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À partir d’avant-hierContrepoints

La fin du miracle économique chinois

Depuis plusieurs dizaines d’années, les analyses convergent sur la continuité de la croissance chinoise et la projection d’un premier rang économique mondial. Mais les bambous ne montent pas jusqu’au ciel. Un certain nombre de signaux négatifs apparaissent dans l’économie chinoise. Sont-ils conjoncturels ou plutôt structurels ? Le ralentissement économique, la démographie, la dette des entreprises, ne seront pas passagers. Le retournement de l’économie chinoise commence sous nos yeux.

Quand on vit des dizaines d’années de forte croissance, on se laisse aller à imaginer que celle-ci sera éternelle. L’histoire nous enseigne que la vie économique relève de cycles.

 

La décélération de la croissance

En étudiant la courbe de la croissance économique chinoise depuis 60 ans, on s’aperçoit qu’elle se découpe en trois phases :

  1. Une croissance accélérée, pendant 30 ans, des années 1960 jusqu’au début des années 1990, avec une pointe proche de 20 %
  2. Une croissance stable, les 15 années suivantes, en moyenne autour des 10 %
  3. Une décélération de la croissance, amorcée en 2008, passant de 10 % à  « autour » de 5 % (vocabulaire officiel)

 

Des prévisions réalistes des prochaines années prolongent ce dernier chiffre vers 4 %, puis 3 %.

La décroissance est donc à l’œuvre depuis 15 ans… Elle s’explique par la hausse des coûts, la baisse des gains de productivité, et le manque de dépenses des ménages chinois, préférant l’épargne.

Cette décroissance sera alimentée par un paramètre additionnel, le repli démographique.

 

Une triple peine démographique

Le choix de l’enfant unique décidé en 1979 a atteint l’objectif de réduire la forte croissance de la population au moment où le pays devait relever le défi alimentaire. Cette politique maintenue jusqu’en 2016 a préparé un tsunami démographique.

Ce déficit de naissances sur une longue période, première peine, a mis en place la baisse décalée du vieillissement de la population, deuxième peine.

Début 2023, le pouvoir politique a eu la plus grande difficulté à admettre une baisse de population d’environ 200 000 personnes, en 2022. La baisse de 2023 se situe à deux millions.

Probablement en 2028, la Chine repassera sous la barre des 1,4 milliard d’habitants puis, dans une génération, en 2050, en dessous de 1,2 milliard.

Ce rétrécissement de population s’accompagne d’un vieillissement accéléré, déjà inscrit dans la structure de la pyramide des âges.

La population de plus de 60 ans atteignait 241 millions en 2017 ; elle est passée à 280 millions en 2020, et se dirige vers 420 millions en 2050. Cet accroissement spectaculaire aura deux impacts : l’un sur le marché intérieur, l’autre sur le marché du travail.

La disparition de 200 millions de personnes du marché du travail ne pourra conduire qu’à un renchérissement de la main-d’œuvre, même en intégrant l’impact de l’automatisation.

Un retraité dispose de moins de revenus qu’un actif. Des conséquences significatives sur la vitalité du marché intérieur sont donc à prévoir.

La troisième peine démographique concerne la jeunesse. Après un parcours dans un système éducatif très exigeant, elle se trouve face à un marché de l’emploi très compétitif, et des conditions de travail difficiles. Apparaît donc un phénomène de désenchantement, qui se traduit par deux phénomènes inattendus : l’exode intérieur et l’exil.

Le départ des grandes villes conduit à un exode vers des villes moyennes ou la campagne. Il s’explique par le cumul du coût de l’habitat urbain, le niveau de pollution, et les difficultés d’emploi.

L’autre dynamique de la jeunesse se traduit par un exil caché. Il est étonnant de découvrir que la quatrième nationalité des migrants à la frontière sud des États-Unis est la nationalité chinoise.

Ce retournement démographique global est porteur de conséquences économiques et financières très substantielles.

 

Le poids des dettes

Ces nouvelles tendances impactent la construction et le BTP, qui représentent presque 25 % du PIB.

Pendant plusieurs décennies, la hausse de la demande de logements neufs, urbains, a conduit les sociétés majeures du secteur à poursuivre leur endettement pour alimenter cette « croissance éternelle ». Le ralentissement économique, et le rétrécissement/vieillissement de la population ont provoqué une baisse de la demande, dans une situation où l’offre de logements continuait d’augmenter.

Le groupe Evergrande, un des plus grands groupes immobiliers chinois, à la tête de plus de 300 milliards de dollars de dettes s’est déclaré en faillite aux États-Unis pendant l’été 2023, et vient d’être mis en liquidation par une décision d’un tribunal de Hong Kong, le 4 février 2024.

À l’automne dernier, l’autre géant du secteur, Country Garden, n’a pas été en mesure d’honorer un paiement de 60 millions de dollars.

Le niveau des capitaux engagés provoque naturellement des effets sur le secteur financier. Le groupe Zhongzhi, géant de la finance parallèle, très exposé au marché immobilier, affiche une dette de 64 milliards de dollars. Il s’est déclaré en faillite au début du mois de janvier 2024.

Cette triple fissure, décroissance, démographie, dette, se traduit naturellement dans les indicateurs boursiers. Le repli de la bourse de Shanghai atteint 12 % depuis six mois. Depuis fin janvier 2024, la capitalisation boursière de Hong Kong, est dépassée par celle de Bombay…

Ces nouvelles tendances clés de la réalité chinoise ne sont pas conjoncturelles, mais structurelles.

 

Des conséquences globales

La rigueur idéologique du Parti communiste chinois est-elle adaptée à cette nouvelle phase de l’économie chinoise ? Face à cette situation nouvelle, il faut de la créativité, de l’ouverture, de l’innovation, de nouvelles politiques, et des décisions atypiques afin de faire face à des réalités totalement nouvelles.

Ceci constitue un autre défi, idéologique, et structurel lui aussi, porté directement au cœur du système du PCC.

L’objectif de rattraper et dépasser les États-Unis apparaît de moins en moins probable. Au 1er octobre 2029, 80e anniversaire de la République Populaire de Chine, cela pourrait même apparaître impossible.

Il nous faut absolument réfléchir aux conséquences intérieures et internationales de cette « nouvelle » Chine.

Quand la Chine s’éveillera…. Quand la Chine s’essoufflera…

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