président du Conseil italien, Mario Draghi, favorable à un « idéalisme fédéraliste ».

Mais à peine avait-il prononcé son discours que treize Etats membres (scandinaves, et de l’Est) publiaient une lettre commune rejetant toute perspective de modification des traités. Qu’à cela ne tienne, certaines idées macroniennes ne nécessitent pas ce détour. Il en va ainsi par exemple de la mise en place de listes transnationales pour les prochaines élections européennes. Mais il y a surtout un point qui mobilise à Bruxelles, et tout autant à Berlin : la fin des décisions prises à l’unanimité. Cette règle, qui permet à un ou quelques pays de bloquer un projet qu’ils jugent contraire à leur intérêt, ne s’applique déjà plus, en réalité, qu’en matière sociale et fiscale, et en politique étrangère.

C’est bien dans ce dernier domaine que ce verrou doit sauter, martèlent en particulier les dirigeants allemands, avec une insistance redoublée depuis la guerre en Ukraine. Et pour cause : pour l’heure, la Hongrie traîne notoirement les pieds dès lors qu’il est question de se priver du pétrole ou de gaz russe, d’autant que Budapest est soupçonné de nourrir des sentiments insuffisamment hostiles à Moscou. Mais, hors réforme des traités, passer à la règle de la majorité nécessite… l’unanimité des Vingt-sept. Improbable.

Une dernière proposition a marqué le plaidoyer du maître de l’Elysée : la création d’une « Communauté politique européenne » qui associerait aux Etats membres de l’UE actuelle les pays souhaitant la rejoindre, en particulier l’Ukraine. Car, estime le président français, leur adhésion proprement dite prendra des années voire des décennies. Agacé, le président ukrainien a déploré une intégration au rabais. Enfin, Emmanuel Macron a suggéré qu’au sein même des Vingt-sept, des pays « plus avancés » constituent des « avant-gardes », comme c’est déjà le cas pour l’euro ou Schengen.

Les prétendues nouveautés exhumées par Emmanuel Macron renvoient étrangement aux décennies 1990 et 2000

Convention pour une UE plus fédérale, Europe à plusieurs vitesses, confrontation entre partisans de l’élargissement et supporters de l’approfondissement : les prétendues nouveautés exhumées par Emmanuel Macron renvoient étrangement aux décennies 1990 et 2000. Mais aujourd’hui avec des lignes de fracture et des querelles bien plus exacerbées. Les réformes rêvées sont donc une nouvelle fois mort-nées.

D’autant que, malgré la volonté de décrire la Russie sous les traits les plus repoussants, l’UE a encore moins de charme aux yeux des peuples aujourd’hui qu’hier. Et ce sera très probablement pire demain, dès lors que les dirigeants européens s’engagent dans une voie outrageusement belliciste conduisant inexorablement à des hausses sans précédent des prix de l’énergie et à la « sobriété », faux-nez d’une austérité décuplée.

Cette dernière pourrait être imposée plus aisément si elle est habillée de vert, estime-t-on sans doute à Bruxelles. Mais ce faisant, la Commission prend surtout le risque de récolter un peu partout du jaune. Celui des gilets.

Pierre Lévy

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Bruxelles préparerait des restrictions sur la viande, et une opération navale contre le Royaume-Uni

Par : pierre

Alors que la pandémie de Covid n’est toujours pas sous contrôle, la Commission européenne prépare deux décisions qu’elle s’apprêterait à mettre en œuvre en urgence. Constatant que les Etats membres agissent plus que jamais en ordre dispersé, Bruxelles estime qu’il lui revient d’agir à travers des règlements qui, à la différence des directives, sont d’application directe au sein des Vingt-sept, sans qu’il soit besoin de lois nationales de transposition.

Le premier règlement viserait à imposer de strictes restrictions sur la consommation de viande. D’une part, le commissaire européen à la santé, la Chypriote Stella Kyriakides, a fait part de nouveaux travaux scientifiques qui montreraient des circuits de diffusion du virus jusqu’à présent insoupçonnés. Non seulement les chauves-souris, via les pangolins, seraient des pourvoyeurs massifs de Covid, mais ce serait aussi le cas de nombreux animaux d’élevage. Le boeuf, en particulier, serait suspecté, de même que le porc et l’agneau. Des présomptions existent également sur les volailles, mais les virologues bruxellois sont plus circonspects.

Mme Kyriakides n’a souhaité ni confirmer, ni démentir ces préparatifs. Mais son collègue Frans Timmermans, premier vice-président de la Commission, chargé du Pacte vert contre le changement climatique, a en quelque sorte vendu la mèche, en rappelant que la chute de la consommation de produits carnés – voire, dans un second temps, son interdiction pure et simple – constituerait « un acte majeur » concrétisant la contribution de l’Union européenne à une économie mondiale, durable et citoyenne.

« Les Européens mangent trop de viande », a lâché le politicien social-démocrate néerlandais dans un sourire, faisant ainsi écho à la phrase restée célèbre de Raymond Barre (« les Français mangent trop de chocolat »), ancien premier ministre français qui tonnait, en 1976, contre ses compatriotes rétifs à la politique d’austérité que son gouvernement s’apprêtait à mener.

Selon certaines rumeurs – qu’il convient cependant de prendre avec précaution – l’exécutif européen aurait déjà signé des contrats avec des imprimeries et des firmes logistiques pour produire des tickets de rationnement. Ceux-ci porteraient exclusivement sur la viande, a précisé une source ayant souhaité rester anonyme. Le haut fonctionnaire bruxellois a fait valoir que cette manière de procéder – qui aurait également une alternative numérique sur les smartphones – serait garante d’une stricte égalité.

Intervention militaire maritime

La deuxième décision que Bruxelles serait en train de préparer vise le Royaume-Uni. Malgré les mises en garde répétées, celui-ci continue de s’approvisionner en vaccins auprès des usines britanniques de l’anglo-suédois AstraZeneca, avec un accès prioritaire qui laisse le vieux continent de côté. Il percevrait également, via l’Irlande, des doses fabriquées en Belgique et aux Pays-Bas.

Après avoir envisagé de rétablir une frontière entre les deux Irlande, et avoir dû rétropédaler en catastrophe, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, aurait un nouveau plan afin d’interdire la Grande-Bretagne de recevoir d’autres vaccins par des voies détournées. Elle solliciterait le mécanisme baptisé Initiative européenne d’intervention (IEI). Lancée à l’initiative d’Emmanuel Macron en 2018, cette structure regroupe treize Etats membres susceptibles de mettre en commun des moyens militaires dès lors que l’UE estime qu’un engagement opérationnel serait nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix un peu partout sur le globe.

Les services de Mme von der Leyen ont effectué une expertise juridique au terme de laquelle il apparaît qu’une action déployée dans le cadre de l’IEI et qui enverrait un ensemble de navires de combat en mer d’Irlande (entre la Grande-Bretagne et l’Irlande) serait licite au regard des traités. L’Etat-major de l’UE assure que les voies maritimes de communication pourraient être ainsi strictement contrôlées, afin de restreindre l’accès de Londres aux vaccins.

Il garantit également que la Royal Navy pourrait être tenue en échec, du fait de l’effondrement cataclysmique que le pays a subi depuis le Brexit. Cette catastrophe avait été prévue par la plupart des économistes mondialisés.

NB : ces informations sont publiées ce jeudi 1er avril. Cependant, elles font écho à certains événements réels traités dans l’édition de Ruptures datée du 29 mars.

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Ursulas Arroganz unbemerkt geblieben

Par : pierre

Jenes Ereignis ist natürlich weitgehend unbemerkt geblieben. Am 16. September hielt Ursula von der Leyen eine Rede, die von der kleinen Brüsseler Blase mit Spannung erwartet wurde. Von Lissabon bis Helsinki, von Neapel bis Sofia gibt es jedoch kaum einen Menschen, der die Präsidentin der Europäischen Kommission kennt – außer vielleicht in Deutschland. Und es gibt erst recht niemanden, der sich für das interessiert, was der EU-Mikrokosmos die SOTEU-Rede nennt. SOTEU, eine Art Passwort für Insider, steht für « State of the EU », die Lage der EU also.

Es sei darauf hingewiesen, dass dieser jährliche Brauch, der vor dem EU-Parlament stattfindet, von den Vereinigten Staaten übernommen wurde. Zu einer Zeit, als die EU-Prominenz noch von den « Vereinigten Staaten von Europa » träumte – ein Traum der Oligarchie, der glücklicherweise zur Chimäre geworden ist.

Jenseits der hohlen Phrasen, die für diese Art von Übungen üblich sind (« Es liegt an uns, was wir aus unserer Zukunft machen. Es liegt an uns, welches Europa wir wollen!« ), hatten die Kommentatoren die Qual der Wahl, denn von der Leyens Rede war thematisch sehr breit gefächert.

Unter anderem sind zwei Punkte erwähnenswert. Ersterer ist die reumütige Demut vor der Natur. Für Frau von der Leyen hat COVID-19 « die Versäumnisse unseres Gesundheitssystems offengelegt » (die von der EU im Laufe der Jahre auferlegten Sparmaßnahmen, insbesondere im Bereich der öffentlichen Dienstleistungen, hätten natürlich nichts mit diesem Versagen zu tun …). Das Virus habe auch « die Zerbrechlichkeit unseres Planeten aufgezeigt, die wir jeden Tag mit dem Abschmelzen der Gletscher, den Waldbränden und heute mit einer globalen Pandemie erleben » (obwohl zwischen den ersten beiden Faktoren und dem dritten eigentlich keine tatsächliche Verbindung besteht).

All dies offenbare « die Zerbrechlichkeit von allem um uns herum« . Für die Chefin der Brüsseler Exekutive liegt also folgende Schlussfolgerung nahe: « Für Europa ist die Zeit zum Handeln gekommen« . Einige Sätze weiter hämmert sie ihren Zuhörern ein: « Es ist jetzt höchste Zeit, an die Arbeit zu gehen. » Was nicht gerade den Anschein erweckt, als handle es sich hierbei um ein Lob für ihre Vorgänger.

