La SNCF compte quatre syndicats représentatifs, qui viennent tous de signer un accord avec la direction pour mettre en place un congé de fin de carrière. Ceux qui entreront dans ce dispositif pourront être payés à 75% de leur salaire pendant les 15 mois précédant leur départ officiel à la retraite, sans effectuer leur service. Bref, ils seront payés à rester chez eux…
Cette mesure très favorable, qui neutralise, dans la pratique, la réforme des retraites, pourrait coûter 300 millions selon l’IFRAP. On notera que la direction de la SNCF a bien pris garde de ne pas chiffrer le coût du petit cadeau qu’elle vient d’adresser à ses contrôleurs qui menaçaient d’une grève en mai.
Si ce chiffre de 300 millions se vérifiait, il équivaudrait à 1,5% du prix d’un billet. Rappelons que la vente de billets rapporte près de 20 milliards par an à la SNCF.
Ceux qui se serrent la ceinture pour acheter une place dans le TGV apprécieront : au lieu de profiter de la réforme des retraites pour diminuer le coût de ses produits, la SNCF invente un dispositif pour les augmenter. C’est bien, la solidarité, quand ce sont les autres qui paient.
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Donc, un smicard verse, tout au long de sa carrière, 250.000€ au système de retraites installé par Vichy en 1941 et fièrement repris par les communistes à la Libération (pour les gens ordinaires, les gros bataillons de la CGT demeurant dans des régimes spéciaux bien plus favorables au nom de la solidarité, bien entendu). En supposant qu’il vive jusqu’à 85 ans, il en retire péniblement 222.000€.
Le régime général condamne donc le smicard à perdre plus de 25.000€.
Rappelons quelques points :
L’urgence est d’ouvrir un système de retraite par capitalisation pour les salaires les moins élevés du secteur privé.
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Les uns diront que « l’État dépense trop », d’autres que « les riches doivent payer » ou que « l’immigration coûte trop cher » Bref, toutes les idéologies ont leur solution…
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Les sénateurs ont dit non à la ratification du Ceta, le traité de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada, jeudi 21 mars. L'issue du vote était attendue, grâce à une alliance de circonstance, entre la gauche et Les Républicains, qui a permis de rejeter l'article du projet de loi relatif à ce traité commercial par 211 voix contre 44.
L'accord, très décrié, prévoit notamment la suppression des droits de douane sur 98 % des produits échangés entre l'UE et le Canada, la réduction des réglementations et (...)
Le traité de libre-échange entre l'UE et le Canada est examiné le 21 mars par le Sénat. Mais une alliance entre la gauche et la droite menace la ratification de l'accord, néfaste pour l'environnement et la santé des consommateurs.
En pleine campagne pour les élections européennes et sur fond de crise agricole, il n'y a pas meilleur moment pour imposer le sujet dans les débats. Plus de six ans après son adoption par le Parlement européen, le Comprehensive economic and trade agreement (Ceta) est de retour (...)
Les positions de la Cour des Comptes, affichées en exorde de son rapport annuel, sont ici parfaitement claires : pour revenir à un déficit public de 3% en 2027, le gouvernement devra trouver 50 millliards € d’économies nouvelles, par rapport aux 20 milliards annoncés pour 2024. Compte tenu des politiques affichés depuis 2017 au travers des différentes lois de programmation annuelle (preuve est faite que la programmation annuelle repose sur du vent et non sur une stratégie intelligente), cet objectif paraît impossible à tenir.
Bref, la France ne pourra pas tenir ses engagements européens. On le sait déjà.
Elle est pourtant, comme le montre ce schéma contenu dans le rapport, un très mauvais élève :
La Cour ajoute que le déficit du Fonds de Solidarité Vieillesse (qui finance les “retraites de solidarité” versées à ceux qui n’atteignent pas le minimum contributif) devrait atteindre des proportions astronomiques. Rappelons que nous publions une série pour préparer sa retraite à l’approche des baisses prévisibles (mais cachées par le gouvernement) qui se profilent à l’horizon.
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La vidéo ci-dessus est destinée aux abonnés de la chaîne Youtube “Patrimoine” du Courrier des Stratèges. Vous pouvez la rejoindre à partir de la page d’accès de la chaîne.
Dans cette vidéo, je vous détaille les 6 erreurs à ne pas commettre pour préparer sa retraite. Ce sont des erreurs que j’ai moi-même commises, et que je vous conseille d’éviter, car elles peuvent faire perdre beaucoup d’argent.
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Plusieurs points doivent être précieusement notés pour comprendre cet exposé :
Pour toutes ces raisons, et tout particulièrement si vous n’entrez pas dans “l’épure” de la carrière linéaire, suivez nos conseils pour préparer votre retraite. Et pensez à vous abonner à notre chaîne “patrimoine” sur Youtube (pour 5€ par mois, des conseils irremplaçables).
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De Gaulle a transcrit dans ses « mémoires de guerre » cette phrase prononcée lors de son discours du Palais de Chaillot à Paris le 12 septembre 1944 :
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Nous avions alerté, il y a peu, sur la proposition de loi adoptée et promulguée le 13 février 2023, sous pression de la FNSEA, dont la conséquence directe était de baisser les retraites, et spécialement les petites retraites, des exploitants agricoles. En pleine crise paysanne, cette erreur paraissait cataclysmique. Un rapport de l’IGAS éclairait précisément les dangers sociaux de cette mesure en apparence bénéfique.
Officiellement, le rapport devait être publié début février. Il n’en a rien été. Seuls les sénateurs de la commission des affaires sociales ont pu le lire. Visiblement, ils en sont sortis effrayés, puisqu’ils ont écrit que la réforme n’augmenterait pas les pensions, mais qu’elle les baisserait pour un volume allant de 15 à 50% des agriculteurs. Le commun des mortels n’a manifestement pas le droit de vérifier par lui-mêmes ces informations pourtant publiques concernant un système public de retraites. C’est la démocratie, diront les sénateurs…
En attendant, les sénateurs déposent une nouvelle proposition de loi pour éviter de léser les petits agriculteurs.
Comme disent certains, c’est l’Europe ! Sauf que les pouvoirs publics français n’ont manifestement pas besoin de l’Europe pour torpiller les agriculteurs français.
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Plusieurs éléments majeurs doivent être retenus sur l’évolution à venir de nos retraites :
Nous ouvrons aujourd’hui un cycle de conseils pour préparer ces années difficiles. Renez-vous dès demain sur notre chaîne “Patrimoine” sur Youtube.
J’ajouterai par ailleurs quelques posts sur des situations particulières.
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Le 1er février, un millier de paysans étaient rassemblés devant le Parlement européen contre les traités de libre-échange "antidémocratique". Ils dénoncaient aussi l'appauvrissement de la profession.
Bruxelles, reportage
Près du Parlement européen, sous un gigantesque panneau « Use your vote » — utilisez votre vote, en français – un cordon de police a essuyé jeudi 1er février des jets de bouteille et quelques cocktails Molotov lancés par des agriculteurs en colère, visage découvert. Une statue, au centre de la (...)
« Je tremble, je le confesse, qu’ils ne se laissent enfin si bien posséder par un lâche amour des
jouissances présentes, que l’intérêt de leur propre avenir et de celui de leurs descendants
disparaisse, et qu’ils aiment mieux suivre mollement le cours de leur destinée, que de faire au
besoin un soudain et énergique effort pour le redresser. »
L’article Charles Péguy et le « système de la retraite » – Nicolas Bonnal est apparu en premier sur Strategika.
La France pourra-t-elle soutenir sa dépense retraites à long terme avec une natalité en plein décrochage ?
Il s’agit bien entendu d’une question rhétorique, puisque tous les familiers de la retraite par répartition savent que ce système d’indemnisation du risque vieillesse n’est viable que si la population reste stable, et même si elle progresse. Dès que la fécondité s’effondre, il n’est pas possible de soutenir durablement un niveau de pensions stable.
Pour mémoire, comme nous l’indiquons dans la capsule, en 1990 encore, la France comptait 4 habitants entre 20 et 65 ans pour un habitant de plus de 65 ans. Cette proportion devait tomber à 1,76 en 2070 avec des projections “optimistes”. Il faudra désormais attendre les nouvelles projections de l’INSEE pour savoir où cette proportion tombera. Ce qui est sûr, c’est que, compte tenu du vieillissement de la population, le poids des retraites va mécaniquement augmenter s’il n’est pas réformé.
Et la réforme est inévitable, qui passera par une baisse programmée de la retraite moyenne rapportée au salaire perçu durant la carrière (le fameux taux de remplacement).
Il faut donc ici retenir plusieurs points !
Ces prévisions sont fondées sur des hypothèses antérieures au décrochage de 2022. Elles seront actualisées prochainement par l’INSEE, et cette actualisation risque de réserver de mauvaises surprises.
Ne manquez pas les conseils que nous vous donnons pour préparer d’ores et déjà votre retraite et éviter une chute trop brutale de revenus. La chaîne Youtube “patrimoine” du Courrier s’y consacrera.
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Pour comprendre la retraite par répartition, il faut avoir quelques éléments en tête :
Pour ceux qui veulent aller plus loin, le Courrier a consacré plusieurs articles à cette question :
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Bruno Le Maire l’assure : l’Allemagne et la France ont parcouru 90% du chemin pour définir ensemble les nouvelles règles du Pacte de Stabilité, arrêté il y a plus de 30 ans pour harmoniser les politiques budgétaires dans la zone euro à l’occasion du Traité de Maastricht. En apparence, donc, la France affronte l’Allemagne sur la dette publique plafonnée à 60% du PIB (la France en est au double), et sur le déficit budgétaire bientôt réduit à 2% (3% actuellement).
Mais il s’agit d’une pure apparence, car la cigale française a d’ores et déjà cédé l’essentiel à la fourmi teutonne. En particulier, ni Bruno Le Maire ni Emmanuel Macron ne sont parvenus à s’opposer à une réduction des déficits autorisés à partir de 2028, ni à un mécanisme de retour accéléré à ce déficit en cas de dépassement (0,5% de PIB par an).
La seule chose que la France a obtenue, à ce stade, est de pouvoir ralentir le retour à l’équilibre en cas d’investissement dans la transition énergétique ou dans la défense, à hauteur de 0,2 point.
Une chose est sûre, le projet d’une Europe fédérale prend progressivement corps.
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L’Assemblée Nationale a donc adopté une résolution sur l’avenir de l’Europe que nous avions déjà évoquée, dont la lecture n’est pas inutile. Nous la reproduisons intégralement ci-dessus.
Dans la pratique, le texte propose effectivement une évolution des traités permettant de passer à la majorité qualifiée plutôt que l’unanimité actuelle. Cette évolution est fondamentale dans le fonctionnement de l’Union. Elle permettrait à un groupe de pays (en l’espèce les plus grands) d’imposer leurs vues aux plus petits.
En revanche, l’Assemblée Nationale propose de soumettre au référendum tout transfert de souveraineté à l’Union, et elle n’intègre pas la position évoquée hier, de “raidissement” du rôle de la Commission.
Dans tous les cas, on retiendra que le calendrier est fixé : après les élections européennes de juin 2024, le débat sur le fédéralisme européen devrait s’ouvrir. Et il y a lieu de penser qu’il s’agira du débat de tous les dangers pour l’Union elle-même : existe-t-il aujourd’hui une majorité d’Européens favorables à plus de verticalité bureaucratique ?
Il faut lire avec recul l’avis donné par le Parlement européen sur la réforme des traités. Il est en effet sans surprise : comment imaginer qu’un Parlement supra-national aux pouvoirs incertains puisse ne pas réclamer sa transformation en Parlement souverain, détenteur du pouvoir en plein exercice ? D’une certaine façon, pour reprendre une expression à la mode, le fédéralisme européen est inscrit dans les gènes du Parlement.
Voici donc le contenu des résolutions adoptées par le Parlement :
Selon la Novlangue contemporaine, cette centralisation nouvelle du pouvoir est bien entendu justifiée par le besoin de “donner davantage la parole aux citoyens”.
Pour que ce projet ait une chance d’aboutir, il faudrait que les gouvernements qui forment le Conseil décident à l’unanimité de se saborder. Voilà qui paraît quand même peu plausible. En revanche, le projet est posé, et l’on sait qu’il pourrait aboutir au gré de circonstances exceptionnelles.
Notre résumé des principales nouveautés du projet de modification des traités sur l’UE adopté par le Parlement européen : La prise de décision à l’unanimité des Etats membres (Conseil européen) devient l’exception, le vote à la majorité simple ou qualifiée la règle
L’article Avec les voix des macronistes, le Parlement européen adopte un projet de révision des traités : création d’une armée et d’un Président de l’UE, partage des compétences des Etats avec l’UE pour la défense, les affaires étrangères, l’éducation… est apparu en premier sur Strategika.