Und da Pädagogik ja aus der Kunst der Wiederholung besteht, drängt sie dazu, « uns zu beeilen, denn die Zukunft unseres zerbrechlichen Planeten steht auf dem Spiel« . Teil des Menüs ist der sogenannte « Green Deal », der « Grüne Pakt », der für Brüssel immer noch höchste Priorität hat. Er ist keineswegs beiseitegelegt oder abgeschwächt worden, trotz der schwersten Rezession der europäischen Volkswirtschaften seit dem Zweiten Weltkrieg und des für diesen Herbst zu erwartenden Anstiegs der Arbeitslosigkeit.

« Erst gestern erhielt ich einen Brief von 170 Wirtschaftsführern und Investoren »…

Aber Ursula von der Leyen verdient Unterstützung: « Erst gestern erhielt ich einen Brief von 170 Wirtschaftsführern und Investoren, in dem Europa aufgefordert wird, sich [bei der Reduzierung der CO2-Emissionen bis 2030] ein Ziel von mindestens 55 Prozent zu setzen« .

Ursprünglich waren 40 Prozent als Ziel vorgesehen. Die Präsidentin verpflichtete sich höchstpersönlich, dass dieses Ziel erreicht wird. Es sei daran erinnert, dass der « Grüne Pakt » schon weit vor 2030 etwa elf Millionen Arbeitsplätze in Sektoren wie Bergbau, Energie, Chemie, Stahlindustrie etc. direkt bedrohen wird, so die Einschätzung eines europäischen Gewerkschaftsführers, der selbst ein Befürworter des « ökologischen Übergangs » ist.

Aber die vor der Natur zur Schau gestellte, extreme Demut hat ihre Symmetrie in der vielfachen (leicht grotesken) Arroganz in der Weltgeopolitik. So erklärte von der Leyen wörtlich: « Europa ist entschlossen, diese Übergangszeit zu nutzen, um die Welt zu schaffen, in der wir leben wollen. Natürlich hört das nicht an unseren Grenzen auf« .

Es folgt eine Liste von Forderungen, die an China gerichtet sind – in den Bereichen Handel, Klimawandel und Menschenrechte. Im letzteren Bereich ist jedoch Russland das Thema, das den größten Teil der Rede ausmacht. Einen Ehrenplatz in ihren Ausführungen nimmt der Blogger Alexei Nawalny ein. Für die ehemalige deutsche Verteidigungsministerin verdient die These der von Moskau ferngesteuerten Vergiftung durch einen chemischen Nervenkampfstoff nicht den Funken eines Zweifels. Auch wenn die russische Führung nach wie vor die vom deutschen Militärlabor bestätigten « Beweise » verlangt.

Denn schließlich, so die Kommissionspräsidentin, hätten « wir das gleiche Muster zuvor in Georgien und der Ukraine, in Syrien und Salisbury gesehen – und bei der Einmischung in Wahlen weltweit« . Frau von der Leyen nutzte die Gelegenheit, sich denjenigen anzuschließen, die die Fertigstellung der Pipeline Nord Stream 2 infrage stellen. Sie plant auch die Einführung eines « Magnitski-Gesetzes », das dem US-amerikanischen Gesetz nachempfunden ist und schnelle sowie gezielte Sanktionen gegen Einzelpersonen ermöglichen soll.

Die Türkei – sicherlich ein Paradies für Menschenrechte – wird in diesem Zusammenhang nicht erwähnt. Sie ist ein « wichtiger Nachbar und wird es immer sein« , obwohl sie aufgefordert wird, Griechenland und Zypern nicht mit ihren militärischen Manövern und Bohrprojekten zu vergraulen.

Weder Saudi-Arabien noch Indien werden erwähnt, wichtige G20-Länder, in denen Meinungsfreiheit, religiöse Mäßigung und immenser Respekt vor oppositionellen Gegnern besonders hoch im Kurs stehen.

Andererseits hält die Kommissionspräsidentin ihre Emotionen nicht zurück, wenn es um Uncle Sam geht: « Wir sind vielleicht nicht immer mit den jüngsten Entscheidungen des Weißen Hauses einverstanden. Aber wir werden das transatlantische Bündnis immer in Ehren halten – aufgrund unserer gemeinsamen Werte und Geschichte« .

« Europa wird immer bereit sein, enge Partnerschaften mit unseren engsten Nachbarn einzugehen. Das fängt mit dem Westbalkan an. »

Schließlich gibt es noch die von der EU bezeichneten « Freunde », die Gegenstand genauerer Betrachtung sind: « Europa wird immer bereit sein, enge Partnerschaften mit unseren engsten Nachbarn einzugehen. Das fängt mit dem Westbalkan an. » Der « Westbalkan »? Der Begriff bezieht sich im Wesentlichen auf das ehemalige Jugoslawien, bei dessen Zerfall Berlin in den 1990er-Jahren eine Schlüsselrolle spielte. Von der Leyen weiter: « Die Zukunft der gesamten Region liegt in der EU. Wir haben dieselbe Geschichte und teilen dasselbe Schicksal. »

Das Gute am « Schicksal » ist, dass es per Definition jenseits der menschlichen Entscheidungsmöglichkeiten liegt – wer würde es wagen, sich einem solch transzendenten, um nicht zu sagen göttlichen Willen entgegenzustellen?

Denn nach einer allgemein akzeptierten Definition ist das Schicksal « eine Macht, die nach bestimmten Vorstellungen den Ablauf von Ereignissen im Leben des Menschen, die als von höheren Mächten vorherbestimmt werden, mithin auch der Entscheidungsfreiheit des Menschen entzogen sind, unwiderruflich bestimmen würde ». So bestanden die Verfasser der Verträge darauf, die Europäische Union als « Schicksalsgemeinschaft » zu definieren, um ihre Existenz vor dem Ärger, Protest und menschlichem Widerstand zu schützen.

Die « SOTEU » 2020 schloss mit einer « Lektion fürs Leben »: « sich niemals von seinem Weg abbringen zu lassen« .

Auch und vor allem, möchte man fragen, wenn die Hindernisse die Völker selbst sind?

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« SOTEU » : l’arrogance d’Ursula passée inaperçue

Par : pierre

Lors de son discours du 16 septembre, la chef de l’exécutif bruxellois a plaidé pour l’humilité devant la nature, mais vanté les ambitions géopolitiques de l’Union européenne.

L’événement est évidemment passé inaperçu. Le 16 septembre, Ursula von der Leyen a prononcé un discours que toute la petite bulle bruxelloise attendait avec fébrilité. Mais, au-delà de celle-ci, il n’y a pas, de Lisbonne à Helsinki ou de Naples à Sofia, une personne sur mille – hors sans doute en Allemagne – qui connaisse la présidente de la Commission européenne. Et, a fortiori, qui s’intéresse à ce que le microcosme communautaire baptise discours SOTEU (pour « State of the EU »), une sorte de mot de passe pour initiés.

A noter que cette coutume annuelle organisée devant l’europarlement avait été directement copiée de la pratique en vigueur aux Etats-Unis. C’était du temps où les dirigeants européens rêvaient encore des « Etats-Unis d’Europe », un cauchemar mortifère pour les peuples devenu heureusement une chimère.

Au-delà du lyrisme creux, habituel pour ce type d’exercice (« l’avenir sera ce que nous en ferons. Et l’Europe sera ce que nous voulons qu’elle soit »), les commentateurs avaient l’embarras du choix tant le tour d’horizon était large.

Deux points parmi d’autres méritent d’être relevés. Le premier est l’humilité repentante devant la nature – un couplet typique de l’idéologie dominante. Pour Mme von der Leyen, le Covid-19 a « mis à nu les faillites de notre système de santé » (l’austérité imposée par l’UE depuis des années, notamment en matière de services publics, n’est naturellement pour rien dans cette faillite…) ; il a aussi « mis en lumière la fragilité de notre planète, que nous constatons chaque jour avec la fonte des glaciers, les incendies de forêts et, aujourd’hui, une pandémie mondiale » (et qu’importe si strictement aucun lien n’a été établi entre les deux premiers éléments et le troisième).

Bref, tout cela révèle « la fragilité de tout ce qui nous entoure »… Dès lors, pour la chef de l’exécutif bruxellois, la conclusion évidente s’impose : « pour l’Europe, le moment est venu d’agir ». Quelques instants plus tard, elle martèlera à nouveau : « il est temps désormais de nous mettre au travail ». Ce qui n’est pas de la dernière élégance pour ses prédécesseurs.

Et comme la pédagogie est l’art de la répétition, elle y insistera derechef, exhortant ainsi à « accélérer car il y va de l’avenir de notre fragile planète ». Avec, au menu, le « Pacte vert » (« Green Deal »), la plus haute priorité bruxelloise. Celui-ci n’a nullement été mis de côté ou assoupli, alors même que les économies européennes connaissent leur pire récession depuis la seconde guerre mondiale, et que le chômage va encore monter en flèche cet automne.

Mais Ursula von der Leyen a les soutiens qu’elle mérite : « pas plus tard qu’hier, j’ai reçu de 170 chefs d’entreprise et investisseurs une lettre appelant l’Europe à fixer un objectif d’au moins 55% » de réduction des émissions de CO2 d’ici 2030 (initialement, c’était 40%). Une consigne que la présidente s’est engagée à réaliser. On peut rappeler que le « Pacte vert » va menacer 11 millions d’emplois directs (mines, énergie, chimie, sidérurgie…), et ce, bien avant 2030, selon l’estimation d’un dirigeant syndical européen, lui-même pourtant partisan de la « transition écologique ».

« L’Europe est résolue à construire le monde dans lequel nous voulons vivre. Bien sûr, cela ne s’arrête pas à nos frontières »

Mais l’humilité extrême affichée devant la nature a son symétrique : l’arrogance démultipliée (et légèrement grotesque) dans la géopolitique mondiale : « L’Europe est résolue à profiter de cette période de transition pour construire le monde dans lequel nous voulons vivre. Bien sûr, cela ne s’arrête pas à nos frontières ».

Suit une liste d’exigences adressées à la Chine : sur le plan commercial, sur le plan climatique, et sur celui des droits de l’Homme. Mais dans cette dernière matière, c’est la Russie qui fait l’objet de la plus grande partie du discours. Avec pour hôte d’honneur le blogueur et avocat Alexei Navalny. Pour l’ancienne ministre allemande de la Défense, la thèse de l’empoisonnement télécommandé par Moscou via un agent chimique neurotoxique ne fait pas l’ombre du moindre doute. Même si les dirigeants russes réclament toujours les « preuves » attestées par le laboratoire militaire allemand.

Du reste, « nous avons pu observer ce type de pratiques en Géorgie et en Ukraine, en Syrie et à Salisbury – sans parler de l’ingérence électorale dans le monde entier. Ces pratiques ne changent pas ». Mme von der Leyen en profite pour joindre sa voix à ceux qui mettent l’achèvement du gazoduc Nord Stream II dans la balance. Et projette la mise en place d’un « Magnitisky Act » copié de la loi américaine permettant des sanctions rapides et ciblées contre des personnalités.

La Turquie – certainement un paradis pour les droits de l’Homme – n’est pas évoquée sur ce plan. Elle est un « voisin important et le sera toujours », à qui il est cependant demandé de ne pas intimider la Grèce et Chypre par ses manœuvres militaires et projets de forage.

Pour s’en tenir aux seuls pays du G20, ni l’Arabie saoudite, ni l’Inde ne sont non plus citées – autres grands pays où la modération religieuse, la liberté d’expression et l’immense respect des opposants sont particulièrement célébrés.

En revanche, la présidente de la Commission ne cache pas son émotion dès qu’il s’agit de l’Oncle Sam : « nous ne sommes peut-être pas toujours d’accord avec les décisions récentes de la Maison-Blanche. Mais nous chérirons toujours l’alliance transatlantique – fondée sur des valeurs et une histoire communes, et sur un lien indéfectible entre nos peuples ».

Pour avoir droit à la compassion bruxelloise, il vaut donc certainement mieux se nommer Alexei Navalny que George Floyd. Il est vrai qu’on n’a pas vraiment laissé la chance au second de passer sa convalescence à la Charité.

« L’avenir [de l’ex-Yougoslavie] est bien dans l’UE. Nous partageons la même histoire et la même destinée »

Enfin, il y a une proie, pardon, des amis qui font l’objet d’une attention plus à portée de mains : « l’Europe sera toujours prête à établir des partenariats solides avec ses voisins les plus proches. Cela commence par les Balkans occidentaux ». Les « Balkans occidentaux » ? Ce terme désigne pour l’essentiel ce qui s’appelait jadis la Yougoslavie dans l’éclatement de laquelle Berlin avait joué un rôle clé durant la décennie 1990.

Pour la patronne de Bruxelles, « l’avenir de toute cette région est bien dans l’UE. Nous partageons la même histoire et la même destinée ». Ce qu’il y a de bien, avec la « destinée », c’est qu’elle échappe par définition aux choix humains – qui oserait s’opposer à une telle volonté transcendante, pour ne pas dire divine ?

Car selon une définition couramment admise, le destin est « une puissance qui, selon certaines croyances, fixerait de façon irrévocable le cours des évènements ». Ainsi, les rédacteurs des traités ont tenu à définir l’Union européenne comme une « communauté de destin », histoire de mettre l’existence de celle-ci à l’abri des colères, des contestations et des résistances humaines.

Le « SOTEU », cru 2020, s’est conclu par une « leçon de vie » : « ne jamais se laisser bloquer par les obstacles sur son chemin ». Même – et surtout – si lesdits obstacles sont les peuples eux-mêmes ?

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Die Doppelverordnung der Untergangspropheten (Leitartikel in der April-Ausgabe von Ruptures)

Par : pierre

Noch mehr Europa. Noch mehr Grün. Es ist das doppelte Wundermittel, das die herrschende Ideologie unablässig für das « Danach » propagiert. Jeden Tag werden leidenschaftliche – aber doch eher verzweifelte – Texte von « großen Intellektuellen » oder « Aktivisten für eine nachhaltige Zukunft » in der französischen Presse publiziert, die meinen, die Epidemie liefere den unwiderlegbaren Beweis für ihre schon längst erstellten Dogmen. Der öffentlich-rechtliche Sender France 2 hat sich in dieser Hinsicht selbst übertroffen, als er, mit dem Präsidenten der Europäischen Kommission als Ehrengast, am 16. April eine Sondersendung ausstrahlte, in der der liberal-ökologische Konsens bis zum Überdruss zelebriert wurde.

Im gleichen Geist appellieren ein gutes Dutzend europäischer Umweltminister: Wir müssen uns « der Versuchung widersetzen, kurzfristige Lösungen zu finden, die die Wirtschaft der EU auf Kohlenstoffbasis belässt« . Kurz gesagt, keine wirtschaftliche Wiederbelebung, wenn sie Öl benötigt. Pech eben für den europäischen Automobilmarkt, der schon im März um 55 % zurückgegangen ist, mit allen Folgen, die sich daraus für die Beschäftigung ergeben könnten. Ganz zu schweigen von der Stahlindustrie: In Fos-sur-Mer, in der Nähe von Marseille, wurden zum Beispiel die Hochöfen stillgelegt – « vorübergehend », wie es offiziell heißt.

Gleichzeitig wurde eine charmante europäische Koalition rund um einen Text geknüpft, die « politische Entscheidungsträger, Führungskräfte aus Wirtschaft und Finanzen, Gewerkschaften und NGOs » beschwört, eine « grüne » wirtschaftliche Wiederbelebung anzustreben. Zu den Unterzeichnern gehören u.a. die französische Umweltministerin und ihre deutsche Kollegin, Laurent Berger als Präsident des Europäischen Gewerkschaftsbundes (er ist auch Vorsitzender der französischen CFDT), die Vorsitzenden der sozialdemokratischen, grünen und liberalen Fraktionen im Europarlament, führende Vertreter von NGOs, sowie 37 Generaldirektoren von Großunternehmen wie Renault, Unilever, Danone, L’Oreal und Ikea.

Sicherlich zufällig erschien auf deutscher Seite am 27. April ein Appell mit der gleichen Forderung, unterzeichnet von mehr als sechzig Chefs der größten Unternehmen, darunter bekannte Freunde der Arbeiterklasse: Thyssen-Krupp, Bayer-Monsanto, Allianz und Deutsche Telekom.

In einem anderen Text verkünden Dutzende von Persönlichkeiten, die sich seit langem für die EU einsetzen, feierlich: « Die Zeit ist reif für einen neuen europäischen Patriotismus« . Es ist erstaunlich, wie das unglückliche Virus die Phantasie anregen kann… Die EU sei « zum Schutz der Bürger da » lautet die « erste Botschaft » der Autoren, und die « zweite Botschaft« , die EU garantiere « Einheit, Stärke und Stabilität« , insbesondere für die Eurozone. Hätte denn irgendjemand Zweifel?

« diese Krise muss in einen heilsamen Schock verwandelt werden, den wir so dringend brauchen » – General Vincent Desportes

Eine besondere Auszeichnung geht an einen französischen General. Der inzwischen pensionierte Vincent Desportes, kritisierte in der Le Monde vom 15. April « die Erhöhung der Ausgaben für Sozialleistungen und den sozialen Frieden », die bis heute schwer auf Europa lasten würde. Offensichtlich hat sich der Alte Kontinent und insbesondere Frankreich bisher in ausschweifender Kaufkraft geaalt. Nun, für den ehemaligen Direktor der französischen Kriegsschule muss « diese Krise in einen heilsamen Schock verwandelt werden, den wir so dringend brauchen« . Man wird wohl die letzten Worte zu schätzen wissen.

Dem hochrangigen Offizier kommt das Verdienst zu, das Wesen des liberal-ökologisch-reaktionären Denkens unverblümt auszudrücken: « Der Mythos des ewigen Fortschritts ist gerade zusammengebrochen« . Das geniale Virus brachte ihm eine zweite « Offenbarung » « Europa (…) ist nicht immun gegen die Welt: Weder die Wissenschaft, noch die Zivilisation und noch weniger unsere nationalen Rückzugsgebiete machen uns unverwundbar« . Die Assoziation dieser drei Plagen in ein und demselben Satz ist schon auffällig.

Seine Schlussfolgerung à la Macron: Europa muss seine « strategische Autonomie » zurückgewinnen (nanu, warum « zurück »?). Der ehemalige Absolvent des United States Army War College hat den Glauben an Uncle Sam verloren: « Der Gefreite Ryan wird nie wieder zurückkehren, um an den Stränden Frankreichs zu sterben ». Eine « strategische Autonomie » sei in Zukunft unabdingbar, vor allem wegen des « Zivilisationsniveaus » in Europa, das für den General offenbar höherwertig ist als jenes in anderen Regionen der Welt – wenn denn seine Worte irgendeinen Sinn ergeben sollen.

Der Weg ist also vorgegeben: Unsere Nationen müssen « ein bisschen Souveränität gegen die Schaffung einer autonomen Konföderation eintauschen« , die zu « einer europäischen Souveränität mit respektierten, aber begrenzten nationalen Souveränitäten » führt. Mit « ein bisschen Souveränität » (sic!) eine « begrenzte Souveränität » (sic!) zu erlangen – das verdient es sicherlich, der Nachwelt überliefert zu werden.

Einstweilig beendet Vincent Desportes seinen Tagesbefehl mit einer Anweisung, die keinen Ungehorsam duldet: « Ein bisschen Haltung, Europa! Ein bisschen Stolz, Europa!« .

Machen Sie sich etwa Sorgen um die Moral der Truppen, Herr General?

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La double injonction des prophètes de malheur (éditorial de l’édition d’avril)

Par : pierre

Editorial paru dans l’édition de Ruptures du 28 avril (les abonnés qui n’auraient pas encore reçu cette édition peuvent signaler ce dysfonctionnement postal par un message au journal).

Encore plus d’Europe. Encore plus de vert. Voilà la double recette miracle assénée sans relâche par l’idéologie dominante pour penser « l’après ». Chaque jour paraissent des textes enflammés – en réalité désespérés – de « grands intellectuels » ou de « militants de l’avenir durable » qui croient voir dans l’épidémie la preuve irréfutable de leurs dogmes préexistants. La chaîne de service public France 2 s’est à cet égard surpassée en diffusant, le 16 avril, une émission spéciale où le consensus libéralo-environnemental ruisselait jusqu’à l’écoeurement, avec comme invitée d’honneur la présidente de la Commission européenne.