Le Parlement européen a adopté mercredi 22 novembre, par 524 voix contre 85 et 21 abstentions, l'accord de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et la Nouvelle-Zélande. Il supprimera les droits de douane entre les deux entités, dont le commerce atteint aujourd'hui 9 milliards d'euros par an. Les négociations avaient commencé en 2018. Selon le service de presse du Parlement, l'accord protège les indications géographiques (IG) de l'UE pour les vins et les spiritueux, ainsi que 163 IG célèbres pour (...)
Lire la suite - En bref / Économie , Monde , Traités de libre-échange« L’État ayant dépensé
Tout l’été
Se trouva fort dépourvu
Quand il fallut financer ses agents,
Plus d’argent.
Il alla crier famine
Chez l’Argirc-Arrco sa voisine,
La priant de lui donner
Quelques sous pour financer son déficit,
« C’est pour la solidarité », lui dit-il.
L’Agirc-Arrco n’est pas prêteuse ;
C’est là son moindre défaut.
« Que faisiez-vous au temps faste ? »
Dit-elle à ce quémandeur.
« Je dépensais à tout venant, pour de bonnes causes »
« Vous dépensiez ! J’en suis fort aise.
Eh bien ! empruntez maintenant »
L’Agirc (Association Générale des Institutions de Retraite Complémentaire des Cadres) et l’Arrco (Association pour le Régime de Retraite Complémentaire) gèrent les retraites complémentaires des salariés.
L’Agirc-Arrco est un système de retraite complémentaire au régime général, c’est un système de retraite par répartition obligatoire, qui fonctionne par points. Les points reçus par chaque pensionné sont fonction du montant des cotisations versées (employeurs et employés) ; le total des points est multiplié par la valeur du point à la date du départ à la retraite. Le montant annuel brut de la retraite est donc égal au nombre de points Agirc-Arrco multiplié par la valeur du point.
C’est, oh miracle, une caisse gérée par les syndicats et qui est à l’équilibre ; ce qui n’est pas le cas du système de retraite général, ni a fortiori du système de retraite des fonctionnaires.
L’Agirc-Arrco est un système à contribution définie, c’est-à-dire que les prestations sont définies par rapport aux cotisations versées. Autrement dit, s’il y a 100 dans la caisse, on distribue une somme inférieure ou égale à 100.
On le fait en jouant sur la valeur du point : si les cotisations dans la caisse s’élevent à par exemple 90, alors, s’ils sont responsables, les gérants de la caisse vont baisser la valeur du point, et on distribuera 90 ; dans le cas contraire, s’il y a 110 dans la caisse, alors les gérants peuvent, soit opter pour le maintien du point à sa valeur et constituer des réserves pour des jours moins fastes, soit distribuer 110. Chaque retraité bénéficiera alors d’une retraite plus élevée, et il n’y aura ni réserves ni déficit.
On voit avec cet exemple simple que ce système de retraite par répartition, avec une valeur du point modulable (à la hausse ou à la baisse) en fonction des recettes, est un excellent système quand il est géré par des acteurs responsables… c’est-à-dire, pas par l’État. C’est le cas à l’heure actuelle, ce qui prouve que lorsqu’ils travaillent hors des projecteurs et des déclarations politiques les syndicalistes savent gérer d’une manière sensée un système complexe.
Or, l’allongement de l’âge de la retraite de 62 à 64 ans a pour effet de gonfler les cotisations, et donc les excédents du régime complémentaire. Il y a, ce que l’on appelle en France, une « cagnotte » (c’est le niveau économique).
Des entrées exceptionnelles, dues à une réforme élémentaire du système de retraite français (on passe de 62 à 64 ans…), sont estimées à 400 millions d’euros en 2024, à 800 millions d’euros en 2025 ; et 1,2 milliard d’euros en 2026.
Ce surplus peut : soit être capitalisé, soit être dépensé, soit être « confisqué » par l’État pour financer le système de retraite des fonctionnaires ou le régime général, tous deux largement déficitaires, ou pour servir à financer des promesses faites dans le feu de la négociation (relèvement des petites pensions).
Dans tous les cas, on appellera cela la solidarité entre régimes. Cette solidarité ne peut être qu’à sens unique étant donné la disparité entre un système de base et un système public des retraites déficitaire, et un système complémentaire excédentaire.
Inutile de dire que la solution choisie par l’Agirc-Arrco a été celle de dépenser immédiatement ce surplus (sans mettre en péril les réserves confortables qu’elle possède, estimées à 68 milliards fin 2022). Les pensions complémentaires des retraités Agirc-Arrco seront revalorisées de 4,9 % dès le début novembre 2023.
Le gouvernement avance que cet accroissement des recettes du système complémentaire n’a rien à voir avec la gestion de l’Agirc-Arrco, mais qu’il est le résultat de la réforme des retraites qu’il a menée, réforme nécessaire et impopulaire. Ce surplus n’appartient donc pas à l’Agirc-Arrco, et il ne serait pas anormal que la totalité, ou du moins une partie, aille à la solidarité entre caisses, la caisse excédentaire finançant une partie des caisses déficitaires (régime général et pourquoi pas, abonder les petites retraites). Cela montre que dès qu’il y a un surplus exceptionnel (Agirc-Arrco, UNEDIC), l’État ne pense qu’à le dépenser quitte à invoquer des économies.
Toutes ces négociations portent sur le marginal.
Il y a un excédent exceptionnel, comment le dépenser ? Faut-il le réserver pour son destinataire, faut-il le partager ? Et pour qui ? Faut-il augmenter des cotisations ici, et les réduire ailleurs ? Faut-il raboter les allègements de charges des entreprises ?
Toutes ces discussions sont un peu dérisoires compte tenu du problème posé. Elles montrent que l’État est dans une situation désespérée, et cherche par tous les moyens à grappiller des sous pour financer un système de retraite à bout de souffle.
Cela montre ce que dit M. Jouyet dans son dernier livre :
Je n’ai jamais senti chez Chirac, Hollande, Sarkozy et Macron le moindre intérêt pour la réforme de l’État.
Cet immobilisme est conforté par une haute administration pusillanime qui, chaque fois qu’une réforme est nécessaire, répond « Est-ce bien nécessaire monsieur le ministre ? »
Aucune réforme n’est possible sans un diagnostic.
Le système des retraites français repose sur la répartition, c’est-à-dire que les actifs paient pour les pensions des retraités actuels. Pour que le système soit viable, il faut que le montant des cotisations soit égal ou supérieur au montant des prestations la même année. Non seulement les cotisations doivent être égales aux dépenses (prestations versées), mais il faut que les cotisations futures (sur au moins une génération) soient égales aux prestations futures.
Dans le cas contraire, il se forme un déficit qui ne peut être financé que par des emprunts, c’est-à-dire des impôts futurs. Or, il n’y a aucune justification éthique et économique pour que les retraités d’aujourd’hui soient financés par de la dette, c’est-à-dire par les impôts futurs que devront payer nos enfants et petits-enfants.
Le ratio clef est le nombre d’actifs (cotisants) par rapport au nombre de retraités.
Or, nous savons que ce ratio va en diminuant inexorablement (le ratio doit être projeté sur 30 ans). Le problème de la retraite en France (comme partout dans le monde) est un problème démographique et un problème financier. Si c’est un problème démographique, il doit être étudié sur la longue durée, qui n’intéresse pas les politiques, sauf pour l’allongement de l’âge de la retraite qui est une réforme nécessaire, mais très insuffisante.
Quand on parle du système des retraites, les questions à poser sont :
Hélas, le débat actuel ne tourne pas sur cette question structurelle que la haute administration ne veut ni ne peut voir. Au lieu de cela, on discute à perte de vue de la répartition d’un hypothétique surplus.
Le montant des recettes du système des retraites par répartition en France s’élève en 2021 à 227 milliards d’euros, soit 8,6 % du PIB. Bien entendu, dans les cotisations on ne tient pas compte des subventions de l’État en faveur de ses fonctionnaires qui, sur le plan économique, s’analysent comme des dépenses publiques (subventions). On considère que la cotisation de l’État est équivalente à celle du secteur privé en faveur de ses salariés, soit 16 % du salaire brut.
Au niveau national, les prestations totales s’élèvent à 345 milliards d’euros, soit 13 % du PIB. Le déficit du budget des retraites français est donc égal aux cotisations moins les prestations (227-345 = -118 milliards) ; ce n’est pas exactement le même chiffre que celui du COR, qui trouve un… surplus de 800 millions cette année. Nous ne reviendrons pas sur les âneries du COR qui est un organisme idéologique dont l’objectif consiste à montrer que le budget retraite en France est équilibré grâce aux subventions de l’État, et que les retraites des fonctionnaires ne pèsent pas dans ce déficit.
Ce déficit est couvert par des subventions et des impôts.
Rappelons que, sur le plan économique, une subvention est une ressource pour le budget retraite (le COR s’est limité à cet aspect) et toujours une dépense pour l’État. Donc quand on consolide ces deux comptes, les subventions et les transferts d’une caisse à une autre disparaissent. Il est curieux que le COR ait un niveau aussi faible en économie.
Une fois le diagnostic fait, les questions à poser sont les suivantes :
Ici, nous ne sommes plus dans un système pouvant être corrigé en modulant la valeur du point d’indice, mais dans un système fou, où les prestations n’ont rien à voir avec les cotisations. Cela s’appelle un système à prestations définies par un groupe de pression sans préoccupation du montant dans la caisse. Si on regarde le tableau, on constate qu’il y a 100 dans la caisse (en recette) et 152 en prestations. Ce n’est pas viable.
Ces discussions autour de la répartition du surplus sont dérisoires par rapport à l’enjeu.
Le nœud du problème consiste à supprimer le ratio de 75 % du dernier salaire pour les fonctionnaires, mais ici nous entendons les hauts fonctionnaires dire : « Est-ce vraiment nécessaire, Monsieur le ministre ? Pensez à la rue (et pensez à notre propre intérêt) ».
En admettant que ceux qui décident dans notre pays aient fait le diagnostic, ils n’ont aucun intérêt à ce que ça change (non seulement ils n’ont pas intérêt, mais ils demandent que leurs retraites soient calculées sur leur dernier salaire plus leurs primes). Les retraites françaises sont financées par l’accroissement de la dette qui représente environ la moitié du déficit budgétaire français. Quelle que soit la réponse du haut fonctionnaire et de la rue, la question sera sans doute posée un jour par les marchés.
On écoute enfin les démographes !
Depuis longtemps ils annoncent la diminution prochaine de la population de nombreux pays, puis de l’ensemble de la planète, alors que la mode était plutôt à la crainte de la surpopulation, crainte qui a été relayée et amplifiée, notamment par une partie de l’écologie politique.
Depuis, la mode a changé. On a remarqué la baisse de la population chinoise, qui devrait s’accélérer, et celle de nombreux autres pays.
En France, nous n’en sommes pas là, mais la baisse de la fécondité va nous rapprocher du jour où la population va commencer à diminuer.
Avant d’examiner cette situation française, il faut rappeler le contexte mondial et les principales raisons de cette baisse.
La baisse de la fécondité se répand dans le monde entier, et cela dans les trois parties du monde que l’on distingue habituellement :
Au passage, il faut signaler une croyance répandue selon laquelle l’islam est une cause de forte fécondité, alors que l’examen montre que c’est le niveau de développement qui est déterminant : les pays musulmans profondément sous-développés, comme ceux du Sahel, ont une fécondité élevée, mais elle n’est que moyenne dans les pays musulmans où le développement est bien amorcé, comme le Maroc, la Tunisie, l’Iran, l’Indonésie…
Et il n’y a pas que des pays musulmans qui ont une forte fécondité, c’est aussi le cas de certains pays chrétiens africains, et de certaines communautés comme les Amish en Pennsylvanie ou les Juifs orthodoxes de New York, et de certains quartiers de Jérusalem.
Certaines causes de cette baisse de la fécondité sont les mêmes dans l’ensemble des pays, et sont bien connues et étudiées. Il s’agit de la scolarisation des filles, des difficultés de logement, du coût de l’éducation, de la diffusion de la contraception. Tout cela se trouve en général dans les grandes villes. On passe ainsi d’une famille villageoise où l’agrandissement de la maison ne coûte pas cher et où les enfants aident les parents dans les champs ou pour l’élevage, à un univers urbain complètement différent.
D’où l’idée généralement répandue que l’urbanisation est la principale cause du déclin de la fécondité à l’échelle mondiale.
Mais, à mon avis, il y en a une autre dont on ne parle pas.
Une motivation importante pour avoir des enfants est que quelqu’un s’occupera de vous pendant vos vieux jours. Ce qui explique par ailleurs la préférence pour les garçons dans les sociétés traditionnelles, la fille devant s’occuper de sa famille et de son mari.