On relèvera dans le même esprit l’appel lancé par une bonne douzaine de ministres européens de l’environnement : il faut résister, supplient-ils, à « la tentation de solutions de court terme qui maintiendraient l’Union dans une économie carbonée ». Bref, pas de relance si cela doit consommer du pétrole. Et tant pis pour le marché automobile, qui a chuté en mars de 55% (de 72% en France), avec toutes les conséquences pour l’emploi qui pourraient s’en suivre. Pour ne rien dire de la sidérurgie, de Fos sur Mer par exemple, dont les hauts-fourneaux ont été arrêtés, officiellement provisoirement.

Au même moment, une charmante alliance européenne s’est nouée autour d’un texte exhortant « les décideurs politiques, les chefs d’entreprise et les dirigeants financiers, de syndicats, d’ONG » à viser une « relance verte ». Outre l’eurodéputé Vert Pascal Canfin, on trouve parmi les signataires le ministre français de la transition écologique ainsi que sa collègue allemande, Laurent Berger en sa double qualité de patron de la CFDT et de la Confédération européenne des syndicats, les présidents des groupes socialiste, Vert et libéral à l’europarlement, des responsables d’ONG, ainsi que trente-sept PDG, dont ceux de Renault, d’Unilever, de Danone, de L’Oreal ou d’Ikea.

Dans un autre texte, plusieurs dizaines de personnalités engagées de longue date en faveur de l’UE claironnent solennellement : « le temps est venu d’un nouveau patriotisme européen ». C’est fou ce que le malheureux virus peut stimuler les imaginations. Pour les auteurs, « le premier message » est que l’UE « est là pour protéger » ; et le second est qu’elle « garantit l’unité, la force et la stabilité », notamment pour la zone euro. Il y aurait un doute ?

Pour le général Vincent Desportes, il faut « transformer cette crise en choc salutaire dont nous avions tant besoin »

Palme spéciale pour le général Vincent Desportes qui dénonce, dans les colonnes du Monde (15/04/20) « l’augmentation des dépenses et de la paix sociales » qui a plombé l’Europe jusqu’à présent. Sans doute le Vieux Continent et la France en particulier se gobergeaient-ils jusqu’ici dans une débauche de pouvoir d’achat. Eh bien, pour l’ancien directeur de l’Ecole de guerre, il faut « transformer cette crise en choc salutaire dont nous avions tant besoin ». On savourera ces derniers mots.

Le tragique troupier galonné a le mérite d’exprimer sans détour l’essence de la pensée libéralo-environnementalo-réactionnaire : « le mythe du progrès perpétuel vient de s’effondrer ». Deuxième « révélation » qu’a permis le virus, décidément bien inspiré : « l’Europe (…) n’est pas à l’abri du monde : ni la science, ni la civilisation et encore moins nos repliements nationaux ne nous rendent invulnérables ». On remarquera l’association dans la même phrase de ces trois fléaux.

D’où la très macronienne conclusion : l’Europe doit reconquérir son « autonomie stratégique » (tiens, pourquoi « re » ?). C’est que l’ancien diplômé du Collège militaire US a perdu foi dans l’Oncle Sam : « le soldat Ryan ne reviendra plus jamais mourir sur les plages de France ». Une « autonomie stratégique » qui s’impose, à l’avenir, notamment du fait du « niveau de civilisation » européen. Que le général juge sans doute supérieur aux autres contrées du globe, si les mots ont un sens.

Le chemin est tout tracé : il faut que nos nations « échangent un peu de souveraineté contre l’édification d’une confédération autonome », le tout menant à « une souveraineté européenne forte de souverainetés nationales respectées mais contenues ». Ce troc d’« un peu de souveraineté » (sic !) aboutissant à une « souveraineté contenue » (re-sic !) mérite assurément de passer à la postérité.

En attendant, l’adjudant-chef Desportes termine son ordre du jour comminatoire par une consigne à laquelle il n’est pas question de désobéir : « un peu de bon sens, l’Europe !, un peu de tenue, l’Europe !, un peu de fierté, l’Europe ! ».

On s’inquiète du moral des troupes, mon général ?

 

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Derrière le « Pacte Vert » et l’idéologie verte : les pires projets des élites mondialisées

Par : pierre

Nous avons sollicité nos contributeurs extérieurs pour imaginer de quoi l’année 2020 pourrait être faite. Certains ont adopté une approche géopolitique (Michel Raimbaud), économique (Jean-Michel Quatrepoint), ou politique (Marie-Françoise Bechtel).

Deux d’entre eux ont choisi de traiter d’écologie. Le texte de Pierre Vermeren évoque les prochaines élections municipales, et estime qu’une politique favorable à l’environnement, qu’il juge nécessaire, n’est pas sincèrement intégrée aux différents programmes proposés. Celui de Robert Charvin juge, de son côté, qu’écologie et capitalisme sont incompatibles.

Le point de vue du journal, sous la plume de Pierre Lévy (ci-dessous), s’inscrit en revanche dans une tout autre approche : il analyse l’idéologie environnementaliste, liée dès le départ aux élites européistes et mondialisées, comme une tentative totalitaire, anti-progrès et régressive secrétée par un système en bout de course.

Le débat n’est pas clos…

 

Par Pierre Lévy, rédacteur en chef du mensuel Ruptures

Le « Pacte vert » (« Green Deal » en sabir bruxellois) est désormais l’axe majeur des institutions européennes. Il a été présenté en décembre dernier par Bruxelles. Le 14 janvier, la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen en a précisé le financement, avant que ne soit lancé, au printemps, une « grande loi climatique », qui s’imposera aux Etats membres. Il est question de milliers de milliards d’euros. Ce vaste « plan de bataille écologique » va devenir, selon Mme Von der Leyen, la « marque de fabrique » de l’UE.

Bien sûr, il s’est trouvé de nombreuses voix pour estimer que tout cela n’allait pas assez loin. D’autres, ou les mêmes, ont accusé la Commission d’escroquerie, de « faire semblant » de se convertir à l’écologie en cédant à l’air du temps.

Le discours environnementaliste structure l’idéologie des élites mondialisées, dont Bruxelles est un des plus beaux spécimens

Il n’en est rien. Le discours environnementaliste structure en profondeur l’idéologie des élites mondialisées, dont Bruxelles est un des plus beaux spécimens. Il trouve ses racines il y a plusieurs décennies. Ainsi, un cénacle issu de l’OCDE (organisation des pays occidentaux les plus riches), connu sous le nom de Club de Rome, publiait en 1972 un rapport resté célèbre intitulé « Les limites de la croissance ».

Ce texte fut vivement soutenu par Sicco Mansholt, président de la Commission européenne en 1972-1973. M. Mansholt, généralement considéré comme un des « pères de l’Europe », plaidait déjà pour la décroissance.

Et si l’on a un doute sur le rôle moteur des dirigeants, politiques, financiers et oligarques, dans la promotion des thèses pro-climat et pro-environnement, il n’est pas interdit de remarquer que l’emblématique multimilliardaire américain Michaël Bloomberg était encore récemment le représentant de l’ONU pour le climat. Il vient d’être remplacé à ce poste par le Canadien Mark Carney, qui fut président de la Bank of England jusqu’à janvier 2020. L’homme s’était rendu célèbre par ses prévisions apocalyptiques en cas de Brexit. Il a désormais un nouveau job pour déployer ses talents de prophète des catastrophes annoncées mais fantaisistes.

Distinguer deux pans

Il convient de distinguer d’emblée deux pans de la réflexion en ce qui concerne le « réchauffement climatique » : d’une part, la recherche et la confrontation scientifiques ; d’autre part l’analyse et la compréhension des enjeux qui y sont liés : économiques, sociaux, politiques, géopolitiques, démocratiques, voire philosophiques.

Le premier débat, sur la réalité dudit dérèglement climatique et sur ses causes possibles, relève des scientifiques eux-mêmes. On ne l’abordera donc pas ici. Tout juste peut-on rappeler qu’il n’y a pas d’unanimité parmi les chercheurs qui établirait sans conteste l’existence du réchauffement d’origine anthropique – sauf à traiter tous les scientifiques dissidents de fantaisistes, d’ignorants ou d’imposteurs.

Un esprit rationnel devrait être effrayé par l’omniprésence totalitaire de la thèse dominante si martelée qu’il devient difficile de sortir du cadre de pensée imposé

En revanche, tous les citoyens sont parfaitement légitimes à s’inscrire dans l’autre débat, celui qui tente de cerner les tenants et aboutissants des campagnes actuelles. Du reste, un esprit rationnel et critique devrait être effrayé par l’omniprésence totalitaire de la thèse dominante, serinée matin, midi et soir dans la presse écrite et audio-visuelle, au point qu’il devient difficile de sortir du cadre de pensée imposé. Si l’on écoute bien certains militants écolos, on ne devrait plus être très loin de la mise en place du crime de « négationnisme climatique », voire des sanctions pénales afférentes.

Cinq dossiers, au moins, peuvent être évoqués qui mettent en lumière le lien intrinsèque entre les intérêts de l’oligarchie occidentale mondialisée, et l’idéologie pro-climat. On ne peut ici citer que les têtes de chapitre, chacun d’entre eux méritant à l’évidence de plus larges développements.

Premier dossier : le social

Le premier pourrait être ainsi résumé : la sobriété jugée nécessaire pour « sauver la planète » est en réalité le faux nez de l’austérité que les forces de l’argent entendent imposer aux peuples. Elle a ses relais, évidemment, dans nombres de succursales de la « gauche » et est parfois prônée sous le nom de « sobriété heureuse ». A tous ceux qui s’inquiètent de la manière de boucler leur fin de mois, on agite la menace de la fin du monde. La « surconsommation », y compris d’énergie, est pointée du doigt, sur le thème : plutôt mieux être qu’avoir plus.

On notera que cet état d’esprit n’est pas nouveau dans l’idéologie dominante. Le jadis médiatique journaliste François de Closets a bâti l’essentiel de sa carrière éditoriale en dénonçant le peuple qui voudrait « Toujours plus », titre de l’un de la vingtaine d’ouvrages parus depuis 1970 sur ce même thème.

L’antagonisme entre ceux qui angoissent sur la « fin du mois » et ceux qui alertent sur la « fin du monde » a fait irruption en novembre 2018 : le mouvement des Gilets jaunes est né du refus de la taxe qu’a tenté d’imposer le gouvernement sur les carburants, dans le but avoué de « modifier les comportements ».

Des centaines de milliers d’emplois directs sont menacés, au nom du verdissement de l’économie

Le pouvoir d’achat de millions de travailleurs n’est pas seul en ligne de mire. Des centaines de milliers d’emplois directs sont également menacés, au nom du verdissement de l’économie – censé créer d’autres postes de travail, mais plus tard. Une réalité qui se retrouve aux quatre coins de l’Union européenne. Ce n’est pas par hasard si la Commission prévoit un Fonds spécialement consacré à « accompagner » les futurs travailleurs privés de leur emploi et les futures régions sinistrées.

Et il n’est sans doute pas anodin de remarquer que les catégories les plus menacées sont les plus emblématiques de la force et de l’histoire ouvrières : mineurs (en France, on avait trouvé d’autres prétextes pour liquider précédemment cette activité), sidérurgistes, ouvriers des industries chimique et de l’automobile… Un peu comme si dans l’inconscient des dominants, il s’agissait de se débarrasser des usines trop « carbonées »… et dans le même temps des classes dangereuses, surtout là où elles ont sont concentrées et combatives.

Deuxième dossier : la géopolitique

Le deuxième domaine est d’une autre nature. Il tient à une maladresse du Tout-puissant : celui-ci a eu le mauvais goût de répartir les hydrocarbures en en confiant une large part aux Etats non alignés sur l’Occident… Ainsi, la Russie, l’Iran, le Venezuela, pour ne citer que ces trois exemples, sont les pays où sont concentrées les plus grandes réserves pétrolières et/ou gazières.

On peut donc imaginer que dans les sphères dominantes, on ne serait pas forcément mécontent que ces Etats soient petit à petit privés des ressources que leur procurent les exportations d’énergie carbonée. En diabolisant cette dernière, on affaiblit ainsi les positions et les moyens financiers des adversaires ou ennemis désignés.

Troisième dossier : la gouvernance mondiale

Le troisième dossier est à forte connotation idéologique. On nous le répète encore et encore : la catastrophe climatique ne peut être combattue qu’à l’échelle mondiale. Un mantra providentiel pour tous ceux qui militent, depuis des décennies, pour une gouvernance mondialisée (rêve ultime des puissants) et ses déclinaisons en grands blocs régionaux, tels que l’UE.

Bref, cela tombe à pic : pour résoudre les grands problèmes de notre temps, l’échelle des Etats nations serait dépassée. Du coup, la thèse a toutes les apparences de l’évidence : le réchauffement n’a pas de frontières, il faut donc oublier les vieilles lunes de la souveraineté nationale.

Quatrième dossier : la démocratie

La quatrième dimension des impératifs climatiques imposés concerne un enjeu qui n’est pas tout à fait anodin : la démocratie. Car les exemples le montrent : les classes populaires, les peuples, semblent ne pas accepter de se soumettre à la doxa environnementaliste, en tout cas pas assez vite pour éviter les catastrophes annoncées.

Pire, ils seraient prêts à punir électoralement les gouvernements trop zélés en matière de lutte contre le CO2. Et comme ceux-ci auraient la faiblesse de craindre les réactions de leurs électeurs, les mesures nécessaires – résumées dans la formule : « il faut changer radicalement notre mode de vie » – sont éternellement retardées…

La conclusion s’impose : la démocratie est devenue un obstacle à la survie de la planète. Certains l’affirment ouvertement. D’autres, qui ne peuvent être aussi brutaux, s’interrogent gravement. Car si notre survie collective est réellement menacée, la démocratie doit passer après. C’est imparable – et c’est surtout, miraculeusement, une aubaine pour les puissants du monde, qui font de moins en moins bon ménage avec la souveraineté populaire (la Commission Trilatérale avait déjà pointé les « problèmes » de la démocratie dès les années 1970 – l’époque du Club de Rome).

Dernier dossier : la remise en cause du progrès

Enfin, le cinquième enjeu est probablement le plus fondamental, et a trait au progrès. Il ne peut échapper à personne que l’« air du temps » est à la remise en cause fondamentale de ce dernier. Le progrès sous toutes ses dimensions – sociale (pouvoir d’achat, protection sociale, services publics…), économique (croissance), culturelle, scientifique, technologique… – serait, au choix, suspect, coupable, risqué, ou arrogant.

Ici et là, on s’interroge gravement : ne serait-on pas allé trop loin ? Le dogme dominant pourrait ainsi s’énoncer : « veuillez laisser la planète dans l’état où vous l’avez trouvée ». Et pour donner une dimension émotionnelle supplémentaire à l’affaire, on convoque « nos enfants », « nos petits enfants » auprès de qui nous portons une lourde responsabilité. Exactement le même argument que pour la dette…

La palette est vaste, des collapsologues prônant ouvertement le retour à la charrue (quand ce n’est pas le suicide préventif de l’humanité, seule méthode pour laisser survivre la planète) jusqu’aux plus prudents qui se contentent de mettre en cause chaque nouveau projet d’infrastructure (ferroviaire, routière, aéroportuaire, hydraulique – il y a toujours un castor de la pampa qu’il faut sauver). Avons-nous vraiment besoin de tout cela ? murmure-t-on de différents bords.

Certes, la querelle entre partisans d’une vision prométhéenne de l’humanité et les tenants d’un antique âge d’or (qui n’a jamais existé) n’est pas nouvelle. Mais l’incapacité progressive du système actuel dominant à créer de la richesse (autre que pour les seuls actionnaires) a pour conséquence que ce système secrète des idéologies régressives, telle la décroissance, qui n’est que l’habillage bio de la récession.

La conception du rapport entre l’homme et la nature est le terrain privilégié de cette évolution littéralement réactionnaire. Il faudrait « préserver », « défendre », « respecter » la nature. Pire : l’idéologie dominante a désormais mis une équivalence entre « naturel » et « bon » (l’abondance nauséeuse de la publicité en ce sens l’illustre). Faut-il rappeler que ce culte du « naturel » n’a pas toujours été célébré ?

Mesure-t-on l’absurdité d’une telle injonction ? La nature regorge de produits toxiques, alors que les produits les plus artificiels (médicaments, chimie) représentent un atout irremplaçable pour le bien-être collectif et individuel. Même si, évidemment, on doit s’opposer aux pollutions issues de la recherche effrénée de profit – et non du progrès en tant que tel.

Ne peut-on concevoir l’épopée humaine comme une suite de combats pour découvrir et inventer, pour s’émanciper des « contraintes de la nature » ?

Plus généralement, ne peut-on concevoir l’épopée humaine comme une suite de combats pour découvrir et inventer, pour s’émanciper des « contraintes de la nature » ? Des premiers humains qui construisent un toit protecteur pour se mettre à l’abri des caprices de la nature, à l’époque actuelle où l’on envoie une sonde tutoyer le soleil, l’Homme a toujours cherché à se libérer des contraintes pour rendre possible ce qui était impossible.

L’humanité n’a-t-elle pas précisément pour caractéristique d’agir contre-nature ?

N’est-ce pas du reste ce qui pourrait définir l’humanité ? Cette dernière n’a-t-elle pas pour caractéristique d’agir contre-nature ? A commencer par cette lutte millénaire pour remettre en cause une des principales caractéristiques de la nature : la loi de la jungle.

Il y a donc d’un côté ceux qui respectent la nature, en particulier l’une de ses constantes (même si pas exclusive) : les plus forts dominent les plus faibles, les prédateurs se nourrissent des proies. Et de l’autre ceux qui ont à cœur le combat pour l’égalité – combat qui court, si l’on ose ce raccourci, du soulèvement des esclaves avec Spartacus aux salariés actuels en lutte pour les retraites.

En prétendant « sauver la planète » des menaces que l’activité humaine, sous forme de CO2, ferait planer sur elle, les institutions européennes ont choisi leur camp. On est en droit de choisir celui d’en face, qui se propose de ne pas limiter le champ des possibles à l’existant. Ou, à tout le moins, d’accepter le débat sans invective et sans délire apocalyptique.

 

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En 2020, une nouvelle Commission intrusive et démissionnaire

Par : Grégoire

La nouvelle Commission d’Ursula von der Leyen marquerait le retour du politique en faveur d’une Europe-puissance ? Un scénario improbable pour 2020…

Par Marie-Françoise Bechtel, vice-présidente de la fondation Res Publica

En 2020, l’installation de la nouvelle Commission européenne, née des amours contrariées d’une majorité parlementaire qui croyait détenir le candidat légitime et de deux gouvernements nationaux désirant le passage en force, signerait-elle le retour au primat du politique ? L’auteur de ces lignes ne demanderait qu’à le croire : ne pourrait-on passer, après tout, par profits pertes l’ADN démocratique douteux d’un organe – la Commission – mi-législatif, mi-exécutif, qu’aucune instance légitime ne contrôle ? Et ce pour permettre enfin à l’Union européenne de définir le périmètre d’une souveraineté retrouvée ?

Cette évolution serait ô combien utile : dans le monde instable qui est celui de ce premier tiers du XXIeme siècle, il faut considérer l’enjeu de la puissance économique, voire financière, d’une zone qui, potentiellement, pourrait être un acteur majeur. Cette analyse est indispensable au regard du bénéfice que pourrait en tirer nos peuples.

Le monde est encore dominé par une puissance américaine plus arrogante que jamais, plus dangereuse aussi pour la paix

Las, les ententes gouvernementales à deux ou trois Etats (à les supposer réelles) ne suffiront pas à reverser la tendance. Dans un monde encore dominé par une puissance américaine plus arrogante que jamais, plus dangereuse aussi pour la paix, les projets et annonces de la nouvelle Commission restent marqués, avec un style différent, par la soumission à l’extérieur de l’UE et l’arrogance à l’intérieur.