Or, à partir du moment où existe un système de retraite, cette motivation disparaît, on est moins enclin à faire des sacrifices financiers pour un deuxième enfant, le premier étant supposé être un garçon, au besoin au prix d’un avortement, ou d’un abandon si c’est une fille.
Pour parler brutalement, avoir une retraite, c’est permettre de ne pas avoir d’enfant et de compter sur ceux des autres. Cela non seulement pour la financer, mais surtout pour pouvoir assurer les prestations nécessaires : on oublie qu’il ne faut pas seulement de l’argent, mais surtout des garde-malades, des infirmiers, des médecins… qui vont manquer justement parce qu’on a moins d’enfants ! Sauf immigration, qui se fera probablement de toute façon pour cette raison, malgré l’hostilité de l’opinion publique.
Par ailleurs, un système de retraite généralisé suppose un certain développement économique, c’est à mon avis un lien qu’on oublie entre la baisse de la fécondité et le développement.
Cette baisse de la fécondité a longtemps été ignorée du grand public car la population continue à augmenter. Mais cela parce que l’augmentation du nombre de personnes âgées, conséquences des progrès de la médecine, masquait la diminution du nombre de jeunes, ce qui a largement faussé les idées des écologistes.
Il y a eu quelques lanceurs d’alerte précurseurs, dont le plus ancien est Alfred Sauvy (1916–1990) que j’ai connu à la fin de sa carrière, que je considère comme le père de la démographie moderne et qui a largement contribué intellectuellement à la législation nataliste française. On peut citer également le site Pronatalist.org, qui prévoit un « effondrement de la civilisation ». Ce courant est notamment illustré par Elon Musk, pour qui cet effondrement est « un bien plus grand risque que le réchauffement climatique ». À 51 ans, le nouveau patron de Twitter est déjà père de dix enfants.
La France était en dépeuplement relatif depuis Louis XIV, et a été battue par la Prusse en 1870, notamment du fait de son infériorité numérique.
Elle s’est trouvée ensuite en dépeuplement « naturel », c’est-à-dire hors immigration, jusqu’en 1939. Pour le contrebalancer, elle a attiré des immigrants italiens puis polonais, puis des Juifs fuyant le nazisme.
Ensuite, grâce à sa politique nataliste développée de 1938 à 1946 (allocations familiales, parts fiscales diminuant l’impôt sur le revenu…), le baby boom est allé au-delà du rattrapage des naissances perdues pendant la guerre, contrairement aux autres pays où il a été bref et moins intense. Avec le recul, on constate que si les avantages financiers ont joué un rôle, celui-ci a été accentué par une atmosphère favorisant le cumul emploi-maternité. Contrairement à l’attitude traditionnelle alors en vigueur dans les autres pays où la mère de famille est censée rester à la maison.
Ce dernier point a justement été un argument pour les gouvernements de gauche : « favoriser la fécondité est un moyen pour la droite de pousser les femmes à rester à la maison ». Pour cette raison et également par égalitarisme « pourquoi distribuer de l’argent aux riches ? », les incitations financières ont été plafonnées par les gouvernements de gauche, et l’atmosphère générale a été moins favorable. Le mot « nataliste » est devenu négatif.
Finalement, après des fluctuations, (moindre fécondité dans les années 1980 et 1990, reprise au début des années 2000), on se retrouve avec une baisse des naissances assez prononcée.
En août 2023 on constate une chute de 8 % par rapport à août 2022, selon les chiffres provisoires publiés par l’Insee. Depuis le début de l’année, on comptait déjà environ 35 000 naissances de moins en 2023 qu’en 2022.
L’année pourrait se terminer avec environ 700 000 naissances, soit la pire année depuis 1945.
Une partie de cette baisse est due à l’augmentation continue de l’âge de la maternité : on retarde de plus en plus le moment d’avoir des enfants, ce qui diminue la taille de chaque promotion. L’âge moyen des mères à la naissance est ainsi passé de 30,2 à 31,2 en dix ans.
On peut penser qu’il y aura un rattrapage partiel un jour, lorsque, vers la quarantaine, les femmes verront qu’il ne leur reste que quelques années pour concrétiser leur souhait, qui est en moyenne de plus de deux enfants. Mais avoir des générations creuses aujourd’hui pour en avoir (peut-être) de moins creuses demain ne fait que perturber beaucoup d’activités, à commencer par l’école.
Et la France est relativement en meilleure situation que le reste de l’Europe, avec 1,8 enfant par femme contre 1,3 en moyenne dans les autres pays. Et, comme en France, la chute s’est accentuée encore récemment, sauf au Portugal, avec une baisse de 4,9 % dans l’ensemble de l’Union entre 2021 et 2022. En Estonie et en Grèce, la chute a été de plus de 10 %.
La question est maintenant largement débattue, et de nombreux gouvernements ont voulu imiter la France de 1939 en aidant financièrement les familles.
Les résultats ont été faibles ou nuls. En effet, le problème n’est pas purement financier : par exemple, ce ne sont pas les allocations qui vont augmenter le nombre de logements disponibles et faire baisser leur prix, elles ne feront que renchérir les loyers !
Nous avons vu qu’un des points clés est de faciliter l’organisation des mères de famille qui veulent en grande majorité travailler. Les gouvernements se penchent à juste titre sur le nombre de crèches, mais les crèches officielles ont un taux d’encadrement qui fait qu’on ne peut pas les multiplier… puisque les jeunes ne sont pas assez nombreux. La conséquence est évidemment la création de crèches privées, officielles, ou pas, et dans ce cas moins encadrées ! Ou l’appel à des nounous, massif dans mon quartier et probablement ailleurs, et qui sont très majoritairement issues de l’immigration…
Sur le plan économique, ces crèches et ces nounous permettent à des femmes qualifiées de se consacrer à leur carrière, d’abord parce qu’elles le souhaitent, et ensuite parce que le manque de personnel pour faire tourner l’économie est criant.
Nous avons vu que la généralisation des retraites est également une cause importante de la baisse de la fécondité. Mais personne n’en parle, et on ne voit pas bien quelle conclusion en tirer, personne ne voulant supprimer ce qui est considéré comme une grande conquête sociale dont tout le monde pense bénéficier.
Et pour finir, ajoutons que non seulement le vieillissement va rendre très pénible la nuit des retraités faute de bras, mais aussi la production nationale dans son ensemble. Une enquête diffusée par The Economist ajoute qu’il y aura baisse de la créativité : une étude fondée sur le nombre et la nature des brevets montre que la baisse de la proportion de jeunes, non seulement diminue la créativité, mais surtout freine l’innovation de rupture.
Comme le vieillissement semble inévitable, ce journal estime que le seul remède est d’augmenter le niveau de formation de la population. C’est envisageable dans les pays mal scolarisés, mais il faudrait des réformes profonde en Occident, et particulièrement en France.
Avec quelques collègues, je sonne l’alarme depuis des décennies sur les conséquences irréversibles de la baisse de la fécondité. Je suis donc heureux de cette actuelle prise de conscience, qui est due en partie au débat sur les retraites, et navré de voir que les écologistes l’ont retardée avec leur crainte de la surpopulation de la planète.
Mais cette prise de conscience est encore partielle, comme en témoigne le ton un peu sceptique de l’article du journal Les Échos du 16 janvier 2023 sur ce thème. Plus généralement, je ne suis pas cru lorsque je dis que certains pays auront disparu dans moins d’un siècle, dont probablement le Japon et la Corée, mais aussi une bonne part des pays européens.
Tout cela paraît encore bien abstrait et lointain. Mais certaines conséquences sur la production nationale se font déjà sentir, notamment dans les services aux personnes âgées. Il faut donc continuer à expliquer sans relâche que les prestations dont nous bénéficions ne tombent pas du ciel, ne sont pas une question d’argent, mais nécessitent le travail du plus grand nombre de personnes possible. On retombe sur la question du recul de l’âge de la retraite et de l’immigration.
Et de toute façon, il faudrait enclencher une politique nataliste vigoureuse (campagnes, congé maternité mieux indemnisé pour toutes, y compris indépendants, crèches, avantages famille dès deux enfants, réduction d’impôts, etc). De plus, il faudra l’afficher franchement pour casser le pessimisme actuel et l’ambiance antinataliste, tout en étant conscient qu’il faudra des dizaines d’années pour remodeler la pyramide des âges.
Tu es jeune, tu es Français et tu es plein d’énergie, d’optimisme et de détermination ? Tant mieux, il t’en faudra vraiment beaucoup car grâce au gouvernement actuel, tu seras consciencieusement broyé !
Comment, tu trouves le constat abrupt ? Tu penses que tout ceci est très exagéré ?
Cependant, force est de constater que, si tu rentres dans la vie active, tu vas devoir composer avec quelques petites difficultés qui sont bien franco-françaises.
Ainsi, tu es dans le pays le plus décarboné du monde, et celui dont l’électricité est, normalement, l’une des moins chères car produite en grande partie par une infrastructure nucléaire qui a amplement démontré sa productivité et sa fiabilité. Mais malgré cela, tu devras payer ton électricité (et toutes tes énergies) fort cher : taxes à gogo, distorsions massives du marché de l’électricité au profit de margoulins, de capitalistes de connivence et d’autres pays européens, choix géopolitiques débiles, tout a été fait pour que soit hors de prix cette énergie dont tu as tant besoin pour te lancer dans tes nombreux projets et pour alimenter tes idées.
Oh, bien sûr, il y a bien quelques tentatives timides du gouvernement actuel pour endiguer le problème mais après plusieurs années de n’importe quoi et d’atermoiements, on comprend qu’il ne s’agit que de théâtre et qu’il n’y aura rien de concret avant des mois, des années peut-être.
Ainsi, tu es dans un pays riche de son patrimoine immobilier, de ses villes aux réseaux d’électricité, d’égouts, de voirie bien agencées. Las : pendant que les mairies socialistes, écologistes ou simplement idiotes se battent pour saboter ces infrastructures, la quantité de biens disponibles à la location s’évapore à coup de législations de plus en plus délirantes. À Rennes par exemple, l’offre de location s’effondre de 42%, et de plus de 36% à Paris. Il faut dire que le gouvernement a tout fait pour aboutir à ce flamboyant résultat avec sa lutte imbécile contre les passoires thermiques.
Oh, bien sûr, il tente maintenant un piteux rétropédalage mais, engoncé qu’il est dans son dogme écolo-hystérique, il va lui falloir du temps – beaucoup trop – pour effectivement annuler complètement ses lois destructrices et ses décrets de crétins.
Ainsi, tu bénéficies d’un pays qui dispose de nombreuses écoles, de nombreuses universités, d’un bataillon conséquent d’enseignants et d’une culture riche et reconnue de par le monde. Mais de choix éducatifs désastreux (méthodes de lectures idiotes, dogmes éducatifs dépassés) en abandon des masses enseignantes à des syndicats collectivistes arc-boutés sur un immobilisme de mammouth formolisé, en passant par la manie nécrosante d’un centralisme totalitaire, tu as bien du mal à lire, écrire et compter correctement.
Oh, bien sûr, le gouvernement niera purement et simplement ces problèmes et te filera, entre des cours de poterie et de macramé, quelques notions d’empathie et pourquoi pas, une visite à un atelier “Godes en plasticine” dans le cadre de la nouvelle éducation sexuelle. Pour les matières solides, qui débouchent sur du concret et de l’opérationnel, tu devras te débrouiller autrement.
Ainsi et si tu parviens à l’université entre deux cours de pâte-à-sel inclusive et d’éco-sensibilisation au tri des déchets, tu pourras goûter à la joie d’une université à portée de bourse, mais compte-tenu du coût de la vie (celle qui t’attend et que 3000 milliards de dettes vont légèrement alourdir), tu devras probablement improviser quelque peu pour tes contingences quotidiennes : profitant des effets de bords de tout socialisme lorsqu’il se déploie, tu goûteras à la joie des queues interminables et du temps perdu pour des médicaments, ou pour des repas.
Mais comme tu es plein d’énergie, d’une farouche volonté d’affronter les petites difficultés de la vie, d’un courage d’airain et d’une solide formation, rien de tout cela ne t’effraiera.
Oh, bien sûr, la désindustrialisation galopante du pays (avec l’explosion du chômage chez les chefs d’entreprise) te donnera un peu de fil à retordre, d’autant qu’avec les efforts subtils du gouvernement pour pousser l’économie verte à coup d’argent gratuit des autres, certains effets de bords commencent à devenir gênants. Si, comme on te l’avait lourdement conseillé pendant tout ton enseignement, tu as tout misé sur les renouvelables, les miroirs magiques et le moulins à vent, tu auras peut-être une reconversion rapide à envisager, alors que les hausses d’intérêts entraînent une chute de 20% de ce secteur et que les projets d’implantation suscitent de plus en plus rejets. Pour le coup, il aurait peut-être mieux valu être Chinois.