Restriction des aides publiques

C’est Margrethe Vestager, vice-présidente, chargée de la concurrence et du numérique qui d’emblée (1) annonce, en guise de nouvelle politique de la concurrence, la révision du système de prohibition des aides publiques. Fort bien ! se dit-on… Car le recours à de telles aides constituent un sujet majeur pour le développement économique des territoires nationaux et régionaux. Hélas ! Il ne s’agit pas, dans l’esprit de la Commissaire, de libérer les initiatives nationales mais au contraire d’intégrer plus encore le contrôle des leviers étatiques en réduisant « la liste des secteurs que les Etats pourront aider à compenser le surcoût occasionné (…) à cause du green deal ».

Pas question donc, bien au contraire, de pousser enfin au développement des industries nationales. Quant aux fusions (pour ceux qui croient aux « champions européens »), la Commissaire qui s’est rendue célèbre par un despotique verdict sur la fusion Alstom-Siemens prévient d’emblée : le projet de fusion PSA-Fiat-Chrysler « sera regardé ». Pas au point toutefois de s’étonner de voir le futur groupe choisir le statut fiscal néeerlandais : ce type de concurrence interne, un des plus nocifs, n’a jamais ému la Commission et l’on sent bien que cet état de fait est appelé à durer.

Langue de bois

Enfin la concurrence des pays tiers soutenant leurs entreprises jusqu’en Europe doit-elle donner lieu à une politique spéciale de la Commission ? « C’est un problème, c’est vrai », reconnaît gravement l’éminente experte. Mais « nous n’avons pas de règles qui nous permettent de nous y attaquer ». Heureusement, « nous y réfléchissons ». Tout cela se passe de commentaires tant le renoncement à toute volonté de type étatique se conjugue avec l’imperium sur les Etats nations, soumis, de par le bon vouloir des traités, à une telle philosophie.

Dans son entretien avec Donald Trump, la présidente de la Commission a fait acte d’allégeance

Quant à la présidente de la Commission (qui devrait, si l’on comprend bien, faire, à la tête de cette institution, preuve d’une réussite qu’elle n’a pas connue dans son pays d’origine…), qu’en attendre ? Ursula von der Leyen a certes confié aux Echos (2) que « l’Europe doit faire la course en tête ». La belle déclaration que voilà… Si certaines de ses positions – acceptation du mix énergétique de chaque Etat, par exemple – semblent moins impériales que celles de son incontrôlable prédécesseur, son absence de soutien à la taxe Gafa, encore confirmée dans son entretien avec Donald Trump à Davos le 22 janvier, laisse les Etats, en premier lieu la France, dans la situation humiliante de rétropédaler en attendant le mécanisme (de longue date annoncé) qui serait demain préconisé par l’OCDE. Ne mentionnons même pas l’abaissement de l’Europe dans le conflit Etats-Unis/Iran comme un fait nouveau : dans son entretien avec Donald Trump, la présidente de la Commission a fait acte d’allégeance. Cette attitude est bien plutôt le témoignage que rien n’a changé depuis l’installation de la nouvelle « dream team »   (« équipe de rêve ») à la tête de l’UE.

« Dream team » ? Il en faudra plus, beaucoup plus pour que les peuples éprouvent ce minimum de fierté sans lequel il n’est même pas besoin de parler d’un « nouveau départ »…

Les analyses publiées dans la rubrique Opinions constituent des contributions aux débats. Elles n’engagent pas la responsabilité de la rédaction du site.

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1 Entretien dans Le Monde du 20 décembre 2019

2 Entretien dans Les Echos du 27 décembre 2019

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Von der Leyen und Borrell hämmern ein, « die EU muss lernen, die Sprache der Macht zu sprechen »

Par : pierre

Offensichtlich haben die beiden Politiker, die demnächst ihr Amt in Brüssel antreten, kriegerische, wenn nicht sogar imperialistische Absichten

Ursula von der Leyen wird ihr Amt als Präsidentin der Europäischen Kommission am 1. Dezember antreten – so ist es zumindest vorgesehen. Die ehemalige deutsche Verteidigungsministerin hat aber nicht gezögert, ihre kriegerischen Absichten schon im Voraus offen zu legen.

« Heute reicht Soft Power nicht mehr aus, wenn wir uns in der Welt als Europäer behaupten wollen » – Ursula Von der Leyen

In einer Rede, die sie am 8. November in Berlin anlässlich des dreißigsten Jahrestages des Mauerfalls hielt, benutzte sie scharfe Worte, die leider unbemerkt verhallten. Die zukünftige höchste Repräsentantin der EU ist der Meinung, « dass Europa lernen muss, die Sprache der Macht zu sprechen ». Und damit dies auch wirklich verstanden wurde, verdeutlichte sie: « Heute reicht Soft Power nicht mehr aus, wenn wir uns in der Welt als Europäer behaupten wollen ».

In dieser Tonlage war ihr der künftige Hohe Vertreter für die Außen- und Sicherheitspolitik der EU vorausgegangen. Josep Borrell hatte in seiner Anhörung vor den Europaabgeordneten am 7. Oktober das Terrain bereits mit scharfem Geschütz vorbereitet. Mit 72 Jahren hat der heutige Chef der spanischen Diplomatie eine lange Karriere hinter sich, die in der Spanischen Sozialistischen Partei (PSOE) begann und von vielen Ministerressorts (sowie einigen Skandalen) geprägt war. Von 2004 bis 2007 war er auch Präsident des Europaparlaments.

Standing ovation

Die Begeisterung seiner ehemaligen Kollegen – die ihn abschließend mit standing ovations feierten – wurde von ihm damit geweckt, dass er mit einer sehr scharfen Rede gegenüber Moskau begann, um dann im Weiteren seine Pläne darzulegen. Er bestand insbesondere darauf, dass von einer Aufhebung der Sanktionen keine Rede sein könne. Dies war für einen Mann, der vor einigen Monaten noch verkündet hatte, dass « Russland, unser alter Feind, wieder einmal zu einer Bedrohung geworden ist », nicht überraschend. Damals hatte dies allerdings zu einem diplomatischen Zwischenfall mit Moskau geführt.

Für die EU ist dies sicherlich keine 180-Grad-Wende, wurde doch die derzeitige Amtsinhaberin, die Italienerin Federica Mogherini, regelmäßig, insbesondere von den östlichen Mitgliedstaaten, verdächtigt, dem Kreml gegenüber zu nachsichtig zu sein. Sie freuen sich nun über die von ihrem Nachfolger eingeleitete Wende. Letzterer hat auch seine Absicht bekundet (wie viele andere vor ihm), die außenpolitische Entscheidungsfindung zu ändern: Seiner Meinung nach sollte sie nicht mehr dem Prinzip der Einstimmigkeit unterliegen. Eine solche Entwicklung ist in ihrer jetzigen Form eher unwahrscheinlich (sie erfordert die Zustimmung aller Regierungen), aber sie sagt dennoch viel über die Ambitionen der EU-Führungskräfte aus.

Und das nicht nur in Bezug auf Russland. Herr Borrell betonte immer wieder, dass die Union jetzt « lernen muss, die Sprache der Stärke zu benutzen », um sich als Macht in der Welt zu behaupten. Dazu sei es notwendig, ihre militärischen Fähigkeiten zu stärken, insbesondere die Wiederbelebung der « battle groups » in Angriff zu nehmen. Diese multinationalen Bataillone waren 2004 gegründet worden, aber nie zum Einsatz gekommen. Die Perspektive ist zwar kurzfristig nicht realistisch, da die Interessen und Strategien der Mitgliedstaaten zu unterschiedlich sind, aber ihre Erwähnung zeigt die Richtung an. Zumal Herr Borrell es nicht versäumt hat, darauf hinzuweisen, dass all dies tatsächlich aus dem als « Europäische Friedensfazilität » bekannten Fonds finanziert werden kann, d.h. mit 10,5 Milliarden Euro. Die « Europäische Friedensfazilität » ist ein « ausserbudgetärer EU-Fonds für die Friedensförderung und die Stärkung der internationalen Sicherheit ». Orwell lässt grüssen.

Für Herrn Borrell hängt die Glaubwürdigkeit der EU von ihrer Fähigkeit ab, der Ukraine gegen den « russischen Expansionismus » zu helfen

Für Herrn Borrell hängt die Glaubwürdigkeit der EU in erster Linie von ihrer Fähigkeit ab, einerseits der Ukraine gegen den « russischen Expansionismus » zu helfen, andererseits auch dem Balkan, den er als « Priorität für unsere Außenpolitik » darstellte. Der zukünftige Leiter der europäischen Diplomatie hat daher angekündigt, dass er seine erste offizielle Reise in den Kosovo antreten wird. Dies ist umso bemerkenswerter, als Spanien eines der wenigen EU-Länder ist, das die Unabhängigkeit dieser Provinz nicht anerkannt hat. Der Kosovo hatte sich dank der Bombardements der NATO – an denen sich die europäischen Länder beteiligt hatten, – im Jahr 1999 von Serbien getrennt. Madrid zögert in der Tat, die Unabhängigkeit anzuerkennen, weil es selbst mit den katalanischen separatistischen Forderungen konfrontiert ist. Aber die Versuchung eines « starken Europa » hat oberste Priorität…. Auf jeden Fall erinnert diese Priorität, die der künftige Hohe Vertreter dem vor zwanzig Jahren von Bernard Kouchner formulierten Satz einräumt, wonach « Europa in Pristina » (der Hauptstadt des Kosovo) beginnt, daran, dass eine echte europäische Integration offensichtlich nur auf Krieg basieren kann.

Eine Chance für Europa

Sehr wortreich sprach der spanische Politiker auch über die Migration: « Der Druck der afrikanischen Jugend stellt eine Chance für Europa dar », sagte er. Sprich: für europäische Unternehmer. Böse Geister wird dieser Appetit auf Globalisierung an einen Satz erinnern, den er vor einem Jahr vor Studenten geäussert hatte. Da hatte er sich über die Schwierigkeiten bei der Vereinigung Europas beklagt, und daran erinnert, wie problemlos sich doch die Vereinigten Staaten, gebildet hätten – « es reichte ihnen, ein paar Indianer zu töten », hatte er lachend gesagt…. Später entschuldigte er sich dafür und es wurde ihm auch schnell vergeben, da diese faszinierende historische Analyse ja nicht von einem « populistischen » oder rechtsextremen Führer kam.