Mais moyennant une implication de tous les jours, une abnégation complète et de solides efforts (qui n’en ferait pas pour un si beau pays plein d’avenir ?), toi aussi tu auras droit à quelques joies de vivre – les petites vicissitudes de la vie seront de toutes façon couvertes (ou presque) par cette sécurité sociale que le monde nous envie – et à la fin, tu auras droit à une bonne retraite, bâtie sur les solides entrées d’argent que le gouvernement voudra bien laisser aux organismes paritaires obligatoires.
Magie de la retraite par répartition assise sur des naissances qui s’effondrent, tu bénéficieras alors d’une pension minuscule pour les efforts croissants de toute une vie et ce, même si en réalité, tu es largement favorable à la capitalisation (qui t’aurait de toute façon largement rapporté beaucoup plus, mais c’est interdit dans un pays socialiste, alors oublie).
Bref, ce sera le bonheur…
Ah, finalement, tout bien considéré, qu’il fait bon être jeune en France !
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Un article de la Nouvelle Lettre.
Aujourd’hui, discussion sur la revalorisation des retraites pour maintenir le pouvoir d’achat des salariés en activité : il faudrait faire main basse sur les fonds détenus par Agirc-Arrco. Cette spoliation a été tentée à plusieurs reprises, mais jusqu’à présent elle a été rejetée, et même déclarée anticonstitutionnelle.
Aujourd’hui on connaît le projet de loi de finances de la Sécurité sociale.
Il ferait apparaître la nécessité pour le budget de l’État de financer le déficit de 20 milliards déjà enregistré. Mais ce déficit ne tient compte que du régime général des salariés du secteur privé. Le vrai trou à combler par le budget n’est pas de 20 milliards, mais de 70 milliards.
Ainsi, le système de retraite actuel coûte à l’État la moitié de son déficit annuel.
On a beau masquer les chiffres, la logique du système par répartition suffit à le condamner pour deux raisons.
La première est qu’il consiste à demander aux salariés actifs actuellement employés de cotiser pour payer les pensions des retraités actuels. En 1970, il y avait environ 4 cotisants pour un retraité. Aujourd’hui, il y a moins de 1,2 cotisant. Dans une population vieillissante l’explosion ne fait aucun doute, d’autant que les jeunes entrent de plus en plus tard dans la vie active, et que les pensionnés se font de plus en plus vieux.
La deuxième raison n’est pas souvent évoquée, elle est pourtant déterminante : l’argent des retraites est gaspillé, puisque les cotisations ne sont pas sitôt entrées dans les caisses de l’URSSAF qu’elles en ressortent pour payer les pensions. Les caisses de retraite sont de simples tiroirs-caisses, qui sont vidés entre le 1er et le 9 de chaque mois. Il faut attendre les cotisations du mois précédent pour les remplir à nouveau. La plupart des Français pensent que leur argent a été mis de côté afin qu’ils le retrouvent le jour de leur départ en retraite. C’est évidemment pure illusion.
Donc, non seulement le système est déficitaire, mais il le sera de plus en plus, et ce déficit viendra gonfler une dette publique déjà bien trop lourde, au point que notre pays a été déclassé par les agences de notation, ce qui signifie que le taux auquel les prêteurs rachèteront la dette française sera de plus en plus élevé.
Contrairement à une farce bien répandue, la dette publique sera remboursée tôt ou tard, et plus douloureusement. Avec le niveau actuel de taux, le service annuel de la dette française (les intérêts payés) représente environ 50 milliards, c’est le poste le plus lourd de la dépense publique, avant celui du ministère de l’Éducation nationale.
Les chiffres ne tiennent pas lieu de vérité aux yeux de beaucoup de personnes.
Qu’on se réfère alors à un certain nombre de mensonges qui tentent d’embellir le système par répartition :
C’est une conquête sociale, arrachée par les syndicats et les salariés après de belles luttes
C’est en réalité un système mis en place par Vichy en 1941, par un ministre ancien secrétaire général de la CGT (il ne manquait pas de gens de gauche aux côtés de Pétain). Comme il était normal, cette loi de Vichy a été reprise par le Conseil National de la Résistance dominé par les communistes au moment de la Libération.
C’est un déficit qui peut facilement se rattraper avec le retour de la croissance
Cet espoir permet aussi de se rassurer sur la dette publique. Les performances modestes de la France seraient dues à la crise du covid, à la guerre en Ukraine, au protectionnisme américain et à la concurrence chinoise déloyale. Ce serait bien la première fois qu’une croissance pourrait revenir et s’accélérer dans une économie qui manque d’investissements privés et de main-d’œuvre compétente.
Variante du mensonge précédent : l’inflation efface la dette
Ce n’est pas vrai du point de vue nominal, si les membres de la zone euro tolèrent les déficits français qui menacent la qualité de leur monnaie. Et ce n’est pas vrai dans la réalité, parce que l’inflation détruit les économies au lieu de les stimuler.
L’aveuglement volontaire ou non sur l’inévitable explosion du système par répartition se marie très bien avec la démolition systématique de la capitalisation, dont les méfaits seraient évidents.
Les placements financiers sont périlleux, cf les crises boursières comme celles de 1929, 2001 ou 2008. Or, il est prouvé que la certitude de retrouver son capital placé est acquise après 45 années.
Les taux de rapport sont insuffisants à garantir une plus-value financière. Or, il est prouvé que le taux de rentabilité aura été en moyenne de 4 % en termes réels depuis plusieurs décennies.
De nombreux gestionnaires de retraites en capitalisation ont volé les souscripteurs et les pensionnés, tels Murdock, Enron, et autres. Ces scandales relèvent de la malhonnêteté, et ont été châtiés, les entreprises n’ont pas pour vocation de gérer des caisses de retraites.
Enfin, et couronnant le tout, la capitalisation est le fleuron du capitalisme, un système économique fondé sur l’exploitation des travailleurs.
Il y a eu, et il y a de sombres heures dans l’histoire économique.
À certains moments, des populations en sont réduites à vivre au jour le jour, sans pouvoir faire le moindre projet pour le lendemain. Capitaliser, c’est au contraire pouvoir se projeter dans l’avenir. Ce n’était pas possible en Europe dans ce qu’on appelle le haut Moyen Âge : la chute de l’Empire romain avait conduit les peuples à quitter les plaines, et les échanges étaient devenus impossibles ou dangereux. Aujourd’hui, il n’y a pas de retraite ni de capitalisation pour la plupart des habitants des pays africains.
On ne comprend pas la capitalisation parce que, paradoxalement, dans nos pays réputés riches et libres on a perdu le sens profond de la retraite : épargner pour préparer ses vieux jours, être propriétaire, transmettre un patrimoine. La retraite pousse les êtres humains à développer leurs capacités, à travailler, à entreprendre, à investir. Cette dimension humaine a été oubliée.
Le plus extraordinaire de l’affaire est que l’on ignore aussi la dimension mondiale des retraites.
Au prétexte d’avoir « le meilleur système social du monde » on ne sait pas que la plupart des pays libres ont réformé leurs systèmes depuis des décennies, et qu’ils en récoltent aujourd’hui les bienfaits, non seulement sous forme de pensions améliorées, mais aussi et surtout par soutien de la croissance et diminution des dépenses publiques et des impôts.
Alors, pourquoi ne pas capitaliser, et comment la réforme s’est-elle faite à l’étranger ?
On peut illustrer globalement la différence entre répartition et capitalisation.
Pour un smicard français au salaire net de 1400 euros, les cotisations à verser à l’URSSAF (parts salariales et patronales cumulées) sont en principe de 320 euros. Pour capitaliser sur un compte d’épargne retraite assurant une pension équivalente, il suffit de verser 110 euros par mois. Un à trois, c’est le chiffre habituellement évoqué pour comparer les coûts respectifs : la répartition coûte trois fois plus cher.
On peut affiner le tableau : quel sera le taux de recouvrement, combien de son dernier salaire celui qui va partir à la retraite percevra désormais en pension ?
Ici on peut comparer le sort d’un Français et d’un Européen moyen (pays de l’OCDE) :
51 % contre 59 %, et en réalité seuls l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Irlande font moins bien que la France, tandis que des pays à forte capitalisation comme les Pays-Bas, le Luxembourg, l’Autriche et la Hongrie arrivent à plus de 70 %.
Donc, des retraites qui coûtent moins cher et qui rapportent plus.
S’agit-il d’un miracle ? Non, mais d’une arithmétique élémentaire : une somme placée à 5 % l’an doublera de valeur en 15 ans. C’est ce qu’on appelle la loi des intérêts composés, jadis enseignée en classe de huitième. Et, comme cela est évident en calcul financier, plus le taux est élevé et plus le placement est long, est plus le rapport est élevé et le risque diminué.
Il va de soi que la qualité du gestionnaire du placement est déterminante. Cela apparaît nettement dans le tableau de ce que représentent les fonds de pension dans les divers pays.
Ici la France est réellement dernière, avec seulement 8 % du PIB, alors que plusieurs pays sont à plus de 100 % !
Les études précises sur les systèmes de retraites ont distingué ce qu’on appelle trois piliers :
Le premier pilier correspond à ce qu’on peut appeler un « filet social » : nulle personne ne peut être laissée sans moyen de survivre. Elle participe de la solidarité, elle n’a donc pas à être financée par des cotisations, mais par des impôts (nationaux ou locaux suivant les pays).
Le deuxième pilier est présent dans la plupart des pays, il donne à l’assuré la possibilité de préparer sa propre retraite par capitalisation, et des exemptions fiscales peuvent être reconnues pour ces retraites complémentaires obligatoires.
Le troisième pilier est dans une logique purement assurancielle.
Si l’on observe les réformes réalisées depuis cinquante ans, on voit qu’elles se font par glissements de piliers successifs – les modalités de la transition pouvant varier.
Le fait est que la France est coincée dans le premier pilier. Peut-être la transition y est-elle plus difficile à organiser.
C’est réellement le seul problème épineux de la réforme des retraites : comment passer d’une situation où tous les assurés sans exception sont en répartition en une vraie et bénéfique révolution, celle de la capitalisation ?
Remarquons d’abord que si le premier pilier est écrasant, il existe aussi un deuxième pilier non négligeable.
Certaines professions ont eu le droit de s’organiser en capitalisation, la profession des pharmaciens en particulier, et tout pharmacien installé s’en réjouit, preuve que la capitalisation, ça marche.
Une masse considérable de personnes ont la possibilité d’une retraite complémentaire par capitalisation, comme les fonctionnaires avec la Préfon ; eux aussi ne veulent pas perdre cette ouverture.
Enfin, et surtout, il y a les comptes d’épargne qui ont été créés par le législateur. Ils s’inscrivent le plus souvent dans le cadre de la « participation », qui s’inscrit à son tour dans une logique du partage des résultats des entreprises. La doctrine gaulliste a favorisé ce type de disposition.
En dépit de leurs différences, ces trois types de retraites sont dénommés « capitalisation collective » pour les distinguer de ce qu’est un deuxième pilier dans certains pays, et encore plus de ce qu’est le troisième pilier : la capitalisation individuelle, chaque personne gérant elle-même sa retraite auprès de l’assureur librement choisi, compagnie d’assurance ou fonds de pension.
La capitalisation collective a un inconvénient majeur : elle lie la retraite au sort de la profession ou de l’entreprise, les changements en cours de carrière font problème, même si on peut prévoir cette éventualité.
La vraie difficulté est la transition au sens strict : comment abandonner les droits acquis par la quasi-totalité de la population ?
Deux solutions sont exclues :
La plus célèbre des transitions aura été celle réalisée par José Pineira au Chili, mais d’une part le niveau des pensions chiliennes était très faible, d’autre part le ministre du Travail a vendu les bijoux de famille, c’est-à-dire tout le patrimoine de l’État chilien, à commencer par les mines de cuivre et les moyens de transport. Cette heureuse conjoncture n’est pas réalisée en France, le patrimoine public étant composé essentiellement de dettes !
Il faut alors s’orienter vers un remboursement étalé dans le temps.
La meilleure proposition a été faite par Martin Feldstein, et Nicolas Marquès lui a consacré un article très détaillé. On peut qualifier cette démarche comme celle des petits pas : sur une période globale de 70 ans environ, chaque année prélève un taux de cotisation pour amorcer une capitalisation totale à la fin de la période. Le taux de transition augmente chaque année, les efforts demandés aux cotisants et futurs retraités sont ainsi moins violents et mieux acceptés, puisqu’on voit sans cesse le bout du tunnel.
J’ai fait une autre proposition consistant à demander aux actifs de continuer à abonder la répartition pendant toute la période nécessaire à éponger les droits acquis.