Insbesondere war es Herrn Borrell wichtig, seinen Hass auf den « Nationalismus » deutlich zu machen, indem er betonte, dass er Grenzen hasse. Diese abschließende Aussage ist nicht ohne Bedeutung. Denn ein politisches Gebilde, das keine Grenzen kennt, bedeutet exakt: ein Imperium.

Das verdiente wirklich eine standing ovation.

 

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Von der Leyen et Borrell martèlent que l’UE doit « apprendre à parler le langage de la puissance »

Par : pierre

Les deux dirigeants, qui vont entrer en fonction à Bruxelles le 1er décembre, annoncent des intentions martiales, voire impériales (éditorial paru dans l’édition de Ruptures du 28/10/19, et mis à jour)

Ursula Von der Leyen prendra ses fonctions à la tête de la Commission européenne le 1er décembre – en principe. L’ancienne ministre allemande de la Défense n’a pas attendu pour dévoiler son état d’esprit martial.

« Aujourd’hui, le soft power ne suffit plus si nous voulons nous affirmer dans le monde comme Européens » – Ursula Von der Leyen

Dans un discours prononcé à Berlin le 8 novembre, précisément à l’occasion du trentième anniversaire de la chute du Mur de Berlin, elle a tenu de mâles paroles, passées hélas trop inaperçues. Pour la future plus haute dirigeante de l’UE, « l’Europe doit apprendre à parler le langage de la puissance ». Et pour que tout soit clair, elle a martelé : « aujourd’hui, le soft power ne suffit plus si nous voulons nous affirmer dans le monde comme Européens ».

Il est vrai qu’elle avait été précédée dans ce registre par le futur Haut représentant pour la politique extérieure et la sécurité de l’UE. Lors de son audition par les eurodéputés, le 7 octobre dernier, Josep Borrell avait déjà préparé le terrain par un tir d’artillerie. A 72 ans, l’actuel chef de la diplomatie espagnole, a une longue carrière derrière lui, commencée au sein du Parti socialiste espagnol (PSOE) et jalonnée de nombreux portefeuilles ministériels (ainsi que de quelques scandales). Il présida également l’europarlement de 2004 à 2007.

Ovation

Il a donc suscité l’enthousiasme de ses anciens collègues – qui l’ont salué en conclusion par une ovation debout – en exposant ses intentions, à commencer par un discours très dur à l’égard de Moscou. Pas question de lever les sanctions, a-t-il notamment martelé. Une profession de foi peu surprenante pour un homme qui avait proclamé, il y a quelques mois, que « la Russie, notre vieil ennemi, est redevenue une menace », ce qui avait provoqué un incident diplomatique avec Moscou.

Pour l’UE, il ne s’agit certes pas d’un virage à 180°. Cependant, l’actuelle titulaire du poste, l’Italienne Federica Mogherini, a régulièrement été soupçonnée de trop d’indulgence vis-à-vis du Kremlin, notamment par les Etats membres de l’Est, désormais ravis de l’inflexion revendiquée par son successeur. Ce dernier a d’ailleurs affirmé son intention (comme bien d’autres avant lui), de modifier les prises de décision en matière de politique extérieure : celles-ci devraient, selon lui, ne plus nécessiter l’unanimité. Une telle évolution est, en l’état, improbable (elle suppose l’accord de toutes les capitales), mais elle en dit long sur les ambitions des dirigeants de l’UE.

Et pas seulement vis-à-vis de la Russie. M. Borrell a en effet martelé que l’Union devait désormais « apprendre à utiliser le langage de la force » afin de s’affirmer comme une puissance dans le monde. Pour cela, il faudrait, a-t-il poursuivi, renforcer les capacités militaires de celle-ci, notamment en sortant du placard les « groupements tactiques ». Ces bataillons multinationaux avaient été créées en 2004 mais n’ont jamais été utilisés. Certes, cette perspective n’est pas réaliste à court terme, pour des raisons de divergences d’intérêts et de stratégies entre Etats membres, mais son énoncé donne le ton. D’autant que M. Borrell n’a pas manqué de signaler qu’on pouvait bien financer tout cela sur le Fonds baptisé « facilité européenne de paix » (bonjour Orwell), soit 10,5 milliards d’euros.

Pour M. Borrell, la crédibilité de l’UE se joue d’abord dans sa capacité à aider l’Ukraine contre l’« expansionnisme russe »

Pour M. Borrell, la crédibilité de l’UE se joue d’abord dans sa capacité à aider l’Ukraine contre l’« expansionnisme russe » ; ainsi que dans les Balkans qualifiés de « priorité pour notre politique extérieure ». Dès lors, le futur chef de la diplomatie européenne a annoncé qu’il comptait effectuer son premier déplacement officiel au Kosovo. Une annonce d’autant plus remarquable que l’Espagne est l’un de seuls pays de l’UE à n’avoir pas reconnu l’indépendance de cette province qui avait fait sécession de la Serbie grâce aux bombardements que l’OTAN – dont les pays européens – mena en 1999. Madrid est en effet réticent aux proclamations d’indépendance, car confronté aux revendications séparatistes catalanes. Mais la tentation de « l’Europe puissance » prime tout… En tout cas, la priorité affichée par le futur Haut Représentant rappelle cette sentence formulée il y a vingt ans par Bernard Kouchner selon laquelle « l’Europe commence à Pristina » (la capitale du Kosovo), manière de signifier que la véritable intégration européenne ne peut se fonder que sur une guerre.

Très en verve, le dirigeant espagnol a également évoqué l’immigration : « la poussée de la jeunesse africaine représente une chance pour l’Europe », a-t-il affirmé. Comprendre : pour les patrons européens. Les mauvais esprits rapprocheront cet appétit pour la mondialisation d’une phrase lâchée il y a un an devant des étudiants. Il se lamentait alors des difficultés d’unir l’Europe, là où les Etats-Unis s’étaient constitués facilement – « il leur a suffi de tuer quatre indiens », avait-il lâché en rigolant… Il s’était excusé par la suite, et fut vite pardonné puisque cette fascinante analyse historique n’émanait pas d’un dirigeant « populiste » ou d’extrême droite.

Précisément, M. Borrell a tenu à déclarer sa haine au « nationalisme », proclamant qu’il détestait les frontières. Cette ultime affirmation n’a rien d’anodin. Car une entité qui ne se reconnaît pas de frontière, cela se nomme précisément : un empire.

Cela méritait bien une ovation.

 

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Ursula von der Leyen confirmée à la tête de la Commission européenne : la boucle est bouclée ?

Par : pierre

Elle ne sera donc pas chancelière – une perspective jadis crédible, mais qui avait pâli depuis quelques années. Pas non plus Secrétaire général de l’OTAN, un poste pour lequel son nom circulait dans les milieux de l’Alliance atlantique, sans doute parce qu’elle a été le premier ministre allemand de la Défense ayant accru le budget militaire (+40% en six ans).

C’est finalement la présidence de la Commission européenne qu’Ursula von der Leyen a obtenue. Après de laborieux marchandages, elle avait été désignée à ce poste par le Conseil européen du 2 juillet sur l’initiative conjointe d’Emmanuel Macron et d’Angela Merkel. Le 16 juillet, elle a été confirmée dans cette fonction par un vote de l’europarlement. Elle prendra ses fonctions en novembre.

Elle a obtenu 383 voix, soit seulement neuf de plus que la majorité absolue qui lui était nécessaire. Elle aurait théoriquement pu compter sur 444 votes, si les eurodéputés des trois groupes qui la soutenaient officiellement avaient tous voté en sa faveur. Un échec était cependant très peu probable, tant il aurait déclenché une crise institutionnelle inextricable.

Depuis deux semaines, la bulle bruxelloise jouait à se faire peur

Mais, depuis deux semaines, la bulle bruxelloise jouait à se faire peur. Car beaucoup, au sein de l’Assemblée de Strasbourg, n’ont pas digéré l’humiliation infligée par le Conseil. Celui-ci avait en effet jeté aux orties la méthode revendiquée par les europarlementaires selon laquelle le candidat présenté par la formation arrivée en tête aux élections européennes devait prendre la tête de la Commission. Sous pression de Paris notamment, Manfred Weber, le champion du Parti populaire européen (PPE, droite, auquel appartient Mme von der Leyen) avait pourtant été écarté.

Au sein même de cette formation, de nombreux grincements s’étaient alors fait entendre. La colère était forte également chez les sociaux-démocrates européens, qui avaient un temps cru pouvoir pousser en avant leur propre candidat. Et la Danoise Margrethe Vestager, Commissaire star à Bruxelles, portait les espoirs des Libéraux.

Du coup, depuis le 3 juillet, Mme von der Leyen n’a pas épargné sa peine pour consoler et séduire les uns et les autres. Intervenant finalement juste avant le vote, elle a beaucoup promis : une Europe « plus sociale », avec un salaire minimum, et qui créée plus d’emplois pour les jeunes ; plus d’efforts pour la santé, l’éducation, et contre la pauvreté ; une lutte contre les violences faites aux femmes ; le sauvetage des migrants en mer ; un engagement « sans transiger » en faveur de l’ « Etat de droit »…

Bien sûr – c’est désormais une exigence idéologique majeure des élites oligarchiques de l’UE – sa première priorité sera « l’urgence climatique »

Et bien sûr – c’est désormais une exigence idéologique majeure des élites oligarchiques de l’UE – sa première priorité sera « l’urgence climatique », sous la forme d’un « green deal européen », et moyennant un nouveau durcissement des objectifs de réduction de CO2. Elle a ainsi plaidé pour la « neutralité carbone » (mais certainement pas géopolitique…) d’ici 2050.