Cette demande n’est pas audacieuse, puisqu’elle sera faite aux intéressés par les gouvernements dans l’obligation de faire face à l’explosion de la répartition – ce qui pourrait bien se produire avant 2030. Mais cette demande vaut aussi autorisation pour le cotisant de disposer d’un compte d’épargne sur lequel l’administration n’aurait aucun droit, et ne pourrait prélever aucun impôt.
Progressivement, l’épargnant s’approchera d’une pleine capitalisation parce que les droits acquis auront été progressivement épongés. Je pense qu’une idée de Pinera mérite d’être retenue : proposer la transition de façon variable suivant les tranches d’âge :
Elles dépendent largement du contexte mondial.
Nous pouvons faire le bilan actuel, pays par pays, et constater que le premier pilier ne concernera qu’une minorité de pays, et une minorité de gens. Les pays émergents éviteront sans doute les pièges de la répartition, les pauvres ont souvent appris à capitaliser, c’est la grande découverte faite par Muhammad Yunus. Les pays « riches » s’en remettront aux techniques sans cesse améliorées de la finance assurancielle.
Le problème du système de retraite français, et plus généralement de notre système dit social est plus difficile à régler.
Il faut d’abord déchirer le voile d’ignorance, et limiter l’accès au débat à des personnes responsables. Or, toutes les réformes précédentes ont été portées ou contrôlées par le Centre d’Orientation des Retraites, qui n’a aucune connaissance même approximative du problème, ce qui est un comble !
Il y a aussi des marchands d’illusion, qui veulent garder la répartition en remplaçant les euros par des points, soit « la retraite par points » : oui, mais quelle sera la valeur du point quand ma retraite sera liquidée ? Des haricots.
Il faut ensuite avoir le courage politique de mettre fin à des privilèges n’ayant aucune justification, comme les privilèges des salariés du secteur public en particulier. Voilà qui me semble plus improbable dans les prochaines années. On peut reprendre à propos des retraites l’image de la bureaucratie française : il s’agit de couper la tête de l’hydre de Lerne, sachant que chaque fois qu’une tête est coupée, il en repousse deux. Quel Hercule ferait-il le travail ?
Je voudrais conclure par un point qui me tient à cœur, j’y ai souvent fait allusion.
Le passage à la capitalisation est un vrai choix de société.
C’est ce qu’avait souligné Gary Becker, prix Nobel d’Économie, venu à Paris en 1996 tenir conférence à mon invitation et à celle de Gérard Maudrux, gestionnaire de la Caisse des Retraites des Médecins.
Voici le choix de société lié à la capitalisation :
« C’est un retour au travail, plus de gens seront actifs et le seront plus longtemps.
C’est un retour à l’épargne, alors que la répartition dilapide l’argent gagné et la richesse nationale. C’est un retour à la responsabilité personnelle ; la répartition contient tous les germes de la collectivisation et aboutit à faire disparaître toute idée de progrès personnel ».
Alors, pourquoi retarder depuis des décennies la transition à la capitalisation, partielle ou totale ?
84 % des Français sont désormais favorables à la capitalisation pour financer leurs retraites !
Et cette tendance est particulièrement marquée chez les jeunes… Ces mêmes jeunes qui étaient très nombreux dans les cortèges de manifestants opposés à la réforme des retraites.
Ce constat factuel peut sembler paradoxal au premier abord… La préoccupation pour la retraite n’est- elle pas une question déplacée pour ces jeunes gens ? Manifester contre la réforme, n’est-ce pas un soutien implicite à la répartition ? Leur présence massive dans les manifestations contre la réforme a souvent été mal interprétée par les médias, ou analysée comme un refus de s’engager pleinement dans le monde du travail.
Non, les jeunes Français qui entrent sur le marché du travail, et qui sont opposés à la réforme des retraites ne sont pas des fainéants. Ils sont lucides tout simplement. Ils ont parfaitement conscience que l’on va leur demander de verser tout de suite des cotisations très importantes pour fournir des pensions aux retraités actuels, alors qu’ils n’auront pas droit aux mêmes pensions quand leur tour viendra… Pour des raisons démographiques évidentes.
Le refus des jeunes d’accepter la réforme des retraites proposée par le gouvernemet de monsieur Macron est une question d’égalité dans le temps, d’équité intergénérationnelle.
En 1959, il y avait 0,24 retraité par cotisant contre 0,73 aujourd’hui… Et ce déséquilibre ne fera que s’accentuer.
Le système actuel est intenable, et les jeunes le savent.
Leur participation aux manifestations contre la réforme des retraites n’était absolument pas un soutien au système actuel basé à 100 % sur la répartition, ou un désintérêt pour le travail, mais bien une volonté de changer le système actuel, comme le démontre ce sondage.
Qui peut leur donner tort ?
Personne de bonne foi assurément : quand en 1959 les dépenses de retraites représentaient 5 % du PIB, en 2020 elles sont montées à 15,9 % du PIB !
Ces dépenses sont essentiellement prélevées sur le travail… Des jeunes justement.
L’information modifie lentement la psychologie de la foule française.
Les comparaisons entre les différents systèmes de retraites et leurs coûts respectifs à l’intérieur de l’UE sont, à l’ère d’internet, faciles à obtenir pour les jeunes Français.
Les excellentes performances en matière de retraites des pays ordolibéraux sont désormais bien connues : les Pays-Bas consacrent 12,8 % de leur PIB pour leurs retraites, le Danemark 12,9 %, l’Allemagne 12,6 %… Alors que la France dépense 15,9 % soit 3 % du PIB en plus.
C’est une différence considérable de coût, sans que le service rendu soit meilleur.
En 1895, dans son ouvrage majeur Psychologie des foules, Gustave Le Bon nous dit :
S’il faut longtemps aux idées pour s’établir dans l’âme des foules, un temps non moins considérable leur est nécéssaire pour en sortir. Aussi les foules sont-elles toujours, au point de vue des idées, en retard de plusieurs générations sur les savants et les philosophes. Tous les hommes d’État savent aujourd’hui ce que contiennent d’erroné les idées fondamentales citées à l’instant, mais leur influence étant très puissante encore, ils sont obligés de gouverner suivant des principes à la vérité desquels ils ont cessés de croire.
La psychologie de la foule évolue très lentement, et quand elle le fait, ces évolutions perdurent pendant plusieurs générations.
Aucun politicien ne peut gouverner contre la psychologie de la foule. Tous les professionnels de la politique le savent.
Nous sommes actuellement en train de vivre un mouvement souterrain mais puissant de modification de la psychologie de la foule. Ce mouvement, qui affecte de nombreux États providence, peut être résumé par une formule lapidaire : la perte de confiance dans l’État.
Ou plutôt, le déplacement de la confiance des services publics vers les services privés.
Le chiffre de 84 % de la population ne faisant plus confiance à la seule répartition (et donc à l’État) est éloquent… Un autre indice de la perte de confiance des Français dans le service public est visible dans une étude montrant la perte quasi totale de confiance dans les médias publics. Seuls 18 % des Français ont encore confiance dans les médias du service public.
Les signaux faibles sont partout.
La lente modification de la psychologie de la foule est bien engagée désormais… Pour Gustave Le Bon, ce type de mouvements est durable, et entraîne systématiquement l’adaptation des politiques, car c’est elle qui commande aux politiques, et non l’inverse.
Il est donc très probable que le système de retraite des Français évolue prochainement ainsi que, plus généralement, tout le modèle français d’État providence, pour se rapprocher des systèmes des pays ordolibéraux qui nous entourent.
Le changement actuellement constaté est très prometteur, et constitue une excellente nouvelle pour nos libertés.
Par Romain Delisle.
Un article de l’IREF
Depuis les années soixante, le taux de fécondité des Français s’est effondré, passant de 2,8 à 1,84 enfants par femme en 2020.
Les générations nées pendant la période du baby-boom ont donc commencé à prendre leur retraite au moment même où décroissait la part d’individus en âge de travailler. Selon un rapport du Sénat, la proportion de plus de 65 ans dans la population a augmenté de 4,7 % entre 2000 et 2020 quand celle des 20-59 ans a diminué de 4,4 %. Conséquence majeure, durant la même période : le ratio entre le nombre de cotisants et celui des retraités a baissé de 2,1 à 1,7, et devrait continuer sa lente décrue jusqu’en 2070, date à laquelle il s’élèvera à 1,3.
C’est cet inquiétant constat qui a motivé la création du Fonds de réserve pour les retraites (FRR) par Lionel Jospin dans la Loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Au départ conçu comme une section du Fonds de solidarité vieillesse, le FRR a pris son indépendance en 2001 pour devenir un établissement public administratif, dirigé notamment par le directeur de la Caisse des dépôts et consignations, mais qui confie la gestion de ses actifs à des prestataires privés, via un système d’appel d’offre classique.
L’objectif qui lui est assigné est clair : préserver l’équilibre financier du régime général de retraite entre 2020 et 2040, au moment où les effets de la « bosse démographique » commenceront à se faire sentir.
À l’origine, le Fonds était censé percevoir 1000 milliards de francs pour mener à bien sa mission, une somme qui, par la suite, s’est réduite comme peau de chagrin pour atteindre 31,3 milliards d’euros tirés notamment des privatisations d’entreprises, de la vente des licences de téléphonie mobile et de taxes affectées.
Dès 2011, le patrimoine du FRR s’élevait déjà à 37 milliards d’euros, dont 5,6 milliards de gains réalisés grâce à l’argent de son « capital » fourni par l’État.
Ces actifs sont divisés en deux catégories principales : une « poche de couverture », composée d’obligations de pays développés, en euros ou en dollars, et une « poche de performance » composée d’actions, d’OPCVM (organismes de placement collectif en valeurs mobilières, des fonds destinés à mutualiser les risques d’investissement dans les actions), et d’investissements dans des PME non cotées.
À la fin de l’année 2021, comme le décrit son rapport annuel, le portefeuille du fonds se composait de 38,6 % d’actions cotées, de 37,4 % d’obligations dites de qualité, notamment venant de pays sûrs et de 7,4 % de parts d’entreprises non cotées.
En outre, 32,5 % de ces investissements étaient destinés à alimenter l’économie nationale, dont 1,1 milliard d’euros en capital-risque fléchés vers des start-ups hexagonales en déshérence de financements comparées à leurs consœurs britanniques.
En 2010, sous le premier mandat de Nicolas Sarkozy, et suite à la crise financière de 2008, l’État aux abois cherchait de toute urgence de nouveaux moyens de financement de la dette sociale.
Il a donc introduit une mesure en loi de financement de la sécurité sociale pour obliger le FRR à verser chaque année 2,1 milliards d’euros à la CADES (Caisse d’amortissement de la dette sociale), afin d’éponger un minimum des déficits du régime général des retraites, et ce jusqu’en 2025, date à laquelle cette somme sera réduite à 1,45 milliard.
En 2021, le FRR avait donc été ponctionné au total de 27 milliards d’euros au profit de la CADES et, de manière plus marginale, de la CNAV (Caisse nationale d’assurance vieillesse), alors que dans le même temps, ses investissements lui avaient rapportés 16 milliards.
Comme le montre le graphique suivant, la performance du FRR a toujours été supérieure aux taux d’intérêts souverains depuis 2012, sauf en 2018 :
Depuis 2010, la performance annuelle du fonds a donc été de 4,7 %, contre un coût annuel de 0,9 % pour la dette de la CADES.
Toujours selon les calculs du Sénat, l’argent placé par le fonds a donc rapporté 12,3 milliards d’euros de plus que si celui-ci avait été affecté au remboursement de la dette. Selon le FRR, ses réserves s’élèveraient aujourd’hui à 56 milliards d’euros, s’il n’avait pas été mis à contribution par l’État, et même à 74 milliards si celui-ci avait continué de le financer après 2011.
Cette mise à contribution pose deux principaux problèmes pour l’avenir : elle obère la rationalité des choix financiers du FRR qui doit privilégier les actifs de sa poche de couverture plus sécurisés, mais dont le rendement est faible ; et elle assèche ses réserves en le ponctionnant plus que les gains qu’il réalise.
À horizon 2033, le patrimoine de l’établissement public devrait donc s’effondrer pour atteindre entre 6,8 et 14,6 milliards d’euros selon le taux de rendement de ses actifs (entre 1 et 4 %). En tout état cause, il n’est plus à même de remplir sa mission initiale, dépecé comme il l’a été par les gouvernants successifs.
Dans la mesure où il est décemment possible de considérer que le régime général des retraites par répartition est insoutenable, dans les conditions démographiques et d’essoufflement de la productivité des travailleurs français, le FRR pourrait constituer un embryon de système par capitalisation, amené à se développer progressivement, à condition qu’il ne subisse plus de prélèvement de la part de l’État.
À terme, ce modèle de capitalisation sous-traité au secteur privé pourrait même être mis en concurrence avec des fonds de pension plus classiques via, par exemple, la création d’un compte personnel de retraite.
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Baisse de la croissance, tensions sur le pouvoir d’achat, déficits structurels des finances publiques, opposition épidermique aux réformes des retraites, la France se crispe à répétition sans voir le point commun à tous ces sujets, le vieillissement d’une société mal préparée.
Rétrospectivement, plus le vieillissement s’installe, plus son impact est occulté, comme le nez au milieu du visage que l’on ne voit plus.
Au moment où il généralisait la répartition pour financer les retraites, le législateur de 1945 n’hésitait pas à souligner qu’elle était plus onéreuse que la capitalisation, et que si on n’y prenait pas garde, le vieillissement lent et progressif de la population « ferait peser sur la population active une charge insupportable ».
En 1965, le cinquième plan de développement économique et social invitait à accroître le montant des réserves des régimes de retraites.
En 1978, le Premier ministre Raymond Barre soulignait qu’« on ne pourra pas dans ce pays continuer à concevoir un système d’avantages sociaux [seulement] à partir du mécanisme de répartition, et il faudra bien, comme dans d’autres pays, arriver à des mécanismes de capitalisation. »
Mais près d’un demi-siècle après la fin du baby-boom, la France n’a pas tenu compte de ces mises en garde et de ces appels à l’action.
En 1991, dans un Livre blanc sur les retraites, le Premier ministre Michel Rocard identifiait tous les dangers liés au statu quo (hausse des prélèvements, réduction du pouvoir d’achat et de l’épargne, perte de compétitivité, chômage…) mais refusait le recul de l’âge de la retraite, comme la généralisation de la capitalisation.
En 1999, après des années d’attentisme, le gouvernement français mettait en place un Fonds de réserve pour les retraites (FRR) sous la houlette de Lionel Jospin. Mais ce fonds a été rapidement pillé sans vergogne par différents gouvernements à la recherche d’argent facile pour résorber les déficits, sans comprendre que ces derniers étaient la conséquence d’un vieillissement mal anticipé.
En 2003 et 2017, les gouvernements de François Fillon et d’Emmanuel Macron relançaient les plans d’épargne retraite, mais ils n’attirèrent que 5,8 % des cotisations retraite en 2021.
En 2020, une réforme mal pensée proposait de fermer l’Établissement de retraite de la fonction publique (ERAFP), le plus gros fonds de pension français avec 38 milliards d’euros d’actifs placés.
En 2023, une réforme des retraites présentée comme comptable ferme un des régimes de retraite le mieux provisionné de France, celui de la Banque de France, avec à la clef des surcoûts à venir pour le contribuable.
La situation française s’apparente à celle d’un déni durable de réalité et d’un refus d’obstacle.
Comme l’expliquait Alfred Sauvy :
« Nous sommes tous plus ou moins enclins à ne pas voir ce qui nous déplaît ».
Et parmi les sujets que l’on refuse d’assumer collectivement, le vieillissement occupe une place clef.
Le créateur de l’Institut national d’études démographiques soulignait :
« Il suscite un extraordinaire refus de voir, alors que c’est le phénomène le plus sûr, le plus ancien (il a déjà deux siècles en France), le plus facile à mesurer, sans qu’il soit besoin d’aller à une quatrième décimale, le plus facile à prévoir dans une large mesure. »
Pourquoi le vieillissement est un problème dans un pays qui s’appuie quasi exclusivement sur la répartition ?
En raison du déséquilibre croissant entre le nombre d’actifs cotisants et celui des retraités. Avec le contre-choc du baby-boom, le fameux théorème de Alfred Sauvy – « ce sont les enfants d’aujourd’hui qui feront les retraites de demain » – s’est retourné contre nous.
De 1950 à aujourd’hui, la fécondité a chuté de 3 à 1,8 enfant par femme. Moins d’enfants, c’est moins d’actifs, moins de cotisants, moins de moyens pour financer les retraites comme toutes les autres politiques publiques. De même, la bascule vers le vieillissement rime avec charges supplémentaires. Les dépenses publiques pour les plus de soixante ans sont trois fois plus élevées que celles en faveur d’une personne entre 25-59 ans et 2,6 fois plus élevées qu’un individu de 24 ans ou moins, mais rien n’a été fait pour amortir ce choc.
Comme le soulignait encore Alfred Sauvy :
Dès l’instant que le niveau de la natalité ou de la fécondité est parfaitement connu, pourquoi y aurait-il débat ? Parce que le diagnostic que l’on émet conduit au pronostic. Et avant même que le pronostic soit établi, déjà le diagnostic semble conseiller l’ordonnance, une ordonnance désagréable. L’opinion préfère alors refuser le diagnostic pour ne pas avoir à suivre certaines mesures. C’est un peu comme si un malade refusait le diagnostic parce qu’il a peur du remède.
Depuis la fin du baby-boom, la réflexion collective face au vieillissement n’a quasiment pas progressé.
L’État a fait mine de s’emparer du sujet de la dépendance en créant une « cinquième branche » de la sécurité sociale, mais chacun sait que c’est un miroir aux alouettes.
Les moyens manquent pour financer la dépendance à domicile comme dans les Ehpad. La tentation est forte de pointer du doigt les opérateurs privés, sans qu’on réalise que le sous-financement orchestré par l’assurance maladie est un problème global.
S’agissant des retraites, les rapports du Conseil d’orientation des retraites dressent un constat édulcoré de la situation. Ils occultent notamment la quasi-totalité (94 %) des déficits associés aux retraites (884 milliards d’euros depuis 2002 ou 2 % du PIB chaque année). Ils se focalisent sur le secteur privé et ne tiennent pas compte des subventions d’équilibres dont bénéficient les retraites des fonctionnaires et les autres régimes spéciaux (SNCF, RATP…).
Ce faisant, le COR a contribué à masquer la situation.
La dégradation structurelle des finances publiques françaises est une conséquence du vieillissement. Ce n’est pas une coïncidence si les administrations publiques n’ont jamais été à l’équilibre depuis 1974, date qui marque la fin du baby-boom.
Auparavant, la croissance de la population active et de l’économie était significative, et les comptes publics étaient le plus souvent excédentaires. Avec la fin du baby-boom, cette mécanique s’est enrayée, et les déficits sont devenus systématiques.
La crainte du législateur de 1945, qui redoutait que l’insuffisance de la natalité n’entraîne un vieillissement de la population, et fasse peser sur la population active une charge insupportable, s’est réalisée. Les dépenses de retraite par répartition ont explosé, de 7 à 14 % du PIB.
Elles expliquent 40 % de la hausse des dépenses publiques sur un demi-siècle.
Faute d’avoir fait appel aux marchés financiers pour financer une partie des retraites, il a fallu augmenter significativement les prélèvements obligatoires, ce qui a nui à la compétitivité, l’emploi et au pouvoir d’achat, renchérissant la facture associée au vieillissement.
L’État – qui est de loin le premier employeur avec 2,5 millions d’agents – a été l’opérateur le plus imprévoyant en France. Il a promis des retraites attrayantes, financées par le budget. Il n’a pas de caisse de retraite permettant de limiter ses engagements avec des points ou un provisionnement permettant d’autofinancer une partie des prestations sans faire appel au contribuable. Cette erreur historique, qui remonte à 1853 et Napoléon, n’a pas été corrigée en 1945, les fonctionnaires d’État n’ayant pas souhaité rejoindre la répartition, et encore moins en 2020, le régime universel ayant été rejeté.
En proie à une dégradation accélérée du ratio cotisant/retraité (à 0,9 contre 1,3 dans le privé suite à la réduction des embauches consécutive à la décentralisation), l’État a besoin chaque année de 60 milliards d’euros pour financer les pensions promises à ses personnels, qui représentent un engagement de 1600 milliards d’euros. Une partie de ces pensions est financée par de la dette, le reste étant financé par une dégradation du rapport qualité prix des services publics.
À titre d’illustration, 28 % des dépenses d’Éducation nationale sont absorbés par le paiement des pensions de retraite dont bénéficient les anciens personnels. C’est autant d’argent qui manque pour mieux rémunérer les personnels, et réduire le nombre de postes vacants.
Dans le secteur privé, l’équation du vieillissement est tout aussi insidieuse.
L’augmentation des cotisations retraite des salariés – actuellement à 28 % des salaires bruts contre 21% en 1980 –nuit à la compétitivité et au pouvoir d’achat. Si les régimes complémentaires de retraite sont parfois bien gérés – à l’image de l’Agirc-Arrco qui dispose de points et de réserves – le refus de généraliser la capitalisation se traduira par une paupérisation des retraités. Leur niveau de vie relatif équivaudra dans cinquante ans à celui des retraités des années 1980. Un sacré retour en arrière ! En 2070, le niveau de vie moyen des retraités pourrait représenter 80 % de celui de l’ensemble de la population, alors qu’il dépasse légèrement les 100 % aujourd’hui.
Il faudrait donc épauler la répartition d’une dose de capitalisation collective, comme nous avons eu l’occasion de le défendre dans une étude publiée en 2019 en partenariat avec Contrepoints.
Pour ce faire deux démarches sont indispensables.
La première consiste à provisionner progressivement les retraites des personnels publics au sein du Fonds de réserve des retraites (FRR).
Cette méthode est employée depuis plus d’un siècle par la Banque de France ou le Sénat. Elle permet de créer de la valeur sur les marchés et de limiter le recours aux prélèvements obligatoires pour financer les retraites. À titre d’illustration, si l’État avait provisionné ses retraites comme le Sénat, il aurait placé 920 milliards pour financer les retraites de ses personnels. Il aurait économisé en moyenne 29 milliards d’euros par an sur les 15 dernières années. Son déficit aurait été 30 % moins élevé, à 66 milliards d’euros par an au lieu de 95 milliards. Cette démarche – qui s’apparente à l’investissement le plus rentable que l’État puisse faire – est une priorité si l’on veut redresser les finances publiques.
La deuxième priorité est d’inciter les régimes de retraite du secteur privé à généraliser la capitalisation collective, sur le modèle de la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens (CAVP).
Dès les années 1960, les pharmaciens ont intégré que le tout répartition ne permettrait pas de distribuer des retraites généreuses. Ils ont choisi de financer leurs retraites complémentaires de façon hybride, en s’appuyant à la fois sur la répartition et sur la capitalisation, conformément à la recommandation standard des économistes. Une partie des cotisations est placée pour bénéficier du rendement des marchés financiers (40 % des cotisations qui, grâce aux intérêts, financent 50 % des prestations) avec à la clef un milliard d’euros de gains générés par la capitalisation sur les 4,7 milliards de prestations distribuées par leur régime complémentaire durant les 30 dernières années.
On le voit, les solutions existent.
Concluons avec Sauvy :
« Tant que le diagnostic sera refusé, il ne sera pas question de trouver le remède spécifique. Mais le jour où il sera clairement exprimé, combien de reproches pleuvront sur les dirigeants, sur les informateurs, sur toutes les têtes du pays, politiques, économiques, universitaires, syndicales, qui auront tout fait pour cacher ce mal éminemment guérissable. Ne ménageons pas les efforts pour que s’ouvrent enfin les yeux ».
Le poids des retraites risque d’aller croissant du fait du vieillissement de la population.
Les rapports du Conseil d’orientation des retraites ne sont pas alarmistes, mais leur objectivité est contestée par de nombreux spécialistes.
Pour l’avenir, le choix du système reste le plus fondamental : répartition ou capitalisation. Rappelons que dans un système par répartition, les cotisations des actifs payent les retraites actuelles. Le système est fondé sur une solidarité gérée politiquement par ajustement des deux flux financiers. Un système par capitalisation résulte de l’épargne des actifs. L’épargne accumulée par chaque actif lui assure une rente au moment de sa retraite. Le droit de propriété sur un capital est à la base du système. Le risque de dépréciation du capital est supporté par les épargnants.
Un examen historique fait apparaître une réalité : la France a parfois tenté la capitalisation, mais est toujours revenue à la répartition. La capitalisation est cependant présente aujourd’hui, mais discrètement.
Lorsque l’espérance de vie était très faible, le problème des retraites ne se posait pas vraiment.
Selon l’INED, l’espérance de vie en France à la naissance ne dépassait pas 25 ans au milieu du XVIIe siècle. Elle n’était encore que de 45 ans en 1900. La mortalité infantile, très élevée jusqu’au XVIIIe siècle, a commencé à diminuer au XIXe siècle, ce qui explique cette évolution. Mais les chances de vivre au-delà de 60 ans restaient faibles.