Cela n’a pas suffi au groupe des Verts pour la soutenir. Son co-président, Philippe Lamberts, s’est plaint d’avoir été « relégué en bout de table puis finalement écarté » dans les négociations initialement engagées en vue d’une « grande coalition » à quatre. « Nous sommes une force politique respectable, nous avons été traités de manière insultante », s’est indigné M. Lamberts.

Mme von der Leyen s’est également dite prête à accepter un nouveau recul de la date de sortie du Royaume-Uni, si Londres le demande (ce qui n’est en aucune manière le cas), se faisant huer au passage par nombre d’eurodéputés britanniques.

Finalement, elle a réussi à rallier certaines voix venues du groupe des « Conservateurs et réformistes européens » (ECR) où siègent notamment les ultraconservateurs au pouvoir en Pologne (PiS) – Angela Merkel serait discrètement intervenue auprès de Varsovie, selon certaines sources – ainsi, plus étonnant encore, que de certains eurodéputés du Mouvement cinq étoiles italien.

Fiction grotesque

Pour les familiers de Bruxelles et Strasbourg, la séquence était passionnante. En revanche, elle a évidemment laissé de marbre l’écrasante majorité des citoyens des différents pays de l’UE. D’autant que le spectacle était affligeant et pathétique : les différentes promesses prodiguées par la future patronne ressemblaient à celle d’un « gouvernement » en début de mandat. Une fiction grotesque.

Le choix de Mme von der Leyen est sans grande influence sur les contradictions explosives auxquelles l’UE est confrontée depuis quelques années, et qui ne peuvent que s’aggraver.

Dans ces conditions, le choix de la personnalité finalement élue – forcément au sein d’un panel idéologiquement homogène, en tout cas fidèle à la « foi européenne » – n’a qu’une importance limitée. Il est sans grande influence sur les problèmes et contradictions explosives auxquels l’UE est confrontée depuis quelques années, et qui ne peuvent que s’aggraver.

Ainsi, le thème de l’arrivée des migrants continuera à susciter controverses et antagonismes entre pays membres. La crise économique pourrait rebondir et resurgir dans la prochaine période, d’autant que la première puissance économique de la zone voit sa croissance caler.

Les oppositions entre gouvernements partisans d’une orthodoxie budgétaire stricte (dont Mme von der Leyen constitue un beau spécimen) et ceux accusés par ces derniers de laxisme devraient s’aiguiser, notamment au sein de la zone euro.

Et certains gouvernements de l’Est devraient continuer à jouer les frondeurs en matière d’« Etat de droit », narguant ainsi leurs homologues occidentaux – sans toutefois déclencher de guerre ouverte, tant les fonds en provenance de Bruxelles restent importants pour Varsovie ou Budapest.

A ce sujet, les négociations en vue du futur budget pluriannuel de l’UE (2021-2027) ne vont pas manquer d’être explosives, a fortiori avec l’ardoise que devrait laisser le Royaume-Uni en sortant…

Toutes ces bombes à retardement reflètent en réalité la contradiction majeure fondamentale : celle qui ne cesse de croître entre les partisans d’une « Europe plus juste et plus unie » (selon les termes de la future chef de Bruxelles)… et les peuples qui, de manière plus ou moins consciente, sentent que « l’aventure européenne », par sa nature même, ne mène qu’à plus de casse sociale et à la confiscation de la démocratie.

Les dirigeants sont parfois victimes de leur propre propagande

Mme von der Leyen veut aller toujours plus loin dans l’intégration, par exemple en proposant une « conférence » sur l’avenir institutionnel de l’UE (comme demandé par Emmanuel Macron), ou bien en abandonnant la règle de l’unanimité en matière de politique étrangère. Peut-être même croit-elle que cela répond à une attente populaire. Après tout, les dirigeants sont parfois victimes de leur propre propagande, un peu comme George W. Bush imaginait que les boys seraient accueillis avec enthousiasme à Bagdad. On connaît la suite.

En 2014, l’actuel président, Jean-Claude Juncker, avait lancé son mandat en martelant que sa Commission serait celle « de la dernière chance ». Sous son règne, les crises n’ont pas manqué. Il n’y avait pas eu d’Allemand à la tête de la Commission européenne depuis Walter Hallstein, qui inaugura ce poste lors de la fondation de la CEE, en 1958. Qui sait si, par une facétieuse ruse de l’Histoire, Ursula von der Leyen ne sera pas, finalement, la dernière à l’occuper, avant liquidation ?

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Braises et fumées (éditorial mis à jour après les nominations)

Par : pierre

Ca y est : à l’issue d’un Conseil européen qui se sera étalé sur près de trois jours, et après de laborieuses négociations en coulisses, les Vingt-huit se sont mis d’accord sur leur « casting de rêve ». L’affiche comprend surtout des responsables politiques qui apparaissaient en fin de carrière.

L’Allemande Ursula Von der Leyen (60 ans) devrait présider la Commission européenne à partir du 1er novembre. Angela Merkel offre à l’UE son actuelle ministre de la Défense, peu populaire outre-Rhin, et qui était fragilisée à ce poste après diverses bévues, scandales et déclarations peu adroites. Mme Von der Leyen est une fervente supporter de l’OTAN, et rêve des Etats-Unis d’Europe…

Le Belge Charles Michel, désigné comme futur président du Conseil européen (à partir du 1er décembre), n’est certes pas, lui, atteint par l’âge de la retraite. Mais il vient de subir une double défaite aux élections fédérales belges du 26 mai. Tant son parti, le Mouvement réformateur (libéral), que toutes les formations du gouvernement de coalition qu’il dirigeait ont subi de sévères déroutes. Ses chances de retrouver un poste de premier plan dans son pays étaient quasiment nulles.

A 63 ans, la patronne du FMI, la Française Christine Lagarde devrait prendre la tête de la Banque centrale européenne. Celle qui avait commencé sa carrière par vingt-cinq ans dans un des plus importants cabinets d’affaires américains avant de devenir ministre à Paris, puis de diriger le FMI de Washington, va désormais rempiler à Francfort. Les Grecs, qui n’ont pas oublié la Troïka, seront ravis.

Enfin, l’Italienne Federica Mogherini, qui chapeautait la « diplomatie » de l’UE, sera remplacée par le socialiste espagnol Josep Borrell, 72 ans, ancien président de l’europarlement, et actuel chef de la diplomatie dans le gouvernement provisoire à Madrid. Une fonction dans laquelle il a récemment qualifié la Russie de « vieil ennemi » qui « redevient une menace ».

Ce vaste mercato a une apparence : un complexe marchandage où presque tous les coups sont permis – retournements, bluff, pressions, alliances et trahisons ultimes. Ce « Game of throne » passionne l’euro-bulle autant qu’il indiffère les citoyens des différents pays. Au passage, si les dirigeants avaient voulu détruire la légende que leurs communicants ont désespérément tenté de bâtir avant et après les élections européennes – une UE qui reconquiert l’amour de ses citoyens grâce à une proximité et une transparence toujours plus palpables – ils ne s’y seraient pas pris autrement. Un mois plus tôt, les mêmes chantaient sur tous les tons aux électeurs qu’enfin, cette fois-ci, leur voix compterait.

Le 20 juin, les candidats respectifs des trois premiers partis européens avaient été déclarés disqualifiés, faute de consensus au Conseil. En particulier, le poulain d’Angela Merkel a été barré par Emmanuel Macron, qui n’en voulait à aucun prix mais qui n’a pas manqué d’appeler de ses vœux la chancelière à se présenter elle-même, sachant pertinemment que celle-ci avait exclu cette hypothèse. A l’europarlement, les chefs de groupe n’ont certes pas abouti à proposer une candidature commune, mais une « super-grande coalition », à quatre, se prépare pour élargir la majorité sortante, trop affaiblie, qui était « seulement » composée de la droite classique et des sociaux-démocrates. Voilà qui enchanterait sûrement le « citoyen européen » si ce dernier existait…

Mais, derrière ce rideau de fumée, ce mercato a une réalité : l’émergence d’une Union européenne toujours plus minée par les contradictions d’intérêts. Car si on peut se désintéresser des petites manœuvres, cela n’interdit pas d’élucider ce que celles-ci recouvrent au fond. Certes, l’intégration européenne ne s’est jamais faite sans frictions. Mais en particulier depuis 2004 – l’élargissement de quinze à vingt-cinq Etats membres – puis 2008 – la mise en place du traité de Lisbonne – le problème des élites dirigeantes européennes a changé de nature : l’UE est désormais en phase de délitement, même si nul ne peut en prévoir l’échéance, et dont le Brexit est le signe avant-coureur.

Si peu de choses séparent la plupart des dirigeants sur le plan idéologique – chrétiens-démocrates, sociaux-démocrates, libéraux, Verts, voire « gauche radicale » (sic !) clament tous, à des degrés divers, leur foi en l’aventure européenne à laquelle « il n’y a pas d’alternative » – les différences d’intérêts entre pays émergent désormais plus crûment, dans tous les domaines : économique, social, industriel, commercial, démographique, migratoire, sans parler des cultures politiques si dissemblables, forgées par l’histoire et la géographie. Autant de domaines qui ont dessiné les affrontements de ces dernières années entre pays de l’ouest et de l’est, du nord et du sud, entre petits et grands, entre inconditionnels de Washington et nostalgiques de Barack Obama…

Les différences d’intérêt ne sont pas un problème en soi. Elles peuvent refléter des complémentarités, fournir la matière de coopérations, faire l’objet de négociations diplomatiques entre pays souverains. Elles le deviennent en revanche dès lors qu’il s’agit de faire rentrer tout le monde de force dans le même moule intégré. C’est bel et bien l’exigence centrale des traités – « une union toujours plus étroite » – qui a semé les graines des divisions, des antagonismes, des conflits. Et le temps n’est plus où le « couple franco-allemand » pouvait assurer la discipline au sein d’instances policées. Encore moins depuis que les contentieux s’accumulent entre Berlin et Paris.

Au-delà de la tragi-comédie qu’on pourra au choix trouver réjouissante ou insipide, les dirigeants de l’UE font face à un processus de désintégration que les braises des colères populaires pourraient bien un jour accélérer.

La fumée ne sera pas forcément toujours blanche.

 

Pierre Lévy

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