Durant les siècles passés, les plus de 60 ans ne représentaient même pas 10 % de la population française. Selon l’INSEE, ils n’étaient encore que 12,7 % en 1901. Les chances d’atteindre cet âge étaient beaucoup plus élevées dans les couches sociales les plus favorisées, et très faibles chez les pauvres, qui ne disposaient pas d’une alimentation suffisante. La question des retraites ne se posait pas, car il était inenvisageable de prévoir des ressources pour sa vieillesse lorsque les chances de l’atteindre étaient dérisoires. La famille avait la charge des rares personnes survivant un peu trop longtemps…
Au XXe siècle, tout change avec l’élévation du niveau de vie et les gigantesques progrès de la médecine. En 2016, les plus de 60 ans représentaient 25 % de la population française. Les projections de l’INSEE conduisent à un chiffre de 32 % en 2050.
La question des retraites se pose alors pour deux raisons principales.
Les premiers systèmes de retraite concernent les salariés de l’État. On cite toujours La Caisse des Invalides de la Marine Royale créée par Colbert en 1673, mais il s’agissait en réalité d’un système d’assistance réservé aux marins du roi.
Selon Pierre-Cyrille Hautcoeur et Françoise Le Quéré, c’est en 1790 qu’une loi institue un droit à pension pour les fonctionnaires de l’État. Elle ne sera pas appliquée, mais débouchera sur une retenue sur les traitements, alimentant un fonds de réserve destiné à payer les pensions. Le principe est donc la capitalisation. La cotisation de 1 % se révélant insuffisante, elle augmente progressivement jusqu’à 5 %. Mais cela ne suffit toujours pas, et une subvention de l’État devient nécessaire pour équilibrer le système. À partir de 1853, le système fonctionne par répartition.
Pourtant, dès 1850, l’État avait créé un système facultatif par capitalisation. La Caisse des retraites pour la vieillesse (CRV) était alimentée par des cotisations volontaires des salariés de l’administration et des grandes entreprises. Les fonds étaient gérés par la Caisse des dépôts et consignations qui les plaçait en rentes de l’État (les États ont toujours été des emprunteurs). En 1914, la CRV verse 350 000 pensions, mais les montants sont faibles : 200 francs par an, alors qu’on estime qu’il fallait 300 à 400 francs pour vivre. Par ailleurs, la CRV attire plutôt la petite bourgeoisie (commerçants, artisans, cadres, fonctionnaires), mais ne touche pas les milieux populaires.
Des initiatives apparaissent aussi dans le secteur privé. Au XIXe siècle, des caisses de retraite sont créées dans les compagnies de chemin de fer. Le fonctionnement, spécifique à chaque compagnie, comporte à la fois de la capitalisation et de la répartition. De même les banques, les compagnies d’assurance et certaines grandes entreprises versent une retraite à leurs salariés, mais sans constitution d’un fonds spécifique. Les versements dépendent de la situation financière de l’entreprise.
Au XXe siècle, la préoccupation générale de subvenir aux besoins des personnes âgées se développe progressivement.
Une loi du 5 avril 1910 crée un système de retraites ouvrières et paysannes par capitalisation. Des cotisations patronales et ouvrières abondées par un versement de l’État sont prévues. Mais un arrêt de la Cour de cassation supprime l’obligation de cotiser. Dès lors, seule une minorité de la population visée continuera à cotiser : 2,7 millions de cotisants en 1912 sur 10 millions de personnes concernées. Le résultat ne se fait pas attendre : le système évolue vers la répartition. Le faible nombre de cotisants ne permettait plus d’assurer le versement des retraites, d’autant que la dépréciation des capitaux due à l’inflation pendant la guerre de 1914-1918 avait été considérable.
Une loi du 5 avril 1928 crée un régime obligatoire de retraite pour les salariés de l’agriculture, de l’industrie et du commerce, soit environ 10 millions de personnes en 1930. Le financement relève principalement de la capitalisation. Les cotisations (5 % du salaire à la charge du salarié, et 5 % à la charge de l’employeur) ne permettront pas de verser des retraites assurant un niveau de vie correct. Par ailleurs, les très nombreux indépendants de l’artisanat et du commerce n’étaient pas concernés et tombaient dans la pauvreté s’ils avaient été imprévoyants pendant leur vie active.
L’ordonnance du 19 octobre 1945 instaurant la Sécurité sociale crée un régime général de retraites par répartition pour les salariés du secteur privé.
Le régime est géré paritairement par les organisations d’employeurs et les syndicats de salariés, sous la tutelle de l’État. Ce système général par répartition est un choix atypique dans les pays occidentaux où répartition et capitalisation coexistent presque toujours. L’approche socio-économique sous-jacente a une coloration à la fois keynésienne (maintenir le niveau de vie des retraités pour soutenir la demande) et marxisante (le salariat devait à terme supplanter le travail indépendant). Ce régime est encore en vigueur mais a fait l’objet d’une quantité phénoménale de réformes afin de tenter d’assurer son équilibre financier, précarisé par le vieillissement de la population, et l’abaissement de l’âge de la retraite de 65 à 60 ans en 1982.
Les travailleurs salariés ou indépendants non soumis au régime général relèvent d’une multitude d’autres régimes. On en dénombre 42 qui fonctionnent en général par répartition, exceptionnellement par capitalisation : fonctionnaires, travailleurs indépendants, travailleurs agricoles, SNCF, RATP, Banque de France, avocats, médecins, etc.
La France a donc choisi la retraite par répartition, laissant une place marginale à la capitalisation à titre de complément.
Citons un exemple très paradoxal de capitalisation : la Retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP). Il s’agit d’un régime obligatoire par capitalisation assurant aux fonctionnaires (État et autres employeurs publics) le versement d’une rente ou d’un capital au moment de la retraite. Les cotisations sont de 10 % du salaire : 5 % à la charge du fonctionnaire, 5 % à la charge de l’employeur. Le régime comporte 4,5 millions de cotisants pour un actif net de 38,2 milliards d’euros en 2022, placé essentiellement en obligations françaises et étrangères.
Le conseil d’administration du régime comporte huit représentants syndicaux, huit représentants des employeurs, et trois personnalités qualifiées. Les syndicats les plus anticapitalistes, par exemple la CGT, siègent au conseil d’administration !
La capitalisation est donc présente au cœur même de l’État, mais à bas bruit. Plus généralement, il n’est pas absurde de considérer le régime juridique de l’assurance vie comme un substitut accessible à la classe moyenne de la retraite par capitalisation. Le montant des placements en assurance vie s’élevait à 1885 milliards d’euros en 2022 selon la Banque de France.
La conclusion paraît assez évidente.
Les Français rejettent politiquement la capitalisation, mais l’utilisent en pratique aussi discrètement que possible.
Pourquoi ? Très sommairement, deux points peuvent être signalés.
Premièrement, les Français adorent les polémiques politiques. L’opposition entre répartition et capitalisation rejoint si parfaitement l’opposition gauche-droite qu’il n’était pas possible pour les politiciens de se priver d’un tel joyau. Dans le récit politicien dominant, la gauche généreuse défend la solidarité par la redistribution, et la droite égoïste l’individualisme par la capitalisation. Ce manichéisme puéril est utilisé par la gauche depuis plus d’un siècle.
Le second élément, plus profond, résulte de la construction de la nation française. En France, c’est l’État qui a bâti la nation, et non la société qui a pris acte de la nécessité de l’État comme en Angleterre. Les Français considèrent que l’État tutélaire doit leur fournir un cadre de vie de la naissance au tombeau. Santé, retraite, éducation, chômage, niveau de vie sont dans l’esprit français des domaines d’intervention nécessaire de l’État. Il ne faudrait pas qu’un politicien vienne suggérer à ses électeurs que leur retraite, c’est d’abord leur problème, et qu’ils peuvent s’organiser librement par capitalisation ou répartition. Il commettrait un péché mortel et ne s’en remettrait pas.
La nounou État a donc encore de beaux jours devant elle au pays de Molière, génie de la comédie que Louis XIV, un pilier de l’édification de l’État, avait adoubé pour le distraire.
Un article de l’Iref
La page des retraites paraît tournée. En réalité ce fut un coup d’épée dans l’eau, inutile, peu glorieux, démobilisateur. Non seulement cette réforme a coûté trop de grèves, de violences, de cris et d’aigreurs inutiles, mais elle a attenté à l’économie de tout le pays et elle empêche désormais pour des années de réformer notre système de retraite qui, à défaut d’introduire de la capitalisation, continue de courir à sa perte eu égard à la chute démographique et à la baisse du temps de travail.
Bien plus, pour amadouer des syndicats colériques, Mme Borne promet de repenser encore le système en faveur de diverses catégories de population, si bien que le peu de gain susceptible d’être obtenu par cette réformette risque d’être bientôt anéanti.
Personne, ou presque, n’en a cure. Et pourtant ce risque est systémique. La charge des retraites est considérable et ceux qui le savent le cachent. Le gouvernement n’a pas eu le courage d’en parler et continue de dissimuler le vrai déficit des retraites françaises qui représente un montant équivalent au produit de la CSG sur les produits de l’activité et du patrimoine.
En effet, comme l’IREF l’a déjà indiqué à plusieurs reprises, alors que le Conseil d’orientation des retraites (COR) a annoncé un excédent de un milliard d’euros du système en 2021, le vrai déficit des retraites publiques cette même année a été de 117 milliards d’euros.
Les pensions de retraite versées et charges annexes ont représenté en 2021 un montant de 345 milliards d’euros. Cette même année, les cotisations « normales » ont totalisé 228 milliards d’euros, soit un manque de 117 milliards.
Mais les documents officiels sont trompeurs, ils disent autre chose.
Ainsi l’État annonce 273 milliards de cotisations. En réalité, il verse des surcotisations qui sont une vraie subvention au régime de retraite des fonctionnaires pour un montant de 45 milliards en 2021. Sur la base d’un taux de cotisations employeurs de 16,5 %, comme dans le secteur privé, l’État aurait dû verser 19M de cotisations. En 2021, il a versé 64 milliards en gonflant artificiellement ses cotisations aux taux de 74,3 % sur les rémunérations des fonctionnaires civils, 126,1 % sur celles des militaires, et 30,6 % sur celles des fonctionnaires locaux et hospitaliers.
Par ailleurs, des subventions d’État et des transferts d’impôts contribuent pour respectivement 27 et 46 milliards à un semblant d’équilibre des comptes. Ils compensent les déficits de la CNAV (12 milliards d’euros), d’AGIRC-ARRCO (2 milliards), de la mutualité sociale agricole (5 milliards) ou des régimes spéciaux (8 milliards). Ils financent encore des régimes dits de solidarité pour les carrières longues, les avantages familiaux, les départs en retraite anticipés, notamment dans la fonction publique, les périodes de chômage non cotisées…
En cachant cet état de fait, le gouvernement a évidemment empêché une prise de conscience des difficultés et des risques de la situation.
Le projet de Loi de finances pour 2023 prévoit un déficit public de 158,5 milliards d’euros. Un retour à l’équilibre des systèmes de retraite permettrait de réduire ce déficit à 31,5 milliards, soit à peine plus de 1 % du PIB. Il apparaît donc bien que nous sommes malades de nos retraites, ou plus exactement du régime de répartition des retraites qui s’est substitué aux systèmes de capitalisation existants pendant la guerre de 1940/45 et qui perdure depuis, les gouvernements de la Libération ayant repris sans vergogne les mesures pétainistes à leur profit.
Il en est d’ailleurs de même de l’ensemble des régimes de base de la Sécurité sociale et du Fonds de solidarité vieillesse dont le budget de 601,9 milliards pour 2023 n’est financé par les cotisations des assurés qu’à hauteur de 57 % (342,6 milliards), le solde correspondant à des impôts, taxes et autres contributions sociales (111,1 milliards), la CSG (119 milliards), des transferts (11,2 milliards) et d’autres produits (11 milliards).
Nos assurances sociales n’ont plus guère d’assurance que le nom puisqu’elles sont financées en grande partie par l’argent public, c’est-à-dire par les contribuables, dans un brouillard de transferts de comptes dans lequel personne ne parvient à savoir qui paye quoi, et pour qui. Plus personne n’est responsable. Une sorte d’équilibre financier des systèmes, ou de déficit maîtrisé, est présenté chaque année de manière totalement artificielle, seuls quelques initiés partageant dans leurs alcôves le secret des vrais chiffres.
Il est urgent de clarifier la situation, de dire la vérité aux Français et de repenser nos assurances sociales en rendant à chacun le droit de choisir ses contrats d’assurance et ses assureurs.
Ce n’est qu’en rendant chacun responsable du prix réel de ses assurances sociales et en instaurant la concurrence dans l’offre d’assurances qu’on pourra retrouver d’abord la connaissance des coûts, puis la maîtrise des dépenses. À n’en pas douter, le marché offrira alors des assurances meilleures et moins chères, contribuant ainsi à l’amélioration du pouvoir d’achat et à la responsabilisation des Français.
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Il est intéressant qu’au même moment où le gouvernement cherche désespérément des milliards à économiser, le Conseil d’orientation des retraites (COR) annonce un excédent de 4,4 milliards pour 2022 en matière de retraites.
Pourquoi faire le rapprochement entre la dépense publique et l’équilibre des retraites ? Parce que les deux sont liés.
Comme le COR a omis 884 milliards de déficits des retraites depuis 20 ans, peu de monde réalise que les retraites expliquent la moitié des déficits publics. Aussi, certains continuent à penser que l’on peut résorber durablement les déficits publics en cherchant des économies dans la santé, le logement, l’aide à l’emploi, etc.
En ouverture des Assises des finances publiques le 19 juin, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie et des Finances, annonçait avoir trouvé, après première revue des dépenses publiques, 10 milliards d’économies. Le chiffre peut faire sourire tant il est dérisoire eu égard à l’ampleur des déficits publics évalués à 4,7 % du PIB ou 124,5 milliards d’euros en 2022.
Il ne l’est pourtant pas, car trouver des économies en omettant la question du paiement des retraites est une gageure. En France, on n’a toujours pas pris la mesure de l’impact des retraites qui, depuis 1959, représentent 55 % de la progression des dépenses publiques et des déficits.
Si cet impact reste peu connu du public comme de nos autorités, c’est sans doute parce que ces dernières ne disposent pas des mesures adéquates. En dépit de la création en 2000 du COR, pour étudier la question des retraites et documenter les choix publics, force est de constater que nos dirigeants sont mal informés par une institution qui occulte 94 % des déficits.
En effet, depuis sa création, le COR a choisi par convention de ne calculer que les déficits des retraites du privé et des collectivités locales, en omettant les déséquilibres des retraites de l’État sous prétexte qu’ils sont financés par le budget. Il ne viendrait pourtant à l’idée de personne de prétendre qu’EDF était à l’équilibre l’an passé, sous prétexte qu’elle a été étatisée.
Pour tenir compte des déficits des retraites de l’État l’an passé, il faut ajouter 54,8 milliards d’euros (ou 2,1 % du PIB) aux chiffres du COR. Les retraites étaient donc déficitaires de 50,4 milliards d’euros, et non en excédent de 4,4 milliards tel que calculé par le COR.
De 2002 à 2022, le COR a occulté des déficits des retraites qui représentent ou 884 milliards d’euros courants ou 2 % du PIB par an. Le déficit des retraites a été 16 fois plus élevé que ce qu’a calculé le COR.
En faisant la lumière sur ces chiffres, il devient possible de mieux comprendre pourquoi il est si difficile depuis des décennies de remettre en ordre les finances publiques.
Dans le privé, les cotisations sociales se sont alourdies au point de nuire à la compétitivité, obligeant l’État à multiplier les allègements de charges depuis 20 ans.
Dans le public, les retraites non provisionnées des fonctionnaires coûtent de plus en plus cher.
Conséquence : le point d’indice, permettant de réévaluer les traitements des fonctionnaires, a stagné pendant des années. Il est impossible de réduire les dépenses et améliorer significativement l’attractivité des emplois publics quand près du tiers du budget de ministères majeurs sert à payer les retraites (Éducation nationale, intérieur, justice…).
Nombre de défis français se mesurent à l’aune de la question des retraites et de leur financement. C’est pourquoi c’est aussi de ce côté-là qu’il faut rechercher des solutions qui puissent réaliser des économies durables, sans pour autant renier les promesses faites.
Or, contrairement aux idées reçues, des marges de manœuvre existent.
Un travail récent de l’Institut économique Molinari montre que l’État devrait imiter le Sénat, qui économise 13 % de ses dépenses grâce à la capitalisation retraite. Si les retraites de l’État étaient gérées comme au Sénat, l’État aurait économisé 433 milliards d’euros sur 15 ans et réduit son déficit de 30 %.
Le provisionnement des retraites des personnels publics est une source d’économies structurelles qui n’a pas été exploitée en France, sauf rares exceptions (Sénat, Banque de France…). Pour des raisons historiques, cette méthode a été écartée dès 1853 par l’État, Napoléon III ayant pris l’habitude de financer les retraites des fonctionnaires au jour le jour, par l’intermédiaire du budget. Il est temps de remettre au goût du jour le provisionnement. C’est la seule façon d’honorer les promesses faites aux fonctionnaires, sans que cela soit un fardeau pour les comptes publics et les contribuables.
Le Coup de Gueule de Nicolas Bonnal, la rubrique de Café Noir du mardi 25 avril 2023.
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La deuxième émission co-réalisée par Le Média pour Tous et Ruptures est désormais en ligne. Ce débat accueille David Cayla (à gauche), économiste hétérodoxe, auteur, et maître de conférence à l’université d’Angers
Dans une première partie, l’invité débat avec Pierre Lévy du rôle de l’Union européenne dans la volonté des gouvernements nationaux – en France en particulier – d’imposer des réformes des retraites. Dans la seconde partie (accessible seulement aux abonnés), l’échange porte sur la fin possible du néolibéralisme – sujet du dernier ouvrage de David Cayla – et des rapports entre les marchés financiers et Bruxelles.
Visionner la première partie en accès libre
NB : Fin avril, le prochain invité sera le journaliste François Poulet-Mathis. Il s’agira cette fois d’un débat contradictoire avec Pierre Lévy, portant en particulier sur les livraisons d’armes à l’Ukraine, et plus généralement sur la place et les contradictions de l’UE dans ce conflit.
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Le Conseil constitutionnel va-t-il valider, totalement ou partiellement, la réforme des retraites ? Va-t-il donner son feu vert à une « référendum d’initiative partagée » portant sur ce thème ? On connaîtra ses décisions vendredi 14 avril, le lendemain d’une nouvelle journée d’action qui pourrait rassembler encore beaucoup de monde, même si la tendance récente était plutôt à la décrue du nombre de manifestants…
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Le Conseil constitutionnel va-t-il valider, totalement ou partiellement, la réforme des retraites ? Va-t-il donner son feu vert à une « référendum d’initiative partagée » portant sur ce thème ? On connaîtra ses décisions vendredi 14 avril, le lendemain d’une nouvelle journée d’action qui pourrait rassembler encore beaucoup de monde, même si la tendance récente était plutôt à la décrue du nombre de manifestants.
En outre, les dirigeants syndicaux ne manquent pas de le souligner : les sondages affirment que le texte gouvernemental se heurte à l’hostilité d’une partie considérable de la population, évaluée à plus de 70%. Et ce, alors que la loi reculant de deux ans l’âge de la retraite a été formellement adoptée le 16 mars grâce à l’utilisation de l’article 49-3 de la constitution qui permet à l’exécutif d’imposer son projet sans vote de l’Assemblée nationale, pour peu que celle-ci n’adopte pas une motion de censure dans la foulée.
Ce passage en force a renforcé la colère populaire et la participation aux manifestations. De nombreux commentateurs – y compris ceux proches du pouvoir – s’interrogent sur la durée de la crise politique qui se profile : le premier ministre, Elisabeth Borne, dépourvue d’une majorité absolue à l’Assemblée, va-t-elle pouvoir rester en place ? Et comment peut se poursuivre le second mandat du président de la République lui-même, qui ne s’achève que dans quatre ans ?
Il est toujours hasardeux de prédire avec certitude l’avenir d’un mouvement social, et sa capacité à obtenir gain de cause. Il faut donc rester prudent. Mais deux facteurs de fond laissent à penser que le chef de l’Etat pourrait bien réussir à imposer sa réforme.
Le premier tient à la nature de la mobilisation. Bien sûr, les manifestations sont massives ; bien sûr, l’« opinion publique » reste très largement opposée au recul social majeur qui consiste à imposer de travailler deux années de plus ; bien sûr, certains secteurs sont particulièrement mobilisés – c’est le cas pour les transports, les raffineries ou bien le ramassage des ordures. Cela a provoqué des conséquences spectaculaires.
Mais tous ces éléments ne sont pas forcément déterminants dans le rapport de forces, comparés à ce qui serait décisif pour faire échec au projet contesté : une grève massive qui s’étendrait à des milliers d’entreprises, d’usines, de bureaux – ce qui est très loin d’être le cas. Les références en la matière restent 1936 (le Front populaire) ou mai-juin 1968.
Même en 1995, mouvement souvent cité en exemple, la grève longue et massive des cheminots et d’autres services publics avait certes suspendu la suppression de régimes spéciaux des retraites, mais n’avait nullement empêché une réforme radicale de la Sécurité sociale. C’est aussi de cette année là que date l’expression « grève par procuration ».
Applaudir, répondre à un sondeur, même manifester, cela n’a jamais pu remplacer une mobilisation de masse dans les entreprises.
Le même phénomène renaît aujourd’hui : des millions de citoyens sympathisent avec les grévistes de quelques secteurs particuliers, mais leur disent en substance : continuez, votre combat est le nôtre, on vous soutient. Ce n’est probablement pas ainsi que le rapport de force pourra basculer. Applaudir, répondre à un sondeur, même manifester, cela n’a jamais pu remplacer une mobilisation de masse dans les entreprises.
Le second facteur est l’aveuglement quant aux responsabilités réelles de la réforme, qui est à chercher du côté de Bruxelles – ce qui ne disculpe en rien le président français, co-auteur des orientations décidées au niveau européen. L’aveuglement ? Ou, pire, la cécité volontaire de ceux qui cherchent à tout prix à épargner l’Union européenne dans l’espoir (absurde) que celle-ci devienne « plus sociale ».
Certes, il n’y a pas de directive de l’UE qui impose un âge unifié de la retraite dans tous les pays membres. Mais il y a bien une pression multiforme pour tirer ce dernier, partout, vers le haut. L’Espagne en est un exemple, ou, malgré des « mesures de justice » compensatoires mises en avant par le gouvernement « de gauche » dans sa récente réforme, l’âge de départ s’établit à 66 ans, et passera à 67.
Le Conseil de l’UE avait recommandé à la France, le 12 juillet 2022, de réformer le système de pensions. Puis la Commission européenne avait laissé filtrer, avant la présentation de la réforme par Emmanuel Macron, une certaine impatience : « jusqu’à présent, aucune mesure concrète n’a encore été précisée ».
En outre, le président français ambitionne d’être un leader majeur de l’Union, mais a besoin pour ce faire d’être crédible vis-à-vis de ses homologues, notamment face à Berlin. Il veut donc apparaître comme un réformateur zélé.
Dans les conclusions du sommet européen de 2002, à Barcelone, figure la consigne de « chercher à augmenter d’environ cinq ans l’âge moyen effectif auquel cesse, dans l’Union européenne, l’activité professionnelle ».
Et pour qui aurait encore des doutes sur le lieu du crime et les auteurs de ce dernier, il faut rappeler le Conseil européen de Barcelone qui date de… mars 2002. Dans les conclusions de ce sommet figure en toutes lettres la consigne de « chercher d’ici à 2010 à augmenter progressivement d’environ cinq ans l’âge moyen effectif auquel cesse, dans l’Union européenne, l’activité professionnelle ».
A l’époque, le président Jacques Chirac (droite) et le premier ministre Lionel Jospin (socialiste) avaient avalisé cette rédaction. Au point que le pourtant très pro-UE François Bayrou (centriste aujourd’hui associé à la majorité d’Emmanuel Macron) avait vivement réagi : « Jacques Chirac et Lionel Jospin ont signé une décision capitale sur l’allongement de la durée de cotisation pour les retraites en Europe. Qui en a débattu ? Qui en a dit un mot ? Quel citoyen, quel député, quel parlementaire a été invité à la préparation de cette décision capitale ? Personne ».
Au Parlement français, aucune force politique n’évoque la perspective de se libérer du carcan de l’UE
Aujourd’hui, l’engagement de Barcelone continue d’orienter les politiques actuelles, au nom de la gestion « rigoureuse » des finances publiques… et à la plus grande satisfaction des « marchés » financiers.
Mais au Parlement français, aucune force politique n’évoque la perspective de se libérer du carcan de l’UE : ni les députés macronistes bien sûr, ni ceux de la droite classique, ni ceux de la gauche traditionnelle – mais pas plus ceux souvent étiquetés à l’extrême gauche ou à l’extrême droite.
Tant que ce déni perdurera, le mouvement social, aussi puissant soit-il, souffrira d’un handicap limitant fortement ses chances de succès.
Pierre Lévy
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Cette réforme des retraites à contretemps est guidée par un phénomène d'inertie, au nom d’une idéologie qui est en train de mourir. Le discours néolibéral est un discours de la rationalité économique, un discours de la rationalité des marchés qui va permettre de produire, en théorie, plus d'efficacité. Je vais vous dire l’état de mes recherches sur le nihilisme néolibéral : cette passion de détruire les cadres de sécurité établis au cours des siècles par les religions, les États et les partis de gauche. Le nihilisme néolibéral détruit la fécondité du monde avancé, la possibilité même d’un futur.
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